l’approche multifocale du patient alcoolique en soins institutionnels 12/04/2017 l’approche multifocale du patient alcoolique en soins institutionnels COPAAH Journée nationale 14/11/82014 Dr Vanghelis Anastassiou – Service de Médecine Addictologique – CH4V
l’approche multifocale du patient alcoolique en soins institutionnels 12/04/2017 l’approche multifocale du patient alcoolique en soins institutionnels Une problématique concernant le management des soins en alcoologie et l’intérêt de la modélisation opératoire des phénomènes complexes Ce sont les équipes autour de Ph. Jeammet et de J-P. Venisse qui ont évoqué il y a déjà une vingtaine d’année la possibilité d’approche multifocale des pathologies addictives à propos surtout de l’anorexie mentale. Bien que cette approche semble pouvoir inspirer les prises en charge thérapeutiques en addictologie, en général, nous allons ici présenter notre problématique à propos de la pratique de l’approche multifocale en alcoologie concernant plus particulièrement le patient alcoolo-dépendant (désigné dans le texte comme patient ou malade alcoolique ce qui est plus proche de la définition que le DSM-5 proposera). L’approche multifocale précède d’une modélisation de la pratique des soins en alcoologie et cherche à en déduire ce qui peut les rendre plus pertinents ou performants d’une part et d’autre part comment serait-il possible d’éviter les dysfonctionnements lors d’une prise en charge thérapeutique. Par « modélisation de la pratique de soins » nous entendons : les principes et les grandes modalités d’intervention (un savoir opératoire, communément partagé, par la majorité des équipes soignantes en alcoologie) qui semblent se constituer en un protocole; les modalités relationnelles, que les soins prodigués institutionnalisent, entre le patient, ses contextes et ses systèmes d’appartenance et les fournisseurs de soins ; l’explicitation des rapports régis entre soignants à propos d’une prise en charge thérapeutique ainsi que les modalités de prises des décisions. Les soins institutionnels, en France, ne se limitent pas uniquement aux soins résidentiels au sein d’un établissement hospitalier ; les prises en charge thérapeutiques, en ambulatoire, proposées par des équipes soignantes (ELSA, CSAPA) en font partie. Nous éviterons à nous servir des savoirs de pointe ou récents qui n’ont pas eu le temps d’être suffisamment diffusés et explicités et auxquelles, par conséquent, la plupart des équipes soignantes institutionnelles n’ont pas encore accès ou ne les ont pas intégrés dans leur pratique. Il n’est pas exclu que, dans l’avenir, les apports de la recherche scientifique (grâce à la découverte d’un procédé thérapeutique facile à codifier, à transmettre et à administrer) autorisent une approche thérapeutique de l’alcoolisme à la fois plus simple et radicale. Nous allons désigner dans la suite de ce texte par « entreprise thérapeutique » l’ensemble fonctionnel, installé dans la durée et constitué de relations, interventions thérapeutiques, administration de remèdes, injonctions thérapeutiques, gestion de contextes soignants…. Nous allons avoir également recours à l’expression « dysfonctionnement(s) » pour désigner l’origine et le résultat d’inadaptations et d’inadéquation entre un fonctionnement (conduite, comportement) individuel ou collectif (familial, groupal, institutionnel) et le contexte interne ou externe. Le « dysfonctionnement » ne présage rien de la qualité de la structure en question, de son origine, de son évolution, de sa souffrance et de ses ressources mais cherche à attirer notre attention sur les modalités selon lesquelles nous percevons un problème ; il ne s’agit donc pas d’une désignation morale ; par « dysfonctionnement(s) » nous faisons référence à la perception des soignants de ce que, par la suite, ils vont qualifier de problème. En tant que démarche modélisante, l’approche multifocale n’est pas une théorie de la maladie alcoolique pas plus qu’une théorie de la thérapie de la maladie. L’approche multifocale se présente, in fine, comme un ensemble de prémisses méthodologiques et opératoires en vue de la prise en charge thérapeutique d’un patient dépendant. De ce fait là, l’approche multifocale influe sur le cours de la pathologie addictive, elle modifie potentiellement son expression clinique ainsi que les réactions de l’entourage aux comportements addictifs, elle réorganise l’institution soignante et elle peut être à l’origine de nouveaux dysfonctionnements institutionnels. Dr Vanghelis Anastassiou – Service de Médecine Addictologique – CH4V
Le soin en alcoologie: un phénomène complexe 12/04/2017 Le soin en alcoologie: un phénomène complexe L’entreprise thérapeutique, en alcoologie, concerne des contextes de soins au carrefour de la médecine somatique, de la psychiatrie et de la psychopathologie, de l’anthropologie, de l’action politique et de l’action sociale. L’élaboration uniforme des interventions thérapeutiques dans ces contextes est impossible parce qu’elles relèvent de niveaux épistémologiques différents. L’entreprise thérapeutique, en alcoologie, concerne des contextes de soins au carrefour de la médecine somatique, de la psychiatrie et de la psychopathologie, de l’anthropologie, de l’action politique et de l’action sociale ; nous devons, en outre intégrer le large contexte culturel au sein duquel l’alcoologie s’exerce en prenant en charge des personnes souffrant de leur consommation d’alcool. L’élaboration uniforme d’interventions thérapeutiques dans ces contextes croisés est improbable puisque ces interventions relèvent de niveaux épistémologiques différents. ARGUMENTS EN FAVEUR DU CARACTERE COMPLEXE DU SOIN ALCOOLOGIQUE Le modèle bio-psycho-social de l’alcoolisme (la rencontre idoine d’une personne et d’un produit dans un contexte) inspire depuis longtemps les thérapeutiques mises en place par les soignants. Il se traduit par un triple souci thérapeutique qui donne lieu à une triple démarche: traitement des souffrances neurobiochimiques, biologiques et corporelles associé à un accompagnement psychothérapique et social. Les travaux récents de M. Craplet concernant l’histoire de l’alcoologie montrent que les contextes scientifique, socioéconomique et culturel de la pratique de l’alcoologie favorisent, sous prétexte de pratique innovante, la prises en charge thérapeutique de certaines souffrances dues à l’alcoolisme, de façon privilégiée (abondance de moyens, approfondissement du savoir d’intervention) alors que d’autres souffrances soient prises en considérations bien moins. Nous pouvons considérer toutefois que cette démarche, à partir du modèle bio-psycho-social, bien que pertinente, fait implicitement appel à des savoirs multiples et complexes. Le travail motivationnel en amont d’une prise en charge de désintoxication concerne autant le patient désigné que son entourage et relève d’une organisation spécifique des soins et d’une stratégie au-delà de simples entretiens motivationnels centrés sur le malade alcoolo-dépendant. A défaut d’instauration d’une alliance thérapeutique l’entreprise thérapeutique sera de courte durée ou d’une redondance usante. Nul doute que les souffrances somatiques de l’alcoolique demandent une expertise avancée de la médecine interne. Or les souffrances du corps, l’éventuel risque vital, les carences nutritionnelles ou les handicaps secondaires peuvent compromettre sérieusement l’approche relationnelle et psychothérapique. La prise en charge psychologique exige des compétences aussi bien neuropsychologiques que cognitivo-comportementales sans pour autant pardonner un éventuel défaut de connaissances psychodynamiques. L’évaluation et le suivi psychiatrique est d’une très grande complexité: diagnostiquer et traiter les comorbidités, mais aussi les conséquences de la consommation chronique de l’alcool et bien entendu les pathologies psychiatriques qui voient le jour après le rétablissement et l’abstinence. Nos patients souffrent souvent de pathologies doubles ; ceci est autant vrai de point de vue psychiatrique que somatique. Les contextes de vie et d’usage sont des médiateurs/modérateurs aussi bien de la consommation que de l’expression clinique de la maladie ; ils doivent faire l’objet d’interventions thérapeutiques ciblées; la prise en charge curative ou préventive des enfants doit être incluse dans l’entreprise thérapeutique. La prescription de contextes de soins, espaces aussi transitoires que transitionnels, requière une réflexion thérapeutique particulière pour chaque patient. La diversification et la spécification des interventions sociales qui visent la réinsertion (et par conséquent la re-narcissisation de la personne alcoolique) sont croissantes. Les différentes interventions thérapeutiques pour le même patient ne sont pas « solubles » dans un paradigme épistémologique unique ….pas plus que les divers dimensions et contextes du dysfonctionnement de la personne alcoolique sont compréhensibles via une seule grille de lecture. Ni la modélisation de la maladie alcoolique ne peut se suffire à un seul paradigme épistémologique, ni la modélisation de la réponse thérapeutique à la maladie alcoolique peut se suffire du discours d’un seul paradigme épistémologique (bio-médico-chirurgical, politico-socio-culturel, neurophysiologique, psychodynamique, cognitiviste, systémique). D’autant plus qu’il s’agit là de modélisations de processus évoluant et se modifiant dans le temps et dont la compréhension dépend du temps de l’observation ou de l’intervention, se référant, dès lors, à des paradigmes épistémologiques différentes. Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique – CH4V
Quels facteurs contribuent à construire la complexité? 12/04/2017 Quels facteurs contribuent à construire la complexité? L’histoire de la personne candidat à l’alcoolisme L’histoire de la rencontre du patient et de l’alcool L’histoire de la rencontre du patient alcoolique et des soignants L’histoire de l’alcoologie Toute étude ou approche d’un phénomène complexe requiert une exercice de modélisation préalable qui garantie la possibilité d’évaluation et de comparaison entre modèles. Nous proposons pour la modélisation de l’entreprise thérapeutique en alcoologie quatre étapes : la modélisation de la démarche alcoologique en fonction de ses contraintes, la modélisation de l’organisation des dysfonctionnements de la maladie alcoolique, le rappel de la modélisation en tant qu’exploration, la modélisation de l’organisation des soins. Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique – CH4V
(3)la temporalité de l’alliance thérapeutique 12/04/2017 modélisation de la complexité La pratique alcoologique met les cliniciens face à un triple défi…. (1)les particularités des malades dans leurs démarche de demande d’aide (2)la parcellisation importante du savoir d’une clinique particulièrement polymorphe (3)la temporalité de l’alliance thérapeutique Les particularités des malades dans leur démarche de demande d’aide La parcellisation importante du savoir d’une clinique particulièrement polymorphe La temporalité de l’alliance thérapeutique Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique
leur engagement thérapeutique inconsistant 12/04/2017 modélisation de la complexité (1) Paradoxes de la démarche de la demande à l’aide: leur engagement thérapeutique inconsistant l’ambivalence de leur demande d’aide leur labilité transférentielle, L’aspect « manipulatoire » de leurs comportements leur nomadisme thérapeutique. Les « résistances » dans leur contexte de vie… Les particularités des malades dans leur démarche de demande d’aide est en rapport avec la représentation que les soignants ont d’eux : Les malades alcooliques sont considérés comme inconsistants dans leur engagement thérapeutique, habituellement ambivalents quant à leur demande d’aide, suspectés souvent comme des « manipulateurs » (conduites « clivantes », démarche séductrice, mensonges). Leur nomadisme thérapeutique et leur labilité transférentielle nourrissent l’aversion de certains psychothérapeutes pour ces patients Les dysfonctionnements et les « résistances » rencontrées dans le contexte de vie des malades alcooliques rendent sisyphien tout discours et entreprise thérapeutique ; les soignants ont le sentiment désespéré de toujours recommencer sans qu’aucune trace des efforts thérapeutiques accomplis ne reste des tentatives précédentes. La demande d’aide initiale est habituellement imprécise ; elle se résume le plus souvent à solliciter l’intervention des soignants pour que les conséquences néfastes ou pénibles de la consommation d’alcool cessent. La prise en charge thérapeutique proposée peut se limiter à la réduction de la consommation problématique et/ou aux comorbidités somatiques et psychiatriques voire les conséquences sociales. Une perception plus globale de la maladie et de la souffrance sous-jacente du patient et de son entourage prônera une prise en charge des processus psychiatriques et/ou psychopathologiques à l’origine de la maladie voire des contextes culturels et relationnels du malade. Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique – CH4V
12/04/2017 modélisation de la complexité(2) pluridisciplinarité et parcellisation des savoirs en alcoologie génétique, biologie, facteurs de vulnérabilité et comorbidités. modes d’usage, comportements et contextes de vie, configurations socio-économiques. interactions et « jeux » familiaux. histoire, structure de personnalité et processus psychopathologiques. Modalités d’attachement et de relation d’objet la temporalité du processus addictif, les mutations de l’alliance thérapeutique. La parcellisation importante du savoir pluridisciplinaire d’une clinique particulièrement polymorphe Les difficultés croissantes à modéliser les pathologies addictives de façon satisfaisante et opératoire vont de pair avec la croissance des connaissances sur ces mêmes pathologies ; autrement dit, plus nous connaissons à propos des addictions plus nous nous rendons compte de leur complexité. Il en résulte une parcellisation du savoir qui justifierait un transfert des savoirs entre soignants ; une des conséquences de cette parcellisation du savoir addictologique est la difficulté croissante de promouvoir une approche axiomatique et donc un cadre de référence épistémologique; à défaut, l’approche heuristique de la clinique addictologique (malgré la richesse de ses nuances et la promotion de la créativité des soignants qu’elle favorise naturellement) est aussi à l’origine d’un découplage regrettable entre les différents savoirs addictologiques car elle ne favorise nullement les échanges d’expériences et des pratiques. De ce fait, lors d’une prise en charge d’un patient particulier l’équipe soignante ne dispose, à priori, ni de références pour des interventions cohérentes entre-elles ni de critères de pertinence quant au choix des modalités thérapeutiques. La bibliographie issue de la recherche scientifique propose rarement des possibles articulations entre divers modes d’intervention thérapeutique et la problématique issue du projet MATCH invite à réorienter notre réflexion sur ce sujet. Fort probablement, un cadre de référence épistémologique n’est pas possible – ni nécessaire – mais alors un cadre de transferts des savoirs et des expériences thérapeutiques est requis afin que nos prises en charges soient cohérentes et pertinentes. Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique – CH4V
en fonction des contextes scientifique, socioéconomique et culturel 12/04/2017 modélisation de la complexité(2) le modèle bio-psycho-social fait appel à des savoirs multiples en fonction des contextes scientifique, socioéconomique et culturel certaines approches apparaissent innovantes et ont les faveurs des cliniciens et des patients. Contextualisation du modèle bio-psycho-social Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique – CH4V
12/04/2017 modélisation de la complexité(2) La thérapeutique alcoologique repose sur l’approche heuristique favorisant la prise en compte des tableaux cliniques nuancés et la créativité des soignants La thérapeutique alcoologique a besoin également d’une approche axiomatique coordinatrice des savoirs L’approche heuristique s’appuie sur l’expérience, l’expertise mais aussi l’intuition et l’inspiration créative du praticien en lui pardonnant ses paradoxes épistémologiques; la prise en compte du détail clinique, la finesse et la subtilité de l’approche, la prise en considération des singularités et des particularités du sujet sont mises en avant. L’approche axiomatique s’impose la rigueur pour définir les règles d’articulation entre différents savoirs d’une part et règles de cohérence entre différents interventions possibles d’autres part. Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique
L’interpellation du système des soins 12/04/2017 modélisation de la complexité(3) L’organisation temporelle de la demande d’aide du patient alcoolique L’interpellation du système des soins Le temps du travail motivationnel L’alliance thérapeutique Les reformulations successives des objectifs thérapeutiques Toute alliance thérapeutique a une histoire L’INTERPELLATION. Tout commence habituellement par l’interpellation des soignants pour un problème d’alcool. L’interpellation est le plus souvent agie et plus rarement verbalisée. C’est le caractère urgent, critique, l’annonce d’une catastrophe à brève échéance qui nous interpelle ; l’interpellation tend à imposer aux soignants le cadre, la méthode et même le contenu de la réponse thérapeutique. L’interpellation n’est pas véhiculée exclusivement par le patient mais aussi souvent par son entourage et/ou les agents de l’ordre social de sorte que l’interpellation traduit simultanément l’expression d’un besoin systémique et/ou d’un ordre culturel voire d’un besoin politique. LE TRAVAIL MOTIVATIONNEL. L’engagement du soignant est déterminant de ce que l’interpellation adviendra. Ce sera le départ d’un travail motivationnel pour le patient. L’objectif du travail motivationnel consiste à rendre irréfutable l’inadéquation entre la conduite du malade alcoolique et son contexte et/ou son fonctionnement neurobiologique de sorte que l’organisation alcoolique soit mise en crise : la motivation émerge du caractère incontournable de cette inadéquation qui rend le déni obsolète dans sa fonction interactionnelle ; le malade-qui-se—croyait-usager, jusque-là, renonce, alors, à la fonction communicationnelle de sa consommation et, in fine, il se reconnait, progressivement, d’abord une impuissance, puis une souffrance et enfin une maladie. L’ALLIANCE THERAPETIQUE. L’engagement du soignant est aussi l’invitation faite au patient alcoolique pour qu’il s’engage, à son tour, dans une alliance thérapeutique qui n’est pas autre chose qu’une négociation du contrat thérapeutique. Le contexte de cette négociation est l’institution soignante. Dès lors, le patient doit être maintenu co-auteur des décisions thérapeutiques. Au commencement, habituellement, l’alliance thérapeutique se concrétise et se fonde dans le soin du corps en souffrance ; c’est la prise en charge somatique et la considération avec le patient alcoolique de la normalisation de ses constantes biologiques qui réalise la configuration initiale de l’alliance thérapeutique. L’alliance thérapeutique recherchée en addictologie revêt d’un caractère d’affiliation et d’intégration dans une organisation de soins (institution soignante, réseau de soins, groupe d’entraide, discours alcoologiques, manifestations et rites alcoologiques) qui, de facto, offre une identité de substitution. LA DEMANDE D’AIDE. Le malade alcoolique organise son monde autour de sa maladie et l’aide dont il a besoin dépasse les dysfonctionnements neuro-physio-psychologique et ses corolaires sociaux. La demande d’aide de l’alcoolique et de son entourage est toujours à renégocier, à reformuler, et à connoter autrement : le changement thérapeutique commence par là. Or, à l’organisation alcoolique, mono-centrique par définition, nous devons proposer une organisation de soins différente, qui réfute cette logique et résiste à toute simplification causale ou linéarité temporelle. Connoter autrement la demande d’aide peut concerner la consommation modérée et/ou contrôlée lorsqu’il s’avère que l’abstinence est aussi souhaitable qu’inatteignable ; c’est un processus permanent qui peut éventuellement concerner aussi la parentalité, la conjugalité, la sexualité, l’autonomie, la gestion des pertes et des séparations, le rapport à la mort et au plaisir. Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique –CH4V
« le système alcoolique » (Steinglass) 12/04/2017 « le système alcoolique » (Steinglass) …est un modèle qui exprime cette complexité qui se traduit dans l’expression clinique et l’évolution des soins de la maladie alcoolique Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique
alcool Famille d’origine Famille actuelle pairs Institution soignante 12/04/2017 Système Alcoolique Neuro-physiologie temps conjugalité Filiation /identification Fonctions Psychho-dynamiques Fonctions cognitives Famille d’origine Famille actuelle comorbidités attachement attachement pairs parentalité Contextes d’usage C’est P. Steinglass qui a évoqué, dès 1981, l’hypothèse d’un système alcoolique pour désigner le résultat des défauts (familiaux et personnels) d’origine et des mécanismes bio-neuro-psycho-socio-adaptatifs à la consommation chronique d’alcool et en déduire, ses capacités d’autogestion et de maintien et sa trajectoire dans le temps. La consommation d’alcool devient un principe organisateur de la personne alcoolique. Cela s’avère vrai en ce qui concerne l’organisation de la personne alcoolique: son cerveau, son fonctionnement mental et psychologique, ses aptitudes cognitives, le fonctionnement de ses viscères sont adaptés à la consommation de l’alcool. Ces mécanismes neuro- et physio- adaptatifs contribuent par la suite au maintien de la consommation et concrétisent la dépendance. Par ailleurs, les relations de la personne alcoolique avec ses contextes de vie s’adaptent à la consommation de l’alcool: contextes familiaux, contextes amicaux et socioprofessionnel. Là encore, une organisation idoine se met en place: des processus psychologiques et interactionnels d’autonomisation tels que l’identification, la conjugalité, la parentalité, l’intégration sociale se trouvent en panne alors que des modes d’attachement dysfonctionnels d’origine (ou pas) sont renforcés de sorte que la consommation d’alcool soit maintenue. Judiciarisation /précarisation Institution soignante alcool protocoles thérapeutiques société Principe organisateur Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique
« le système alcoolique » (Steinglass) 12/04/2017 L’alcoolisme relève d’une organisation idoine (à des fins d’adaptation) de multiples dysfonctionnements « le système alcoolique » (Steinglass) …et requiert d’une prise en charge via des interventions à de multiples niveaux épistémologiques selon une coordination temporelle. La démarche alcoologique est complexe car elle intègre des données de multiples niveaux épistémologiques et elle est stratégique puisqu’elle aborde une organisation dysfonctionnelle qui est le système alcoolique. Quelques constats ou rappels issus du quotidien de la pratique alcoologique, souvent repris dans la littérature scientifique, peuvent rendre compte de la complexité requise quant à la démarche thérapeutique. Ce sont, volontiers, exposés ici sans distinction de niveau épistémologique mais à la manière qui se présentent lors de la pratique des soins afin de mieux souligner leur enchevêtrement. Bien que c’est en buvant que l’alcoolique le devient, ce n’est pas, pour autant l’alcool qui l’a poussé initialement à boire mais des vulnérabilités génétiques, psychologiques et sociales. Le paradigme épistémologique de la prévention est différent donc de celui des soins alcoologiques aigus. Les processus à l’origine de l’initiation aux alcoolisations ne sont pas, le plus souvent, les mêmes que ceux en jeu dans l’alcoolo-dépendance ni ceux en jeu dans le maintien de la maladie alcoolique et à l’origine des rechutes. Le paradigme épistémologique concernant les demandes des usagers est donc différent de celui concernant les demandes des malades. Le seuil de stimulation et la sensibilité des circuits dopaminergiques, corticotropes et opioïdergiques ne sont pas uniquement révélateurs de la vulnérabilité génétique mais ce sont aussi des corolaires de l’histoire de l’individu (traumatismes, troubles d’attachement). La prise en charge somatique (et la symbolique de maternage qui lui est associée) précède la prise en charge psychologique du comportement, qui de retour doit se référer à la souffrance somatique pour être audible par la patient ; l’approche somatique est souvent à l’origine de l’alliance thérapeutique. La médiation corporelle du soin semble essentielle pour l’entreprise thérapeutique en alcoologie. A l’instar de « l’avance de la parole » avec les patients alexithymiques, une attitude contre-transférentielle positive induit la démarche transférentielle du patient addictif. Ce (l’alcoolisme) qui avait été une maladie (après avoir été un usage) advient par le truchement de sa reconnaissance (alliance thérapeutique), un statu identitaire (être alcoolique). C’est un impératif d’éviter l’infantilisation et la déresponsabilisation du patient et cela constitue une prémisse du travail de re-narcissisation et de revalorisation du patient dans sa quête identitaire. Outre sa fonction narcissisante, l’alliance thérapeutique a également une fonction de « base de sécurité ». Il y a fort probablement une boucle interactive entre troubles d’attachement, défaut de mentalisation et absence d’insight, troubles cognitifs et/ou neuropsychologiques, troubles alexithymiques, inconsistance dans l’alliance thérapeutique et rechutes. Dès lors, démarche psychothérapiques, prise en charge cognitive et processus de resocialisation se croisent et sont interdépendant. Il y a une boucle interactive entre dysfonctionnement identitaire, crainte de la dépendance à autrui, évitement du plaisir partagé et ambivalence de la demande d’aide qui nécessiterait une compréhension psychodynamique du déni alcoolique. La symptomatologie du patient, désigné alcoolique, s’apparente souvent à un dérivatif au service des mécanismes homéostatiques du système familial ; or, souvent le déni de la maladie est partagé par ses proches et la définition du problème à résoudre diffère selon qu’on l’aborde de point de vue du patient, de sa famille ou du soignant. Le contexte des alcoolisations, le contexte familial et autres contextes relationnels, le contexte de judiciarisation et de précarisation, le contexte des comorbidités somatiques et psychiatriques, le contexte des soins sont des médiateurs/modérateurs du comportement addictif et de l’expression clinique de la psychopathologie sous-jacente. Une prise en charge globale s’impose. La maladie alcoolique est chronique et sa construction évolue et se complique avec le temps qui passe ; la maladie alcoolique d’une personne a une histoire (dont la narration est le plus souvent ineffable en début de soins) qui tôt ou tard va supplanter l’histoire du sujet. L’alcoolisme tient, dès lors, lieu d’identité. Penser et organiser une prise en charge thérapeutique pour un patient dépendant présuppose (de façon même implicite) une « modélisation de l’organisation de sa maladie » qui tient compte de l’enchevêtrement des différents dysfonctionnements (défauts d’origine et mécanismes adaptatifs) et par conséquent, une modélisation opératoire des interventions thérapeutiques; nous considérons que cela soit vrai même s’il s’agit d’une intervention monodimensionnelle (traitement médicamenteux uniquement ou psychothérapie seule) puisqu’il est sous-entendu, à tort ou à raison, soit qu’un seul processus dysfonctionnel est en cause dans la souffrance du patient soit que l’équipe soignante (ou le soignant) n’a pas les moyens d’une modélisation plus complexe. Une modélisation n’est pas une explication ! Loin de chercher la théorie apte à expliquer l’origine des manifestations dysfonctionnelles qui se présentent à nous, sous forme de souffrance d’une personne, modéliser consiste à rendre compte de la structure, du fonctionnement et de la temporalité de l’organisation de l’ensemble des manifestations dysfonctionnelles. Nous nous permettons de rappeler un schème général de processus de modélisation. Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique
Une démarche hypothético-déductivo-expérimentale (Whewell) 12/04/2017 Une démarche hypothético-déductivo-expérimentale (Whewell) Interaction entre l’observateur et l’objet (patient et son environnement) Interaction entre les différentes approches épistémologiques (médicale, neuropsychologique, psychanalytiques, cognitive, familio-systémique, sociale) et les données cliniques. Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique
temps du processus de modélisation (Walliser) 12/04/2017 temps du processus de modélisation (Walliser) CHAMPS THEORIQQUE axiomatique MODELE HYPOTHETIQUE CHAMPS EMPIRIQUE manipulation CONFIRME MODELE déduction induction formalisation L’acte de modélisation ne se réduit pas au choix d’un protocole préétablit par un savoir théorique unique. Une interaction permanente s’établit entre la modélisation des dysfonctionnements et la modélisation de l’entreprise thérapeutique à travers une mise en commune des savoirs partiels et un partage des faits et observations cliniques. (a) La modélisation des dysfonctionnements incite à explorer (travail hypothético-déductif) l’évocation d’hypothèses de défauts d’origine personnels et familiaux le développement d’un fonctionnement mental adaptatif la simulation de la « construction à travers le temps et les évènements de vie » de la pathologie addictive et de ses ramifications, le processus de la mise en place d’une organisation alcoolique (système alcoolique) et ses variables d’ajustement pour que ce système perdure dans le temps les mécanismes du maintien de la pathologie addictive et les « lignes de résistance » au changement les personnes ressources et les mécanismes morphogénétiques pouvant favoriser le changement. (b) L’objectif explicite d’une telle démarche est la prise de décisions thérapeutiques et la mobilisation des ressources humaines soignantes de façon coordonnée dans le temps et cohérente par rapport à la complexité que chaque patient présent. La modélisation de l’entreprise thérapeutique (travail expérimental) est cette recherche d’une syntaxe cohérente de l’ensemble des signes, symptômes, actes et actions d’une part et la définition d’objectifs thérapeutiques, graduels et négociables d’autre part. Il en résulte que l’exploration c’est la modélisation. On obtient, alors, une « feuille de route » dont nous pouvons évaluer sa cohérence et sa complétude et qui en cas de difficulté, au long de la prise en charge, peut nous aider à mieux comprendre ce qui s’oppose au changement thérapeutique. description prévision expérimentation Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique
outils du processus de modélisation (Walliser) 12/04/2017 outils du processus de modélisation (Walliser) CHAMPS THEORIQUE MODELE CHAMPS EMPIRIQUE Problématiques épistémologiques Organisation et articulation des données Hypothèses diagnostiques et psychopathologiques Examens cliniques, biologiques, imagerie, tests psy, évaluation sociale etc traitement des informations Dans la mesure de possible, les propositions thérapeutiques concernent tous les niveaux de dysfonctionnement du patient (médical, cognitif, psychologique, relationnel, social) et de son contexte (familial, socioprofessionnel et économique, juridique); dans la mesure de possible, les propositions thérapeutiques s’adressent également aux personnes faisant partie de son contexte (enfants, parents, conjoint, amis). Les limites de chaque intervention (à savoir, l’effet thérapeutique que nous pouvons raisonnablement attendre de chaque intervention) sont envisagées et discutés. Certaines interventions thérapeutiques se font en parallèle mais à des rythmes différenciés et ceci pendant un temps prolongé (psychothérapie individuelle hebdomadaire, suivi alcoologique mensuel, thérapie familiale bimensuelle, participation à des groupe de parole, d’art-thérapie, et des groupes d’entraide); d’autres se succèdent (hospitalisation temps plein, puis postcure, prise en charge des troubles cognitifs, SSRA, puis accueil familial et hôpital du jour). L’implication des soignants dans le système alcoolique devrait modifier son fonctionnement de sorte que le principe organisateur ne soit plus le comportement alcoolique mais l’articulation des soins et leur déploiement dans le temps. Cette transmutation se fait, peu à peu, le long du travail motivationnel et de la négociation de l’alliance thérapeutique: bien que l’alcool soit encore présent, entre abstinence provisoire, tentatives de consommation modérée et rechutes fortes, la personne désigné du système alcoolique et les personnes en relation avec elle ( membres de sa famille, amis, collègues, employeurs, juges, médecin de travail ou de l’assurance malade) prennent en considération les interventions des soignants et leurs engagement…..puis, ils ont tenté d’organisent leurs conduites en fonction du cours des soins. Ce système relationnel mue aussi avec le temps : des personnes partent, des liens rompent, d’autres personnes y entrent et de nouveaux attachements potentiels se profilent. Il n’est pas certain que les soignants soient toujours conscients de ces transmutations et qu’ils cherchent de l’aide auprès de ceux qui deviendraient des personnes-ressources du système thérapeutique. Compte-rendu cliniques, bilan psy, neuropsy et social, Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique
soins Famille d’origine Famille actuelle pairs / société soignants 12/04/2017 Système thérapeutique temps Neuo-physiologie Famille d’origine Fonctions Psycho-dynamiques Fonctions cognitives Famille actuelle Filiation / identification comorbidités conjugalité Contextes d’usage parentalité pairs / société L’alliance thérapeutique mue avec le temps ; au départ, l’alliance thérapeutique se concrétisait dans l’accompagnement du patient alcoolique vers une connaissance des coordonnées de sa maladie et vers « la liberté » qui se conçoit en rapport avec la « contrainte par le corps » (la pulsion alcoolique - « craving ») ce qui implique, dans la très grande majorité des situations cliniques, l’abstinence comme destination ultime de l’entreprise thérapeutique. Toutefois, l’abstinence en tant que objectif thérapeutique n’émerge qu’au bout de plusieurs renégociations au sein de l’alliance thérapeutique, à travers des rechutes et des re-connotations successives des difficultés du patient…..tout cela prend habituellement beaucoup du temps. Avec le temps, l’objectif premier, à savoir « se débarrasser des conséquences de son alcoolisme », se décompose à une multitude d’objectifs partiels en rapport avec les « réalités multiples » de la vie de l’alcoolique. Dès lors, des approches et des pratiques thérapeutiques différentes vont être sollicitées pour y faire face. Le système thérapeutique mue avec le temps : il englobe le patient et les personnes (parents, pairs, soignants) impliquées par sa maladie, il s’organise autour des actions thérapeutiques et des engagements personnels des soignants il est caractérisé par des règles de fonctionnement qui sont au service d’une part de l’objectif thérapeutique et des changements personnels consécutifs et d’autre part des besoins des autres membres de la famille et des exigences de la société. Progressivement nous allons nous trouver bien loin de la pensée opératoire, en train d’expérimenter la pensée réflexive, l’élaboration mentale de ses propres actes, sentiments, émotions, décisions et l’accès, après avoir intégré l’altérité, à la complexité. In fine, l’expérience clinique montre que si le « cap thérapeutique » est tenu, l’abstinence complète ou intermittente est atteinte, à la suite de changements radicaux et irréversibles concernant le contexte des consommations, le fonctionnement familial et le fonctionnement mental du patient. soins soignants Judiciarisation /précarisation Ambivalence / alliance thérapeutique Principe organisateur Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique
Le « système » thérapeutique 12/04/2017 Le « système » thérapeutique L’alliance thérapeutique est destinée à évoluer vers un réseau constitué des thérapeutes, des membres de la famille et des pairs impliqués dans l’accompagnement du patient vers la modération et l’abstinence…. …ce processus implique un changement radical du contexte des consommations, du fonctionnement mental et du fonctionnement familial du patient. Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique - CH4V
L’approche multifocale 12/04/2017 L’approche multifocale …. Traitements psychiatriques Traitements médicaux Thérapies cognitives Thérapies psychodynamiques Déployer dans le temps contenir autonomisation Conjugalité parentalité L’approche multifocale trouve tout son intérêt lorsque nous considérons la prise en charge thérapeutique du système alcoolique comme une transmutation en système thérapeutique. L’acte de modélisations explicite le management, pour rendre pertinentes, des interventions soignantes d’inspirations épistémologiques différentes qui interviennent à des moments différenciés. Contextes de soins Réinsertion réhabilitation Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique coordonner
12/04/2017 Une interrogation active du réel(PIAGET) ….qui n’est pas sans conséquences « Effet de sonde »: modifications du système observé. confrontation de la théorie et de la pratique risque de clivages entre professionnels processus schismogénétique : effets imprévisibles confrontation entre observateurs (cliniciens, soignants, thérapeutes) mise en question du management des soins confrontation entre l’institution soignante et l’entreprise thérapeutique interrogations sur la volonté et la compétence de l’institution. …sur le cours de la maladie Les interventions cliniques, diagnostiques et thérapeutiques, désignent « l’effet de sonde » et modifient sensiblement le fonctionnement du système alcoolique. Les modifications dus à l’effet de sonde se cumulent lors des hospitalisations itératives. Les soignants ont intérêt d’explorer et éventuellement amplifier les changements progressifs induits par l’effet de sonde ; il est souvent plus aisé de les identifier et les évaluer en s’entretenant avec l’entourage du patient. …sur le fonctionnement de l’institution Les tentatives de modélisation de chaque cas clinique est l’occasion pour que la théorie se confronte à l’expérience et à la pratique et il est possible que la pratique remet en question les certitudes de la théorie ou alors, inversement, que la théorie permet de présager les variables « invisibles » du système, en remettant donc en question les techniques de l’approche clinique. Le travail collectif dans la mise en place des réponses thérapeutiques complexes amène les soignants à s’exprimer sur leurs pratiques et à y réfléchir en présence de collègues qui ont des pratiques différentes; un transfert des savoirs a lieu inéluctablement. Cela enrichit la pratique des soignants mais il met en rude épreuve leurs identités professionnelles. La complexité dont relève chaque malade alcoolique et les doutes quant à la pertinence d’une approche scientifique unique sont anxiogènes pour la majorité des soignants. L’approche multifocale est exposée, en permanence, au péril des clivages institutionnels qui sont induits par la mise en question des identités professionnelles des soignants (p.ex. hospitaliers/médicosociaux, médecins /paramédicaux, internistes/psychiatres, psychanalystes/cognitivistes etc….) L’instauration de clivages qui se chronicisent au sein de l’institution soignante aboutira à la paralysie de l’institution qui deviendra de plus en plus « égocentrée » en proie d’un processus schismogénétique ….alors, pour éviter les luttes intestines « suicidaires » les uns vont ignorer les autres et le transfert des savoirs cessera d’avoir lieu. En l’occurrence, il s’agit de pouvoir aborder les questions de l’identité professionnelle au sein de l’institution soignante et promouvoir la production d’un discours issu de la pratique collective « locale » afin que l’institutionnalisation du travail thérapeutique collectif devienne contenante. …sur le management L’ordre institutionnel peut éventuellement être mis en question par ces modélisations parce que la pertinence clinique n’est pas toujours associée à une hiérarchie institutionnelle. De même, l’engagement et l’implication des soignants peuvent être tiédis par des modélisations trop « savantes » qui ne tiennent pas compte du « jeu transférentiel » en cours dans toute relation thérapeutique. Le management des soins exige le respect pour la pertinence apportée, dans chaque prise en charge, par chaque soignant impliqué ; l’incarnation du management maintient la motivation des équipes soignantes. Il faut toujours craindre que la formalisation et la protocolisation des interventions thérapeutiques entame la motivation des soignants en dépersonnalisant leur intervention. …sur l’évolution de la nature de l’alliance thérapeutique Le patient se voit pris dans une toile de relations transférentielles…..avec des « objets partiels ». Cela ne se fait pas naturellement ! Le patient est tenté de cliver, entre les intervenants, pour instaurer un transfert massif, substitut addictif, sur un soignant « isolé » (effet du clivage) qui ne saurait pas comment gérer la situation (crainte de faire ressentir le patient « rejeté »). La prise en charge multifocale rend improbable ces situations. La mise en place de cette toile transférentielle renforce par ailleurs l’alliance thérapeutique en diminuant l’ambivalence de la demande d’aide et elle réduit considérablement le nomadisme thérapeutique. D’autre part, les membres de l’entourage qui se trouvent impliqués dans les soins, établissent également une alliance avec les soignants ; elle prendra éventuellement, pour certains d’eux, la forme d’une relation transférentielle dans un processus thérapeutique. C’est donc la nature de l’alliance thérapeutique qui évolue vers un système de relations entrecroisées de confiance, qui ont fonction de vecteurs de demandes d’aide. Nous pouvons considérer qu’il s’agit alors d’un phénomène d’affiliation du patient et des membres de sa famille à l’institution soignante. Dr Vanghelis Anastassiou - Service de Médecine Addictologique