Le contrôle judiciaire de la constitutionnalité
Fondements: droit anglais En droit britannique, le contrôle judiciaire de la légalité est limité par le principe de la souveraineté du Parlement. Par ailleurs, le contrôle judiciaire des actes des parlements coloniaux a toujours été admis en vertu du principe britannique de la préséance du droit anglais (Repugnancy doctrine). Le droit anglais reconnaît aux tribunaux la responsabilité de trancher les conflits entre lois : Les tribunaux ont l’obligation d’appliquer le droit Les tribunaux doivent gérer les conflits de droit Il existe un hiérarchie entre les normes juridiques Blackstone, Commentaries on the Laws of England
Fondements : Marbury v. Madison
Marbury v. Madison … si une loi est en opposition avec la constitution, si la loi et la constitution s'appliquent toutes les deux à un cas particulier; de telle sorte que le juge doit soit décider de l'affaire conformément à la loi et écarter la constitution, soit décider de l'affaire conformément à la constitution et écarter la loi, le juge doit décider laquelle de ces deux règles en conflit gouverne l'affaire. C'est là l'essence même du devoir judiciaire. Si donc les juges doivent tenir compte de la constitution, et si la constitution est supérieure à la loi ordinaire, c'est la constitution, et non pas la loi ordinaire, qui régit l'affaire à laquelle toutes les deux s'appliquent. Ceux qui contestent le principe selon lequel la constitution doit être tenue par le juge comme une loi suprême, en sont réduits à la nécessité de soutenir que les juges doivent ignorer la constitution, et n'appliquer que la loi. Cette doctrine minerait les fondements mêmes de toutes les constitutions écrites. Elle considérerait qu'un acte qui, selon les principes et la théorie de notre gouvernement, est entièrement nul, est néanmoins, en pratique, obligatoire en tous points. Elle admettrait que, si le pouvoir législatif venait à faire ce qui est expressément défendu, cet acte, nonobstant l'interdiction absolue, serait en réalité effectif. Elle donnerait en pratique au pouvoir législatif une omnipotence considérable tout en prétendant restreindre ses pouvoirs dans d'étroites limites. C'est assigner des limites et déclarer dans le même temps que ces limites peuvent être outrepassées à volonté."
Fondements : droit canadien Avant 1982 :It is the proper function of a court of law to determine what are the limits of the jurisdiction committed to them; but, when that point has been settled, courts of law have no right whatever to inquire whether their jurisdiction has been exercised wisely or not. Lord Watson dans Union Colliery Co. of British Columbia v. Bryden [1899] A.C. 580 Après 1982 : Dans l'affaire Law Society of Upper Canada c. Skapinker [1984] 1 RCS357, la Cour suprême a clairement affirmé une conception identique de la place de la Loi constitutionnelle au Canada en citant, avec approbation de longs extraits de l'affaire Marbury c. Madison.
Limites au contrôle de la constitutionnalité La doctrine de la justiciabilité La justiciabilité est une "doctrine [...] fondée sur une préoccupation à l'égard du rôle approprié des tribunaux en tant que tribune pour résoudre divers genres de différends" Operation Dismantle Inc. c. La Reine, [1985] 1 R.C.S. 441. Une question est non justiciable des tribunaux si elle met en cause "des considérations morales et politiques qu'il n'est pas du ressort des tribunaux d'évaluer". La retenue judiciaire Les tribunaux refusent généralement de se prononcer sur des questions devenues théoriques soit en raison d’un changement législatif, soit en raison de la disparition du litige entre les parties qui avait donné naissance à l’action. La divisibilité de la législation Une loi ou une disposition législative pourra être invalide en partie seulement, les dispositions non touchées resteront valides. L’interprétation atténuée Il est acquis qu’en présence de deux interprétations possibles, il faut préférer celle qui est conforme à la constitution.
Les modalité du contrôle judiciaire (le procès constitutionnel) Les grands types de procès à incidence constitutionnelle: Les procès "ordinaires", fondés sur l'art. 52 de la LC 1982. Les procès portant sur l'art. 24 de la LC 1982. Les "références" ou "renvois" constitutionnels. Ces procès portent sur la détermination de la conformité ou non d'une règle de droit à la LC : soit au chapitre du partage des compétences législatives soit au chapitre de la CCDL soit à une autre disposition de la LC Avant 1982 tous les procès en inconstitutionnalité étaient fondés sur le arts.2 et 3 du Colonial Laws Validity Act , maintenu en vigueur pour le Canada par l'art. 7 du Statut de Westminster.
Les modalités du contrôle judiciaire Tout litige peut donner lieu à une objection d’inconstitutionnalité. Seules les décisions émanant des tribunaux supérieurs sont opposables. C’est une objection ordinaire, elle n’est pas d’ordre public. Elle peut être soulevée chaque fois qu’elle se pose; à toute étape de la procédure; à titre principal ou incident. Tout demandeur doit avoir l’intérêt pour agir c’est-à-dire, un intérêt distinct dans un litige né et actuel. (Ministre de la Justice (Can.) c. Borowski [1981] 2 R.C.S. 575 ) Lorsque des objections constitutionnelles sont soulevées, les procureurs généraux doivent être mis en cause : 95 Cpc, 53(5) Loi sur la Cour Suprême.