La précontrainte dans les ouvrages d’art
La précontrainte : qu’est-ce que c’est ? Connaissez-vous l’histoire de la précontrainte ? Le béton précontraint : comment ça fonctionne ? Quels sont les types de précontrainte ? Quels ponts sont précontraints ? Quelles portées peut-on atteindre ? Quel est le cadre réglementaire en précontrainte ? Quelques ressources complémentaires…
La précontrainte : qu’est-ce que c’est ? En comprimant suffisamment toute une rangée de livres, on parvient à les déplacer. On comprime les différents éléments de façon à rendre l’ensemble résistant. C’est le principe de la précontrainte
Un petit peu d’histoire… L’origine de la précontrainte L'idée de précontrainte a germé dans l'esprit d'Eugène Freyssinet (1879-1962) pour la première fois en 1903. Trois ans plus tard, une circulaire reconnaît au béton des propriétés élastiques jusqu'alors réservées à l'acier. L'aventure de la précontrainte peut commencer... Il faut pourtant attendre 1928 pour que le système de précontrainte aboutisse réellement à un brevet déposé par Freyssinet : le " Procédé de fabrication de pièces en béton armé ". Le terme "précontrainte" n'apparaîtra qu'en 1932. Photo structurae.de
Un petit peu d’histoire… En 1934, Freyssinet démontre de manière spectaculaire l'intérêt de la précontrainte en réussissant la consolidation de la gare maritime du Havre dont les fondations se tassaient et qui menaçait de s’effondrer.
Un petit peu d’histoire… L’essor de la précontrainte A partir de 1938, Freyssinet réalisera les premiers ponts précontraints. Mais ceux-ci, du fait d’une trop faible inertie et donc de leur sensibilité aux vibrations, ont tous mal vieilli. En 1943, Edme Campenon crée la Société Technique pour l’Utilisation de la Précontrainte (STUP) afin de permettre à Freyssinet de profiter de l’ensemble des chantiers Campenon-Bernard pour appliquer et développer encore ses travaux de recherche. L’objectif de STUP qui signera l’expansion de la précontrainte dans les années 60 est de faire connaître la précontrainte et ses applications aux maîtres d'ouvrage, fabriquer les matériels et matériaux de précontrainte et fournir l'assistance technique sur chantier. En 1976, STUP, pour marquer son ouverture internationale et rendre hommage à l’homme dont elle continue l’œuvre, devient Freyssinet International (STUP), puis Groupe Freyssinet aujourd’hui.
Principe de fonctionnement du béton précontraint « Le béton précontraint est un béton comprimé par des câbles tendus » Le béton est un matériau qui résiste bien à la compression, mais mal à la traction. Simulation de comportement d’un ouvrage en béton pur Traction = action mécanique qui tend à allonger le corps sur lequel elle s’applique Compression = action mécanique qui tend à raccourcir le corps sur lequel elle s’applique Il s’agit donc de comprimer le béton suffisamment pour qu’en tous les points de l’ouvrage, les compressions soient supérieures aux tractions qui se développeront ultérieurement. La compression préalable du béton est la « précontrainte ». L’intensité de la précontrainte à mettre en œuvre dépend évidemment des efforts de traction auxquels il faudra s’opposer.
Principe de fonctionnement mécanique L’ouvrage précontraint est dans sa position initiale : la tension des câbles se reporte sur le béton, ce qui provoque un raccourcissement de la partie inférieure et par là même une cambrure vers le haut. Plus la charge augmente, plus la cambrure diminue. Avec l’augmentation des charges, l’ouvrage peut supporter une légère incurvation vers le bas. Aucune fissure n’apparaîtra aussi longtemps que la partie inférieure restera en compression. L’ouvrage reprend sa position initiale lorsqu’on supprime les charges appliquées.
Les types de précontrainte La mise en tension des câbles peut intervenir : - avant le bétonnage de l’ouvrage, c’est la pré-tension - ou après le bétonnage, lorsque le béton a atteint une résistance donnée, c’est la post–tension.
Les types de précontraintes : Pré-tension à fils adhérents C’est le mode de précontrainte breveté en 1928 par Freyssinet on tend préalablement les armatures en acier entre deux points fixes (culées) on bétonne autour de ces armatures tendues on relâche la tension aux appuis une fois le béton durci La mobilisation de la précontrainte se fait par l’adhérence entre l’acier et le béton.
Les types de précontraintes : Précontrainte intérieure par post-tension Gaines Les câbles de précontrainte sont enfilés dans des gaines mises en œuvre lors du ferraillage de l’ouvrage, et noyées dans le béton. La précontrainte est mobilisée par la circulation de câbles dans la structure. Il n’y a pas d’adhérence béton/câble comme dans la pré-tension. Images Diwidag Systems International Droits ??? Vérin Câbles Une fois atteinte une résistance satisfaisante du béton, ces câbles sont tendus par des vérins, puis coincés en position tendue par des systèmes d’ancrage. La protection des câbles contre la corrosion se fait par injection d’un coulis de ciment à l’intérieur des gaines, une fois les câbles en place.
Les types de précontraintes : Précontrainte extérieure par post-tension Après le coulage et le durcissement du béton, les câbles de précontrainte sont insérés dans des gaines extérieures au béton. Les extrémités de ces câbles traversent des dispositifs de blocage placés aux deux abouts de l’ouvrage. Ces dispositifs de blocage des câbles sont des cônes d’ancrage ou des plaques métalliques percées de trous coniques. On installe ensuite des vérins hydrauliques de mise en tension à l’une ou aux deux extrémités des câbles. Les câbles sont mis en tension à l’aide des vérins qui prennent appui sur le béton de la poutre. Lorsque la tension et l’allongement désirés sont obtenus, on bloque les câbles avec les dispositifs installés aux abouts de la poutre. Les vérins sont ensuite démontés et du coulis de ciment est injecté dans les gaines pour protéger les câbles de la corrosion. Précontrainte extérieure, photo Diwidag systems international Plaque ancrage VSL
Types de ponts : Pont dalle précontrainte Les Passages Supérieurs ou Inférieurs en Dalle Précontrainte (PSI-DP) sont constitués d’une dalle précontrainte longitudinalement et armée transversalement, de hauteur constante. La section transversale comprend généralement des encorbellements. Les ouvrages sont coulés sur cintre. Dans certains cas particuliers, ils peuvent être mis en place par poussage. Ils peuvent être constitués de 2, 3 ou 4 travées, selon les caractéristiques de la voie à franchir et le biais de franchissement.
Types de ponts : Pont dalle précontrainte Pont de Bettel-Roth (Luxembourg) Viaduc de la ravine de l’Hermitage (Ile de la Réunion) (photos structurae.de)
Types de ponts : Pont dalle nervurée précontrainte Leur construction ne peut se faire que sur cintre, coulé en place. Viaduc de Mesnil-le-Roi (photos structurae.de)
Types de ponts : Pont à poutres précontraintes par adhérence (PRAD) Coupe type d’un pont routier PRAD Les tabliers des ponts PRAD (PRécontrainte par ADhérence) sont constitués de poutres préfabriquées précontraintes par pré-tension. La précontrainte des poutres est assurée par des torons mis en tension avant bétonnage (pré-tension), puis relâchés dès que le béton a acquis une résistance suffisante (de l’ordre de 30 MPa). Les poutres, régulièrement espacées (entraxe de l’ordre de 1 m), sont solidarisées par une dalle coulée en place sur des coffrages perdus. Poutres précontraintes
Types de ponts : Poutres précontraintes par adhérence (PRAD) Les poutres sont préfabriquées en usine et mises en place par des moyens de levage légers. Les entretoises et le hourdis sont coulés en place en une seule phase. Solution adaptée à des travées de longueur sensiblement égales Atouts : solution adaptée au franchissement réalisé sous circulation Diminution des travaux sur site LGV Est-Européenne, Annet sur Marne Photos structurae.de Viaduc de la Thérouanne
Types de ponts : Viaducs à travées indépendantes à poutres précontraintes (VIPP) Les tabliers des Viaducs à travées Indépendantes à Poutres Préfabriquées (VIPP) sont constitués de poutres précontraintes par post-tension de hauteur constante, solidarisées entre elles par des entretoises d’abouts et une dalle supérieure coulée en place en béton armé ou précontrainte transversalement. Les poutres ont un espacement de l’ordre de 3 à 4 mètres. Le hourdis peut être coulé entre les tables de compression des poutres (hourdis intermédiaire), ou par-dessus les tables (hourdis général). Les poutres sont généralement mises en oeuvre à l'aide d'une "poutre de lancement"
(poutres en T préfabriquées avec tablier coulé en place) Types de ponts : Viaducs à travées indépendantes à poutres précontraintes (VIPP) Les poutres sont généralement préfabriquées sur site et lancées à l’aide d’une poutre de lancement ou par des moyens de levage. Les entretoises et hourdis sont coulés en place. C’est une solution adaptée principalement à des franchissements rectilignes Atouts : ouvrage adapté au franchissement de brèches importantes en sites difficiles d’accès Mode de construction ne nécessitant pas de coffrage prenant appui sur le sol Viaduc de Pont d’Ouche (poutres en T préfabriquées avec tablier coulé en place)
Types de ponts : Viaducs à travées indépendantes à poutres précontraintes (VIPP) PONT DE SAINT NAZAIRE Les viaducs d’accès en béton comportent 22 travées au nord et 30 travées au sud. Chaque travée de 50,70 mètres de portée est constituée de quatre poutres en béton précontraint de 2,80 m de hauteur, de 3,00m de largeur de table, solidarisées par un hourdis et des entretoises aux extrémités. Les travées sont « attelées » entre elles, longitudinalement, par groupe de quatre au niveau du hourdis. Les poutres reposent sur les chevêtres situés en tête de pile par l'intermédiaire d'appareils d'appuis. La pente longitudinale atteint localement 5,6%. Les poutres de 190 tonnes ont été fabriquées en rive et mises en place à l'aide d'un lanceur couvrant deux travées. Elles ont été solidarisées transversalement par un hourdis de 0,50m entre tables. Photos structurae.de
Types de ponts : pont-caisson construit en encorbellement Pont de l’Ile de ré Le Pont en poutre-caisson ou pont en caisson est un type d'ouvrage dont la rigidité à la torsion est assurée par un tablier constitué d'un ou plusieurs caissons creux. Les caissons peuvent être mis en œuvre par encorbellement. Cette méthode consiste à ériger l'ouvrage symétriquement en porte à faux à partir des piles, par tranches successives appelées voussoirs, coulés en place ou préfabriqués, la stabilité étant assurée par la mise en tension successive des câbles de précontrainte, ancrés à l'extrémité de chaque voussoir.
Gamme des portées Type d’ouvrage Portée minimale Portée courante Portée maximale Ponts dalles précontraintes PSIDP Dalle rectangulaire 14 m 14 à 20 m 25 m Dalle à larges encorbellements 15 m 18 à 25 m 30 m Dalle poussée 10 à 20 m Ponts dalle nervurée précontrainte Hauteur constante - 25 à 30 m 40 m Hauteur variable 35 à 45 m 50 m Ponts à poutres PRAD Pré-tension 10 m 15 à 25 m VIPP Post-tension
Cadre réglementaire Eurocode 2 : les règles générales de calcul des structures en béton sont décrites dans l’Eurocode 2; Fascicule du CCTG La conception et l’exécution des ouvrages en béton précontraint sont soumis au fascicule 65A du CCTG Normes Chaque constituant des dispositifs de précontrainte (câbles, gaines,…) doit répondre à des normes spécifiques
Ressources complémentaires Freyssinet www.freyssinet.com SETRA (Service d’Etudes sur les Transports, les Routes et leurs aménagements) www.setra.fr VSL International Ltd www.vsl.com