Que l’excellent médecin est aussi philosophe

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Transcription de la présentation:

Que l’excellent médecin est aussi philosophe Le portrait du bon médecin selon Galien de Pergame

L’identité hybride des médecins-philosophes « J’ai été particulièrement sensible à ce que Pierre Corvol, médecin, et Jacques Bouveresse, philosophe, joignent leurs efforts pour présenter la candidature de l’hybride de philosophe et de médecin que je suis. Cette double formation n’est pas rare. Au-delà de ma personne, je suis heureuse qu’en créant cette chaire de philosophie des sciences biologiques et médicales le Collège de France honore une communauté de philosophes-médecins ou médecins-philosophes qui tire fierté de grands ancêtres : Avicenne et Averroës, La Mettrie et Cabanis, Emile Littré et Karl Jaspers, sans oublier Galien. Cette communauté a été, elle est, bien représentée dans la tradition française récente, par Georges Canguilhem, François Dagognet, Georges Lanteri-Laura, Anne-Marie Moulin, et d’autres plus jeunes qui prennent la relève. Cette communauté est en même temps une communauté internatinale avec Henrik Wulff à Copenhague, Henk ten Have à Nimègue, Tristan Engelhardt à Houston, Erich Löwy à Peoria, … Jean-Noël Missa à Bruxelles, pour n’en citer que quelques uns ». Anne Fagot-Largeaut, Leçon Inaugurale, Collège de France, Paris, 2001, p. 6 . Rappel semaine dernière : longue tradition de médecins philosophes qui revendiquent une identité double. Mais que recoupe exactement cette identité ? Peut-on la penser de la même manière à l’époque antique et à notre époque ? Y a-t-il des formes de continuité ou des moments de rupture ?

Galien où la définition de l’excellent médecin

Galien figure par excellence du médecin philosophe Pepaideuménos. Que l’excellent médecin est aussi philosophe, Paris, Belles Lettres, éd. Boudon-Millot, 2007. Voir aussi « Galien de Pergame ou le médecin qui voulait se faire philosophe », V. Boudon-Millot, dans Médecins et philosophes, une histoire, ed. Lefevbre et Crignon, Paris, CNRS éditions, 2019.

Quelques éléments de présentation Claude Galien Médecin grec, né à Pergame vers 131, mort à Rome ou à Pergame vers 201 L’un des plus grands médecins de l’Antiquité avec Hippocrate qu’il contribue à faire connaître. Galien étudie d’abord la rhétorique et la philosophie. Commence des études de médecine à 17 ans puis voyage pour côtoyer les médecins les plus réputés de son temps tout autour du bassin méditerranéen. Il devient à 26 ans médecin des gladiateurs et va ainsi perfectionner ses connaissances en anatomie et en traumatologie. Il pratique la dissection d’animaux : chèvres, singes, chiens, porcs. En 162 il s’établit à Rome où il se forge une solide réputation en raison de ses capacités à diagnostiquer, de son observation clinique des patients et de la qualité de son enseignement. Mais il s’attire aussi la jalousie de ses confrères en raison de son caractère cassant, orgueilleux et il quitte la ville en 166 à l’occasion d’une épidémie de peste. Il y revient deux ans plus tard, appelé par l’empereur Marc Aurèle et il devient médecin personnel de l’empereur et de ses fils. Se présente lui-même comme un continuateur d’Hippocrate. Doctrine médicale du galénisme reprend la théorie hippocratique des quatre éléments : air, terre, eau et feu, dont les quatre qualités physiques (chaud, froid, humide, sec) influent sur les quatre humeurs présentes dans le corps (sang, bile, pituite et atrabile). Ces humeurs déterminent quatre tempéraments physiologiques : tempérament sanguin, flegmatique, mélancoliques et colérique. Définition de la santé comme équilibre entre les humeurs et de la maladie comme rupture de l’équilibre ou de la bonne proportion etnre ces humeurs. Propose une thérapie par les contraires : opposition d’une humeur à une autre ou d’une qualité à une autre (guérir le chaud par le froid par exemple) quand d’autres médecins de l’Antiquité (Alcméon de Crotone par exemple) proposent une cure par les semblables (fondement de la médecine homéopathique). Attribue l’essence même de la vie à une force occulte, PNEUMA (souffle, esprit) qui se manifeste sous trois formes, ayant leur siègle dans le cœur, le cerveau et le foie. Affirme aussi qu’un Dieu unique est le créateur du corps humaine ce qui explique que ses écrits aient été érigés en dogmes par l’Eglise catholique jusqu’à la fin de la Renaissance. Galien auteur extrêmement prolifique. A laissé pas moins de 500 traités en médecine, philosophie et éthique. Mais une grande partie est détruite en l’an 192 dans l’incendie du temple de la Paix à Rome. Ouvrages de Galien ont été traduits par les arabes au Ixe siècle.

Etudes de philosophie « Après nous avoir élevé de façon à nous rendre savant en arithmétique, calcul et grammaire, au milieu de ces disciplines et des autres connaissances qui font partie de l’éducation, alors que nous étions dans notre quinzième année, il (son père) nous amené à l’étude de la dialectique pour que nous attachions notre esprit à la seule philosophie, puis, influencé par des songes clairs, il nous fit en outre, alors que nous étions dans notre dix-septième année, nous entraîner à la médecine, en même temps qu’à la philosophie ». Galien De Ord. Libr. Suor, IV. 4 (Sur l’ordre de ses propres livres, dans Galien, 2007, p. 99-100).

Le double héritage d’Hippocrate et de Galien à l’époque Le double héritage d’Hippocrate et de Galien à l’époque. Moderne La pratique médicale de Felix Plater

Que l’excellent médecin doit être aussi philosophe Une critique adressée à la médecine de son temps. Une réflexion sur la finalité éthique de la médecine La médecine comme modèle d’investigation rationnel des phénomènes. La nécessité d’une méthode pour mettre un terme aux controverses des philosophes et des médecins. On verra d’abord que ce mot d’ordre correspond, chez Galien (IIe siècle après JC), à une critique adressée à la médecine (1). Mais on verra que ce mot d’ordre implique aussi une réflexion sur la finalité éthique que poursuit le médecin et l’art médical (2), réflexion sur les limites de l’art médical et sa finalité éthique qui était déjà au cœur de l’œuvre d’Hippocrate et de son serment. (3) enfin la définition du médecin philosophe inclut aussi le fait d’assigner à la médecine une finalité rationnelle : médecine comme modèle d’investigation rationnel des phénomènes.

1. La critique de la médecine Une médecine mercantile, plus soucieuse du gain et de la renommée que du bien-être des patients. « Mais il n’est pas concevable lorsqu’on accorde à la richesse plus de considération qu’à la valeur personnelle et qu’on apprend son art non pour le bienfait de l’humanité mais pour s’enrichir, d’atteindre le but que se propose la médecine ». - La critique de l’anatomie. Départager les connaissances essentielles / accessoires. - Partons de la figure du médecin philosophe pendant l’Antiquité. On cite souvent le traité de Galien, Que l’excellent médecin est philosophe (IIe siècle après JC) pour faire état de l’attachement de G à la philosophie. Mais dans ce traité, cette déf du médecin renvoie d’abord à une définition idéale du médecin et s’accompagne d’une critique de la médecine telle qu’elle est pratiquée de son temps. Voir sur ce point la notice de présentation du texte par V. Boudon-Millot, dans Galien, tome I, Paris, Belles Lettres, 2007, p. 245 et suivantes. Le texte est une critique de la médecine de son temps et une manière pour Galien de renvoyer à une figure idéale de médecin : celle d’Hippocrate (un trait qui sera toujours valable jusqu’à une période relativement récente, voir par ex. l’utilisation du qualificatif d’Hippocrate anglais pour qualifier les travaux et l’œuvre du médecin anglais Th. Sydenham au 17es). Dans l’injonction adressée au médecin d’être aussi philosophe on trouve souvent cette dimension à la fois critique et normative : critique, parce qu’il y a derrière cette injonction, une critique adressée à une certaine manière de pratiquer la médecine, plus soucieuse de succès personnel que de faire réellement progresser cet art. Galien critique une médecine décadente, en proie aux controverses et aux polémiques, recherche du gain et de la gloire / au lieu du soin et du souci du malade. C’est là un aspect que l’on retrouve souvent chez les philosophes médecins, comme Locke : qui lui aussi dans ses manuscrits se livre à une critique assez acerbe de la médecine de son temps, avide de réputation, et peu soucieuse d’œuvrer à l’amélioration réelle des conditions de vie des patients (dimension éthique déjà à l’œuvre dans cette critique de la médecine).

2. La réflexion sur les fins et les limites de l’art médical Confiance du patient vis-à-vis de son médecin. Art du pronostic Le meilleur médecin est faillible. Hippocrate Aphorismes II, 219 : « dans les maladies aigües, les prédictions soit de la mort, soit de la santé, ne sont absolument pas sûres ». 3. Le meilleur médecin n’entreprend pas l’impossible. Le médecin parfait est celui « qui est capable de faire la distinction entre le possible et l’impossible » (J. Jouanna, Hippocrate, Paris, Fayard, 1992, p. 156). Dire que le médecin doit être philosophe c’est donc pour Galien prendre clairement parti contre une pratique de la médecine essentiellement mercantile. Mais cette définition n’a pas qu’une portée négative. Elle signifie aussi que la médecine doit se définir comme pratique qui se donne une finalité éthique (réflexion sur le bon médecin ou le médecin parfait). Important de rappeler que depuis l’Antiquité, souci de réguler la pratique de la médecine en lui assignant une visée éthique, réflexion non seulement sur les limites de l’art médical mais aussi sur ce qui doit constituer la finalité de l’art médical. a. Pourquoi exerce-t-on la médecine et pourquoi ne doit-on pas l’exercer, en vue de quelle fin b. Quid des relations entre médecins et patients ? Quelles précautions le médecin doit-il prendre dans le traitement, l’annonce d’une maladie ? c. jusqu’où a-t-on le droit d’intervenir sur le corps et sur la santé ?

3. La nécessité d’une méthode Meth Med, trad. Boulogne p. 195-196 : « il faut examiner la nature de la personne souffrante, et que pour chaque individu, il existe une thérapie particulière. (…) puisque ce qui est particulier à la nature humaine est inexprimable et inaccessible à la sce la plus exacte, celui-là serait le meilleur médecin de tous les états maladifs pris individuellement qui se doterait d’une méthode grâce à laquelle il diagnostiquerait leur nature et conjecturerait les traitements propres à chaque nature ».

Des facultés naturelles « Et de la même façon, à propos des quatre humeurs… à propos desquelles après cela Hippocrate mentionne la nature de l’homme, càd l’élément, n’est pas en tout et pour tout une seule humeur, mais qu’elles sont 4, il aboutit à une conclusion qui n’est en rien différente de ce qu’il avait promis au début, à savoir que l’homme n’est pas une seule chose. L’opinion des philosophes de la nature et des médecins qui disent que l’élément de toute chose ou de l’homme est un est donc ridicule ».

Doctrine des humeurs

1. Le médecin et l’argent a. Chez Galien par exemple, dans le traité que le médecin doit être philosophe, précise que la médecine ne doit pas être exercée pour l’appât du gain. Le médecin non seulement méprise l’argent, mais surtout il doit chercher la tempérance p. 290 : « Assurément le véritable médecin se révèle être un ami de la tempérance de même aussi qu’un compagnon de la vérité ». Pt de départ d’une réflexion sur le « bon médecin » : idée qu’il y a un ethos de la médecine, un certain genre de vie associé à la médecine qui peut être rapproché de celui du philosophe qui s’oppose par ex. à celui du sophiste, pour la médecine s’oppose à la figure du charlatan : celui qui promet de remèdes miracles, qui propose son art moyennant finance. p. 288 : « Mais il n’est pas concevable lorsqu’on accorde à la richesse plus de considération qu’à la valeur personnelle et qu’on apprend son art non pour le bienfait de l’humanité mais pour s’enrichir, d’atteindre le but que se propose la médecine ». Le médecin doit soigner les pauvres comme les riches.

2. relations médecins malades L’exemple de l’annonce de la maladie Galien : « … quand il s’agit d’annoncer les maladies présentes, passées et à venir pour le malade, Hippocrate dit qu’il convient d’y avoir amplement réfléchi ». Voir Hippocrate, Pronostic, dans l’Art de la médecine, trad. J. Jouanna et C. Magdelaine, Paris, GF, 1999. Sur ce point encore, Galien renvoie à Hippocrate. Voir Pronostic, où Hippocrate évoque la confiance du patient à l’égard de son médecin, confiance liée à la capacité que montrera le médecin à diagnostiquer et à annoncer la maladie. On retrouve ce souci des relations entre un médecin et son malade dans la médecine andalouse au Moyen-Âge. Ane-Marie Moulin cite dans son article sur médecine et philosophie (voir bibliographie) le médecin andalou Al-Zahrawi qui écrit au Xe siècle après JC qui exprime un souci fort pour les particularités et l’individualité du malade : « L’une des choses les plus nécessaires au traitement des maladies, après la connaissance de l’art médical, est de savoir interroger le malade. Il est encore plus important de s’approcher de lui et d’observer son état, car tous les malades ne savent pas s’exprimer sur eux-mêmes. Il peut se produire du fait de la maladie un affaiblissement qui indispose le malade, même s’il est capable de s’exprimer » [elle renvoie à la thèse de M. G. Guesdon, Médecins et hommes de sciences en Espagne musulmane, thèse de doctorat Paris III, 1992, t. 2, p. 389]. Prise en considération ici de la personne malade et de la manière dont la maladie peut atteindre son autonomie et sa capacité à s’exprimer, insistance sur la nécessité du dialogue médecin-patient qui n’est donc pas spécifiquement moderne ou contemporaine (on pourra sur ce point consulter Bon médecin, bon patient, éd. C. Crignon & M. Gaille, éd. Séli Arslan, 2010).

3. Les limites de l’art médical Au IIIe s après JC, Hérophile, chef de file de l’école d’Alexandrie, définit le médecin parfait, comme celui « qui est capable de faire la distinction entre le possible et l’impossible » (J. Jouanna, Hippocrate, Paris, Fayard, 1992, p. 156). « Un habile pilote, un grand médecin voit jusqu’où son art peut aller ; ce qui est possible, il l’entreprend ; ce qui ne l’est pas, il l’abandonne, et s’il lui échappe quelque bévue, il est capable de la réparer ». Platon, République, Œuvres complètes, trad. Chambry, t. VI, Paris, Belles Lettres, 1989, livre II, 360e-361a, p. 54. « La philosophie de la santé ne présente qu’un infirme parcelle de tous ces devoirs qui se posent à nous. Il importe de trouver à chaque fois, dans tous les secteurs, un équilibre entre ce qu’il est possible de faire et une action volontaire et responsable. A l’intérieur de ce vaste ensemble, les problèmes inhérents à la santé couvrent un domaine qui nous touche tous directement, à partir duquel seulement nous parviendrons nécessairement à nous accorder sur les limites d’action que nous enseignent la maladie et la mort ». H. G. Gadamer, Philosophie de la santé, 1998, p. 8-9. Au IIIe s après JC, Hérophile, chef de file de l’école d’Alexandrie, définit le médecin parfait, comme celui « qui est capable de faire la distinction entre le possible et l’impossible » (J. Jouanna, Hippocrate, Paris, Fayard, 1992, p. 156). Distinction qui renvoie à la prudence qui doit caractériser le médecin. Ne pas promettre par exemple la guérison alors que les moyens à disposition du médecin sont limités. Voir aussi sur ce point Platon, République II, 360e-361a. Le bon médecin est celui qui n’entreprend pas l’impossible : « Un habile pilote, un grand médecin voit jusqu’où son art peut aller ; ce qui est possible, il l’entreprend ; ce qui ne l’est pas, il l’abandonne, et s’il lui échappe quelque bévue, il est capable de la réparer ». Platon, République, Œuvres complètes, trad. Chambry, t. VI, Paris, Belles Lettres, 1989, livre II, 360e-361a, p. 54. C’est précisément parce que les questions de médecine et de santé posent le problème des « limites » de ce que l’on peut faire ou ne pas faire qu’elles mobilisent nécessairement la philosophie, comme le souligne par exemple H. G. Gadamer dans l’Avant-Propos de sa Philosophie de la santé, Grasset 1998 (1993). Ancêtre de cette réflexion sur les limites et finalité éthique de l’art médical : le serment d’Hippocrate (voir séance prochaine).

L’ambition rationaliste de l’art médical La médecine suppose une connaissance de la nature Recherche de la vérité, élucidation des causes, formulation de raisonnements logiques Le débat entre les sectes médicales, dogmatiques, empiriques. Des Sectes pour les débutants, dans Traités philosophiques et logiques, trad . P. Pellegrin, C. Dalimier et JP. Levet, GF, 1998. La médecine ne s’est pas uniquement définie depuis l’antiquité comme un art, renonçant à toute recherche de la vérité, à toute ambition spéculative. Cette ambition spéculative se manifeste de deux manières au moins. a. On trouve aussi depuis les médecins de l’Antiquité, l’idée que la médecine, même si elle est un art, repose et suppose une connaissance de la nature. b. Prétention à la recherche et à l’élucidation des causes et aussi à la formulation de raisonnements logiques (et donc visée de la démonstration et recherche de la certitude). Même si sur ce point le débat oppose les sectes médicales de l’Antiquité, en particulier débat entre médecins rationalistes (dogmatiques) et médecins empiriques. Voir Des sectes pour les débutants, dans Traités philosophiques et logiques, trad . P. Pellegrin, C. Dalimier et JP. Levet, GF, 1998. Débat empiriques / rationalistes, ch. I, p. 64.

La connaissance de la nature « Le médecin parcourra toute la Grèce, car il lui faut noter aussi ce qui relève de la nature des régions », et plus particulièrement à celle de la « nature des corps ». p. 283 : « En particulier, pour ce qui est de la nature du corps, Hippocrate juge bon qu’on la connaisse précisément, arguant qu’elle est au fondement de tout raisonnement en médecine ». Physique : connaissance de la nature. Références à Air, Eaux, Lieux d’Hippocrate. Pour Galien, le médecin doit se consacrer à la connaissance de la nature (p. 289 : « il parcourra toute la Grèce, car il lui fait noter aussi ce qui relève de la nature des régions »), et plus particulièrement à celle de la « nature des corps ». p. 283 : « En particulier, pour ce qui est de la nature du corps, Hippocrate juge bon qu’on la connaisse précisément, arguant qu’elle est au fondement de tout raisonnement en médecine ». Connaître la nature de ses parties, leur structure, conformation, relation avec les parties voisines. Le médecin doit « observer de ses propres yeux » (289). Notion d’autopsia.

Le bon médecin maîtrise l’art du raisonnement « il lui faut s’exercer à la méthode logique pour savoir discerner en combien d’espèces et de genres se subdivise la totalité des maladies et comment dans chaque cas il faut concevoir une indication des traitements ». Il doit « parvenir à des certitudes grâce à la démonstration ». Enfin pour Galien, le bon médecin doit aussi s’exercer à l’art de la logique, il doit maîtriser les formes du raisonnement. La méthode logique est indispensable pour discerner le nombre des maladies, leur division en genres et en espèces. P. 290 : « il lui faut s’exercer à la méthode logique pour savoir discerner en combien d’espèces et de genres se subdivise la totalité des maladies et comment dans chaque cas il faut concevoir une indication des traitements ». Il doit « parvenir à des certitudes grâce à la démonstration » (ambition spéculative forte assignée ici à la médecine qui justifie le rapprochement fort avec la philosophie). Je reviendrai sur ce point plus tard (la médecine comme modèle d’activité rationnelle pour le philosophe, car la médecine devient alors un objet ext à la philosophie).

En quel sens le médecin aujourd’hui peut-il ou doit-il revendiquer d’être aussi philosophe « N’est-il pas surprenant que l’enseignement de la médecine porte sur tout, sauf sur l’essence de l’activité médicale, et qu’on puisse devenir médecin sans savoir ce qu’est et ce que doit être un médecin ? A la faculté de médecine, on peut apprendre la composition chimique de la salive, on peut apprendre le cycle vital des amibes intestinales de la blatte de cuisine, mais il y a des sujets sur lesquels on est certain de ne recevoir jamais le moindre enseignements : la psychologie du malade, la signification vitale de la maladie, les devoirs du médecin dans ses relations avec le malade (et pas seulement avec ses confrères ou avec le juge d’instruction), la psychosociologie de la maladie et de la médecine ». G. Canguilhem, « Thérapeutique, expérimentation, responsabilité », 1959, dans Etudes d’histoire et de philosophie des sciences concernant les vivants et la vie, Paris, Vrin, 1994, p. 390. Claude Debru, « L‘engagement philosophique dans le champ de la médecine : Georges Canguilhem aujourd’hui », dans Canguilhem, Histoire des sciences et politique du vivant, Paris, Puf, 2007. p. 50-51.