Je vous l’avais promis : en même temps que les troupeaux, nous montons pour l’estive. L’estive, c’est quatre, cinq mois tout seul là-haut avec son chien et ses bêtes. Et c’est loin ! et c’est haut ! Il ne faut rien oublier… Actuellement, cependant, on peut louer les services d’un hélicoptère. On prépare un énorme ballot qui est accroché au bout de l’élingue, et en route ! Enfin… En l’air !

Dans le village encore endormi, on entend des sifflets, des sons de cloches, des aboiements, des bêlements, des piétinements. Dès potron-minet, le troupeau se met en route. Les sonnailles résonnent entre les murs des maisons. Les fenêtres s’ouvrent, les gens s’apostrophent : « Bonne route ! » « Ne t’ennuie pas ! » Les ânes suivent avec le chargement (et il y en a des choses à amener !) et les chèvres caracolent en tête. Les chiens excités ne savent plus où donner de la voix !

Les villages sont traversés, le jour s’est levé, on attaque la montée. Oui mais… l’herbe des bas-côtés est bien tentante… et les moutons ont tendance à s’égayer… Il faut que les chiens aient l’œil partout… et les bergers aussi ! Car ils sont plusieurs pour ce convoyage : les enfants notamment prennent cela très au sérieux, et c’est pour eux une véritable fête !

Qu’il est bon de traverser les feuillus, alors que le soleil commence à chauffer et que l’on est en marche déjà depuis plusieurs heures… Mais le chemin devient sentier, rocailleux, étroit, escarpé parfois… et le ruban de laine ambulant s’étire et ondule…

La halte du casse- croûte est la bienvenue, autant pour les animaux que pour les hommes !

Mais lorsqu’on arrive enfin, alors que la brume du soir commence à voiler la montagne, quelle récompense ! Où trouver si beau paysage ? Et comme l’on respire bien, là-haut ! Cet air pur, vivifiant, chargé de mille fragrances subtiles…

Sur les versants moins exposés au soleil, la neige est encore présente, et l’herbe n’a pas reverdi. Mais le cercle des montagnes familières semble protéger troupeaux et pasteurs… Une telle beauté coupe le souffle.

Les vaches aussi montent à l’estive. Leurs cloches sont plus grosses que celles des moutons, et chaque mouvement des bêtes lance dans l’air cristallin des montagnes un carillon que chacun connaît et reconnaît. Le choix d’une cloche est chose sérieuse et de longue haleine. Il faut voir le berger choisir une nouvelle cloche ! D’après le son, d’abord, mais aussi la forme, les dessins gravés… Une cloche abîmée est portée à réparer, même si la réparation doit être aussi onéreuse que l’achat d’une nouvelle cloche, car le son de chacune, dans l’harmonie du troupeau, est irremplaçable…

Les chevaux, eux aussi, ont repris des forces. Ils repartiront vers la vallée, ramenant les convoyeurs. Mais on trouve aussi des troupeaux de chevaux en parfaite liberté. Si vous arrêtez votre voiture pour les admirer, il est possible que l’un d’eux vienne cogner la vitre du museau pour quémander un peu de pain…

Et le berger reste seul, dans toute cette beauté et toute cette solitude… Avec de temps en temps une visite imprévue, comme celle de cet isard… Et coulent les jours…

Mais ne croyez pas que ce sont des jours de rêve et de flânerie ! Dans mon troisième diaporama sur ce sujet, je vous partagerai la fabrication du fromage. Au fait ! L’avez-vous goûté ? Notre fromage des Pyrénées, avec un peu de vin de Jurançon ou de Madiran… Je ne vous dis que ça !!! Et n’oubliez pas de trinquer à ma santé !!!

Photos : J.M. De Faucompret, que je remercie pour son autorisation. Texte : Jacky Musique : « Adishatz » (Au revoir) chant béarnais par le groupe « Los de l’Ouzoum » Diaporama de Jacky Questel, ambassadrice de la Paix Site :