Entre Pasteur et Darwin…

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Prévention des cancers
Transcription de la présentation:

Entre Pasteur et Darwin… Dépister les cancers ? Entre Pasteur et Darwin… La seule certitude qui vient immédiatement à l’esprit dans ce domaine est que notre médecine (« triomphante » aurait dit Jules Romains, faisant sans aucun doute le parallèle avec ce que mettait en œuvre le bon docteur Knock… [1]) met l’accent sur la prévention et le traitement précoce des maladies lentement évolutives, ce qui suppose que l'on se préoccupe de l'identification des sujets à risque (Conseil de l’Europe, 1994) [2]. Rappelez-vous, Knock à son prédécesseur Parpalaid : « Vous me donnez un canton de quelques milliers d’individus neutres, indéterminés. Mon rôle, c’est de les déterminer, de les amener à l’existence médicale ». Le problème de la pertinence des dépistages recommandés ou imposés n'est pas nouveau [3, 4]. Ce qui est nouveau, ce sont les questions que l’on commence à se poser sur des dépistages plébiscités par leurs « bénéficiaires » (celui du cancer de la prostate), parfois sous la pression des décideurs et/ou des médecins (celui du cancer du sein). « Dois-je me faire tester pour le cancer ? Peut-être pas, et voici pourquoi » développe le remarquable ouvrage d’un médecin interniste et épidémiologiste américain en apportant des arguments qui paraissent à beaucoup inhabituels et troublants [5].

Médecine - SFDRMG – Bibliomed Liens d’intérêts : Médecine - SFDRMG – Bibliomed JPV Bobigny 2014

Informer, pas recruter… Questions sur le « modèle » du dépistage Quel est le « service médical rendu » par le dépistage proposé dans 4 cancers : col – côlon – sein - prostate ? JPV Bobigny 2014

Histoire naturelle du cancer « selon Pasteur » Phase de détectabilité pré-clinique= « temps de séjour » du cancer Phase de détectabilité clinique Bénéfice potentiel dû au dépistage Diagnostic Décès Tps Décès Naissance du cancer Symptômes Survie sans dépistage Dépistage Survie avec dépistage JPV Bobigny 2014

…Ou « selon Darwin » ? 1ère mutation de l’ADN Réparation de l’ADN  pas de cancer Nème mutation de l’ADN Réparation de l’ADN  pas de cancer Cellule atypique Contenue/détruite  pas de cancer Carcinome in situ Contenu/détruit  pas de cancer Selon Welch, le cancer est un processus dynamique qu’on peu concevoir comme une cascade d’évènements où existe aussi la possibilité d’enrayer une évolution qui n’a rien d’inéluctable. Il est très difficile de savoir si les interventions les plus précoces sont aussi les plus « aidantes », alors que le seul résultat qui importe est l’impact sur la mort (sans doute faut-il ajouter : quelle que soit sa cause, ce qui élargit le débat). « Si on doit chercher un cancer à son début, il se peut que nous devions envisager une nouvelle stratégie : l’attente vigilante. Il est tout à fait possible de faire mieux avec un peu plus d’attente et un peu moins d’action ». Carcinome invasif Décès par cancer Welch HG. Dois-je me faire tester pour le cancer ? (2005) JPV Bobigny 2014

A titre d’exemple : mélanome Incidence du mélanome et mortalité (sujets > 65 ans). Données du programme US SEER 1986-2001 (Welsh 2005). JPV Bobigny 2014

Informer, pas recruter… Pourquoi dépister ? Quel est le « service médical rendu » par le dépistage proposé dans 4 cancers : col – côlon – sein - prostate ? JPV Bobigny 2014

Cancer du col L’histoire naturelle du cancer du col utérin est assez bien connue : la principale cause est virale (infection par HPV « oncogène », notamment 16 et 18), mais d’autres infections sexuellement transmissibles, le tabagisme, une contraception orale de plus de 5 ans et des facteurs endogènes et génétiques sont eux-mêmes facteurs de risque ou cofacteurs de cette infection HPV ou de la carcinogenèse [11].

Cancer du col utérin 2010 Données d’incidence / 100 000 Tendances historiques 1/ Une grande inégalité de répartition mondiale au bénéfice des pays industrialisés. L’incidence varie de moins de 10 pour 100 000 femmes dans ces zones « favorisées » à plus de 90 dans certains pays d’Afrique ou d’Amérique du sud. 2) Une diminution constante de l’incidence et de la mortalité en France 3) Âge médian au diagnostic : 50-51 ans. Partout dans le monde, l’incidence augmente régulièrement entre 20 et 40 ans, puis diminue ensuite. 4) Le risque relatif annuel de surmortalité lié au cancer du col utérin est actuellement stable et de faible amplitude (moins de 2% chaque année). Chez les femmes jeunes (15-44 ans) ce taux diminue à 1% dès la 5e année après le traitement, et devient négligeable au-delà. Il est très inférieur à celui des femmes plus âgées. Ces deux derniers points expliquent que le pic de mortalité lié à ce cancer se situe aux environs de 50-51 ans. (réf : Gallois P, Vallée JP, Le Noc Y. Cancer du col de l'utérus : l'urgence reste le dépistage. Médecine. 2007;3:215-20.) JPV Bobigny 2014

Données France 2010 (1) Inca / InVs Le taux de mortalité (standardisé monde) par cancer du col de l’utérus a été réduit de moitié entre les périodes 1983-87 et 2003-07, passant de 4,2 à 2,0 pour 100 000. Selon les projections qui font l’hypothèse d’une prolongation de la tendance récente du risque de décès, le taux est estimé à 1,6 décès pour 100 000 femmes en 2010. Le risque de développer un cancer du col avant 74 ans a considérablement diminué avec l’année de naissance, selon les projections des courbes dont on dispose : 3,6% chez les femmes nées en 1910, 0,6% chez les femmes nées en 1950 [11].Cette évolution pourrait être expliquée par l’amélioration des conditions d’hygiène chez les plus âgées, la plus grande fréquence du dépistage depuis les années 1960 et l’amélioration de la prise en charge des cancers (notamment lorsqu’ils sont détectés à un stade plus précoce). Les tendances par âge montrent une baisse du taux de mortalité pour toutes les tranches d’âge. Toutefois, la décroissance s’est nettement ralentie sur la décennie récente (entre les périodes 1993-97 et 2003-07) pour la tranche d’âge 40-44 ans (-7 % contre -15 % lors de la première décennie), les 45-49 ans (-13 % contre -23 %) et les 50-54 ans (- 8 % contre -41 %). Cette tendance favorable pourrait s’expliquer par la baisse du taux d’incidence qui serait en lien avec une amélioration des conditions d’hygiène chez les femmes plus âgées et le développement du dépistage individuel dans les années 60 chez les plus jeunes. L’amélioration de la standardisation de prise en charge des patientes diagnostiquées plus souvent à des stades précoces (chirurgie, radiochimiothérapie) contribue également à la baisse du taux de mortalité (Bélot A, 2008). JPV Bobigny 2014

Histoire naturelle du cancer du col L’évolution naturelle des lésions cervicales est loin d’être uniforme : pour chaque lésion constatée sur le frottis, il existe une probabilité non négligeable (de l’ordre de 30 à 50%) de régression vers un épithélium normal, y compris au stade CIN III. S’il y a bien corrélation entre la sévérité de l’anomalie cytologique et la proportion de tests positifs pour les HPV à haut risque, l’incidence de l’infection aux stades intermédiaires est mal connue et moins de 5% des femmes infectées par le HPV 16 développeront un cancer du col. Ce qu’il faut retenir sur les lésions histologiques cervicales → Le cancer invasif du col utérin met en moyenne plus de 10 ans à se développer après une infection à HPV à haut risque oncogène. → Toute lésion précancéreuse, et même un carcinome in situ, a une probabilité non négligeable (de 32 à 57 % selon la lésion) de régresser spontanément. JPV Bobigny 2014

Où en sommes nous en France ? 17,5 millions de femmes de 25 à 65 ans concernées Plus de 6 millions de frottis réalisés chaque année ; Couverture insuffisante : 51,6 % des femmes pas/trop peu dépistées (sous-dépistage) 40,6% des femmes trop dépistées (sur-dépistage). Situation pratiquement inchangée depuis 2000 En 2000, 5 405 402 FCU ont été remboursés par les trois principaux régimes de l’assurance maladie (CnamTS, Canam et MSA). Ce nombre de frottis rapporté à la population féminine de cette tranche d’âge permet de calculer un taux d’activité moyen annuel de 27 frottis pour 100 femmes de 20 à 69 ans résidant sur le territoire français (DOM y compris). Sur trois ans cela correspondrait à un taux d’activité de 81 frottis pour 100 femmes si toutes les femmes ne faisaient qu’un seul frottis en 3 ans. Ce n’est pas le cas puisque plus de 50 % d’entre elles les réalisent avec un intervalle inférieur ou égal à 2 ans. Il est à noter que ce volume de frottis remboursé annuellement ne tient pas compte de l’activité hospitalière. D’avis d’experts, la proportion de frottis cervico-utérins réalisés en milieu hospitalier est d’environ 15 %. HAS. Juillet 2010 JPV Bobigny 2014

Dépistage du cancer du col Les deux plateaux de la balance… Objectif visé : arrêter l’évolution (généralement lente) de lésions infectieuses vers un cancer invasif. Nuisance possible : surmédicalisation de lésions qui auraient régressé spontanément, au prix d’un traitement (relativement) simple, considéré comme peu agressif. Information probablement objective : la participation au dépistage répond bien à l’objectif visé pour un prix « raisonnable » (donc prescription ou mieux réalisation du frottis, prise en charge des tests positifs) ; Dépistage organisé ? JPV Bobigny 2014

Cancer du côlon

CCR : dépister avant le cancer… En dehors des rares formes familiales, l’histoire naturelle de ce cancer est liée à celle de l’adénome : sur 1000 petits adénomes, 100 « seulement » dépasseront le diamètre de 1 cm, 25 deviendront cancéreux dans un délai d’environ 12 ans. Dépister, c’est faire « la chasse aux adénomes », ce qui suppose donc la coloscopie, geste diagnostique et thérapeutique [19]. Les causes sont probablement multifactorielles. Le rôle respectif de chacun de ces facteurs est assez mal connu : alimentation (viande rouge, charcuterie), surpoids, sédentarité, alcool… [9]. 12 ans Adénome 1000 Adénome > 1cm 100 Cancer 25 JPV Bobigny 2014

Données France 2010 Hommes (CCR en rouge) Femmes (CCR en vert) JPV Chez l’homme, le taux de mortalité (standardisé monde) par cancer colorectal a diminué entre les périodes 1983-87 et 2003-07, passant de 18,6 à 14,7 pour 100 000, soit une baisse de -21 % (figure IV-1). La baisse s’est particulièrement accélérée lors de la deuxième décennie entre 1993-97 et 2003-07 (-15 % contre -7 % entre 1983-87 et 1993-97). Selon les projections qui font l’hypothèse d’une prolongation de la tendance récente du risque de décès, le taux est estimé à 14,1 décès pour 100 000 hommes en 2010. Les baisses les plus importantes concernent les plus âgés (de 55 à 74 ans) avec une variation des taux de -22 % à -26 % entre les périodes 1983-87 et 2003-07. Chez la femme, le taux (standardisé monde) a également baissé, passant de 11,1 à 8,5 pour 100 000 entre les périodes 1993-97 et 2003-07, soit une baisse de -23 %. Selon les projections, le taux est estimé à 8,3 décès pour 100 000 femmes en 2010. Les tendances par âge indiquent une baisse de la mortalité pour tous les groupes d’âge, excepté les 20-24 ans chez l’homme (annexe 5). Les baisses sont plus prononcées (de -24 % à -30 %) et concernent davantage de classes d’âge (entre 50 et 84 ans). Ces tendances favorables résultent des progrès réalisés dans la détection de la maladie grâce à un diagnostic plus précoce, à l’amélioration de la prise en charge thérapeutique et à une diminution de la mortalité opératoire (Bouvier AM, 2009). Il est à noter que le dépistage organisé généralisé depuis une date récente n’a pas pu — encore — avoir d’impact sur l’évolution de ces taux de mortalité. Dans d’autres pays, tels que les États-Unis ou le Canada, une partie de la baisse de la mortalité par cancer colorectal est attribuée à la diminution de l’incidence depuis le milieu des années 80 (Edwards BK, 2010) (Société canadienne du cancer, 2010). Cette tendance n’est pas constatée en France pour l’instant, mais la stabilisation de l’augmentation de l’incidence de ce cancer dans les années récentes, peut indiquer qu’une tendance similaire sera observée en France dans le futur (Bélot A, 2008). Aux États-Unis, cette baisse conjointe de l’incidence et de la mortalité par cancer colorectal est essentiellement attribuée à l’ancienneté des pratiques de dépistage permettant de détecter et de réséquer à un stade précoce cancers et polypes précancéreux. Dans une moindre mesure, cette baisse est attribuée aux progrès thérapeutiques et à la réduction des facteurs de risque (obésité, surpoids, sédentarité, alcool) (Edwards BK, 2010). Hommes (CCR en rouge) Femmes (CCR en vert) JPV Bobigny 2014

Dépistage du cancer du côlon Les deux plateaux de la balance… Objectif visé : éviter l’évolution lente d’un adénome vers un cancer invasif (éradiquer les adénomes à risque). Nuisances possibles : surmédicalisation de lésions qui auraient régressé spontanément. La coloscopie est dans l’ensemble (relativement) peu agressive. Information probablement objective : la participation au dépistage répond bien à l’objectif visé pour un prix « raisonnable » (donc incitation au test et à la coloscopie en cas de test positif) ; Evaluation nécessaire, donc dépistage organisé Le dépistage du cancer colorectal par recherche du sang occulte dans les selles a fait la preuve de son efficacité en montrant une réduction de la mortalité à 11 ans de l’ordre de 15% pour l’ensemble de la population (participation environ 60%) et de 33 % pour les seuls sujets dépistés. Ces résultats ont été obtenus malgré une sensibilité imparfaite du test Hémoccult®. Cette faible sensibilité implique de bien informer les patients de la nécessité de consulter en cas de manifestations cliniques. Sa réalisation (taux de participation et suivi des positifs) dépend de l’implication des généralistes. La remise du test ne peut être une simple distribution, mais impose une information sur la signification et le suivi en cas de test positif. Cette implication demande du temps et justifie une rémunération adaptée. L’efficacité du programme passe par la lecture centralisée des tests (facteur de limitation des faux positifs) et le suivi épidémiologique. Cela implique une structure de gestion bien organisée, et une liaison étroite de celle-ci avec les médecins traitants. Le dépistage du cancer colorectal est aussi un examen de prévention par le repérage et l’ablation des polypes coliques. Le suivi des polypes dépend de leurs caractères propres. JPV Bobigny 2014

Cancer du sein L’histoire naturelle de ce cancer pose le même type de questions que pour les autres cancers : le schéma linéaire d’une petite lésion qui évoluerait in situ avant de devenir symptomatique puis métastaserait ne peut correspondre à la réalité histologique qui n’est ni linéaire dans le temps, ni obligatoire [17]. La forme très particulière des DCIS (Ductal Carcinoma In Situ) pose depuis les années 90 des questions toujours sans réponse puisqu’ils sont traités comme cancers (on en trouvait en 2000 10 fois plus qu’en 1973, environ 20% des cancers détectés par dépistage) [5, 17, 18].

Données France 2010 Après avoir augmenté au cours des dix premières années de la période d’étude, le taux de mortalité (standardisé monde) par cancer du sein a baissé de manière régulière, passant de 20,0 à 17,4 pour 100 000 entre 1993-97 et 2003-07, soit une baisse de 13 %. Selon les projections qui font l’hypothèse d’une prolongation de la tendance récente du risque de décès, le taux est estimé à 16,2 décès pour 100 000 femmes en 2010. Les tendances par âge montrent que cette baisse de la mortalité sur les dix dernières années a concerné toutes les classes d’âge sauf les 85 ans et plus dont le taux a constamment augmenté au cours des deux décennies, passant de 201,7 à 217,6 décès pour 100 000 entre les périodes 1983-87 et 2003-07. Les diminutions les plus importantes sont observées chez les classes d’âge entre 30 et 59 ans (baisse allant de -16 à -21 % selon les classes d’âge). Les baisses sont plus modérées chez les plus âgées (de -3 % à -14 %). La baisse du taux de mortalité enregistrée chez les femmes jeunes et d’âge moyen pourrait traduire les premiers impacts de l’extension de la pratique du dépistage permettant l’amélioration du pronostic par le traitement de tumeurs dépistées à un stade précoce. Il est à noter que la généralisation du dépistage organisé en 2004 n’a pas encore pu avoir d’impact mesurable sur les taux de mortalité observés en 2007. Les améliorations de prise en charge avec notamment l’extension de pratiques standardisés de la chirurgie, de la radiothérapie, de l’hormonothérapie et de la chimiothérapie y ont aussi nettement contribué (Bélot A, 2008). JPV Bobigny 2014

Le « prix à payer » Traitement de « pseudo-maladies » (DCIS ?) Augmentation du nombre de mastectomies totales dans les essais (de 8 à 32%) et les séries historiques. Augmentation du taux de dissections axillaires, mises sous traitement adjuvant et radiothérapies. Quelques cancers radio-induits probables. Accélération des métastases consécutive aux interventions diagnostiques/thérapeutiques ? Dans les études de Bologne et de Nashville, une révision des biopsies du sein a montré que 75 (.Nasville) et 89 % (Bologne) des femmes ayant des DCIS « ratés » lors de la 1ère biopsie n’avaient pas développé de cancer dans les 20 années suivantes. Et l’augmentation marquée du nombre de diagnostics de DCIS depuis le début des années 80 n’a pas réduit lke nombre de cancers envahissant du sein. « Si 2000 femmes sont examinées régulièrement pendant 10 ans, une seule d’entre elles bénéficiera réellement du dépistage par le fait qu’elle évitera ainsi la mort par cancer du sein. Dans le même temps, 10 femmes en bonne santé deviendront, à cause de ce dépistage, des patientes cancéreuses et seront traitées inutilement. Ces femmes perdront une partie ou la totalité de leur sein et elles recevront souvent une radiothérapie et parfois une chimiothérapie. En outre, environ 200 femmes en bonne santé seront victimes d’une fausse alerte. Le stress psychologique de l’attente du résultat pour savoir si elles ont vraiment un cancer et celui de la suite des soins, peut être sévère ». In Gøtzsche PC, Hartling J, Nielsen M, Brodersen J. DÉPISTAGE DU CANCER DU SEIN PAR LA MAMMOGRAPHIE sur www.cochrane.dk. Janvier 2008. Il est rappelé dans cette publication que l'évaluation la plus minutieuse de tous les essais randomisés qui existent est une analyse de Cochrane : la réduction de mortalité était de 7% dans les meilleurs essais et de 25% dans les plus médiocres, et puisque des essais médiocres surestiment habituellement les effets, la réduction de mortalité a été évaluée à 15%. Dans une autre évaluation minutieuse des essais par l’ U.S. Preventive Services Task Force, les chercheurs ont trouvé un effet de 16%. Cela signifie que le dépistage régulier de 2000 femmes pendant 10 ans est nécessaire pour sauver une seule d'entre elles de mort par cancer du sein, soit un effet de 0,05%. Les essais randomisés ont montré que le dépistage augmentait de 30% le nombre de femmes qui ont reçu un diagnostic de cancer du sein et ont été traitées par rapport au groupe qui n'a pas été examiné. Des grandes études de population des pays nordiques, du Royaume-Uni, des Etats-Unis et d’Australie ont confirmé que le dépistage se soldait par un surdiagnostic de 30% à 40%. De l'analyse Cochrane, il peut être calculé ce qu'un surdiagnostic de 30% signifie : dans les essais du Canada et Malmö, le sein entier ou une partie du sein ont été enlevés chez 1424 femmes dans le groupe mammographié et chez 1083 femmes dans le groupe témoin. Puisque le groupe témoin comptait 66154 femmes, le surdiagnostic calculé (1424-1083) / 66154 x 2000 est de 10 sur 2000 femmes mammographiées. Ainsi, en mammographiant 2000 femmes, 10 femmes en bonne santé recevront un diagnostic de cancer qu'elles n'auraient pas eu si elles n'avaient pas été examinées et elles seront ainsi traités comme si elles étaient des patientes cancéreuses. JPV Bobigny 2014

Les 25 ans de l’ERC canadien Mortalité toutes causes Mortalité par cancer du sein Miller AB et al. Twenty five year follow-up for breast cancer incidence and mortality of the Canadian National Breast Screening Study: randomised screening trial. BMJ 2014;348:g366 JPV Bobigny 2014

Dépistage du cancer du sein Les deux plateaux de la balance… Objectif visé : dépister les cancers du sein le plus précocement possible. Nuisances possibles : surdiagnostic et (donc) surtraitement dont le « prix » peut être lourd. Information probablement objective : la participation au dépistage répond peut-être à l’objectif visé ; le « prix à payer » peut être lourd : affaire de choix personnel. Dépistage nécessairement organisé, compte tenu des doutes (qui se confirment d’études en études) sur la balance bénéfice/ risques ? JPV Bobigny 2014

Cancer de la prostate L’histoire naturelle des cancers de la prostate est très « diverse » : certains évoluent très vite (les « lièvres »), la majorité très lentement, durant des décennies (les « tortues »), sans que l’on sache a priori qui est qui. Avec l’avancée en âge, il devient plus commun pour un homme de mourir avec que de mourir d’un cancer de la prostate [22, 23]

Le cancer de la prostate, c’est en France… 71200 nouveaux cas, 8700 morts en 2011 (cancer du poumon : 27500 ; cancer colorectal : 9200) ; Un âge moyen au diagnostic de 71 ans, au décès de 80 ans ; Une morbidité désastreuse ; surmortalité annuelle tous stades confondus de 6,67% à 10 ans du diagnostic ; Une très large – de plus en plus large – utilisation du PSA en dépistage « sauvage », donnant une impression de véritable « épidémie » (84% des cancers dépistés au stade localisé) ; Une controverse depuis des années entre les urologues et « les autres »… Nombre de nouveaux cas estimés de cancer de la prostate en 2005 = 62 245 [53 614 ; 70 876]. Âge moyen au diagnostic = 71 ans. Taux d’incidence standardisé monde = 121,2. Nombre de décès estimé en 2005 = 9 202. Âge moyen au décès = 80 ans. Survie relative (diagnostics portés entre 1989 et 1997) à 1 an = 94 %, à 5 ans = 80 %. Données INSERM 2006 ; INCA 2009 ; HAS 2012 JPV Bobigny 2014

Données IARC 2012 JPV Bobigny 2014

Méta-analyse 2010 6 études randomisées (plus de 300 000 participants) : Québec (1999), Norrkoping (2004), ERSPC et sa branche française publiée à part (2009), PLCO (2009), Göteborg (2010) Le dépistage a augmenté la probabilité diagnostique de cancer de la prostate (RR 1,46 ; 1,21-1,77 ; p <0,001), surtout de stade 1 (RR 1,95 ; 1,22 à 3,13 ; P = 0,005), sans effet significatif sur la mortalité par cancer de la prostate (RR 0,88 ; 0,71-1,09 ; p = 0,25) ou sur la mortalité globale (0,99 ; 0,97-1,01, p = 0,44). Djulbegovic M, Beyth RJ, Neuberger MM, Stoffs TL, Vieweg J, Djulbegovic B, Dahm P. Screening for prostate cancer: systematic review and metaanalysis of randomised controlled trials. BMJ 2010;341:c4543. Andriole GL. Screening for prostate cancer PSA testing should be tailored to individual risk. BMJ 2010;341:c4538. 4 études ont été publiées depuis 2009, dont PLCO et ERSPC. La MA de Djulbegocic et al. confirme les limites méthodologiques importantes des essais. Aucun n’apporte de données sur les effets du dépistage sur la qualité de vie des participants et peu sur les inconvénients possibles du dépistage. Ces données confirment que le dépistage n’a que très peu d’impact sur le diagnostic des formes évoluées de cancer, posant à nouveau la question de la détection et du traitement de formes qui n’auraient jamais évolué puisque la mortalité –spécifique ou totale – ne change pas. L’urologue Andriole souligne que, indépendamment des données de mortalité, les coûts humains et économiques liés à ce dépistage sont considérables. Il en appelle à un raisonnement toujours individualisé, où le dosage de PSA serait largement espacé, voire jamais réalisé, chez les patients les plus âgés ou à faible risque individuel. Djulbegovic M et al. Screening for prostate cancer: systematic review and metaanalysis of randomised controlled trials. BMJ 2010;341:c4543 JPV Bobigny 2014

Etude autopsique prospective 2013 (320 prostates) 220 Russes et 100 Japonais décédés d’autres causes que le cancer de la prostate. Prévalence du cancer de la prostate globale : 37,3% et 35% (p<0,7), avec une moyenne d’âge de 62,5 et 67,5 ans (p<0,001). à 60 ans : 40% à 80 ans : 60% Gleason 7 et plus : 25% des Russes et 50% des Japonais Djulbegovic M, Beyth RJ, Neuberger MM, Stoffs TL, Vieweg J, Djulbegovic B, Dahm P. Screening for prostate cancer: systematic review and metaanalysis of randomised controlled trials. BMJ 2010;341:c4543. Andriole GL. Screening for prostate cancer PSA testing should be tailored to individual risk. BMJ 2010;341:c4538. 4 études ont été publiées depuis 2009, dont PLCO et ERSPC. La MA de Djulbegocic et al. confirme les limites méthodologiques importantes des essais. Aucun n’apporte de données sur les effets du dépistage sur la qualité de vie des participants et peu sur les inconvénients possibles du dépistage. Ces données confirment que le dépistage n’a que très peu d’impact sur le diagnostic des formes évoluées de cancer, posant à nouveau la question de la détection et du traitement de formes qui n’auraient jamais évolué puisque la mortalité –spécifique ou totale – ne change pas. L’urologue Andriole souligne que, indépendamment des données de mortalité, les coûts humains et économiques liés à ce dépistage sont considérables. Il en appelle à un raisonnement toujours individualisé, où le dosage de PSA serait largement espacé, voire jamais réalisé, chez les patients les plus âgés ou à faible risque individuel. Zlotta AR et al. Prevalence of prostate cancer on autopsy: cross-sectional study on unscreened Caucasian and Asian men. J Natl Cancer Inst. 2013;105:1050-8. JPV Bobigny 2014

Cancers trouvés par biopsie systématique si PSA < 4 ng/ml Total < 0,5 0,6-1 1,1-2,0 2,1-3,0 3,1-4 6,6 10,1 17,0 23,9 26,9 (total : 15,2%) 486 791 998 482 193 (total : 2950) La première difficulté vient du PSA lui-même : il est actuellement impossible de fixer un « seuil » déterminant [25-28] à ce test, puisque l’on trouve encore des cancers de la prostate chez des hommes ayant un PSA inférieur à 0,50 ng/ml [28]. Son « inventeur », Richard Ablin, rappelait dans une tribune du New York Times, le 10 mars dernier, que le PSA a pour objectif de surveiller l’évolution des cancers traités et dépister les cancers débutants chez les seuls hommes ayant dans leur famille des antécédents de cancer de la prostate. Thompson et al. (étude finastéride). NEJM. 2004;350:2239-46 JPV Bobigny 2014

Dépistage entre 55 et 69 ans 1000 hommes dépistés / PSA 1000 hommes non dépistés 270 biopsies 116 biopsies 96 cancers 60 cancers 191 décès dont 4,1 par cancer de la prostate 193 décès dont 5,1 par cancer de la prostate Pour éviter 1 décès par cancer de la prostate, il faut donc : Réaliser 154 biopsies supplémentaires (9 hospitalisations pour effets adverses graves, 0,2 décès) Diagnostiquer et traiter 36 cancers additionnels dont 32 à faible risque (12 impuissances sexuelles, 2 incontinences urinaires, 1 incontinence fécale) Cancer décelé : prostatectomie ou surveillance ? Les études scandinaves de l’ère pré-PSA montraient la longue survie de cancers de la prostate localisés non opérés (81% à 15 ans, 54% à 21 ans). Une étude américaine plus récente a suivi 10 ans en moyenne 15 000 hommes de 78 ans d’âge moyen avec un cancer de la prostate localisé (31% après dépistage), n’ayant pas eu de traitement initial. Elle a confirmé ces données : mortalité par cancer de la prostate à 10 ans à 8% et 9% (cancer bien ou moyennement différencié) et 25% (cancer indifférencié). Il n’y a eu que 1,6% de chimiothérapies et 0,9% d’interventions chirurgicales majeures pour compression spinale. Surtout, la mortalité liée au cancer de la prostate est diminuée de 60 à 74% par rapport aux études antérieures sans doute surtout pour 2 raisons : allongement de la phase symptomatique par le dépistage, progrès thérapeutiques [10]. Dans un essai randomisé (prostatectomie radicale vs simple surveillance) 2, le bénéfice de la chirurgie sur les métastases et la mortalité n’apparaissait qu’au bout de 10 ans, presque uniquement quand il existait une extension extracapsulaire initiale ; il était incertain après 65 ans. Le bénéfice en valeur absolue dépendait surtout du caractère plus ou moins différencié du cancer. Le cancer décelé aurait-il évolué ? Le cancer de la prostate est un cancer très particulier, avec une évolution sur une très longue durée, qui se traduit en particulier par la grande fréquence de cancers qui n’ont jamais fait parler d’eux, détectés sur les pièces d’autopsie : 50% à 50 ans, plus de 75% après 85 ans dans une étude US. Par ailleurs on a constaté une explosion de l’incidence du cancer de la prostate depuis l’introduction du dépistage par PSA, sans modification parallèle de la mortalité. Ceci conduit à se poser la question du surdiagnostic lié au PSA : les cancers détectés auraient-ils évolué ? Selon les auteurs, environ 50% des cancers dépistés n’auraient jamais fait parler d’eux. Le surdiagnostic est donc un problème majeur. Les effets indésirables du dépistage ne dépassent-ils pas le bénéfice ? Ces effets sont bien connus : rares effets secondaires de la biopsie, anxiété créée par le diagnostic, troubles sexuels chez 50% des prostatectomisés, incontinence chez 20 à 30% d’entre eux, parfois totale. Ce rapport bénéfice/risque est bien sûr négatif pour les 50% de surdiagnostic qui n’auraient jamais évolué, mais qui sont difficiles à identifier. Mais surtout, dépister précocement une maladie d’évolution très lente allonge artificiellement la durée de maladie perçue, agissant ainsi sur la qualité de vie [12]. Sur quels critères peut se fonder la décision ? L’âge et l’espérance de vie sont les premiers. Le consensus est de les prendre en compte pour la décision de dépistage : le bénéfice très limité sur la durée de vie doit être mis en relation avec l’espérance de vie du patient qu’il faut savoir estimer. Le PSA, comme nous l’avons vu, est un test de dépistage imparfait et son taux ne permet pas de tirer des conclusions pronostiques. Le score de Gleason peut être analysé sur les biopsies avant de décider un geste chirurgical. Dans les cancers bien ou moyennement différenciés, le rapport avantages/inconvénients peut faire discuter la simple surveillance. Par contre les cancers peu différenciés (Gleason 7-10) sont de mauvais pronostic, quel que soit le traitement [12]. En pratique Les études de cohortes comme les essais randomisés confirment qu’on peut « attendre » » avant de recourir à un traitement agressif sans risque excessif de majorer la morbidité ou la mortalité. Ce n’est pas négligeable chez les plus âgés et les sujets à faible risque. Le surdiagnostic est le problème le plus difficile à prendre en compte pour la décision. C’est pour l’identifier avant la décision qu’un marqueur pronostique serait important. Des recherches sont en cours mais aucun marqueur de ce type n’est utilisable en pratique. Actuellement, il faut simplement se rappeler que près de 50% des cancers dépistés n’auraient jamais fait parler d’eux. Le rapport avantages/inconvénients doit être à la base de la décision qui doit être partagée avec une information objective. Perrin P et al. Number needed to harm in prostate cancer screening with PSA. Abstract Search. European Cancer Congress 2013 (ECCO-ESMO-ESTRO) JPV Bobigny 2014

Dépistage du cancer de la prostate Les deux plateaux de la balance… Objectif visé : dépister le cancer de la prostate au stade localisé. Nuisances possibles : surdiagnostic et (donc) surtraitement dont le « prix » peut être lourd. Information « probablement objective » : la participation au dépistage répond parfois à l’objectif visé, mais sans le savoir  ; le « prix à payer » peut être lourd : affaire de choix personnel ? ? Cancer de la prostate 2010  Les essais randomisés ne permettent toujours pas de conclure. Le dosage du PSA n’est pas le « bon » test : il ne permet pas, notamment, de distinguer les cancers évolutifs de ceux qui ne seraient jamais devenus symptomatiques. Les études confirment qu’on peut « attendre » avant de recourir à un traitement agressif sans risque excessif de majorer la morbidité ou la mortalité. La décision de dépistage doit être partagée, à partir, entre autres, des données des essais chiffrées des essais. Le surdiagnostic est le problème le plus difficile à prendre en compte pour la décision : près de 50% des cancers dépistés n’auraient jamais fait parler d’eux. Nous avons la lourde responsabilité d’une « décision sous influence ». Si le dépistage peut en expliquer une partie des bénéfices, c’est au prix d’un surdiagnostic expliquant la divergence des courbes d’incidence et de mortalité. L’allongement des durées de survie depuis le dépistage par PSA n’est pas un critère décisionnel : elle dépasse 20 ans du simple fait du biais d’avance au diagnostic. La décision, très complexe avant « l’ère PSA », l’est encore plus maintenant, du fait du « prix à payer » demandant une décision vraiment partagée. Le rôle « idéal » d’un médecin de famille conseiller relativement « neutre » au milieu d’un océan de conflits d’intérêts est extrêmement complexe, parfois dangereux sur le plan médico-légal… La question « centrale » reste aujourd’hui celle du dépistage : la situation devient difficilement contrôlable dès la première évocation du diagnostic de cancer. JPV Bobigny 2014

Conclusion : le « modèle dépistage » ne peut rester binaire Les objectifs d’un dépistage sont hiérarchisés en fonction de leur utilité perçue pour et par le patient. La hiérarchie « moyenne » standard dans les pays occidentaux est la suivante : 1/ augmentation de l'espérance de vie, 2/diminution de la survenue des événements morbides non létaux, 3/ disparition des symptômes gênants, 4/ prévention du handicap, 5/ amélioration de la qualité de la vie. Le fondement de cette hiérarchie est d’origine culturelle. Elle est valable « en moyenne » car susceptible de varier d’une culture à l’autre, d'un patient à l'autre et pour un même patient selon son âge, sa situation professionnelle, familiale, ses pathologies associées, etc. Si la plupart d'entre nous redoutent la mort, ce n'est pas le cas de tous. Celui-ci ne s'en souciera pas adolescent, la craindra à l'âge adulte, l’attendra centenaire, la réclamera s’il est gravement handicapé. Pour toutes ces raisons, le médecin ne peut décider seul : il ne peut le faire sans le patient, qui a obligatoirement son mot à dire, et depuis quelques années le dernier mot, même si pour cela le dialogue nécessaire est souvent délicat à conduire. Au sein de ce débat l’autonomie du sujet se manifeste et celle du médecin s’exerce sous la forme d’un médiateur de sa responsabilité collective. Il est sans doute temps de proposition un nouveau modèle de recommandations ouvrant la porte à un choix individuel dans l’évaluation du rapport risques/bénéfices. « Quand un arbre tombe dans la forêt et que personne ne l’entend, fait-il du bruit » ? Quand, après son décès, on trouve chez une personne des cellules anormales, cette personne était-elle cancéreuse ? Plus on cherche de cancers, plus on en trouve. La plupart sont de petite taille (on en « rate » probablement de plus petits encore). Le « réservoir » est potentiellement sans limites. Alors que seule une minorité va en souffrir et peut-être en mourir. La pratique médicale reste pleine d’incertitudes… 3 principes : autonomie ; utilité (non-nuisance) ; équité JPV Bobigny 2014

Proposition d’affiche de HG Welch pour le dépistage du cancer du sein : La mammographie a à la fois des avantages et des inconvénients : c’est pourquoi accepter de la faire est une décision personnelle : Le dépistage par mammographie peut vous aider à éviter de mourir d’un cancer ou peut vous faire traiter inutilement. Mais les deux sont rares ; plus souvent, il n’arrivera ni l’un, ni l’autre. C’est pourquoi le dépistage est un choix. Les femmes qui souhaitent faire tout ce qui est possible pour éviter un cancer du sein devraient se sentir mieux en faisant des mammographies (tous les ans si elles le souhaitent). Les femmes qui n’aiment pas ce procédé ou l’idée d’un test ou d’un traitement non indispensable devraient de la même manière se sentir bien en ne faisant pas de mammographies, ou en les faisant moins souvent, ou en les débutant plus tard dans la vie JPV Bobigny 2014