Les difficultés de fonctionnement Section 2 Les difficultés de fonctionnement
Plan La société est parfois le siège de difficultés ou le théâtre de conflits opposant dirigeants et associés. Des solutions sont concevables, à défaut desquelles la dissolution s’impose. Toutefois, celle-ci ne débouche pas inéluctablement sur la liquidation de la société car elle peut aussi être le prélude à une opération de restructuration par fusion ou scission. On examinera donc successivement : les solutions judiciaires le prononcé de la dissolution les suites normales de la dissolution : liquidation et partage les suites exceptionnelles : fusion et scission
§ 1 : Les solutions judicaires. Intervention du juge Pour résoudre les conflits internes à la société, le juge n’a pas hésité, dans le silence de la loi, à décider de mesures qui lui apparaissent correspondre à l’intérêt social de la société. Dans le cadre de cette approche institutionnelle, et non plus simplement contractuelle de la société, il sanctionne les abus de majorité ou de minorité, il annule des délibérations irrégulières, nomme des administrateurs provisoires et accueille des propositions de rachat de titres sociaux et prend des mesures plus audacieuses encore.
Sanction des abus de majorité Parfois, sous le visa de l’article 1382 du Code Civil, plus souvent sans aucun visa, le juge annule les délibérations prises « contrairement à l’intérêt de la société et dans l’unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment des membres de la minorité » Le juge examinera quand même la preuve caractérisée d’un abus commis par las majoritaires et ne remettra pas en cause aisément la politique suivie par ces derniers.
Sanction des abus de minorité et des abus d’égalité De même que les majoritaires peuvent abuser de leur droit de vote, de même les minoritaires peuvent le faire si, détenant une minorité de blocage, ils empêchent l’adoption d’une délibération qui serait conforme à l’intérêt de la société. Le problème de la sanction Dans un arrêt du 9 mars 1993, la cour de cassation a précisé que : « le juge ne pouvait se substituer aux organes sociaux légalement compétents et qu’il lui était possible de désigner un mandataire aux fins de représenter les associés majoritaires défaillants à une nouvelle assemblée et de voter en leur nom dans le sens de décisions conformes à l’intérêt social mais ne portant pas atteinte à l’intérêt légitime des minoritaires » les mêmes mesures judiciaires sont concevables à l’encontre d’un abus d’égalité par lequel un associé, détenant 50 % du capital social.
Sanctions d’autres délibérations irrégulières. Nullité. Une autre manière pour le juge de régler les conflits internes à la société, peut être, s’il et saisi par un ou plusieurs demandeurs, d’annuler des actes ou des délibérations irrégulièrement décidées par les organes sociaux (dirigeants ou associés). Réticence de la cour de prononcer la nullité: Ainsi, l’action en nullité, qui se prescrit normalement par trois ans à compter du jour où la sanction est encourue est éteinte lorsque la nullité a cessé d’exister le jour où la cour a statué sur le fond. Le tribunal peut même d’office, fixer un délai pour procéder à une régularisation qui couvrira la nullité.
La protection offerte aux tiers de bonne foi:l’article 1844-16 CCM du Code civil précise que « ni la société ni les associés peuvent se prévaloir d’une nullité à l’égard des tiers de bonne foi ». A l’inopposabilité aux tiers de bonne foi, une limite est toutefois apportée au texte : la nullité résultant de l’incapacité ou d’un vice du consentement reste opposable par l’incapable, ou son représentant légal, et par l’associé dont le consentement a été surpris par erreur, dol ou violence.
Nomination d’un administrateur provisoire Dans le silence des textes, le juge n’hésite pas à nommer, si l’intérêt de la personne morale le requiert, un administrateur provisoire qui se substitue aux dirigeants en place. En principe, il ne s’y autorise cependant qu’en défaillance des organes sociaux. L’administrateur provisoire a vocation à dénouer la crise par exemple en faisant entrer un tiers dans la société qui départagera les associés en conflit.
§ 2. Le prononcé de la dissolution. A côté de formes de dissolution spécifiques à telle ou telle forme sociétaire ( par ex la mort d’un associé, à défaut de clause statutaire contraire dans une SNC), l’article 1844-7[1] du Code Civil énumère plusieurs causes de dissolution communes à l’ensemble des sociétés, qu’on peut ordonner dans deux catégories : des causes normales et des clauses accidentelles. Les causes normales Par l’expiration du temps pour lequel la société avait été faite Par la réalisation ou l’extinction de son objet (art 1844-7 du CCM) mais pas par sa simple mise en sommeil Par toute cause particulière prévue dans les statuts (art 1844- 7) par exemple le décès d’un associé.
Les causes accidentelles La dissolution peut être accidentelle, elle peut provenir de certains évènements qui e produisent au cours de l’existence de la société; La dissolution volontaire La dissolution judiciaire qui peut survenir dans divers cas a) La dissolution pour justes motifs Cette dissolution est prévue actuellement par l’article 1844-7, 5° du CCM. Elle peut être prononcée par la cour, à la demande d’un associé, notamment en cas d’inexécution de ses obligations par un associé ou de mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de la société. b)La dissolution résultant d’un jugement prononçant la nullité de la société (art 1844-7 3°)
c) La dissolution résultant d’un jugement ordonnant la liquidation judiciaire ou la cession totale des actifs de la société (art 1844-7, 7°) d) La dissolution à la suite de la réunion de toutes les parts en une seule main Cependant, on doit noter que, aux termes de l’article 1844-5 du Code Civil, une telle réunion n’entraîne pas la dissolution de la société de plein droit.
§ 3 : Les suites normales de la dissolution : la liquidation et le partage La liquidation est l’ensemble des opérations ayant pour but de terminer les affaires dans lesquelles la société était engagée, de réunir les éléments de son actif, de payer ses dettes pour dégager finalement l’actif net qu’on pourra répartir entre les associés. Survie de la personnalité morale pour les besoins de la liquidation L’article 1844-8, al 3 du Code civil, confirmant une jurisprudence ancienne et constante, proclame que la personnalité de la société subsiste pour les besoins de la liquidation, jusqu’à la clôture de celle-ci. Les effets du maintien de la personne morale
La liquidation conventionnelle S’il y a des clauses statutaires sur la liquidation ou une convention expresse entre les parties, la liquidation est régie par ces clauses ou ces conventions. Les statuts désignent comme liquidateurs le gérant qui sera en fonction lors de la liquidation Les associés règlent les pouvoirs du liquidateur. Mais certaines règles sont impératives : la cession de tout ou partie de l’actif au liquidateur, à ses employés, ascendants et descendants est interdite Le liquidateur est responsable dans les trois ans, tant à l’égard de la société qu’à l’égard des tiers, des conséquences dommageables des fautes commises par lui-même dans l’exercice de ses fonctions.
La liquidation judiciaire A défaut de clauses statutaires ou de conventions expresses des associés, la liquidation est réglée par la décision de la Cour. En sus des règles exposées dans le paragraphe précédent, les principes essentiels sont les suivants. Si les associés n’ont pas pu se mettre d’accord pour nommer un liquidateur, celui-ci est désigné par le tribunal. Le mandat du liquidateur ne peut excéder trois ans, sauf renouvellement. Le liquidateur peut par ailleurs être révoqué judiciairement pour faute prouvée.
Les règles applicables au partage D’après l’article 1844-9, al 2 du CCM, les règles du partage des successions s’appliquent au partage entre les associés. De plus, l’article 1844-9 du CCM, al 3, décide que sauf décision différente des associés, tout bien qui se retrouve en nature dans la masse partagée est attribué sur sa demande, et à la charge de la soulte s’il y a lieu, à l’associé qui en a fait l’apport. Cela étant, les associés peuvent aussi choisir de demeurer dans l’indivision pour tout ou partie des biens sociaux. (art 1844-9, al 4 CCM). Le boni de liquidation
§ 4 : Les suites exceptionnelles de la dissolution – la fusion ou la scission. (Art 1844-4 CCM) La fusion est l’opération par laquelle une ou plusieurs sociétés transmettent leur patrimoine, tant actif que passif, à une autre société déjà existante qui l’absorbe, ou encore à une nouvelle société qu’elles constituent. Il y a scission lorsque la société partage son patrimoine et l’apporte à plusieurs sociétés qui absorbent ces parties du patrimoine. (il y alors fusion scission) ou apporte ces parties de son patrimoine à plusieurs sociétés qui se constituent (scission).
Conditions de la fusion et de la scission Pour chacune des sociétés intéressées, la fusion ou la scission sont décidées par les assemblées dans les conditions requises pour la modification des statuts (art 1844-4, al 4). Si l’opération emporte création de sociétés nouvelles, chacune de celles doit être constituée selon les règles propres à la forme adoptée (art 1844-4, al 5).