Le rôle du secteur privé dans le renforcement du RAMED

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Transcription de la présentation:

Le rôle du secteur privé dans le renforcement du RAMED Point de vue de la Médecine Générale Dr Rachid CHOUKRI

Constat « Quel que soit le pays, riche ou en développement, les études épidémiologiques vont toutes dans le même sens : Plus on est pauvre, Plus on est malade et Plus on meurt jeune. Partout on constate que le plus fort prédicteur de la maladie physique et/ou mentale et la mortalité prématurée est le niveau socio-économique du foyer»*. A l'échelle mondiale, les populations les plus vulnérables - femmes enceintes, enfants et populations migrantes - restent les principales concernées par l'inégalité d'accès aux soins. *Source : Haut Conseil de la Santé Publique

Précarité, exclusion, pauvreté.. La Précarité est l'absence d'une ou plusieurs des sécurités permettant aux personnes et familles d'assumer leurs responsabilités élémentaires et de jouir de leurs droits fondamentaux Précarisation de l'emploi et du travail; Précarisation de l'habitat et du cadre de vie. L’Exclusion Economique (chômage de très longue durée); Sociale (mères célibataires sans soutien familial ni social; Personnes âgées isolées, jeunes déscolarisés etc.), ou même Indirecte : immigrés ou handicapés qui ne peuvent profiter des mêmes droits ni participer aux mêmes activités que les autres. La Pauvreté dispose de peu de ressources... La précarité complique l'accès aux soins

Maroc : réglementation, législation Discours Royal de 30 juillet 2004 «.… il importe également d’élargir la protection sociale et l’assurance maladie, de lutter contre la pauvreté et toute forme d’exclusion, de renforcer la solidarité sociale entre les générations en prenant des mesures urgentes pour sauver les systèmes de retraite avant qu’il ne soit trop tard….» « …Nous tenons tout particulièrement à réaffirmer notre ferme volonté personnelle d’assurer la mise en œuvre optimale du RAMED, en lui permettant de surmonter tous les obstacles, et en veillant à le développer et à en simplifier les procédures, de sorte à garantir un large accès des catégories défavorisées parmi nos citoyens à ce régime. Nouvelle constitution (2011) La constitution de 2011 est venue consacrer de nouveaux droits. Ainsi, et pour la première fois au Maroc, le droit à la santé se retrouve au rang de droit constitutionnel au même titre que le droit à l’éducation, au logement et à l’emploi. Article 31 : « L’État, les établissements publics et les collectivités territoriales œuvrent à la mobilisation de tous les moyens à disposition pour faciliter l’égal accès des citoyennes et des citoyens aux conditions leur permettant de jouir des droits : aux soins de santé, à la protection sociale, à la couverture médicale et à la solidarité mutualiste ou organisée par l’État ». Article 34 : « Les pouvoirs publics élaborent et mettent en œuvre des politiques destinées aux personnes et aux catégories à besoins spécifiques. A cet effet, ils veillent notamment à : Traiter et prévenir la vulnérabilité de certaines femmes et de mères, des enfants et des personnes âgées Réhabiliter et intégrer dans la vie sociale et civile les handicapés physiques sensori-moteurs et mentaux; Faciliter leur jouissance des droits et libertés reconnus à tous ». Partant de là, il devient clair que TOUS les marocains doivent pouvoir bénéficier d’un accès égal à la même offre de soins !

Le secteur de la santé au Maroc : constat 1/2 Un secteur public essoufflé à cause : Des contraintes financières; De la limitation en ressources humaines; De la faiblesse des infrastructures; D’une insuffisance en gouvernance. Un secteur de santé privé qui: Offre des soins de qualité; Se développe de manière non régulée; Hors de portée des démunis. Malgré tous les efforts déployés par le Ministère de la Santé dans la filière « santé publique », pour améliorer de nombreux indicateurs de santé de base (mortalité, fécondité,..), le secteur public présente toujours autant de disparités entre le milieu urbain et le milieu rural et n’a pas suivi l’évolution exigée par l’accroissement de la population et ses besoins en soins de santé primaires . Le secteur privé s’est développé de façon exponentielle depuis plus de 3 décennies, mais de façon « anarchique  » . Il offre des soins de qualité, mais aurait besoin d’une supervision voire d’une régulation.

Le secteur de la santé au Maroc : constat 2/2 Absence de vision globale en matière de politique de santé: pas de notion de dispositif sanitaire. Déficit en ressources humaines dans les deux secteurs public et privé; Répartition géographique inégale des effectifs à travers le pays; Faiblesse de production des effectifs; Non optimisation des ressources et des infra structures; Multiplicité des prestataires de soins ( formels et informels); Prédominance incongrue de la population de médecins spécialistes qui impacte négativement le parcours des soins et les équilibres des caisses d’assurance maladie; Pas de proposition concrète à propos de la carte sanitaire du secteur privé. Des promesses: Parcours coordonné des soins; Repositionnement du médecin généraliste comme coordonnateur des dépenses de santé; Couvertures médicale et sociale des indépendants (acteurs de santé ++); Réseaux public - privés; Achat de services pour les assujettis au Ramed auprès des médecins généralistes libéraux. L’ensemble des raison précitées, dans un pays en pleine transition démographique et épidémiologique, sont autant de facteurs susceptibles d’aggraver le clivage entre les secteurs privé et public, accentuant ainsi les inégalités dans l’accès aux soins et retardant l’extension de la couverture médicale universelle.

Le Ramed en 2015 Article 115 de la loi n° 65-00 portant code de la couverture médicale de base: Est censé «permettre à une population économiquement démunie de bénéficier d’une couverture médicale de base qui offrira ainsi la gratuité des soins et prestations médicalement disponibles dans les hôpitaux publics, les centres de santé et les services sanitaires relevant de l’Etat aussi bien en cas d’urgence ou lors de l’hospitalisation». Mis en place en mars 2012, il visait 8,5 millions de bénéficiaires démunis, à l’horizon 2014; Sa généralisation à 100 % devrait avoir lieu en mars 2015; A bénéficié à fin février dernier à 6,54 millions de personnes, soit l’équivalent de 77% de la population potentiellement éligible estimée à 8,5 millions de personnes, selon les statistiques du ministère de la Santé; N’a connu jusqu'à présent qu’un maigre succès auprès des plus vulnérables : dispositif à revoir à cause de ses nombreux dysfonctionnements; Dispositif peu efficace, et encore moins adapté à la réalité des besoins de santé, car ne couvre pas toute l’échelle de soins, de la première consultation au suivi médical, en passant par le remboursement des médicaments. La mise en place du RAMED a eu pour effet : Une augmentation importante de la demande de soins auprès des services publics, sans que l’offre de soins ne puisse croître à la même vitesse; Une accentuation du clivage entre secteur privé et public, avec un secteur privé dédié aux patients solvables et un secteur public réservé aux démunis. .

Le secteur libéral généraliste Le secteur médical libéral « généraliste »: Près de 4000 omnipraticiens; Répartition géographique : campagnes, quartiers populaires; Proximité; Disponibilité (Flexibilité des horaires); Equipement… Mais: Pas de carte sanitaire; Pas de régulation : évolue en « roue libre »; Pas de mesures incitatives à l’installation dans les déserts médicaux; Pas de couverture sociale des prestataires; Secteur non associé aux programmes nationaux de santé publique hormis quelques expériences timides (Insertion du DIU, PPP en matière de tuberculose) et non concluantes.

Propositions 1/2 Une réingénierie interne du dispositif de santé du secteur public s’impose : Amélioration du fonctionnement des établissements médicaux publics et de leur gouvernance; Adaptation des structures, et changement des mentalités et des pratiques professionnelles; Mise à niveau des hôpitaux en termes de matériaux biomédicaux et de soins d’urgence; Développement de l’offre de soins de santé de base en milieu rural à travers la réhabilitation des structures d’accouchement; Amélioration de la prise en charge des femmes enceintes dans les établissements de soins de santé de base; Renforcement de l’encadrement et de l’équipement des centres de santé accueillant les bénéficiaires du Ramed.

Propositions 2/2 il ne s'agit en aucun cas de créer au sein de l'hôpital des filières spécifiques pour les plus démunis. Au contraire, ceux-ci doivent avoir accès aux soins dans les mêmes conditions que l'ensemble de la population. Revisiter l’ensemble des dispositifs d’accès aux soins et à la santé de première ligne pour les rendre plus efficaces et plus ouverts. Mise en place de nouveaux mécanismes juridiques assurant aux assujettis au Ramed le libre choix de la filière des soins (publique ou privée ) . Création de permanences d’accès aux soins de santé au sein des établissements publics (soins assurés par les médecine généralistes libéraux) pour offrir des consultations de médecine générale à horaires élargis aux personnes en situation de précarité : Promotion de la santé, Conseils, Actions de dépistage et de prévention; Santé  de la mère; Prise en charge intégrée de l’enfant; Urgences… Création de réseaux public - privé pour : La prise en charge de certaines pathologies chroniques Le suivi de la grossesse Le dépistage et traitement de la tuberculose Le dépistage e traitement des IST /SIDA Hospitalisation à domicile

Soins primaires et réseaux peuvent contribuer à réduire les inégalités de santé Le médecin généraliste acteur pivot du système de santé pour pouvoir garantir à tous les malades et usagers, à proximité de leur lieu de vie ou de travail, dans la continuité; l’accès à des soins de premier recours. Les réseaux peuvent apporter une réelle plus-value dans la prise en charge des patients en situation de précarité. Les médecins généralistes doivent constituer l’une des chevilles ouvrières des réseaux de santé dont l’ANAM préconise la mise en place :« les recettes de l’assurance maladie augmentent annuellement de 10% alors que les dépenses augmentent de 17%. Parallèlement, les ALD qui touchent 3% de la population des bénéficiaires ayant les droits ouverts, absorbent plus de 50% des dépenses ». L’articulation qu’ils offrent aux patients accueillis permet de : Sécuriser leur parcours, en particulier pour des populations qui sont loin des soins, et peu enclins à s’inscrire dans une continuité Une prise en charge globale des personnes en situation de précarité. L’organisation de l’offre de soins doit adopter une structuration horizontale par pathologie ou par population, L’articulation avec l’ensemble du système de soins incluant la médecine de ville, le secteur médico-social et la psychiatrie doit être développée. Le mouvement d’extension de la couverture de santé doit s’effectuer en parallèle d’une recherche de maîtrise des dépenses de santé.

Conclusion Le système doit utiliser au mieux les ressources et les mécanismes existants et impliquer davantage le secteur privé pour assurer la couverture médicale des démunis. Le secteur libéral joue indéniablement un rôle de premier plan dans le curatif. il apparaît aujourd’hui le plus en mesure d’augmenter de manière significative les moyens que les pouvoirs publics peuvent consacrer à la promotion de la santé. La mise en place de «passerelles» entre les deux secteurs, privé et public, contribuera au renforcement d’une « première ligne » capable de proposer une prise en charge efficiente du citoyen et une maîtrise des dépenses de santé, afin d’assurer la viabilité des caisses d’assurance maladie. Les médecins généralistes libéraux sont prêts à s’engager dans un partenariat « win - win », dans le cadre d’une dynamique de réforme de notre système de santé visant à renforcer la première ligne (SSB), afin de favoriser l’accès aux soins pour tous et améliorer la qualité de vie et le niveau de santé des populations.