Introduction à la sculpture de la première renaissance Rappelez-vous: le destin de la sculpture du Moyen âge en Occident Sculpture de la première renaissance: Donatello
Art hellénistique: Laocoon et ses fils, fin IIème siècle av. J.C. Art hellénistique: Laocoon et ses fils, fin IIème siècle av. J.C., Hagénesor, Athénodorus et Polydorus de Rhodes, Marbre, Musée du Vatican Art hellénistique: Laocoon et ses fils, fin IIème siècle av. J.C. Pièta de Bonn, bois, vers 1300
Zeus (Poséidon), Vème siècle av.J.C. Vénus de Milo, vers 100 av. J.C.
La sculpture antique, souvent liée à la mythologie gréco-romaine, est considérée païenne par les chrétiens. La tradition sculpturale antique est par ailleurs touchée par l’interdit biblique de tailler des images, qui mènent en idolâtrie. durant le Moyen Âg Statue colossale de Zeus, Phidias, Vème siècle av. J. C. Zeus ou Posséidon, Vème siècle avant JC
« Десет светијех заповести Tада рече Бог све ове ријечи говорећи: Ја сам Господ Бог твој, који сам те извео из земље Мисирске, из дома ропскога. Немој имати других богова уза ме. Не гради себи лика резана нити какве слике од онога што је горе на небу или доље на земљи, или у води испод земље. » Библија, Стари Завет, *3. Мој. 26.1.
Baptistère de la cathédrale de Cividale, Italie, VIIIème siècle Ainsi, à partir du Vème siècle, les statues en pied disparaissent complètement de l’art occidental, car elles rapellent les idoles du culte païen. À partir du Vème siècle subsistent seulement les reliefs peu taillés, comme décoration architecturale. art des Lombards, Cividale, Nord de l’Italie, Baptistère de la cathédrale de Cividale, VIIIème siècle Les figures des évangélistes sont représentés par leurs symboles, rejoignant ainsi la tradition du style animalier. Baptistère de la cathédrale de Cividale, Italie, VIIIème siècle
Baptistère de la cathédrale de Cividale, Italie, VIIIème siècle Dans cette sculpture est visible l’influence du style animalier des peuples nomades. La figure humaine leur est trop difficile à rendre: ici les quatre évangélistes sont représentés par leurs symboles. art des Lombards, Cividale, Nord de l’Italie, Baptistère de la cathédrale de Cividale, VIIIème siècle Les figures des évangélistes sont représentés par leurs symboles, rejoignant ainsi la tradition du style animalier. Baptistère de la cathédrale de Cividale, Italie, VIIIème siècle
À partir du XIème siècle la figure humaine réapparait dans les reliefs ornant les portails et les chapiteaux des colonnes des cathédrales romanes… Portail sud Saint Sernin de Toulouse, avant 1118. La sculpture monumentale est limité à la sculpture en bois comme ce Crucifix de Géréon (Xème, 185 cm) Portail sud Saint Sernin de Toulouse, avant 1118
À partir du XIIème siècle la figure humaine regagne de l’importance À partir du XIIème siècle la figure humaine regagne de l’importance. Mais même si de grande taille, le corps du prophète Jérémie est décharné et désarticulé, et lié au trumeau du portail, nous ne pouvons pas l’imaginer sans son cadre. À partir du Xième siècle Mais même quand elle est de grande taille, comme celle du prophète Jérémie, du trumeau de la cathédrale de Saint Pierre de Moissac, début XIIème siècle
La sculpture romane est toujours liée au mur, elle orne la façade, le portail ou les colonnes, elle n’est jamais libre, « en pied ». À partir du Xième siècle
La sculpture médiévale évolue entre le XIIème et le XIIIème siècle: du relief lié au mur (roman, début XIIème), par la figure-colonne, puis à la figure en forme de colonne, mais détachée, occupant une niche à part, adossée à la colonne (l’art gothique, début XIIIème). Début XII, XIIème, début XIIème Saint Pierre de Moissac, début XIIème, Cathédrale de Chartres, 1) oko 1145-1170, Zapadna fasada, srednji portal, glavni Kraljevski portal, figura na dovratniku, 2)portail nord, vers 1210,
Durant le XIIIème siècle les corps prennent de l’espace: les têtes d’abord quittent la ligne du corps… Katedrala u Šartru (Chartres), Le portail nord, début XIIIème, Les figures du transept sud, du XIIIème siècle:
…puis les ailes se déploient, les bras se détachent, le corps n’a plus la forme de la colonne, gagne de l’espace, du poids, du volume, retrouve son anatomie sous le drapé (essai de contrapposto)… Katedrala u Remsu (Rheims), Zapadna fasada, Srednji portal, posle 1252, Figure na desnom dovratniku, Blagovesti i Susret Marije i Jelisavete Cathédrale de Rheims,façade ouest, après 1252: L’Annonciation et la Visitation
Cathédrale de Reims, après 1251 Cette sculpture, qui décolle du mur ou de la colonne (comme ici occupant des niches), et qui retrouve le poids, le volume et l’anatomie corporelle… Cathédrale de Reims, après 1251
…retrouve finalement, au XVème siècle, et à Florence, son autonomie: la sculpture redevient libre, « en pied » à l’antique. à Florence Nanni di Banco, Quattro Santi Coronati, 1410-13, Or san Michele, Florence
C’est là que nous parlons de première Renaissance. Nanni di Banco, Quattro Santi Coronati, 1410-13, Or san Michele, Florence C’est là que nous parlons de première Renaissance. Donatello, Saint Marc, 1411, Or San Michele, Florence
La première Renaissance en sculpture: le regain d’autonomie L’émancipation du cadre, le regain du corps Nanni di Banco, Donatello
Au XVème siècle, à Florence, nous retrouvons finalement la sculpture « en pied » à l’antique: Nanni di Banco, Quattro Santi Coronati, 1410-13, Or san Michele, Florence
En comparant les sculptures de Nanni, Quattro Corronati, avec les statues des piédroits de la Cathédrale de Chartres, celles de Nanni semblent plus réelles, plus monumentales. Cathédrale de Chartres, portail nord, vers 1210 Nanni, Quattro Santi Coronati, 1410-13
Il s’agit bien de corps réels, bien observés avec leur volume et leur poids, les forces s’exerçant sur les plis du drapé (la masse et la forme du corps, le poids du drapé qui tombe en plis…). Les Quatre Saints Couronnés semblent plus grands que les statues des saints des piédroits, leur masse dépasse le domaine de la sculpture médiévale… Ils donnent une impression de monumentalité. Nanni, Quattro Santi Coronati, 1410-13, Or San Michele, Florence
En plus, le réalisme du portrait rappelle la sculpture romaine (notez la ressemblance avec le portrait du citoyen romain du IIIème siècle). Portrait d’un citoyen romain, IIIème siècle Nanni di Banco, Quattro Santi Coronati, 1410-13, détails des portraits
Nanni di Banco, Quattro Santi Coronati, 1410-13, Or san Michele, Florence Nanni di Banco est mort jeune, et c’est un autre sculpteur, Donatello, que nous associons tout particulièrement à la première renaissance en sculpture. Donatello, Saint Marc, 1411, Or San Michele, Florence
Donatello (1386-1466) C’est avec cette statue de Saint Marc, exécuté par Donatello pour la même église d’Or San Michele à Florence, que nous voyons la statue, pour la première fois depuis l’antiquité, s’émanciper complètement de son cadre, et reprendre la position de contrapposto classique. Donatello, Saint Marc, 1411, Or San Michele, Florence
Souvenez vous: Le Contrapposto Apparait dans l’art grec au Vème siècle avant J.C. Pour la première fois l’artiste grec a bien observé la dissymétrie équilibrée de la pose naturelle de l’homme au repos: la jambe avancée est au repos, le genou en est plus bas, le poids du corps est sur l’autre jambe, nous le percevons par le déhanchement du corps (la ligne des hanches, la ligne des épaules). Pour la décrire, nous utilisons le mot italien contrapposto, contrepoids. Contrapposto est cette position naturelle de l’homme au repos, dont le poids repose sur une jambe tandis que l’autre se repose, libre… Toute la symétrie du corps en est perturbée, l’axe du corps n’est pas une ligne droite mais une courbe, un S… Éphèbe (jeune homme), 480 av. J.C.
Nanni di Banco, Quattro Santi Coronati, 1410-13, Or san Michele, Florence Nous voyons donc le Saint Marc de Donatello prendre clairement cette pose de contrapposto, dont nous avons déjà vu des essais plus timides chez Nanni di Banco… , et plus maladroits dans la Visitation de la Cathédrale de Reims… Donatello, Saint Marc, 1411, Or San Michele, Florence
Avec une autre statue de Donatello, Saint Georges, nous retrouvons aussi la beauté physique d’un corps de jeune athlète, ici dans un chevalier chrétien. Donatello, Saint Georges, vers 1416, Or San Michele, Florence
Alors que dans le Prophète Habakkuk (Zuccone, « Tête de Citrouille »), nous retrouvons « la noble laideur », le réalisme des portraits de citoyens romains. Prophète Habakkuk (Zuccone, « Tête de Citrouille »), exécuté entre 1427-36 par Donatello, pour le Cathédrale de Florence
Le David en bronze, exécuté par Donatello vers 1430, représente le premier nu grandeur nature depuis l’antiquité. C’est aussi le premier nu au sens classique du terme. Dans l’art médiéval le corps nu a toujours eu une connotation morale, soit négative (avec Adam et Éve, les damnés), soit positive (avec la passion du Christ et des martyres). Ici David, avec sa nudité de jeune homme vainqueur, exprime, comme aux temps classiques, la dignité et la puissance de l’homme, malgré sa mortalité et sa vulnérabilité. David, 1430, bronze, h. 185cm Nous parlons du fond qui a retrouvé la forme… (un beau garçon est un beau garçon, et non pas un péché ou une vertu). Duc de Milan comme nouveau César, Florence comme nouvelle Athènes
Cette statue a été faite pour une cour privée et donc conçue sans rapport à un mur, vraiment libre, destinée à être vue de tous les côtés. David, 1430, bronze, h. 185cm Nous parlons du fond qui a retrouvé la forme… (un beau garçon est un beau garçon, et non pas un péché ou une vertu). Duc de Milan comme nouveau César, Florence comme nouvelle Athènes Le David en bronze, exécuté par Donatello vers 1430
Donatello réalise à Padoue la statue équestre de Guattamelata, chef d’armée vénitienne récemment décédé. Statue équestre (et détail du portrait) de Guatamelate devant la Basilica di Santo à Padou, 1445-1450, bronze
Il reprend là aussi un modèle antique (comparez avec la statue équestre de Marc Aurèle (IIème ap. J.C.)): Marc Aurèle (IIème ap. J.C.), Rome
Nous voyons ici repris la monumentalité de la statue équestre de l’empereur, mais à l’honneur d’un citoyen, dont la République de Venise honore le service. Le portrait de Guatamelatta est réaliste. Statue équestre de Marc Aurèle, Rome (IIème ap. J.C.) Marc Aurèle Rome c’est le monument à la gloire d’un grand soldat. Détail du portrait de la statue équestre de Guatamelate à Padou, Donatello, 1445-1450, bronze
La sculpture de la première Renaissance Avec les exemples des œuvres de Donatello (1386-1466) nous retraçons les caractéristiques de la sculpture de la première Renaissance en Italie. Nous avons vu que: La sculpture s’émancipe de son cadre architectural, redevient libre, « en pied », « en ronde bosse », destinée à être vue de tous les côtés (Saint Marc, Prophète Habakkouk, David); Le corps regagne l’anatomie réelle: le poids, le volume, la pose de contrapposto classique; Réapparait le nu classique (David), l’admiration de la beauté d’un corps (David, Saint Georges); Réapparait le portrait réaliste, rappelant les portraits romains (Le prophète Habakkouk, « Tête de citrouille »); D’autres modèles antiques sont aussi repris (statue équestre , non plus d’un empereur, mais de Guattamelata, citoyen de mérite).
Émancipation du cadre architectural, sculpture libre, en ronde bosse, volume, poids du corps, contrapposto, poids, réalisme du drapé, et portrait réaliste. Donatello, Saint Marc, 1411, Or San Michele, Florence Prophète Habakkuk (Zuccone, « Tête de Citrouille »), Donatello, entre 1427-36, pour le Cathédrale de Florence
Donatello, Saint Georges, vers 1416, Or San Michele, Florence Statues en pied, indépendantes, grandeur nature, destinées à être vues de tous les côtés. Corps d’athlète, la beauté du corps dans un contexte chrétien, nu « au sens classique » du terme, et non plus « au sens médiéval » (un vice ou une vertu). David, Donatello, 1430, bronze, h. 185cm
Reprise d’autres exemples antiques: statue équestre à la gloire de l’empereur, ici à la gloire d’un citoyen de mérite. Le portrait de Guatamelata est réaliste. Donatello, Statue équestre de Gattamelata, citoyen de mérite (Padoue, 1445-50)