@ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES Octobre 2000

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@ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES Octobre 2000 Fluctuations et conjoncture: une analyse de l’offre et de la demande globales @ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES COMMERCIALES Octobre 2000

Analyse du marché des biens et services: l’offre globale Nous avons vu que le PIB pouvait croître avec le nombre total d’heures travaillées (L·h) et avec la productivité des heures travaillées (y). En règle générale, la productivité augmente avec l’augmentation du stock de capital par heure travaillée (K/Lh) et avec le progrès technologique. A court terme cependant, le stock de capital (la taille des infrastructures de production, la machinerie et l’équipement en place, etc.) est fixe et la technologie est donnée. Il est donc difficile d’augmenter la productivité.

Analyse du marché des biens et services: l’offre globale L’augmentation de la production dépend donc essentiellement de l’augmentation des heures travaillées (Lh). Pour augmenter les heures travaillées, il y a deux solutions: Recruter de nouveaux employés au sein de la population active et augmenter L Allonger la durée moyenne de travail, c’est-à-dire augmenter h. Or, ces heures travaillées ont un coût et le coût par unité produite n’est pas indépendant du niveau de production.

Dérivation de la courbe d’offre globale Faisons les hypothèses suivantes, raisonnables à court terme: La population active est fixe Le stock de capital est fixe La technologie est donnée. Le prix des intrants (travail, matières premières, énergie, etc.) sont fixes. Pour augmenter la production, on doit recruter du personnel et augmenter les heures travaillées en moyenne par les employés.

Sous de telles hypothèses, est-il possible d’envisager une courbe d ’offre globale de cette nature ? OG (relation d’équilibre entre le niveau de production et le niveau général des prix

La réponse est négative Les augmentations de production (comme par exemple de Y0 à Y1) entraînent une augmentation de l’emploi. A population active constante, cette augmentation de l’emploi diminue le taux de chômage. Plus le taux de chômage se rapproche de sa limite inférieure, plus il est difficile de recruter du personnel qualifié. Ce personnel qualifié doit faire des heures supplémentaires généralement rémunérées à un taux horaire plus élevé. On embauche du personnel moins qualifié dont la productivité est moins élevée. Ces deux raisons expliquent pourquoi le coût par unité produite devrait augmenter avec l’augmentation de la production lorsque le taux de chômage se rapproche de sa limite inférieure. La réponse est négative P Y OG Y0 Y1 Le taux de chômage diminue en même temps que Y augmente

Le graphique suivant illustre la relation étroite entre le taux de croissance de la production réelle et le taux de croissance de l’emploi au Canada, entre 1980 et 1999: 8 6 6 4 4 2 2 -2 -2 -4 -4 -6 -6 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 PIB réel Emploi

La limite inférieure du taux de chômage Il y a toujours une partie de la population active qui se trouve entre deux emplois ou qui, nouvellement entrée sur le marché du travail, se trouve en chômage de courte durée en train de rechercher un emploi (taux de chômage frictionnel). Une autre partie est régulièrement en chômage et ce, pour de longues périodes. Il s’agit des personnes qui, faute de compétences adéquates ou de mobilité, trouvent difficilement une place sur le marché du travail (taux de chômage structurel). La somme des taux de chômage frictionnel et structurel (parfois appelé taux de chômage naturel) constitue la limite inférieure du taux de chômage. Le taux de chômage structurel pouvant évoluer dans le temps, la limite inférieure du taux de chômage peut donc varier d’un cycle économique à l’autre.

La courbe d’offre globale P OG Lorsque l ’économie fonctionne à pleine capacité et que le taux de chômage est à sa limite inférieure, on ne peut plus augmenter l’offre globale Zone où le taux de chômage se rapproche de sa limite inférieure Zone à taux de chômage élevé Y

Les déplacements de la courbe d’offre globale La courbe d’offre globale se déplacera dès lors que l’une des hypothèses suivantes sera relâchée: La population active fixe Le stock de capital fixe La technologie donnée. La fixité du prix des intrants (travail, matières premières, énergie, etc.).

Une expansion des facteurs de production à productivité constante: OG’ Une augmentation de la population active et du stock de capital (à productivité constante) déplace la courbe OG vers la droite. Les coûts unitaires demeurent constants. OG Y

S’il y a gain de productivité, la courbe OG se déplace vers la droite et vers le bas. une augmentation de la productivité permet de produire plus... OG’ OG’’ à un coût unitaire plus faible... Y

La courbe OG peut aussi se déplacer verticalement, lorsque le prix des facteurs varie L’augmentation des salaires, des taxes sur la masse salariale, du prix des matières premières et de l’énergie entraînent un déplacement vers le haut de la courbe d’offre globale. OG P Y

Même s’il peut arriver occasionnellement ... OG P OG ’ entraîne un déplacement vers le bas de la courbe d ’offre globale. qu’une baisse du prix des matières premières, de l ’énergie, des salaires, etc., Y

Les prix du pétrole (et de l’énergie en général) connaissent des fluctuations prononcées... 1990:10 35,92 1985:11 30,81 Guerre du Golfe 1999:09 23,88 Choc pétrolier de 1985 11,58 1986:07 11,28 1998:12

Le graphique ci-dessous présente le taux de croissance des salaires provenant des conventions collectives des grandes entreprises (500 employés et plus), entre 1984 et 1999: 2 4 6 8 84 86 88 90 92 94 96 98 Croissance des salaires Les déplacements vers le haut de la courbe d ’offre globale s’accentuent Les déplacements vers le haut de la courbe d ’offre globale s’atténuent

Lorsque la productivité et les salaires augmentent d’un même %... OG OG ’ La courbe OG se déplace seulement vers la droite P Y

Les augmentations salariales ne sont inflationnistes que lorsqu’elles dépassent les gains de productivité OG P OG ’ Les augmentations salariales supérieures aux gains de productivité augmentent les coûts unitaires Les gains de productivité déplacent la courbe vers la droite Y

Les hausses possibles des salaires réels Lorsque les salaires et les prix augmentent aux mêmes taux, le pouvoir d ’achat des salaires est constant. Lorsqu ’il y a des gains de productivité, le PIB réel per capita augmente. Les salaires réels peuvent alors augmenter. Lorsque les salaires nominaux augmentent au même rythme que la productivité, il n ’y a pas d ’inflation (toutes choses étant égales). Les salaires réels augmentent donc. Lorsque les salaires nominaux augmentent plus rapidement que la productivité, les firmes augmentent leurs prix pour couvrir leurs coûts unitaires plus élevés. L’inflation réduit alors les salaires réels (et ramène leur croissance à celle de la productivité).

L’influence de la demande globale Évidemment, les entreprises ne choisiront d’augmenter la production que si cette production est absorbée par le marché. La demande globale est tout aussi importante que l’offre globale pour comprendre la détermination des niveaux de la production et des prix. Pour comprendre l’évolution de la demande globale, il faut comprendre ce qui détermine chacune de ses composantes: DG = (C + I + G) + (X-M) De quoi dépendent (C+I+G) et (X-M) ?

(C+I+G): la demande intérieure C+I+G représente la somme de toutes les dépenses finales des résidents: ménages, entreprises et administrations publiques. Ces dépenses sont intimement liées aux revenus disponibles: (Salaires + intérêts + dividendes + transferts - impôts sur le revenu des particuliers) pour les ménages. (Bénéfices non répartis plus subventions moins impôts sur le revenu des sociétés) pour les entreprises. (Impôts moins transferts aux particuliers et entreprises et intérêts versés aux détenteurs de la dette publique) pour les administrations publiques. Les agents peuvent toutefois dépenser les revenus qu ’ils n’ont pas en empruntant. Ils seront d’autant plus enclins à le faire que les taux d’intérêt (réels) sont faibles.

(C+I+G): la demande intérieure Formalisons un peu tout cela: C = fc (RPD, r, autres variables) I = fi (BNR, r, autres variables) G = fg (T-Tr, politique budgétaire) où RPD désigne le revenu personnel disponible des ménages, BNR les bénéfices non répartis des entreprises net d’impôts moins subventions, T-TR les impôts nets de transferts et subventions et r, le niveau des taux d’intérêt en termes réels. C, I, G, RPD, BNR et T-Tr étant tous mesurés en termes réels (en dollars constants)

(C+I+G): la demande intérieure On écrira: C = fc (RPD, r, autres variables) I = fi (BNR, r, autres variables) G = fg (T-Tr, politique budgétaire) + - +/- + - +/- + +/- Les signes +, - et +/- indiquant le sens attendu de la relation

(X-M): la demande extérieure nette S’il n’y avait pas de relations avec les non-résidents, la demande globale serait égale à la demande intérieure. Les non-résidents ont toutefois leur propre demande intérieure (DINT*= C*+I*+G*) dont une partie achète de la production nationale: X. D’autre part, une partie de la dépense intérieure nationale (DINT) achète des importations: M Les exportations et les importations dépendent également d’une comparaison des prix nationaux et extérieurs. Nous écrirons donc: X-M = fx-m ( DINT*/DINT, EP*/P, autres facteurs ) où P* désigne le niveau des prix à l’étranger (en devise étrangère), E le prix de la devise étrangère (en devise nationale) et P le niveau des prix au pays (en devise nationale) + +/-

La courbe de demande globale Reprenons maintenant le tout: DG = fc (RPD, r, autres variables) + fi (BNR, r, autres variables) + fg (T-Tr, politique budgétaire) + fx-m ( DINT*/DINT, EP*/P ) Pour dériver la pente de la courbe, on a qu’à s’interroger sur le lien entre la demande globale et le niveau général des prix.

La courbe de demande globale LA PENTE: L’une des composantes de la demande globale est liée directement au niveau général des prix (P): il s’agit de la demande extérieure nette qui varie en fonction des prix relatifs (E P*/P). Une augmentation des prix locaux (P) fait en sorte que les biens locaux deviennent plus chers par rapport aux biens étrangers, ce qui décourage les exportations et stimule les importations, de sorte que (X-M) diminue. Toutes choses égales, une augmentation du niveau général des prix (P) va engendrer une baisse des exportations nettes (X-M) et une diminution de la demande globale de biens et services.

La courbe de demande globale LA PENTE P P et donc, E P*/P (X-M) DG DG

Les déplacements de la courbe de demande globale globale La demande globale ne dépend pas que du niveau général des prix. La demande globale dépend du revenu personnel disponible (RPD), des bénéfices non répartis net d’impôts des sociétés (BNR), des taux d’intérêt réels (r), de la politique budgétaire, du taux de change ainsi que d’autres variables. Par exemple, une hausse des taux d’intérêt réel aura tendance à faire diminuer la demande globale, tandis qu’une baisse favorisera une hausse. Lorsque l’une des variables autres que le niveau général des prix change et que cette variable affecte l ’une des composantes de la demande globale, c’est toute la courbe qui se déplace. Quelques exemples...

P + DG = C(RPD,…) + I + G +(X-M) DG1(Revenus-T1,…) DG0 (Revenus-T0,…) DG Une baisse des impôts des particuliers (de T0 à T1 ), en augmentant le revenu personnel disponible des ménages, permet de stimuler la consommation, la demande intérieure et par conséquent, la demande globale. La courbe se déplace donc vers la droite.

P DG = C + I + G +(X-M) DG1 (G1) DG0 (G0) DG Lorsque le gouvernement augmente ses achats de biens et services (de G0 à G1 ), la demande globale est stimulée et la courbe de demande globale se déplace vers la droite.

P DG = C + I + G + (X-M) DG1 (DINT*1 /DINT,...) DG0(DINT*0 /DINT,...) DG Si la demande intérieure augmente aux États-Unis, les exportations augmentent, ce qui se traduit par une augmentation de la demande extérieure nette et par un déplacement vers la droite de la courbe de demande globale.

L’équilibre mouvant entre la demande et l’offre globales... P DG = OG = Y OG0 DG0 Y0 P0

détermine la croissance et l’inflation... OG1 DG1 P OG0 DG0 Y1 P1 Y0 P0

La croissance et l’inflation Les courbes d ’offre et de demande globales ne sont pas stationnaires. Elles sont affectées par des mouvements tendanciels et des chocs temporaires. Ces fluctuations sont à l’origine des variations de l’inflation et de la croissance.

La croissance à long terme du PIB réel La tendance à la hausse du PIB réel ne peut être expliquée uniquement par une hausse de la demande des biens et services. En effet, une hausse continue de la DG, avec un courbe d’offre globale statique, amène rapidement l’économie au PIB potentiel (le PIB maximum atteignable).

La croissance de la DG P DG = OG = Y Y0 P0 OG0 P1 DG1 DG0 Y1

La tendance à la hausse du PIB réel Tel que vu plus tôt, la tendance à l’augmentation du PIB réel est due à: la croissance tendancielle de la productivité; la croissance tendancielle de la population active, de l’emploi et du stock de capital. Dans le cadre de notre modèle, ces phénomènes déplacent la courbe OG.

La croissance équilibrée de l’emploi et du stock de capital Y0 P0 OG0 P OG0 P1 DG0 DG = OG = Y Y1

La croissance de la productivité (augmentation de K/Lh et innovation) OG0 OG1 DG0 Y0 P0 P1 DG = OG = Y Y1

Les déplacements de la courbe d’offre globale Ces déplacements peuvent certes expliquer l’augmentation à long terme du PIB réel, mais n’expliquent pas la hausse continuelle du niveau général des prix (l’inflation). Pour que les prix et le PIB réel augmentent tous deux à long terme, la courbe DG doit aussi se déplacer.

La hausse simultanée de la DG et de l’OG Y1 P1 P Y0 P0 OG0 DG0

Les augmentations à long terme de la DG À court terme, de nombreux phénomènes peuvent faire augmenter la DG. À long terme, seule la croissance des moyens de paiement liée au crédit peut servir de support à une croissance continuelle de la demande globale. Nous reviendrons sur ce point dans la section sur la politique monétaire.

L’inflation et la croissance tendancielles P OG0 DG0 Y0 P0 OG1 La DG et l ’OG ont tendance à se déplacer à un certain rythme à long terme. Ces déplacements sont causés par les hausses normales de la productivité et des salaires (OG) et par la croissance normale des moyens de paiement liée au crédit (DG). DG1 P1 Y1

Les fluctuations conjoncturelles Les déplacements des courbes OG et DG ne se produisent pas de façon égale trimestre après trimestre. L’économie est soumise à des chocs de court terme qui affectent la DG et l ’OG. Voyons maintenant les impacts de ces chocs.

Un choc de demande positif Un choc positif sur la DG (p.ex. une baisse du taux d’intérêt réel) déplace la courbe de demande globale vers la droite, au-delà de son augmentation tendancielle. L ’inflation et la croissance sont augmentées P OG0 DG0 Y0 P0 OG1 DG1 P1 Y1

Un choc de demande négatif P OG0 DG0 Y0 P0 OG1 Un choc négatif sur la DG (p.ex. une baisse de la croissance américaine) déplace la courbe de demande globale vers la gauche. L’inflation et la croissance sont réduites. DG1 P1 Y1

Constatation Des chocs (positif ou négatif) sur la demande globale entraînent une variation de la croissance et de l ’inflation dans la même direction.

Un choc d’offre positif à productivité constante Un choc positif sur l’OG (p.ex. une baisse des taxes sur la masse salariale) diminue les coûts unitaires de production et déplace ainsi la courbe d’offre globale vers le bas. La croissance est augmentée et l ’inflation est réduite. P OG0 DG0 Y0 P0 OG1 DG1 P1 Y1

Une accélération de la croissance de la productivité OG0 DG0 Y0 P0 OG1 Une hausse de la productivité supérieure à la normale déplace davantage la courbe OG vers le bas et la droite. La croissance est augmentée et l ’inflation est plus faible. DG1 P1 Y1

Un choc d’offre négatif à productivité constante Un choc négatif sur l’OG (p.ex. une hausse du prix du pétrole) augmente les coûts unitaires de production et déplace ainsi la courbe d’offre globale vers le haut. L ’inflation est augmentée et l a croissance est réduite. P OG0 DG0 Y0 P0 OG1 DG1 P1 Y1

Constatation Des chocs (positif ou négatif) sur l’offre globale entraînent une variation de la croissance et de l’inflation dans des directions opposées.

L’hypothèse d’accélération de l’inflation à l’approche du plein-emploi Lorsque la demande globale augmente dans la portion ascendante de la courbe OG (lorsque le taux de chômage approche de sa limite inférieure), il y a accélération des hausses de prix. Si les salaires nominaux restaient inchangés, cette hausse des prix diminuerait le pouvoir d’achat des salaires. À l’approche du plein-emploi, on doit donc s’attendre à ce que les travailleurs demandent des hausses de salaires nominaux, pour se prémunir contre cette baisse de leur salaire réel.

L’hypothèse d’accélération de l ’inflation à l’approche du plein emploi  A l ’approche de la limite inférieure du taux de chômage, l ’inflation a tendance à s’accélérer car les salaires ont tendance à augmenter plus rapidement. P OG0 DG0 Y0 P0 OG1 DG1 P1 Y1

L’hypothèse d’accélération de l ’inflation à l’approche du plein emploi Les coûts augmentant plus rapidement, l’inflation s’accélère. A l’approche du plein-emploi, une accélération de la croissance de la demande globale ne fait donc qu’accélérer l’inflation. Les banques centrales et les marchés financiers sont à l’affût d’une telle situation...

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