Contrairement à l’habitude, ici les chapiteaux se lisent de la droite vers la gauche. Les feuillages symbolisent la vie éternelle qui est à l’époque la seule et unique préoccupation de tous: Aller au ciel ! Marcher vers le ciel ! La démarche spirituelle pour y parvenir est représentée comme une marche:
Les feuilles (vie éternelle ou résurrection) ne sont pas orientées vers le ciel mais vers la terre. Les actions de ces hommes ne sont pas orientées vers le ciel. Les bras en X sont le signe que leur marche ne mènent pas au ciel. Les mains (symbole des actions) qui serrent la barbe (symbole de péchés) signifient que ces hommes se complaisent et sont dans le péché.
Un chapiteau similaire se trouve à ANZY-le-DUC (71) L’on voit bien ici les multiples codes utilisés par les sculpteurs: La barbe: l’homme dans le péché La main: symbole des actions qui empoigne la barbe. L’autre main qui tient une feuille orientée vers le sol, donc qui représente ses actions qui ne sont pas guidée par un intérêt spirituel mais plutôt terrestre et matériel… L’homme représenté à double permet aussi au sculpteur de représenter l’X formé par les bras qui signifie que ce n’est pas le bon chemin.
Ce sont les créatures du Malin qui tentent les hommes pour les écarter du bon chemin. Les feuilles (symbole de résurrection ou vie éternelle) ils les croquent ou les détruisent. D’habitude ils crachent des rinceaux qui sont le symbole des épreuves à surmonter pour aller au ciel. Remarquez le nœud dans les tiges.
Ces hommes ne semblent pas dans le péché vu l’absence de la barbe mais ils sont très handicapés pour marcher vers le ciel. Ils sont cul-de-jatte ! Ils ont fait semblant de renoncer aux biens terrestres vu qu’ils ne portent plus de barbe mais leur démarche spirituelle est bien entravée parce qu’ils sont divisés dans leurs actions entre valeurs spirituelles et valeurs terrestres.
Ils n’ont que partiellement renoncé à vivre dans le péché car ils se cramponnent encore aux feuilles renversées. Celles auxquelles les barbus se cramponnaient. Leurs progrès sont insuffisants car bien qu’ils ne soient plus cul-de-jatte ils restent encore boiteux et les béquilles montrent qu’il leur est difficile de marcher vers le ciel et la vie éternelle.
Pour progresser il leur faut orienter leurs actions vers la vraie vie ici symbolisée par les triples feuilles aux angles (symbole à la fois trinitaire et de résurrection ou vie éternelle). Sur ce chapiteau les tiges des feuilles ne forment plus des nœuds mais elles font place à des spirales montantes. Ni nœuds ni X mais bien une spirale symbole de spiritualisation.
Alors ce barbu prend la résolution de progresser et de rompre avec sa vie dans le péché qui lui barre la route du ciel. Il coupe cette barbe symbole de vie dans le péché. Il est à genoux pour cette résolution. Ce thème du barbu sacrifiant sa barbe me semble unique dans l’art roman.
Il a perdu sa barbe Il est debout Ses mains symbolisant ses actions empoignent non plus des feuilles orientées vers la terre mais vers le ciel. Il se croît sauvé parce qu’il n’est plus handicapé pour sa marche vers le ciel. Mais en regardant de plus près l’on voit qu’il n’a pas tout changé dans sa vie des feuilles orientées vers la terre sont encore là. Au fond de lui le renoncement n’est pas complet.
C’est une mise en garde. Sa barbe est en train de repousser! Ses choix de vie ne sont pas francs mais comme cette tige ils sont bifides ! D’une main le feuillage va droit au ciel tandis que de l’autre c’est confusion. C’est un homme partagé dans ses actes tantôt de bonnes actions tantôt des péchés Il n’est plus debout mais accroupi
Ses mains maîtrisent les démons qui le tentent. Ce chapiteau invite à maîtriser nos instincts pour nous orienter vers des choix plus spirituels. Cet homme est en train de vaincre les carnivores dévoreurs d’âmes. Ce chapiteau est abondamment représenté dans les églises romanes.
Voilà ce que les chapiteaux ont voulu enseigner aux fidèles de passage, un appel à plus de spiritualité comme l’enseignaient les moines de CLUNY ! Pas de représentations bibliques, pas de croix ou représentations appelant à la piété, pas de vierges intercédantes, pas de saints à vénérer, mais un message universel…pour élever l’âme. Finalement ce n’est aussi rustres que cela y paraît ! Ce morceau de visage sur le sommet du cul-de-four de l’abside. Quelques restes des quatre chapiteaux qui reposaient sur les colonnes du portail avant qu’il soit reconstruit et qui ont été replacés sur le mur intérieur ouest du transept nord. A voir aussi les reliquaires. Il reste à voir
A gauche un personnage se fait dévorer malgré lui par un carnassier, il protège ses jambes de ses deux mains tandis que la bête lui mord le bras gauche. A droite il est accroupi et défèque (thème relativement courant à l’extérieur des églises)
Châsse du XIII e émail à champ levé typique du limousin.
Reliquaire monstrance de Saint EUTROPE, en bois sculpté et doré _ fin XVII e ou début XVIIIe
Le plan de l’édifice provient de cet ouvrage de référence sur l’art roman et ses sculptures dans le bas-limousin. Photos: Bernadette PLAS et Alain Deliquet Interprétation des chapiteaux: Alain Deliquet auteur du site « Belle Saintonge » dont une grande partie est consacrée aux églises et sculptures romanes de la grande SAINTONGE. Septembre 2014