DOULEUR THORACIQUE AUX URGENCES Dr Sylvie MEYRAN CH St Joseph st Luc LYON
POINTS IMPORTANTS Motif fréquent d’admission au SAU : Pour l’urgentiste : évaluer la gravité potentielle et orienter correctement et rapidement le patient vers une structure adaptée Pas de parallélisme entre la gravité de l’affection responsable et l’intensité de la douleur ressentie par le patient Le patient admis pour une douleur thoracique est examiné dans les plus brefs délais avec réalisation systématique d’un ECG L’ECG normal n’élimine pas l’IDM, le syndrome coronarien aigu, idem pour les enzymes 2 à 8 % des IDM sont méconnus au SAU et non –admis
PRISE EN CHARGE INITIALE (SAU, Pré-hospitalier)
Rechercher des signes de détresse vitale afin de prendre en urgence les mesures thérapeutiques nécessaires Détresse respiratoire : FR, SaO2, Signes de lutte respiratoire, Cyanose État de choc : Pouls, TA, Marbrures Troubles de la conscience : Glasgow, agitation
Rechercher par l’interrogatoire des éléments orientant vers une urgence thérapeutique Antécédents coronariens connus FRCV (HTA, diabète) Antécédents de traumatisme thoracique Anévrisme aortique connu Antécédent récent TEP Intensité de la douleur initiale….
Interrogatoire et examen physique du patient La Douleur Type / intensité / siège/irradiations Mode déclenchement / durée /position antalgique Signes d’accompagnement : nausée, sueur, vomissement Sédation / aggravation / fréquence Prise de TA systématique aux 2 bras Palpation auscultation de tous les pouls, auscultation Recherche d’un souffle diastolique (IA) SaO2
Examens para-cliniques systématiques de première intention ECG à répéter Radiographie du thorax si possible face debout
ORIENTATION DIAGNOSTIQUE
Douleur thoracique et détresse hémodynamique au premier plan Embolie pulmonaire massive Dissection aortique aiguë, rupture d’anévrisme Infarctus du myocarde Tamponnade cardiaque
Douleur thoracique et détresse respiratoire au premier plan Embolie pulmonaire Pneumothorax suffocant Pneumopathie aiguë Syndrome de Boerhaave
Fonctions vitales non altérées mais étiologies à risque de mort subite SCA ST + Embolie pulmonaire Dissection aortique aiguë Pneumothorax suffoquant Anévrysme de l’aorte thoracique
DISSECTION AORTIQUE THORACIQUE Urgence médico-chirurgicale, mortalité élevée Clinique Douleur rétrosternale brutale, intense, déchirure, coup de poignard, migratrice, irradiant dans le dos et la région lombaire (90 % des cas) Parfois d’emblée choc, tamponnade, PC initiale Ischémie aiguë d’un membre Infarctus iléomésentérique Accident neurologique : hémiplégie (5%), paraplégie brutale Douleur abdominale Insuffisance cardiaque
Terrain HTA en particulier chez l’homme (sexe ratio : 2 à 3) Maladie du tissu élastique (Marfan, Ehlers-Denlos) Antécédents familiaux Étiologie iatrogène : cathétérisme Grossesse, 3ème trimestre Toxicomanie cocaïne
Examen clinique Souffle d’IA Abolition d’un ou plusieurs pouls périphériques Asymétrie tensionnelle ( 40 % des cas) HTA (75 %) Manifestations vagales : sueurs, pâleur, bradycardie, syncope initiale 1% de mortalité par heure de retard diagnostic
Examens d’imagerie Affirmer le diagnostic Répondre aux questions suivantes - Type de dissection : Type A Type B - Extension au collatérale de l’aorte - Extension à l’aorte ascendante : racine : dissection coronaire -> IDM Anneau aortique - Existence d’un hématome médiastinal et d’un épanchement péricardique - Présence d’une dilatation anévrismale de l’aorte
Performances diagnostiques différentes techniques en fonction du type de tissection aortique (cf. JEUR n° 3 – Vol 13) Sensibilité (%) Spécificité (%) Type A ETT 78 87 ETO 96 86 TDM 83 100 IRM 99 Type B 10 89
Stratégie thérapeutique Traitement douleur : MORPHINE Traitement HTA : β bloquant, inhibiteur calcique Dissection type A : Traitement chirurgical Dissection type B : Traitement initial médical Même indication pour les hématomes intra-muraux
RUPTURE SPONTANEE DE L’OESOPHAGE Syndrome de Boerhaave Rupture complète et non traumatique de l’œsophage thoracique Homme de plus de 40 ans, rupture 1/3 inférieur Douleur intense basi-thoracique gauche ou épigastrique Vomissement Odynophagie Signes de choc Présence d’un emphysème sus-claviculaire du fait d’un pneumomédiastin (RP) Scanner Thoracique Intervention chirurgicale en urgence
PERICARDITE AIGUE
Terrain Prédominance masculine, sujet jeune Récidivante dans ¼ des cas 5 % des DT au SAU dans une étude de 1998 française
La douleur domine le tableau clinique Rétrosternale, Positionnelle, augmentée par le décubitus, l’inspiration, soulagée par la position assise, TNT - Association possible à des signes pleuro-pulmonaires Douleur parfois absente : dyspnée, dysphagie Présence possible de signes généraux : fébricule, infection virale banale dans les jours précédents (rhino-pharyngite) Frottement péricardique : inconstant (50 %), fugace, bruit mésocardiaque, indépendant des bruits du cœur, variable Assourdissement des bruits du cœur
Le pouls paradoxal de Kussmaul, les signes d’IVD ne sont pas des signes de péricardite mais de tamponnade : adiastolie aiguë. Tachycardie, turgescence des jugulaires, choc… Contexte pathologique donnant une orientation étiologique : Kc, infection aiguë, radiothérapie, maladie auto-immune connue
Examens complémentaires ECG : sus-décallage de ST concave vers le haut, classiquement dans toutes les dérivations, sous-décalage de PR, aplatissement puis négativation des ondes T Cliché thoracique: classiquement horizontalisation du bord gauche du cœur, « gros cœur » Epanchement pleural associé uni ou bilatéral (25 %) Marqueurs biologiques de la nécrose pouvant être légèrement augmentés (myo-péricardite)
Echographie cardiaque De réalisation systématique dans les 24 –48 heures, souvent normale - Péricardite aiguë sèche : péricarde hyperéchogène dense, très refringent, parfois dédoublé - Evalue le retentissement de l’épanchement sur les cavités cardiaques droites
Etiologies Traitement Le plus souvent virale (Entérovirus) ou idiopathique (enquête étiologique rarement effectuée) Parfois intriquée à une autre pathologie Traitement Au SAU : 1 g d’ASPIRINE en IV : Test diagnostic Au domicile : Repos strict au lit jusqu’à disparition de la douleur, AINS pendant 15 jours ou ASPIRINE à dose dégressive (ex : 1 g x 3 pendant 7 j puis diminution)
Traitement spécifique en fonction de l’étiologie 8 péricardite purulente : médiastinite, post-trauma, SIDA 8 Tuberculeuses 8 Post-IDM précoces et tardives (syndrome de Dressler) 8 péricardites radiques 8 Néoplasiques (mésothéliomes, Kc BP, sein, hémopathies) 8 IRC 8 Hypothyroïdie 8 Médicaments : INH, dantrolene, diphenylhydantoïne 8 Maladie inflammatoires : LED, PR: sclerodermie, sarcoïdose, Horton, Behcet…
Orientation Retour à domicile pour les formes simples, reévaluation par un médecin dans les 24-48 heures, remettre courrier médecin traitant UHCD CARDIOLOGIE
DOULEUR THORACIQUE : AUTRES ETIOLOGIES Douleur d’origine pneumologique Douleur d’origine digestive Douleur d’origine neurologique Douleur d’origine rhumatologique et/ou pariétale Douleur d’origine psychogène Pour la culture : autres causes rares
DOULEUR D’ORIGINE PNEUMOLOGIQUE Latéralisée Augmente avec la toux et les mouvements respiratoires Par atteinte de la plèvre pariétale (innervée par les nerfs intercostaux) Les clichés standards face et profil, en station verticale si possible confirment le diagnostic
8 Pneumothorax : Diagnostic difficile si de faible volume : indication de cliché de face en expiration, debout ou en décubitus latéral du côté opposé aux signes cliniques. Diagnostic difficile chez le BPCO, emphysèmateux : indication large de TDM thorax pour éviter la ponction de bulle 8 Tumeurs malignes de la plèvre (mésothéliomes) 8 Pleuro-pneumopathies : radiographie peut être normale au stade infra-radiologique
8 Syndrome de Pancoast-Tobias atteinte néoplasique du dôme pleural à partir d’un Kc du sommet du poumon. Douleur scapulaire irradiant vers le territoire cubital du membre supérieur par atteinte de la huitième racine cervicale et des deux premières racines thoraciques. CBH souvent associé. Lyse de K1, K2 8 Embolie pulmonaire : quelque soit la gravité. Une douleur thoracique avec dyspnée et une radiographie pulmonaire normale est une EP jusqu’à preuve du contraire 8 Pleurésies : infectieuses, inflammatoires 8 Atteinte du nerf phrénique (trajet médiastinal ou diaphragmatique) : douleur sus-claviculaire et point douloureux au niveau du SCM
DOULEUR THORACIQUE D’ORIGINE RHUMATOLOGIQUE ET/OU PARIETALE Douleurs superficielles, reproductibles par la palpation et/ou la mise en mouvement des masses musculaires Palper et percuter les apophyses épineuses, les jonctions chondrosternales et chondrocostales
8 Syndrome de Tietze : arthrite sterno-costale pouvant revêtir un caractère algique aigu. Fréquent chez l’adulte jeune. Aucune place pour les examens complémentaires Douleur + /- tuméfaction des 3 ou 4 premières articulations chondrosternales Parfois authentique atteinte ostéoarticulaire (infectieuse, tumorale, inflammatoire….) Peut être une manifestation inaugurale du syndrome de SAPHO (Synovite, Acné, Pustulose, Hyperostose, Ostéite) Traitement : AINS, infiltration
8 Douleur costale. Fractures traumatiques, spontanées 8 Douleur costale * Fractures traumatiques, spontanées * Tassements vertébraux ostéoporotiques * Spondylodiscites * Ostéoses métastatiques : fractures costales révélatrices d’une métastase. Diagnostic normalement sur la clinique(contexte) et le grill costal. 8 Douleur musculaires intercostales pariétales Traumatiques, rhabdomyolyses des fibromyalgies Atteintes médicamenteuses musculaires (hypolipémiants) 8 Syndrome de Cyriax : syndrome de la côte glissante : Douleur violente en rapport avec une sub-luxation de l’extrémité d’une des dernières fausses côtes sur la côte sus-jacente avec atteinte du nerf intercostal.
DOULEUR D’ORIGINE DIGESTIVE Douleur projetée : tout organe de la cavité abdominale peut donner des douleurs épigastriques hautes ou thoraciques 8 Pathologie oesophagienne : RGO, spasme oesophagien 8 Pathologie gastro-duodénale : ulcère 8 Pathologie hépato-bilaire : cholécystite 8 Pathologie pancréatique : pancréatite aiguë 8 Pathologie colique : distension angle gauche
DOULEUR THORACIQUE D’ORIGINE NEUROLOGIQUE 8 Douleur radiculaire Déclenchées par des efforts à glotte fermée, par la toux Topographie radiculaire, souvent en ceinture 8 Douleurs d’origine comitiale Crises bravais-jacksoniennes
DOULEUR D’ORIGINE PSYCHOGENE 8 Terrain évocateur, ATCD 8 Absence de facteur déclenchant 8 Siège souvent limité, désigné par la pointe de l’index, de topographie variable 8 Douleur à type de piquée 8 De durée relativement brève 8 Avec signes d’accompagnement : angoisse, nervosité, palpitations
DOULEURS THORACIQUES RARES Maladie périodique Poussées inflammatoires des différentes séreuses sur 3, 4 jours Atteinte possible du péricarde et plèvre Phéochromocytome Crises douloureuses thoraco-abdominales constrictives Signes associés : HTA, sueurs, céphalées Diagnostic par dosage des dérivés méthoxylés sanguins et urinaires.
QUI GARDER EN HOSPITALISATION (UHCD)? En l’absence de diagnostic précis Au moindre doute et en l’absence d’avis spécialisé Douleur réveillant le patient : non anorganique, exceptionnellement pariétale Polypnée >20, Fièvre inexpliquée, TAS<1OO mmHg, TAS>180 mmHg, Tachycardie Douleur intense non soulagée Douleur d’allure coronarienne quelque soit l’ECG, sauf angor simple d’effort connu et survenant pour le même effort qu’habituellement Signes d’IVG et d’IVD