Histoire de la Russie : des origines à la révolution Quatrième cours : En attendant Pierre (1613-1689)
Plan de cours 1 – Le règne de Michel (1613-1645) 2 – Évolution du système 3 – Le règne d’Alexis (1645-1676) 4 – Politique étrangère 5 – Le XVIIe siècle dans l’histoire russe 6 – En attendant Pierre
Michel 1er Romanov (1613-1645)
1 – Le règne de Michel (1613-1645) 1.1 – L’élection au trône de Michel Romanov Difficile de trouver un candidat acceptable : beaucoup de familles se sont discréditées pendant les troubles. Le choix se porte sur Michel Romanov : il est jugé « faible », sa famille n’est pas compromise, il est lointainement apparenté à la dynastie des Rurikides.
1.2 – Politique étrangère En 1613, le pays est partiellement occupé par la Pologne et la Suède. 1617 – Guerre russo-polonaise. Échec de Ladislas devant Moscou 1632 – Nouvelle guerre russo-polonaise pour reprendre Smolensk. Échec de la tentative. La paix est signée en 1635 et la Pologne renonce à ses prétentions au trône moscovite
Avec la Suède, la situation est plus simple Avec la Suède, la situation est plus simple. La paix est signée en 1617, la Moscovie renonce à ses prétentions sur les rives de la Baltique, mais récupère Novgorod. 1637-1642 : conflit avec les Turcs concernant la forteresse d’Azov. Poursuite de la colonisation de la Sibérie. La Lena est atteinte dans les années 20, Iakoutsk dans les années 30 et le cours supérieur de l’Amour en 1643.
1.3 – Politique intérieure : Dans un premier temps, jusqu’au retour de Philarète, le Zemski Sobor sera transformé en assemblée permanente. Première tâche : restaurer la sécurité sur le territoire. L’impôt est difficile à percevoir : la population est appauvrie et ceux qui disposent de richesses refusent de s’en départir. La couronne aura recours à des prêts auprès de l’étranger.
- Le retour de Philarète entraîne une période de réforme. Création de nouveaux impôts, entraînant le mécontentement de la population et mettant le trône en danger. Détérioration de la condition paysanne Restauration des traditions religieuses, affectées par les Troubles. Arrivée des premiers étrangers en Moscovie. Établissement d’un embryon de secteur industriel. Fondation de la première usine métallurgique en 1623 ; verrerie fondée en 1634.
2 – Évolution du système 2.1 – Système politique Deux périodes : avant et après le retour de Philarète. Avant : l’Âge d’or (le champ du cygne ?) des boyards, qui gouvernent avec le tsar. Importance aussi du Zemski Sobor Après : Le père du tsar, très respecté, prendra éventuellement le titre de souverain. Il affaiblit la Douma des Boyards et le Zemski Sobor.
2.2 – Le servage La tendance observée depuis Ivan III s’accentue. L’Oulojenie (1649), élaboré sous Michel, est considéré comme l’acte fondateur du servage. Extension à perpétuité de la période d’appartenance d’un serf fugitif à son maître. Réaffirmation des années d’interdiction. Dès lors, celui qui naît serf le demeurera toute sa vie.
Alexis 1er le Très Paisible (1645-1676
3 – Le règne d’Alexis (1645-1676) 3.1 – Politique intérieure 3.1.1 – Reconstruction de l’autorité centrale Retour graduel à la centralisation Effacement du rôle du Zemski Sobor (et de ses équivalents locaux, les zemstvos). Perte de pouvoir des boyards Réforme des prikazes, qui accroît les pouvoirs du centre
3.1.2 – Le schisme Événement d’abord religieux, les implications du schisme seront aussi politiques. Deux problèmes soulevés : la modernisation de l’État et le rôle de l’Église dans l’État. Origines des réformes : le désir de « corriger » les pratiques du culte et d’uniformiser ce dernier, en révisant les textes liturgiques. C’est le Patriarche Nikon qui en sera le maître d’œuvre. Le processus débute en 1553.
Le patriarche Nikon
Se dresse contre lui le protopope Avvakoum (1621-1683), qui s’oppose à cette révision, influencée à ses yeux par l’étranger. Le mouvement prend rapidement de l’ampleur, entre autres à cause de la personnalité de Nikon, très autoritaire. Le concile de 1656 condamne les opposants et consacre paradoxalement la chute de Nikon. Cela n’empêchera pas le développement du mouvement des vieux-croyants. La crise est politique : elle met en opposition les partisans de la modernisation et ceux de la tradition.
L’exécution de la boyarina morozova (Vassili Sourikov)
3.2 – Agitation sociale Époque très agitée. La population se soulève dans les villes (impôts) et dans les campagnes (conditions de vie) 3.2.1 – Les insurrections urbaines 1648 : émeutes du sel 1662 : émeutes du cuivre
3.2.2 – L’insurrection paysanne de Stenka Razine (1670-1671) L’ampleur du mouvement s’explique par le degré d’exaspération de la paysannerie, augmenté de la crise liée au schisme. L’initiateur en est Stenka Razine, un cosaque du Don. Suivant un modèle récurrent, il se prétendra héritier légitime du trône. La révolte touchera le Don, la Volga et l’Oural, avec des échos jusqu’en Ukraine. L’armée de Razine sera défaite à Simbirsk en 1671, Razine exécuté en juin de cette année.
Stenka Razine
La campagne de Razine
4 – Politique étrangère 4.1 – Le rattachement de l’Ukraine À la suite de l’Union de Lublin, la tolérance religieuse des Lituaniens sur leurs territoires disparaît, suscitant le mécontentement des populations ukrainiennes. Un détail qui met le feu aux poudres : Bogdan Khmelnitski rallie à lui la cosaquerie pour se venger d’une offense qui lui a été faite par un seigneur polonais. Il part en campagne en 1648.
Bogdan Khmelnitski
Lettre des cosaques au Sultan (Ilya Repine)
Annexion de l’Ukraine de l’est
Malgré ses succès, il regagne l’Ukraine Malgré ses succès, il regagne l’Ukraine. L’année suivante, la Pologne tente de récupérer ses territoires. La paix qui s’ensuit fait de Khmelnitski hetman à vie, mais ne résout pas le problème des conditions de vie de la paysannerie. La Diète rejette l’accord, la Pologne repart en guerre en 1650 et remporte la victoire. Khmelnitski se tourne vers Moscou. Après hésitations, le tsar se porte à la défense des Cosaques, impose un ultimatum à la Pologne et attend la guerre.
Octobre 1653 : le Zemski Sobor approuve le rattachement de l’ukraine. 8 janvier 1654 : le traité d’union est signé à Pereslav. La Petite-Russie (la rive-gauche du Dniepr) devient pour Moscou sa vassale. Mais pas pour les Cosaques, qui y voient une union entre égaux. La guerre russo-polonaise qui s’ensuit est favorable à Moscou. Mais la Suède entre alors en guerre. La paix est signée avec la Pologne en 1656.
Mais la tension monte entre Moscou et les cosaques, qui se tournent vers la Pologne : le 6 septembre 1658, la Rada vote en faveur d’un accord avec la Pologne. Cela provoque une nouvelle guerre russo-polonaise, qui tourne mal pour Moscou. La paix est signée avec la Suède en 1661, puis avec la Pologne en 1667. La Moscovie garde le contrôle de la rive est du Dniepr, mais devra attendre le siècle suivant pour contrôler la rive ouest.
4.2 – Expansion orientale : L’expansion dans l’est se poursuit : le Baïkal est atteint, puis le cours inférieur de l’Amour. C’est sous Alexis que se met en place la système de colonisation de la Sibérie. À la fin du siècle, 11 millions de personnes habiteront de l’autre côté de l’Oural, surtout des indigènes, qui se russifieront cependant peu à peu.
Expansion orientale
5 – Le XVIIe siècle dans l’histoire russe Période charnière de mutation de la Moscovie en Russie. Le siècle se conclut à l’inverse des attentes : loin de se réduire, le pouvoir central se renforce. Apparition de la société civile dans le processus politique. Il s’agit d’un siècle d’incubation : se mettent discrètement en place les conditions de la transformation du pays. Pierre peut arriver.
6 – En attendant Pierre 2.1 – Le règne de Fiodor III (1676-1682) Règne calme et court, comme celui de son homonyme au siècle précédent. Fiodor est mou et faible, ce qui provoque comme d’habitude une recrudescence des luttes intestines. Néanmoins : guerre russo-turque (1677-1681) ; exécution d’Avvakoum, premier heurts russo-chinois, abolition « officielle » du mestnitchestvo
Fiodor III (1676-1682)
2.2 – La crise de succession, la régence et l’enfance de Pierre Le 30 mai 1672, la seconde épouse d’Alexis donne naissance à Pierre. Il vient tardivement dans l’ordre de succession : ses frères Fiodor et Ivan, (ainsi que ses nombreuses sœurs) le précèdent. C’est le début du « facteur féminin » dans l’histoire russe : moderniste, Alexis voudra donner à ses filles une bonne éducation. L’une d’entre-elles, Sophie, s’imposera.
La régente Sophie et son favori, Golytsine
À la mort de Fiodor, le choix se porte sur Pierre, Ivan étant maladif À la mort de Fiodor, le choix se porte sur Pierre, Ivan étant maladif. Il est couronné le 27 avril 1682. Mais Sophie ne l’entend pas ainsi : elle parvient à imposer un compromis, un duumvirat, avec elle comme régente jusqu’à la majorité de ses frères. Elle dirigera le pays entre 1682-1689, avec son favori, le prince Golytsine. Période intéressante : les idées des régents pavent la voie au règne de Pierre. Pendant ce temps, éloigné des centres de pouvoir, Pierre fait son éducation en autodidacte.
Il s’intéresse plus aux techniques qu’aux sciences théoriques. Il créé ses « régiments pour rire », embryon de sa future armée, découvre la navigation et fréquente les étrangers. En 1689, Pierre devient majeur en se mariant. Sophie tente de s’opposer et elle fomente un coup d’État avec l’aide des streltsy. C’est un échec : Sophie est cloîtrée dans un monastère ; le règne de Pierre commence (même si il partagera théoriquement son pouvoir avec Ivan jusqu’à la mort de celui-ci en 1696)