CONTROVERSE: OUI PRISE EN CHARGE PRECOCE DE L’INSUFFISANCE RENALE AIGUE? OUI A.REYNAUD DES cardiologie 1ère année DESC réanimation médicale SAINT ETIENNE
Définition Prise en charge thérapeutique précoce = par rapport au délais de recours à l’épuration extra-rénale(EER)
INDICATIONS D’EER EN REA (SFAR) CAUSES EXTRARENALES CAUSES RENALES Créatinine: > 265mmol/l Urée: > 28 mmol/l neuropathie, myopathie, encéphalopathie, péricardite Surcharge liquidienne: œdème pulmonaire réfractaire oligurie < 200ml/12h, anurie <50ml/6h Électrolytes: K+>6,5mmol/l, Na+, Acide-bas: acidose métabolique décompensée pH<7,0 intoxication avec toxines filtrables Nutrition Hyperthermie >40°C INDICATIONS SI ASSOCIATIONS D’AU MOINS 2 CRITERES
Problématique Difficile de définir un taux seuil de créatininémie pour débuter EER Le taux de créatinine dépend de 3 facteurs: la production, le volume de distribution et l’élimination rénale Les changement quotidien de la concentration plasmatique de créatinine reflète mal le taux de filtration glomérulaire actuel Moran M. Cause of acute renal failure studied by a model of creatinine kinetics. Kidney Int. 1985.
POUQUOI PENSER QU’UNE EER PRECOCE EST BENEFIQUE? Prise en charge optimale de l’EER dans l’IRA est mal définie et source de polémique. Depuis 50 ans, il est prouvé que l’EER fait partie du traitement de l’IRA. Mais les modalités de prise en charge reste controversés: mode, moment d’initiation, dose… Dans le passé, les patients présentant une IRA sévère décédaient « avec » leur IRA mais non « de »cette IRA, puisqu’on traitait ses complications: HK+, acidose.. Ou on les empêchaient: encéphalopathie, péricardite…
POUQUOI PENSER QU’UNE EER PRECOCE EST BENEFIQUE? IRA est une pathologie fréquente en réanimation, la 1ère cause étant le choc septique (dysfonction multiples d’organes) Objectif: traiter le plus tôt, permet un meilleur contrôle de l’urémie , pour éviter les désordres métaboliques et atténuer les effets néfastes de l’IRA
POUQUOI PENSER QU’UNE EER PRECOCE EST BENEFIQUE? Des études ont démontrées que l’IRA est un facteur de risque de mortalité indépendant Turney JH acute renal failure: a dangerous condition. JAMA 1996. Levy EM. The effect of acute renal failure on mortality: a cohorte analysis. JAMA 1996. Chertow GM. Independant association betwen acute renal failure and mortality following cardiac surgery. American journal of medicine 1998. Bates DW. Correlates of acute renal failue in patients receiving parenteral amphotericin B. Kidney international 2001. Metnitz PG. Effect of acute renal failue requiring renal remplacement therapy on outcome. Critical care medicine 2002. Chertow GM. Acute kidney injury, mortality, length of stay, and costs in hospitalized patients. Nephrology 2005.
POUQUOI PENSER QU’UNE EER PRECOCE EST BENEFIQUE? On se demande donc, si la gestion de l’EER pourrait avoir un impact sur le devenir de l’IRA et si l’optimisation de la prise en charge par EER pourrait réduire la mortalité. Liano F. The spectrum of acute renal failure in the intensive care unit compared with that seen in other settings. Kidney international 1998. Liano F. Epidemiology of acute renal failure: a prospective, multicenter, community-based study. Kidney international 1996. Uchino S. Acute renal failure in critically ill patients:a multinational, multicenter study. JAMA 2005.
° Indication EER Survie % Étude Année EER Design Nb Early Late Parsons et al 1961 IHD Retro. 33 BUN 120 à 150 mg/dl BUN > 200 mg/dl 75 12 Fischer et al 1966 162 BUN 150 mg/dl BUN < 200 mg/dl 43 26 Kleinknecht et al 1972 500 BUN < 93 mg/dl BUN > 163 mg/dl 73 58 Conger 1975* RCT 18 BUN < 70 mg/dl BUN > 150 mg/dl 64 20 Gillum et al 1986* 34 BUN < 50 mg/dl BUN > 100 mg/dl 41 53 Gettings et al 1999 CRRT 100 BUN < 60 mg/dl BUN > 60 mg/dl 39 Bouman et al 2002* 106 IRA < 12h BUN > 112mg/dl 69 Demirkilicet al 2004 61 ∆ < 100ml/8h Créat > 5 mg/dl 77 45 Elahi et al BUN > 4 mg/dl 78 57 Piccinni et al 2006 CCRT 80 IRA < 12 h Classic indication 55 28 Liu et al CCRT/IHD Observational 243 BUN < 76 mg/dl BUN > 76 mg/dl 65 59
Première étude ° Teschan P, Baxter C, O’Brian T, et al: Prophylactic hemodialysis in the treatment of acute renal failure. Ann Intern Med 1960. Pas de groupe contrôle Pas de statistique Registre de l’utilisation de l’hémodialyse « prophylactique » i.e. avant blood nonprotein nitrogen <200mg/dl ou symptômes uriques 15 patients IRA avec oligurie Résultats: les auteurs constatent que les résultats contrastent favorablement avec leur propres expériences passées chez qui l’indication de dialyse est “conventionelle”
Autres études rétrospectives observationelles: Parsons FM. Optimum time for dialysis in acute reversible renal failure. Description and value of an improved dialyser with large surface area. Lancet 1961 IHD 33 patients BUN (blood urea nitrogen) 120 à 150 mg/dl = early BUN > 200 mg/dl = late 75% de survie vs 12% en faveur du groupe où prise en charge précoce Fischer RP. Early dialysis in the treatment of acute renal failure. Surgery Gynecology and Obstetric 1966. 162 patients BUN 150 mg/dl = early BUN < 200 mg/dl = late 43 % de survie dans le groupe early vs 26% Kleinknecht D. Uremic and non-uremic complications in acute renal failure: Evaluation of early and frequent dialysis on prognosis. Kidney 1972. 500 patients BUN < 93 mg/dl BUN > 163 mg/dl 73 % de survie dans le groupe de prise en charge précoce vs 58%
Gettings LG. Outcome in post-traumatic acute renal failure when continuous renal replacement therapy is applied early vs late. Intensive care medecine 1999.*° Rétrospective 100 patients, inclus de 1989 à 1997 Prise en charge de l’IRA post-traumatique par EER continue 2 groupes: BUN < 60mg/dl <=> urée <22 mmol/l = early, moyenne 43+/-13mg/dl, débuté à 10-15 jours de l’hospitalisation BUN > 60mg/dl <=> urée > 22mmol/l = late, moyenne 94+/-28 mg/dl, débuté à 19-27 jours de l’hospitalisation Réduction significative de la mortalité de 39% , p=0,041 Augmentation de la récupération rénale
Analyse en sous groupes: Ronco C. Effects of differents doses in CVVH on outcomes of acute renal failure. Lancet 2000.* Etude prospective randomisée en intention de traiter 425 patients, ≈ 61 years IRA 20 ml/h/kg (group 1), 35 ml/h/ kg(group 2), 45 ml/h/kg(group 3) Survie: groupe 1 < groupe 2 (p=0.0007) et < groupe 3 (p=0.0013). groups 2 et 3 pas différence (p=0.87). Analyse en sous groupes: Dans le sous-groupe “survivant” de tous les groupes, le taux d’urée (BUN) avant la mise en place de CVVH est plus bas que dans le sous-groupe” non-survivant”
Demirkilic. Timing of replacement therapy for acute renal failure after cardiac surgery. J Card Surg 2004 ° Étude rétrospective 61 patients De mars 1992 à septembre 2001 Postopératoire de chirurgie cardiaque continuous venovenous hemodiafiltration (CVVHDF) Groupe 1:tardif 27 patients traités avant juin 1996, CVVHDF si créatininémie > 5 mg/dl ou K+> 5.5 molEq/l malgré traitement médical, indépendamment de la diurèse Initiation traitement 2.6+/- 1.7 jours après la chirurgie Groupe 2: précoce 34 patients traités après juin 1996 CVVHDF dès que diurèse <100 ml/8 h malgré l’administration de furosémide Initiation 0.9 +/-0.3 jour s après la chirurgie Résultats: Diminution de la mortalité en réanimation dans le groupe précoce 17.6% vs 48.1%, p =0.05 Diminution de la mortalité hospitalière 23.5% vs 55.5%,p =0.05 Diminution de la durée de la ventillation mécanique Diminution de la durée de séjour hospitalier
Elahi MM. Early hemofiltration improves survival in postcardiotomy patients with acute renal failure. European Journal of Cardiothorac Surgery 2004 ° Étude rétrospective 64 patients conscutifs de janvier 2002 à janvier 2003 Postopératoire d’une chirugie cardiaque EER par CVVHDF. Groupe 1: tardif 28 patients EER si BUN> 84 mg/dl ou créatininémie> 2,8 mg/dl (247, 52µmol/l) ou K+> 6molEq/l malgré traitemetn médical, indépendamment de la diurèse Delais 2,6 +/- 2,2 j Groupe 2: précoce 36 patients patients EER si diurèse < 100 ml/ 8 h malgré traitement par furosemide Delais 0,8 +/-0,2 j Survie 78% dans groupe 2 vs 57% dans groupe 1. Mortalité hospitalière 43% groupe 1 vs 22% dans le groupe 2,p<0,05.
Liu KD. Timing of initiation of dialysis in critically ill patients with acute kidney injury. Clinical Journal American Society of Nephrology 2006.° Etude observationnelle multicentrique 243 patients Groupe 1 BUN <76 mg/dl urée = 28µmol/l Groupe 2 BUN > 76mg/dl Résultats: Taux de survie à 28jours est de 65% groupe early vs 59% groupe late Utilisé le taux de BUN comme facteur prédicrif d’initiation à l’EER montre une augmentaion du risque relatif de décès dans le groupe “haut” taux . RR=2.07, intervalle de confiance à 95% . 1.30 –3.29.
Dans le choc septique Hypothèse sur l’indication de l’EER dans l’instabilité hémodynamique dans choc septique, la perfusion rénale est diminuée Utilisation de noradrénaline pour maintenir une PAM correcte majore l’hypoperfusion rénale, mais augmente la perfusion dans les états hyperdynamiques comme le choc septique Quand choc devient réfractaire, l’IRA peut se développer D’où la logique d’avoir recours à l’EER Dès que la diurèse s’interrompt i.e. dans les 6 à 12 h, avant que les chiffres soient modifiés Relation entre la correction rapide de l’acidose métabolique avec L’EER et la mortalité Hypothèse sur l’indication d’EER pour « épurer » les médiateurs de l’inflammation Médiateurs de l’inflammation sont des molécules de tailles moyennes est sont « filtrées » par la méthode de convection
Weksler N.Continuous venovenous hemofiltration hemofiltration improves intensive care unit. Journal of critical care 2001. Étude rétrospective 48 patients Sepsis sans oligurie Groupe 1: 26 CVVH Groupe 2: 22 Traitement conventionnel résultats: Sortie de réanimation pour 20 patients du groupe 1 vs 10 du groupe 2, p=0,03
Piccinni P. Early isovolaemic haemofiltration in oliguric patients with septic shock. Intensive care medecine 2006.* Étude rétrospective 80 patients inclus sur 8ans Étude de l’impact de l’hémofiltration isovolémique précoce (EIHF) (45 mL/kg/ hr) chez les patients anuriques en choc septique sur le seul critère d’IRA clinique = une oligurie pendant 12h, indépendamment du taux de créatininémie et de la clairance Groupe 1: 40 patients avec sepsis et oligurie, débuté dans les 12 h après l’admission Groupe 2: 40 patients contrôles dans un registre historique , EER débuté selon les indications conventionnelles. Augmentation significative de la survie à 28jours, 55% vs 27,5%, p<0,05 PAM , 95+/-10 vs 60+/-12 mmHg, p<0.05 besoin NA , 0.20+/-2 vs 0.02+/-0.2 microg/kg/min, p<0.05 sevrage ventillatoire, 70% vs 37%, p<0,01 durée de séjour, 9+/-5 jours vs 16+/-4 jours, p<0.002
Page B. Early veno-venous haemodiafiltration for sepsis-related multiple organ failure. Critical care 2005. Étude prospective observationnelle 60 patients:38 H, 22F Janvier 1995 à décembre 2004 Étude de l’impact de CVVHDF chez les patients en choc septique réfractaire (acidose métabolique (BE -5) malgré remplissage et amines vasoactives durant 6 à 12 h) EER après 6 à 12 h de traitement hémodynamique maximal Après 12 h de CCVHD, réalisation 2 groupes: Groupe 1= 40=répondeur=diminution acidose métabolique après 12 d’EER Groupe 2= 20=non-répondeur= acidose métabolique inchangée défaillance circulatoire Mortalité 30% groupe 1 vs 100% groupe 2, p<0,00001 Amélioration statut hémodynamique dans groupe 1 avec doses catécholamines nécessaires moins importante dans groupe 1 , p<0,001 Taux de lactates plus haut dans le groupe 2 IRA diurèse < 30ml/h , malgré traitement par diurétiques Taux créatinine et urée similaires, créatinine 248+/-141mmol/l, urée 16+/-11mmol/l Amélioration rapide de la fonction rénale dans le groupe 1 après 24h de CVVHDF, p<0,001
Page B. Early veno-venous haemodiafiltration for sepsis-related multiple organ failure. Critical care 2005. Mortalité totale de l’ensemble du groupe à 53%, significativement moins importante que la théorie pour un tel groupe 79%, lié à la mise en place précoce de EER La prise en charge précoce par EER montre un bénéfice comme traitement adjuvant au choc septique réfractaire
Seabra VF. Timing of renal replacement therapy initiation in acute renal failure: a meta-analysis. American Journal kidney disease 2008. 23 études ( 5 essais randomisés + 1 étude prospective + 16 cohortes rétrospectives + 1 étude avec 1 groupe) Dans le groupe de cohorte: EER précoce dans IRA Réduction significative de la mortalité de 28% RR, 0,72: IC 95%, O,64 à 0, 82;p< 0,001 Dans les analyses en sous-groupes de l’ensemble de la méta-analyse: Tendance à moins de mortalité
CONCLUSION Il ne faut donc pas retarder la mise en place d une EER chez les patients présentant une IRA sévère, d’installation et évolution rapide, dans les formes oliguriques i.e. sur les critères cliniques = la diurèse
Mais… En 2006 > 200 définition de IRA > 90 critères de EER * Pour les prochaines études , importance de critères homogènes ( critères RIFLE)
Bellomo R. ARF: the second international consensus conference of acute dialysis quality initiative group. Critical care 2004.* Filtration glomérulaire Diurèse Risk 1,5 x taux de créatinine clairance créat > 25% <0,5ml/kg/h pendant 6h Injury 2x taux de créatinine clairance créat >50% < 0,5ml/kg/h pendant 12h Failure 3 x taux de créatinine clairance créat > 75% taux créatine >4mg/dl (355µmol/l) < 0,3 ml/kg/h pendant 24h Ou Anurie pendant 12 h Sustained loss Perte complète de la fonction rénale > 4 sem. End-stage kidney disease IR terminale > 3mois CRITERES RIFLE
BIBLIOGRAPHIE * Stefan J. Renal remplacement strategies in the ICU. CHEST 2007. Official publication of american college of chest physicans. Palevsky PM. Clinical review:timing and dose of continuous renal raplacement therapy in acute kidney injury. Critical care 2007. ° Palevsky PM.Indications and timing of renal replacement therapy in acute kidney injury. Critical care medecine 2008.
Schiffl H. Daily hemodialysis and the outcome of acute renal failure Schiffl H. Daily hemodialysis and the outcome of acute renal failure. NEJM 2002. Étude prospective randomisée Étude de haute qualité Amélioration de la survie BACKGROUND: IHD is widely used as renal-replacement therapy in patients with acute renal failure, but an adequate dose has not been defined. We performed a prospective study to determine the effect of daily intermittent hemodialysis, as compared with conventional (alternate-day) intermittent hemodialysis, on survival among patients with acute renal failure. METHODS: A total of 160 patients with acute renal failure were assigned to receive daily or conventional intermittent hemodialysis. Survival was the primary end point of the study. The duration of acute renal failure and the frequency of therapy-related complications were secondary end points. RESULTS: The two study groups were similar with respect to age, sex, cause and severity of acute renal failure, medical or surgical intensive care setting, and the score on the Acute Physiology, Age, and Chronic Health Evaluation. Daily hemodialysis resulted in better control of uremia, fewer hypotensive episodes during hemodialysis, and more rapid resolution of acute renal failure (mean [+/-SD], 9+/-2 vs. 16+/-6 days; P=0.001) than did conventional hemodialysis. The mortality rate, according to the intention-to-treat analysis, was 28 percent for daily dialysis and 46 percent for alternate-day dialysis (P=0.01). In a multiple regression analysis, less frequent hemodialysis (on alternate days, as opposed to daily) was an independent risk factor for death. CONCLUSIONS: The high mortality rate among critically ill patients with acute renal failure who require renal-replacement therapy is related to both coexisting conditions and uremic damage to other organ systems. Intensive hemodialysis reduces mortality without increasing hemodynamically induced morbidity.
Bouman CSC. Effects of early high-volume CVVH on survival and recovery of renal function in intensive care patients with acute renal failure. Critical care medecine 2002. Etude prospective randomisée Seule étude jusqu’alors où mise en place précoce CVVH étudié systématiquement Patient chirurgicaux principalement avec oligurie Peu de sepsis Pas d amélioration de la survie et d la fonction rénale à 28 jours Bouman CS. Timing of renal replacement therapy in crittically ill patients with acute kidney injury. Current opinion in critical care 2007.