Jeudi, le premier Jeudi-Saint. Celui où tout finit, celui où tout commence… Les apôtres, les hommes, la terre même semblent suspendus, arrêtés, dans l’indécision et le désarroi. Tout va s’écrouler. Déjà l’annonce de la Passion prochaine, même si elle n’a pas été pleinement comprise, mine les esprits et assombrit les cœurs. Et voilà que Jésus, lui qu’ils appellent Seigneur et Maître, comme pour confirmer la chute et la déchéance prochaine, accomplit un acte inconcevable dans l’esprit de l’époque, un acte qui incombe, dans les grandes maisons, au plus vil des esclaves, mais qu’un esclave de rang normal se refuse à faire : il lave les pieds de ses apôtres. C’était, certes, une mesure absolument indispensable dans ce pays aux chemins poussiéreux, où l’on allait pieds-nus dans de petites sandalettes, car le repas se prenait à moitié allongé sur des divans d’apparat, disposés tout autour de la table. Mais pas lui ! Pas le Maître !
Et voilà que Jésus calmement se relève. Il pose les linges qu’il a utilisés, se rassied, et promène un regard pensif sur les apôtres : il les voit encore stupéfaits et ébahis, mais qui n’ont pas saisi le sens profond de ce geste. Pour Jean, l’apôtre bien-aimé, ce geste est plus important, plus par- lant, que l’institution de l’Eucharistie. Pour Jean, ce qui compte ce soir-là, c’est ce geste incompréhensible, impensable, et la leçon qui en découle. Pour Jean, qui semble plus que tout autre avoir saisi le sens des messages de son Seigneur, ce qui compte, c’est la cause- rie où le Christ résume et approfondit tout à la fois ce qu’il a essayé d’insuffler à ses disciples, à ceux qui le suivaient, aux fou- les rencontrées. Nous lisons ou écoutons souvent cet entretien suprême de Jésus avec ses apôtres ce soir-là par petits bouts, lorsque l’Eglise nous en offre un extrait lors des différentes célébrations. Je voudrais lui restituer un peu de sa force. Je voudrais qu’il nous pénètre, qu’il nous imprègne, qu’il nous possède.
Alors, en cette journée du Jeudi-Saint, asseyons-nous, nous aussi, autour de la table. Ecoutons avec notre cœur les paroles que Jésus dit, ces paroles qu’il a dites ce soir- là pour chacune et chacun de nous. Laissons l’esprit agir en nous, laissons-nous pénétrer par le sens de ces mots trop souvent rabâchés. Retrouvons leur nouveauté, laissons-nous surprendre ! CHUT ! Ecoutons ! Jésus nous parle…
Je vous donne un commandement nouveau : aimez-vous les uns les autres. Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres. À ceci, tous vous reconnaîtront comme mes disciples : à l’amour que vous aurez les uns pour les autres. Que votre cœur ne se trouble pas : vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi. Dans la maison de mon Père, il y a beaucoup de demeures ; sinon, vous aurais-je dit que j’al- lais vous préparer le lieu où vous serez ? Lorsque je serai allé vous le préparer, je reviendrai et je vous prendrai avec moi si bien que là où je suis, vous y serez aussi. Quant au lieu où je vais, vous en savez le chemin !
Je suis le chemin et la vérité et la vie. Personne ne va au Père si ce n’est par moi. Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. Dès à présent vous le connaissez et vous l’avez vu. Philippe lui dit : Seigneur, montre-nous le Père, cela nous suffit. Jésus lui dit : Je suis avec vous depuis si longtemps, et cependant, Philippe, tu ne m’as pas reconnu ! Celui qui m’a vu a vu le Père. Pourquoi dis-tu : montre-nous le Père ? Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ? Les paroles que je vous dis, je ne vous les dis pas de moi-même. Au contraire, c’est le Père qui, demeurant en moi, accomplit ses propres œuvres.
Si vous m’aimez, vous vous appliquerez à observer mes commandements ; moi, je prierai le Père : il vous donnera un autre Paraclet qui restera avec vous pour toujours… Je ne vous laisserai pas orphelins, je viens à vous ; encore un peu et le monde ne me verra plus. Vous, vous me verrez vivant et vous vivrez vous aussi. En ce jour-là, vous connaîtrez que je suis en mon Père et que vous êtes en moi et moi en vous ; celui qui a mes commandements et qui les observe, celui-là m’aime ; or celui qui m’aime sera aimé de mon Père et moi aussi je l’aimerai ; je me manifesterai à lui. Si quelqu’un m’aime, il observera ma parole et mon Père l’aime- ra ; nous viendrons à lui, et nous établirons chez lui notre demeure.
Celui qui ne m’aime pas n’observe pas mes paroles ; or, cet- te parole que vous entendez, elle n’est pas de moi mais du Père qui m’a envoyé. Je vous ai dit ces choses tandis que je demeurais auprès de vous ; le Paraclet, l’Esprit-Saint que le Père enverra en mon nom vous enseignera toute chose et vous fera ressouvenir de tout ce que je vous ai dit. Je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix. Ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne. Que votre cœur cesse de se troubler et de craindre. Vous l’avez entendu, je vous ai dit : je m’en vais et je viens à vous. Si vous m’aimiez vous vous réjouiriez de ce que je vais au Père, car le Père est plus grand que moi.
Je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron. Tout sar- ment qui, en moi, ne porte pas de fruit, il l’enlève, et tout sar- ment qui porte du fruit, il l’émonde, afin qu’il en porte davan- tage encore. Déjà vous êtes émondés par la parole que je vous ai dite. Demeurez en moi comme je demeure en vous ! De même que le sarment, s’il ne demeure sur la vigne, ne peut de lui-même porter du fruit, ainsi vous non plus si vous ne demeurez en moi. Je suis la vigne, vous êtes les sar- ments ; celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui- là portera du fruit en abondance, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est jeté dehors comme le sarment, il se dessèche, puis on les ramasse, on les jette au feu, et ils brûlent.
Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, vous demandez ce que vous voudrez, et cela vous ar- rivera. Ce qui glorifie mon Père, c’est que vous portiez du fruit en abondance et que vous soyez pour moi des disciples. Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés ; De- meurez dans mon amour. Si vous observez mes commande- ments, vous demeurerez dans mon amour, comme, en ob- servant les commandements de mon Père, je demeure dans son amour. Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que vo- tre joie soit parfaite. Voici mon commandement : aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés.
Souvenez-vous de la parole que je vous ai dite : "Le serviteur n’est pas plus grand que son Maître." S’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront vous aussi ; s’ils ont observé ma parole, ils observeront aussi la vôtre C’est votre avantage que je m’en aille ; en effet, si je ne pars pas, le Paraclet ne viendra pas à vous ; si, au contraire, je pars, je vous l’enverrai. Et lui, par sa venue, il confondra le monde en matière de péché, de justice et de jugement. En matière de péché : ils ne croient pas en moi. En matière de justice : je vais au Père et vous ne me verrez plus. En matière de jugement : le prince de ce monde a été jugé.
J’ai encore bien des choses à vous dire, mais vous ne pouvez les porter maintenant ; lorsque viendra l’Esprit de Vérité, il vous fera accéder à la vérité toute entière. Car il ne parlera pas de son propre chef, mais il dira ce qu’il entendra, et il vous communiquera tout ce qui doit venir. Il me glorifiera car il recevra ce qui est à moi, et il vous le communiquera. Tout ce que possède mon Père est à moi ; c’est pour- quoi j’ai dit qu’il vous communiquera tout ce qu’il reçoit de moi. Jean, larges extraits de 13 à 16
Voila donc de très larges extraits du dernier enseignement de Jésus. Nous l’avons lu, mais l’avons-nous intériorisé ? Jésus, c’est pourtant toi qui me parlais, qui parlais à mon cœur… Jésus, permets à mon esprit de goûter toute la saveur de cet enseignement…
Traduction de la TOB Photos de sources diverses, libres de droit. Musique : Grégorien par les Moines de Solesmes – Meine Jesu BWV 487 Diaporama de Jacky Questel, ambassadrice de la Paix Site :