Réalités économiques versus éthique UPMC – Formation Continue - 4, place Jussieu 75005 Paris - Tél. : 01 53 10 43 20 – Fax : 01 53 10 43 30 – www.fp.upmc.fr
Cycle de vie d’un médicament
Les principales phases La recherche identification et fabrication du principe actif (études biochimiques, effet sur des cellules en culture, essais sur l’animal) Le développement passer d’une molécule étudiée en laboratoire à une « spécialité pharmaceutique » qui sera prescrite à des patients les essais sont réalisés sur l’homme (mise au point des doses, efficacité et effets secondaires) le développement coûte deux fois plus cher que la recherche proprement dit
Les étapes clés de la R&D
Le développement d’une spécialité pharmaceutique Répondre aux besoins de la population marketing Répondre aux exigences essentielles de l’AMM (autorisation de mise sur le marché) la qualité (dossier de chimie analytique) la sécurité (dossier toxicologique) l’efficacité (dossier clinique) le dossier d’AMM fait 100 000 pages en moyenne
Les essais cliniques en cours 29 % cancer 16 % système nerveux central 11 % arthrite, maladies inflammatoires 13 % maladies infectieuses 10 % maladies cardiovasculaires 5 % système respiratoire 5 % diabète et endocrinologie 3 % HIV 3 % santé de la femme
Les nouvelles molécules autorisées en 2006
Environ 50 médicaments OGM Anticoagulants et facteurs de coagulation Anticorps monoclonaux Facteurs de croissance cellulaire Hormones EPO (érythropoïétine) Maladies orphelines Vaccins
Un médicament high-tech
La dépression La sévérité d’une dépression est mesurée par l’intensité d’une série de symptômes (HRSD – Hamilton Rating Scale Depression) humeur triste tout semble monotone et vide, y compris les activités habituellement gratifiantes modification involontaire du poids troubles du sommeil troubles de la concentration ou du processus de prise de décision troubles du comportement (agitation ou ralentissement) sensation de fatigue ou de diminution d'énergie sentiments de culpabilité hypertrophiés idées noires (tendances suicidaires)
Les bases moléculaires de la dépression La dépression serait due à une libération insuffisante d’un neurotransmetteur (la sérotonine) dans certains neurones Les neurones sérotoninergiques ont des projections axonales au niveau : du cortex frontal (régulation de l’humeur) des ganglions de la base (agitation) des aires limbiques (anxiété) de l’hypothalamus (modification de l’appétit) des centres du sommeil du tronc cérébral (insomnie)
Les médicaments contre la dépression On augmente l’efficacité de la sérotonine libérée en freinant sa recapture par le neurone émetteur Citalopram (Seropram®) Escitalopram (Seroplex®) Fluoxetine (Prozac®) Paroxetine (Paxil®, Deroxat®) Sertraline (Zoloft®) Venlafaxine (Effexor®)
Des molécules pour chimistes
Les information sur leur efficacité sont-elles accessibles ? Tous les essais cliniques réalisés pour une demande d’AMM sont déposés à la FDA (US Food and Drug Administration) Le Freedom of Information Act permet d’accéder librement à ces informations Il existe une mesure de la gravité d’une dépression admise par tous (HRSD – Hamilton Rating Scale Depression)
Antidépresseurs vs placebo
Pharmacie vs médecine ? En moyenne, les antidépresseurs diminuent la gravité d’une dépression de 1,24 point et le placebo de 0,92 point (soit 0,32 point de différence) Les experts considèrent qu’il faut une différence de 0,50 point pour qu’il y ait un intérêt thérapeutique (~ 3 points HRSD) La vraie question n’est-elle pas « Pourquoi le placebo est-il actif ? Comment augmenter son efficacité ? »
La R&D par secteur industriel (en milliards €) Secteur R&D R&D/ventes Pharmacie et biotechnologies 71 15,9 % Hardware, équipements 65 8,6 % Automobile 61 4,1 % Equipements électroniques 27 4,4 % Software, services informatiques 27 9,8 % Chimie 17 3,1 % Aérospatial et défense 16 4,8 % Hifi, vidéo, photo, etc. 14 6,5 %
Les compagnies ayant la plus forte R&D (en milliards €) 5,8 Pfizer USA pharmacie 5,5 Ford Motor USA automobile 5,4 Johnson & Johnson USA pharmacie 5,4 Microsoft USA informatique 5,2 Daimler Chrisler Allemagne automobile 5,2 Toyota Motor Japon automobile 5,1 Glaxo SmithKline Royaume Uni pharmacie 5,0 Siemens Allemagne électricité 5,0 General Motor USA automobile 4,7 Samsung Electronics Corée électronique 4,5 Intel USA semi-conducteurs 4,4 Sanofi Aventis France pharmacie 4,3 IBM USA informatique 4,2 Volkswagen Allemagne automobile 4,1 Roche Suisse pharmacie 4,1 Novartis Suisse pharmacie 3,7 Nokia Finlande télécommunication
Bénéfices en % des ventes Secteur industriel UE Hors UE Banks 30,8 50,3 Mining 36,7 38,9 Tobacco 30,3 18,3 Other financials 13,7 28,2 Pharmaceuticals 19,8 20,9 Software 15,0 24,7 Oil equipment, services & distribution 16,7 22,7 Oil & gas producers 15,6 19,6 Fixed line telecommunications 15,2 15,7 Electricity 16,6 13,4 Beverages 21,3 7,4 Biotechnology -4,6 4,4 Mobile telecommunications -4,9 17,5 Internet (Google, Yahoo…) -41,0 17,8
Les ventes vs la R&D Cardiovasculaire 40 195 Maladies Ventes R&D biotech milliards $ nombre Cardiovasculaire 40 195 Appareil digestif + métabolisme 32 104 Système nerveux central 31 331 Anti-infectieux 21 598 Système respiratoire 19 84 Système urogénital 11 34 Squelette et muscles 11 122 Dermatologie 8 53 Anticancéreux 8 1 225 Produits pour le sang 6 82
L’achat de solutions clé en main par la BigPharma
Les accords biotech – BigPharma par maladie
Les catégories de médicaments selon la FDA NME New Molecular Entities le principe actif n’a jamais été commercialisé aux Etats-Unis IMD Incrementally Modified Drugs le principe actif est déjà présent dans d’autres médicaments, mais il a été modifié par le fabricant Priority Drug le médicament a des qualités que n’ont pas les médicaments existants Standard Drug le médicament n’est pas meilleur que les autres Other Drugs le principe actif est le même que dans des médicaments existants
Les nouveaux médicaments
Les brevets
L’importance des médicaments leaders Société % du chiffre d’affaires Nombre de produits Amgen 75,7 % 3 Takeda 80,0 % 4 Merck 60,3 % Eli Lilly 55,8 % Bristol-Myers Squibb 40,5 % Pfizer 47,0 % 5 GlaxoSmithKline 20,7 %
Les brevets vont expirer
Le brevet Le brevet donne un monopole pendant 15 à 20 ans Invention une solution technique à un problème technique Nouveauté par rapport à tout ce qui est accessible au public avant la date de dépôt Caractère inventif ça ne découle pas de manière évidente de l’état de la technique Application industrielle l’invention doit être suffisamment bien décrite pour effectivement réalisable
Les brevets sur les médicaments 1844 le Parlement français exclu de la brevetabilité les compositions pharmaceutiques et remèdes de toute espèce 1959 un médicament est brevetable en tant que molécule ; en revanche, une méthode de traitement n’est pas brevetable Il y a 8 fois plus de brevets par € de R&D en télécommunication qu’en pharmacie
L’art de bloquer les médicaments génériques Il y a un délai de 30 mois après l’expiration du brevet, le temps de vérifier que le produit est libre de droits Obtenir un brevet pour une modification du médicament ce peut être sur un point mineur (forme et couleur du comprimé…) Trouvez une nouvelle application ou une nouvelle posologie prolonge le brevet de 3 ans on peut recommencer autant qu’on veut
Les brevets sur BRCA1 (diagnostic du cancer du sein) Brevet sur la méthode Comparer la séquence du patient à celle du gène de référence Brevet sur le produit La séquence génétique de BRCA1 et tous les produits dérivés Brevet sur les mutations de BRCA1 La séquence des mutations prédisposant au cancer du sein
La révocation des brevets sur BRCA1 La première séquence brevetée contenait 10 erreurs La séquence exacte de BRCA1 était dans le domaine public lorsqu’elle a fait l’objet d’une demande de brevet Cette décision ne remet pas en cause la légitimité des brevets sur les séquences
Les essais cliniques
Les trois phases des essais cliniques Phase I : contrôle de l’innocuité 10 à 100 volontaires en bonne santé Evaluer de la dose maximale administrable sans risque Cela dure 1,5 an et coûte 10 millions d’euros Phase II : établissement du protocole 50 à 100 malades Déterminer quelles personnes et combien devraient participer à la phase finale des essais; premières estimations des doses efficaces et des durées de traitement Cela dure 2 ans et coûte 20 millions d’euros Phase III : test final 300 à 30 000 malades Savoir si le traitement est efficace et quels sont les effets secondaires Cela dure de 3 à 5 ans et coûte de 40 à 50 millions d’euros
Le début des essais cliniques 1900 effet de l’aspirine sur l’estomac 1927 efficacité d’un vaccin contre le rhume 1932 effet de la pénicilline contre la syphilis 1946-1947 effet de la streptomycine contre la tuberculose Il s’en est dégagé des règles : définir des critères objectifs pour évaluer les effets du médicament répartir au hasard les patients dans les différents groupes (traitement en double aveugle)
L’aspect éthique des essais cliniques 1936 campagne de vaccination contre la tuberculose dans les tribus indiennes d’Amérique du Nord (1 551 vaccinés / 1 457 témoins) Les personnes sont suivies jusqu’en 1956 En 1944 la tuberculose touche 4,1 % des vaccinés et 16,4 % des témoins En vingt ans 13 décès chez les vaccinés contre 68 décès chez les témoins
La méthodologie des essais cliniques remise en question L’essai clinique est perçu comme une activité immorale (les patient du groupe témoin ne bénéficient pas du meilleur traitement) une atteinte à la liberté du malade Depuis 1990 les associations de malades interviennent dans la définition des essais thérapeutiques (cas du SIDA)
Les nouvelles priorités des essais cliniques suite au SIDA Raccourcir le délai entre les premiers tests d’une molécule prometteuse et sa mise à disposition du malade Elargir l’accès des malades aux traitements nouveaux Développer des protocoles plus souples Mesurer le succès du traitement par l’évolution des marqueurs biologiques Traiter le groupe témoin lorsque les traitements semblent prometteurs
Les comités d’éthique 1946 les procès médicaux de Nuremberg 1964 la déclaration d’Helsinki 1966 les NIH mettent en place des comités d’éthique pour contrôler les essais cliniques 1975 la FDA étend cette obligation aux essais réalisés hors des USA 1988 les comités d’éthique sont une obligation légale en France 2001 une directive européenne impose la présence de représentants des malades dans les comités d’éthique
Dans l’intérêt du malade ou de la médecine ? La finalité de l’expérimentation est la production de connaissances utiles à la collectivité et non le soin individuel Les essais cliniques sont réalisés en échange de la prise en charge des soins par la collectivité Il faut cependant demander l’accord des patients Le jeu est faussé par le décalage social entre le corps médical et les malades soumis à l’expérimentation