Colloque organisé par le Centre de droit JuriSanté du CNEH

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Transcription de la présentation:

Colloque organisé par le Centre de droit JuriSanté du CNEH

La responsabilité du directeur d’hôpital Regards sur l’actualité juridique et les risques encourus Intervenants: Claudine B-Esper, Professeur à la faculté de droit de l’Université René Descartes (Paris V), Directeur du Centre de droit JuriSanté du CNEH Sanaa Marzoug, Directeur d’hôpital, Consultante au Centre de droit JuriSanté du CNEH Stéphanie Ségui-Saulnier, Juriste, Consultante au Centre de droit JuriSanté du CNEH

Pour les hôpitaux public, « le directeur représente l’établissement en justice, dans tous les actes de la vie civile… Il assure la gestion et la conduite générale de l’établissement, et en tient le conseil d’administration informé…  A cet effet, il exerce son autorité sur l’ensemble du personnel dans le respect des règles déontologiques ou professionnelles qui s’imposent aux professions de santé, des responsabilités qui sont les leurs dans l’administration des soins et de l’indépendance professionnelle du praticien dans l’exercice de son art» (art. L. 6143-7 CSP)

Le directeur est ainsi responsable du bon fonctionnement de l’établissement dont il a la responsabilité. Il est donc susceptible, plus que quiconque, d’engager sa responsabilité, notamment en raison de la sécurité.

Une telle responsabilité, Dans quels domaines ? Sur quelles bases ? Avec quelles limites ?

Quelles sont les différentes responsabilités en établissement de santé ? Stéphanie SEGUI-SAULNIER

La responsabilité civile ou administrative a pour objet l’indemnisation de la victime par le responsable La responsabilité pénale vise le prononcé d’une peine à l’encontre de l’auteur des faits, reconnu coupable d’une infraction La responsabilité disciplinaire se prononce sur l’aspect professionnel des fautes

La responsabilité déontologique vaut pour les professionnels liés à un ordre La responsabilité financière ne vaut que pour les gestionnaires des établissements

réparatrice  punitive  administrative  pénale  civile  disciplinaire  déontologique  financière

Nombre de contentieux par an, toutes juridictions confondue 6 à 7000 (2003) Claudine ESPER

Quelle responsabilité indemnitaire pour l’établissement et le directeur ? La jurisprudence la plus récente Claudine ESPER

Avant tout un rappel Le directeur, quelque soit la nature de l’établissement qu’il dirige, est salarié. Il est couvert par son employeur au plan de la réparation civile. Seul l’établissement est tenu des dommages et intérêts (cas exceptionnel vu plus tard, la faute personnelle)

Cela vaut Pour l’hôpital public Pour les ps-ph Pour les cliniques privées

Le juge administratif est seul compétent pour les actions en réparation concernant l’hôpital public Le juge civil est compétent pour ces actions, dirigées contre un établissement privé

En matière hospitalière et médicale, la loi du 4 mars 2002 a mis en place, dans notre pays, un nouveau régime de responsabilité civile, applicable à tous les établissements et tous les acteurs de santé.

Ce régime ne vise pas la responsabilité pénale (sauf quelques points qui seront vus plus loin)

Pourquoi un nouveau régime en responsabilité civile ? Pas de réelle conciliation Difficulté des expertises Lenteur et coût des actions devant les juridictions Deux ordres de juridictions : quelques jurisprudences divergentes

La loi Pose de nouveaux principes de responsabilité médicale au plan civil Facilite l’accès au droit à réparation par de nouvelles procédures de règlement amiable

Attention : cela ne vaut que pour les accidents survenus depuis le 5 septembre 2001

La responsabilité des établissements de santé n’est engagée qu’en cas de faute (toute faute) Celle-ci doit être établie par le demandeur (art. L. 1142-1-I CSP)

Une exception : les infections nosocomiales Responsabilité de l’établissement sauf preuve d’une cause étrangère

L’aléa thérapeutique (hypothèse de l’absence de faute) ne peut plus être imputé à un hôpital La solidarité nationale (Oniam) le prend en charge, à certaines conditions :

Conditions : 3 Préjudice direct imputable Conséquences anormales au regard état de santé Gravité du dommage (seuil établi par décret) L’Oniam a établi un référentiel servant de guide pour ses indemnités

A tout cela, s’ajoutent maintenant L’obligation d’assurance pour tous les acteurs de santé (sauf décision spécifique) Une prescription unifiée de 10 ans à compter de la consolidation

Les nouvelles procédures de règlement amiable Objectif : Éviter le recours à la justice pour le patient ou ses ayants droits

Les instances Les commissions régionales de conciliation et d’indemnisation des litiges relatifs aux accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales (CRCI). La Commission nationale des accidents médicaux (CNAM) L’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM)

La procédure amiable n’est en rien obligatoire pour la victime Celle-ci a le choix absolu de la voie de droit qu’elle retient

Quelques éléments chiffrés sur les demandes en réparation

Partons de données de base sur l’activité santé : 200.000 médecins en activité 150 millions de journées d’hospitalisation, tous statuts d’établissements confondus 75 millions d’actes techniques + 50 millions d’actes imagerie

Face à cela Activité des CRCI (dommages lourds seulement) 3000 demandes/an en 2004, 2005, 2006 Relative stagnation Mais activité forte des CRCI premier semestre 2007 (+ 32 %) Moyenne mensuelle actuelle de dépôt des dossiers : 300 en 2007 ???

Ordre judiciaire Évolution nombre de dossiers enregistrés par les TGI (fond et référé) en responsabilité médicale et paramédicale 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 Responsabilité civile médicale* 805 1112 1806 2389 3221 3598 3906 Dont hépatite C 50 105 180 330 450 220 (Revue Sève)

Service des TA et CAA Contentieux de responsabilité hospitalière Évolution nombre de dossiers enregistrés par les TA en ce domaine 1990 2000 2001 2002 2003 2004 Responsabilité hospitalière 2492 2639 2854 2955 2960 2707 (Revue Sève)

vigilance Tout ceci reste modéré Mais Croissance certaine des indemnités Croissance certaine des réclamations / lettres, sans suites contentieuses vigilance

Au fond, quelles dernières jurisprudences ?

Dans cadre règlement amiable Oniam ne suit pas obligatoirement avis CRCI

Devant les juridictions administratives Certains hôpitaux publics font l’objet de condamnation en l’absence de faute (accidents avant le 5 septembre 2001 ; suite jurisprudence Bianchi)

Questions intéressantes, mais hors contentieux Responsabilités et certification Responsabilités et coopération / réseaux / parcours de soins du patient

Dans ce contexte, quel risque pour le directeur ? La faute personnelle détachable du service ? Stéphanie SEGUI-SAULNIER

Quelques exemples de faute personnelle détachable du service dans le domaine médical… Fuite du médecin alors qu’un incendie se déclare et non évacuation de la patiente Refus du médecin d’astreinte à son domicile de se déplacer

Couverture par un chef de service de la faute commise par un membre de l’équipe médicale Pratique d’une néphrectomie droite au lieu d’une néphrectomie gauche

Le juge judiciaire est alors compétent

Le risque de condamnation pour faute personnelle détachable du service est-il réel pour le directeur d’hôpital aujourd’hui ? Il n’existe à ce jour aucune jurisprudence condamnant un directeur sur ce fondement Les seules décisions concernent exclusivement les médecins et elles sont EXCEPTIONNELLES

Quelques rappels autour de la notion de faute personnelle détachable du service… La faute personnelle détachable est une faute qu’il convient de laisser à la charge du professionnel mis en cause, faute qui révèle « l’homme avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences » (CE 05/05/1877 Laumonier-Carriol)

Actes extérieurs à la fonction et traduisant une préoccupation liée à la vie privée de la personne Actes révélant une intention malveillante Poursuite d’un intérêt exclusivement personnel Faute d’une particulière gravité et inexcusable au regard de la profession exercée

A l’inverse, quelques exemples jurisprudentiels récents de fautes non qualifiées de fautes personnelles détachables du service dans le domaine médical… Arrivée tardive d’un médecin au chevet d’une parturiente Le fait pour un médecin régulateur du SAMU de commettre une erreur grossière d’appréciation des symptômes présentés par une victime

Quelles seraient les conséquences d’une condamnation du directeur d’hôpital pour faute personnelle détachable du service ? La responsabilité civile personnelle du directeur serait retenue La réparation financière lui incomberait personnellement

En conclusion, le directeur d’hôpital doit-il « craindre » la faute personnelle détachable du service ? Situation jurisprudentielle INEXISTANTE à ce jour Pas d’inflation jurisprudentielle de la responsabilité civile personnelle du directeur d’hôpital

Quelle responsabilité pénale pour le directeur Quelle responsabilité pénale pour le directeur ? Affaires récentes et dernières jurisprudence Claudine B-ESPER

Quelques chiffres Peu facile…

(annuaire statistique Justice) Partons des infractions les plus fréquemment reprochées en milieu médical homicides et blessures involontaires par manquement délibéré à une obligation de prudence et de sécurité Regardons les données générales qui englobent et dépassent les seules condamnations de médecins (annuaire statistique Justice)

Annuaire statistique de la Justice Casier judiciaire national Ministère de la Justice Données totales de condamnation sur ces infractions 1998 1999 2000 2001 2002 2003 Homicides involontaires 65 58 81 66 76 64 Blessures involontaires 276 270 307 341 254 287 Total 328 388 407 340 351

Condamnations pénales concernant la santé (tous acteurs confondus) Probablement une vingtaine par an. Affaires graves, le plus souvent avec décès Le plus souvent des médecins sont en cause

Les principales infractions susceptibles de concerner un directeur Homicide par imprudence Blessures par imprudence (ITT >, = ou < à 3 mois) Mise en danger délibérée d’autrui (innovation majeure du CP 1994) Non assistance à personne en danger à l’occasion soit d’accidents médicaux, soit d’infections nosocomiales

D’autres infractions, mais moins évidentes : violation secret législation bioéthique etc… (200 infractions environ prévues par le code de la santé publique)

Pas d’infraction pénale liée au défaut d’information

Et aussi une nouvelle donne dans les relations de travail : Le harcèlement moral, introduit par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 dans le code pénal, le code du travail et le titre I de la fonction publique (art. 6 quinquies) « aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés du harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel » (art. 222-33-2 code pénal) 1 an prison - 15.000 € amende

Sans oublier Les infractions liées à la passation des marchés (vues dans un instant)

Quelques exemples de condamnations ou de relaxes de directeurs

31 janv 1967 TGI Pontoise condamne à 3 mois prison/sursis 2000 Frs amende un directeur dans une espèce où, dans les suite d’une césarienne, une parturiente était décédée subitement d’une phlébite postopératoire alors qu’un diagnostic d’embolie avait été porté. Parturiente suivie par étudiant en médecine faisant fonction d’interne qui s’est trompé de diagnostic. Reproche fait au directeur de n’avoir pas respecté la réglementation en confiant des fonctions d’interne à un étudiant. Le chef de service s’est absenté sans qu’il soit pourvu à son remplacement fautes justifiant condamnation pénale

6 déc. 1966 TGI Seine condamne directeur hôpital Puteaux 1 mois prison / sursis et 3.000 Frs amende. Décès dû à inversion canalisations oxygène et protoxyde d’azote. Travaux confiés à entreprise. Suite à erreur de celle-ci, tuyaux inversés. Faute du directeur en ne respectant pas l’arrêté ministériel qui oblige la réception des installations d’oxygène par une commission de sécurité.

CA Bordeaux 21 nov. 1990 confirmant jugement de relaxe Libourne 6 mars 1990 Relaxe du médecin et du directeur Décès patiente opérée à la suite accident de la route et anesthésie générale. Analyse précise par la juridiction du personnel (nombre…) des locaux et de l’organisation des matériels du réveil Constat : de la saisine de la tutelle par le directeur, sur les difficultés de fonctionnement des interventions de tous, lors accident

TGI Bourgoin Jallieu le 2 janv. 1997 Condamnation du directeur à 1.000 Frs amende Incendie détruit le pavillon des invalides d’un hôpital. Décès de 2 patients asphyxiés par les fumées. Origine de l’incendie dans pile matelas en polyuréthane stockés dans des locaux situés en sous sol du pavillon. Faute du directeur d’avoir laissé ainsi stockés les matelas inflammables ou sous sol du bâtiment accueillant les malades, de n’avoir indiqué aucune consigne de lutte contre l’incendie au registre de sécurité de l’hôpital, de n’avoir affiché aucune de ces consignes dans les locaux et de n’avoir fait installer aucun système d’alarme. non respect des normes, des consignes et des contrôles de sécurité qui entraîne la condamnation

TGI Bobigny 7 juillet 1999 6 mois prison sursis Hospitalisation d’une jeune fille de 17 ans dans une clinique privée en 1994 pour appendicectomie sous coelioscopie. Arrêt cardiorespiratoire survenu peu après l’intervention et décès à l’hôpital public où la malade a été transférée après l’incident. Établissement dépourvu de salle de réveil. Les malades transitent par une salle de stérilisation avant de rejoindre leur chambre après l’intervention. Défibrillateur de plus hors d’usage, et ventilation impossible à faire par SAMU appelé sur place Insuffisance d’équipement des chambres Formation insuffisante du personne Le directeur est condamné (plus les médecins)

TGI Paris 3 sept. 2003 Décès d’un enfant après 48h d’hospitalisation dans hôpital pédiatrique parisien. Déshydratation complète malgré signalement de la mère. Constat par le juge d’une série de dysfonctionnement depuis l’admission. Notamment glissement de tâches entre infirmières et aides soignantes au mépris des textes sur la répartition des fonctions entre les personnels. Pas d’amélioration de l’organisation à la suite du rapport d’inspection suivant l’accident. Condamnation de 8 personnes dont la directrice. Condamnation de l’hôpital, personne morale Directeur = relaxe du chef d’homicide involontaire, en l’absence de toute responsabilité de l’organisation du service concerné. Mais condamnation du chef de mise en danger d’autrui.

Rappel A l’hôpital public Incompétence de la juridiction pénale pour juger les dommages et intérêts renvoi devant le juge administratif

Les effets de la loi du 4 mars 2002 en matière pénale Création pôles santé publique Constitution partie civile pour les associations agréées

La délégation et la responsabilité du directeur Délégation expressément prévue par les textes à l’hôpital public Elle doit obéir à des conditions précises 2 formes de délégations : compétence et signature. C’est celle qui se pratique à l’hôpital

Principe du droit pénal « Nul n’est responsable que de son propre fait » (art. 121-1 C.pénal) Donc le délégataire engage sa responsabilité au plan pénal

Mais Le délégant peut aussi voir sa responsabilité recherchée il ne surveille pas les conditions dans lesquelles la délégation est exercée etc… La délégation est le plus souvent un moyen de défense pour le délégant

La responsabilité pénale de l’établissement Personne morale (suppression par la loi du 9 mars 2004 de la spécialisation de cette responsabilité ; loi Perben II) amende (quintuple) placement sous surveillance judiciaire fermeture temporaire ou définitive

Question fondamentale : Les difficultés en moyens budgétaires et/ou de personnels peuvent-elles être invoquées devant le juge pénal, pour expliquer et justifier des manquements aux obligations de sécurité ?

Appréciation in concreto par le juge pénal des faits d’imprudence, issue de la rédaction (adoptée par loi 13 mai 1996) de l’article L. 121-3 C. pénal

«Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales, compte tenu le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences, ainsi que des pouvoirs et des moyens dont il dispose » (écho à la décision Bourgoin Jallieu)

Ce texte permet d’atténuer en matière pénale la responsabilité du directeur, à la condition qu’il soit démontré parfaitement que tout a été fait pour tenter de réaliser les missions imparties. A cela s’ajoute…

La nouvelle définition de l’infraction d’imprudence La loi du 10 juillet 2000 dite Loi Fauchon qui a ajouté à la définition de la faute d’imprudence (121-3 C. pénal)

Art. 121-3 CP redéfinit l’infraction d’imprudence (suite) : « … Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage, ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer ».

Apport pour la responsabilité pénale du directeur ? L’objectif : limiter les cas de responsabilité pénale des décideurs publics ou privés L’auteur indirect : c’est la plupart du temps le cas du directeur ; le lien direct est le plus souvent inscrit dans la relation des soins Pour l’auteur indirect, une faute importante est requise qui consiste : soit en une violation manifestement délibérée d’une obligation… soit en vue d’une faute caractérisée exposant autrui… Exemple à imaginer : rapport certification HAS avec réserves majeures. Le directeur ne fait rien. Accident…

Application de la loi au cas par cas par tribunal

CA Toulouse 19 sept. 2002 Un ouvrier électricien travaillant à l’hôpital public est victime d’un accident du travail. Une explosion se produit alors qu’il éteint une fontaine électrique. Il est gravement brûlé au cou et au visage. Après instruction, il apparaît que l’étincelle a été provoquée par l’action de l’interrupteur faisant exploser les vapeurs d’un produit dégraissant situé en bas de la fontaine. Le produit utilisé le jour de l’accident particulièrement inflammable a été remplacé par un autre produit. Produit incompatible avec le matériel utilisé Relaxe du directeur au motif « que le défaut de possession de la notice technique d’un produit utilisé sans incident depuis plusieurs années, s’il peut constituer une négligence, ne devient une faute caractérisée que lorsque cette notice technique a été demandée par les services de l’hôpital ou par les intervenants de l’hôpital ». La cour relève aussi que le directeur avait développé une politique de sécurité au sein de l’hôpital. Interprétation in concreto.

Analyse précise du comportement médical Mais La chambre criminelle de la cour de cassation a interprété récemment ces notions à propos de médecins : faute caractérisée en cas de causalité indirecte Crim 12 sept. 2006 Crim 13 fév. 2007 Analyse précise du comportement médical

Comment réagir face à des attaques abusives ? Actions de dénonciation calomnieuse Droit de réponse et de rectification Action en diffamation Injure Atteinte à la présomption d’innocence Violation secret instruction Mais souvent… le mal est fait… Envisager la riposte avec sérénité…

Quelques recommandations liées à toute mise en cause de responsabilité : Dossiers de patients bien tenus Traçabilité de tout acte, notamment administratif Alerte du conseil d’administration et surtout de la tutelle si difficultés de fonctionnement, budgétaires et autres

Obligation d’informer le patient sur le dommage (art. 1142-4 CSP)

Ne jamais rester passif vis-à-vis de situations qui créent un risque sanitaire pour les patients et les personnels

La justice n’aime pas le silence Faire remonter l’information sur l’accident du service à la direction, de la direction à la tutelle Informer les patient sur les dommages Tirer toutes conséquences des accidents, en terme de politique de prévention future des risques

Un autre cas de responsabilité pénale : le délit de favoritisme Sanaa MARZOUG

Le délit de favoritisme Le délit de favoritisme ou délit d’octroi d’avantage injustifié est venu compléter l’arsenal répressif applicable en matière de commande publique Corruption Prise illégale d’intérêt

Eventuels auteurs de l’infraction Si tous les agents de l’établissement public de santé peuvent être poursuivis…

Eventuels auteurs de l’infraction … le chef d’établissement et les directeurs adjoints ayant en charge des marchés publics sont particulièrement exposés Eu égard à leur rôle dans les marchés publics (signature du marché) Même s’ils ne sont pas à l'origine du manquement constitutif du délit de favoritisme, le juge pénal peut parfaitement considérer qu'ils se sont rendus complices de l'infraction du fait de leur négligence dans l’exercice des contrôles qui leur incombent

Les marchés concernés Tous les marchés publics Conclus suite à une procédure formalisée Mais aussi suite à un marché à procédure adaptée (Cass. crim., 14 février 2007, n°06-81924)

Le délit de favoritisme est constitué si trois éléments sont réunis L’existence d’un avantage injustifié (élément matériel) L’intention de l’auteur de l’infraction d’avantager un des candidats (élément intentionnel) Un manquement aux règles garantissant la liberté d’accès et l’égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public (élément légal)

1. L’existence d’un avantage injustifié Avantage accordé à un candidat L'avantage accordé à soi-même correspond à une prise illégale d'intérêt Exemples d’avantages Communication d’un document, publicité insuffisante, analyse partiale des offres …

2. L’intention de l’auteur de l’infraction d’avantager un des candidats Mise en œuvre du principe posé par l’article 121-3 du code pénal « Il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre »

2. L’intention de l’auteur de l’infraction d’avantager un des candidats Pour le juge : « La seule constatation de la violation en connaissance de cause d'une prescription légale ou réglementaire implique de la part de son auteur l'intention coupable » (Cass. crim., 24 mai 1994) L'intention est sous-entendue dans la commission même de l’infraction : en raison de sa formation, de sa profession, l’auteur ne pouvait pas ne pas connaître l’existence de l’infraction

2. L’intention de l’auteur de l’infraction d’avantager un des candidats Pour le juge : Dans les affaires récentes, l’absence de malhonnêteté est régulièrement relevée Même si l'infraction a été constituée le juge relèvera que les irrégularités proviennent « davantage d'un abandon à la facilité dans un petit établissement hospitalier où la rigueur et la compétence administrative étaient absentes, que d'une malhonnêteté avérée » (CA Orléans, 3 mars 1998, cité in Circ. CRIM, 2 juill. 1998)

2. L’intention de l’auteur de l’infraction d’avantager un des candidats Le simple fait de tenter d’octroyer un avantage est punissable Il n’est pas nécessaire de rapporter la preuve de l’attribution effective du marché à l’entreprise favorisée, dès lors que l’intention est démontrée

3. Un manquement aux règles garantissant la liberté d’accès et l’égalité des candidats L’octroi d’un avantage injustifié conduit à une violation des règles garantissant la liberté d'accès et l’égalité des candidats Interprétation large du juge pénal sur ce point Fait de ne pas avoir pas tenu à jour le registre de dépôt des offres Fait de ne pas rédiger le rapport de présentation destiné au contrôle de légalité

3. Un manquement aux règles garantissant la liberté d’accès et l’égalité des candidats En fait, toute règle fixée par le CMP, même la plus anodine, est concernée, à partir du moment où sa méconnaissance a été voulue dans le but de favoriser une entreprise, comme : Le fractionnement de la commande publique afin d'éviter d'atteindre les seuils de procédures formalisées La participation d’un candidat à la confection du cahier des charges L'absence ou l’insuffisance de la publicité La conclusion d’avenants bouleversant l’économie initiale du marché

Les peines encourues Deux ans d’emprisonnement et/ou 30 000 euros d’amende

Des directeurs d’hôpital condamnés pour délit de favoritisme Des exemples jurisprudentiels

La protection juridique du directeur Quelle est la protection légale actuelle ? Comment se protéger au mieux ? Sanaa MARZOUG

Droit à la protection juridique Texte de référence Article 11 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires

Bénéficiaires de la protection Protection due au directeur d’hôpital en qualité de fonctionnaire et assurée par leur établissement employeur Droit également reconnu aux agents publics non titulaires

Bénéficiaires de la protection Les précisions apportées par la jurisprudence

Les différentes hypothèses de mise en œuvre de la protection juridique Cas 1 : le directeur d’hôpital a été condamné civilement Cas 2 : le directeur d’hôpital est victime, à l'occasion de ses fonctions, de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages Cas 3 : le directeur d’hôpital fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle

Cas 1 : le directeur d’hôpital a été condamné civilement L’hôpital est tenu de couvrir les condamnations civiles prononcées contre le directeur d’hôpital, dès lors que 3 conditions sont respectées

Cas 1 : le directeur d’hôpital a été condamné civilement Les poursuites doivent être exercées par un tiers Tiers par rapport à l’hôpital : la garantie civile ne joue pas si c’est l’hôpital qui engage les poursuites

Cas 1 : le directeur d’hôpital a été condamné civilement Nécessité d’une faute de service La protection ne peut pas être mise en œuvre en cas de faute personnelle

Cas 1 : le directeur d’hôpital a été condamné civilement Prise en charge en cas d’absence d’élévation du conflit d’attribution Condamnation prononcée par le juge judiciaire

Cas 1 : le directeur d’hôpital a été condamné civilement Les précisions apportées par la jurisprudence

Cas 2 : le directeur d’hôpital est victime, à l'occasion de ses fonctions, de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages L’hôpital organise la protection du directeur d’hôpital contre ces atteintes à l’intégrité ou à l’honneur L’hôpital répare le cas échéant le préjudice subi par le directeur d’hôpital 3 conditions doivent être réunies

Cas 2 : le directeur d’hôpital est victime, à l'occasion de ses fonctions, de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages 1. Nature des attaques Propos verbaux ou écrits (lettres, tracts, pétitions…)

Cas 2 : le directeur d’hôpital est victime, à l'occasion de ses fonctions, de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages 1. Nature des attaques Agissements contre la personne du directeur d’hôpital Atteinte à l’intégrité physique (séquestration, coups, injures…) Atteinte à l’intégrité psychique (injures, harcèlement moral…)

Cas 2 : le directeur d’hôpital est victime, à l'occasion de ses fonctions, de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages 1. Nature des attaques Agissements contre les biens du directeur d’hôpital Vols ou détérioration de leurs biens (voiture…)

Cas 2 : le directeur d’hôpital est victime, à l'occasion de ses fonctions, de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages 2. Peu importe l'auteur des attaques, exception faite du supérieur hiérarchique L'auteur des agissements est indifférent : agent de l’établissement, représentant d'une organisation syndicale ou usagers du service public L’auteur des agissements peut être inconnu

Cas 2 : le directeur d’hôpital est victime, à l'occasion de ses fonctions, de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages 2. Peu importe l'auteur des attaques, exception faite du supérieur hiérarchique Il n’y a pas de protection contre les agissements du chef d’établissement, supérieur hiérarchique du directeur d’hôpital adjoint (évaluation, observations…) Sauf s'ils ne sont pas rattachables à l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, notamment en raison de leur caractère excessif ou de leur motivation étrangère à l'intérêt du service

Cas 2 : le directeur d’hôpital est victime, à l'occasion de ses fonctions, de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages Existence d'un lien suffisant entre les attaques et les fonctions exercées Attaques subies en raison de sa qualité mais pas nécessairement pendant l’exercice de ses activités (appels téléphoniques nocturnes par exemple)

Cas 2 : le directeur d’hôpital est victime, à l'occasion de ses fonctions, de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages Existence d'un lien suffisant entre les attaques et les fonctions exercées Attaques subies en raison de sa qualité mais pas nécessairement pendant l’exercice de ses activités (appels téléphoniques nocturnes par exemple)

Les précisions apportées par la jurisprudence Cas 2 : le directeur d’hôpital est victime, à l'occasion de ses fonctions, de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages Les précisions apportées par la jurisprudence

Cas 3 : le directeur d’hôpital fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle Le directeur d’hôpital a droit à protection dès lors qu’il y a poursuite pénale Prise en charge des frais d’avocat Mais il n’y a pas de définition législative de la notion de poursuite pénale

Cas 3 : le directeur d’hôpital fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle Mais il n’y a pas de définition législative de la notion de poursuite pénale Définition retenue par le Conseil d'État Un fonctionnaire doit être regardé comme faisant l'objet de poursuites pénales "lorsque l'action publique pour l'application des peines a été mise en mouvement à son encontre" (CE, 3 mai 2002, La Poste c/ Fabre, n° 239436)

Cas 3 : le directeur d’hôpital fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle Mais il n’y a pas de définition législative de la notion de poursuite pénale Droit à la protection juridique de la décision du Procureur à la date du prononcé du jugement ou de la décision de non-lieu rendue par la juridiction d'instruction Notamment garde à vue et mise en examen du directeur d’hôpital

Cas 3 : le directeur d’hôpital fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle Une condition de mise en œuvre du droit à protection Seules les infractions commises par le directeur d’hôpital dans l'exercice de ses fonctions sont concernées Exclusion des fautes personnelles