Laltérité à travers la question du double dans
Au départ, le sujet est pris dans le morcellement. Il se perçoit à travers une image et cherche à sy coller. Il sagit du premier jeu de maîtrise du monde. Lenfant se colle à sa mère pour exister.
« Le stade du miroir est une identification au sens plein (…) : à savoir la transformation produite chez le sujet, quand il assume une image… » Jacques Lacan Dès lorigine, le sujet ne coïncide pas avec lui-même. Il doit se trouver un récit de limmédiateté, cest pourquoi il est aussi sujet de la fiction. La fiction est nécessaire dans le processus de saisissement du sujet.
« Le fantastique, cest lhésitation éprouvée par un être qui ne connaît que les lois naturelles, face à un événement en apparence surnaturel » Tzetvan Todorov, « Introduction à la littérature fantastique », Les lieux lugubres miment le sujet. Ce qui était ordre devient chaos. Le monde devient menaçant. Le fantastique surgit lorsquil y a conflit entre le réel et lirréel, la nature et le surnaturel, le possible et limpossible…
Lunivers connu est enveloppé par un autre univers: celui du rêve. Le texte dEdgar Allan Poe, La chute de la Maison Usher, est écrit tel un cauchemar. Cela se reflète dans le choix des images. Brume = imprécision du cadre Étang noir = sommeil profond et mort Tempête sans éclair = cauchemar
«Lorsquenfin une porte se fut fermée sur elle, mon regard chercha instinctivement et curieusement la physionomie de son frère; mais il avait plongé sa face dans ses mains, et je pus voir seulement quune pâleur plus quordinaire sétait répandue sur les doigts amaigris, à travers lesquels filtrait une pluie de larmes passionnées », Edgar Allan Poe, « La chute de la Maison Usher », p.111. « Létrange réalise (…) une seule des conditions du fantastique: la description de certaines réactions, en particulier de la peur… » Tzetvan Todorov, Létrange sexprime par lexpérience des limites dans la nouvelle dEdgar Allan Poe. En effet, Roderick aime sa sœur jumelle, Madeline:
Cependant, cet amour est destructeur, car… Roderick met Madeline en bière, alors quelle est toujours vivante. Pourquoi? Roderick se voit au travers de sa sœur jumelle. Madeline renvoie une image insupportable. En mettant fin aux souffrances de sa sœur, Roderick espère faire de même pour les siennes.
Limage que renvoie Madeline est celle dun être malade, mourant. Elle est la seule compagnie de Roderick depuis des années et constitue son seul et unique miroir. Roderick est dans le morcellement, mais ne peut se projeter dans une image… Madeline ne peut servir de miroir, car elle est floue, même fantomatique.
Pour calmer Roderick, le narrateur entreprend la lecture de Mad Trist de sir Launcelot Canning. La littérature mime laction du récit de Poe: « … car il ny a pas lieu à douter que je neusse réellement entendu (dans quelle direction, il métait impossible de le deviner) un son affaibli et comme lointain, mais âpre, prolongé, singulièrement perçant et grinçant, lexacte contrepartie du cri surnaturel du dragon décrit par le romancier, et tel que mon imagination se létait déjà figuré… » Edgar Allan Poe, « La chute de la Maison Usher », p Dans La chute de la Maison Usher, la fiction est liée à la résurrection de Madeline. Comme lexpliquait Lacan, la fiction joue un rôle prépondérant dans la formation du je.
Dans un texte des Nouvelles histoires extraordinaires, Edgar Allan Poe introduit le « démon de la perversité ». sans but intelligible « Sous son influence, nous agissons sans but intelligible; ou (…) nous pouvons (…) dire que, nous agissons par nous ne devrions pas la raison que nous ne devrions pas ».
Finalement, Roderick et Madeline meurent ensemble, dans la maison, liés par la même fatalité. La maison seffondre au même moment… Transmet un mal étrange Paraît vivante Connaît le même destin que les Usher Ressemble physiquement à Roderick Influence la santé psychologique de Roderick La maison
Que peut-on retenir de cette relation trouble quentretient Roderick avec l altérité ? Le sujet est divisé et se projette dans une image qui le définit. Ici, limage est fantomatique et renvoie une image malsaine. Il y a mimétisme entre les personnages eux-mêmes et avec la maison. La femme de la Maison Usher incarne le double et la mort. Le destin des jumeaux est donc lié à tout jamais…
Production UQÀM Réalisé par Mélanie Lajoie Dans le cadre du cours EDU 7492 Par Monique Dugal, Isabelle Roy et Suzanne Roy Le 14 octobre 2003