Collège des Enseignants de Pneumologie CAS CLINIQUE Proposé, revu et corrigé par : A. Fredenrich, E. Ferrari et C. Marquette (Université de Nice - Sophia Antipolis) E. Quoix (Université de Université de Strasbourg) F. Lebargy (Université de Champagne Ardennes) B. Desrues (Université de Université de Rennes 1). Items des ECN concernés par ce cas clinique : 45 tabac 128 athérome 129 Facteurs de risque cardio-vasculaire et prévention, dyslipémies 130 HTA 132 angine de poitrine et infarctus myocardique 171 recherche d’un terrain à risque et adaptation thérapeutique 227 BPCO 267 obésité de l’enfant et de l’adulte
Monsieur Jean-Louis HER Monsieur Jean-Louis HER..., âgé de 41 ans, exerce une profession commerciale. Il consulte, sur les conseils de son cardiologue et de sa femme, pour sevrage tabagique suite à un infarctus du myocarde (IDM) survenu 2 semaines auparavant. Il est en l’attente d'un pontage coronarien. Il a débuté son tabagisme à l'âge de 15 ans, a fumé régulièrement environ un paquet de cigarettes par jour, et dit fumer au moment de la consultation 8 à 10 cigarettes par jour. Il n’a jamais essayé d’arrêter. Il ne présente pas d'autre dépendance. Il se dit anxieux, stressé. Il pèse 95 kg pour 1,81 m. Son père, fumeur, a présenté un IDM à l’age de 52 ans et est mort d'un cancer du poumon. Sa PA est à 150/95, son pouls à 92/min.
Il vous montre le bilan biologique réalisé au décours de son infarctus : Créatinine: 85 µmol/l (N 60 - 115 µmol/l) Urée : 5,2 mmol/l (N 2,5 - 8,0 mmol/l) Glucose : 3,9 mmol/l (3,7 - 5,5 mmol/l) Cholestérol total 3,1 g/l (N 1,60 g à 2,40 g/l soit 4,1 à 6,2 mmol/l) LDL cholestérol 2,2 g/l (N 0,80 à 1,55 g/l soit 2,05 à 3,95 mmol/l) HDL cholestérol 0,75 g/l (N 0,35 à 0,80 g/l, soit 0,90 à 2,05 mmol/l) Triglycérides 1,85 g/l (N 0,40 à 1,15 g/l soit 0,45 à 1,3 mmol/l).
À signaler que le patient est le seul fumeur sur son lieu du travail. La 1ère consultation est conduite en présence de son épouse, infirmière au CHU, qui fume. Il apparaît que la motivation du patient est incomplète. Il est conscient que sa consommation de tabac est mauvaise pour son cœur et sa santé en général, mais il n'est pas certain qu'il lui soit indispensable d'arrêter totalement. La consultation consiste, dans un premier temps, à apprécier et renforcer la motivation du patient; sa femme contribue à cette démarche. Elle signale qu'elle désire aussi arrêter de fumer, mais qu'elle n'est pas encore réellement prête. Son score au test de Fagerström est de 8 (sur une échelle de 0 à 10). Son score à l'échelle HAD (Hospital Anxiety and Depression scale, échelle de 0 à 21) est de 10 pour l'anxiété et 5 pour la dépression. La mesure du CO dans l’air expiré montre une valeur de 18 ppm.
De principe, une courbe débit-volume est réalisée dont les résultats sont les suivants : théorique observé % Post BD VEMS 3,56 3,12 88 3,23 91 CVF 4,45 4,92 111 4,98 112 VEMS/CVF 64 65 DEM25-75 3,81 1,85 48
Interpréter la courbe débit-volume Interpréter la courbe débit-volume. Quel diagnostic peut-on évoquer en tenant compte de l'anamnèse ? ?
Diagnostic =BPCO légère (Stade I dans la classification GOLD) Courbe débit volume TVO (VEMS/CVF < 70%), non réversible après BD Obstruction distale (aspect concave de la courbe, DEM25-75 = 48%) Diagnostic =BPCO légère (Stade I dans la classification GOLD) TVO non réversible et VEMS > 80% Th Tabagisme cumulé > 20P-A
Le patient vous interroge sur la réalité des ses risques cardiovasculaires, que lui répondez vous ?
Ses risques cardio-vasculaires sont présents et comportent notamment : Des facteurs de risques non modifiables : l’antécédent d’IDM paternel à 52 ans (ATCD familial d’une maladie cardio-vaculaire survenue tôt chez un ascendant du 1er degré) le sexe masculin Des facteurs de risques « modifiables » : le fait qu’il est fumeur le fait qu’il est « stressé » le fait qu’il est sédentaire le fait qu’il est hypertendu son hypercholestérolémie son surpoids (défini par un IMC > 25 kg/m2), en effet son IMC est calculé à 29 kg/m2
Principaux facteures de risque cardio-vasculaires : facteurs de risques non modifiables : le sexe masculin âge croissant antécédent familial d’athérosclérose maladie cardio-vasculaire survenue avant 55 ans chez un ascendant du 1er masculin et 65 ans chez un ascendant du 1er féminin ménaupause précoce Des facteurs de risques « modifiables » : Hypercholestérolémie = fdr majeur Tabagisme = 2ème fdr majeur HTA = 3ème fdr majeur Diabète Surcharge pondérale Surpoids (défini par un IMC > 25 kg/m2) Obésité (définie par un IMC > 30 kg/m2) « stress » sédentarité Maladies inflammatoires chroniques Insuffisance rénale chronique
Quels éléments présagent de la réussite ou de l’échec du sevrage tabagique chez ce patient ?
Arguments pour la réussite du sevrage notion de risques présents : infarctus récent, antécédents familiaux, présence d’une BPCO, l’épouse souhaite arrêter démarche active d’évaluation de prise de conscience des risques Arguments pour l’échec du sevrage l'absence de tentative d'arrêt antérieur motivation insuffisante épouse fumeuse test de Fagerström élevé anxiété et stress, par ailleurs aggravés par l'infarctus surpoids
Décrire le test de Fagerström et préciser son intérêt dans la démarche de sevrage tabagique ?
Description : Intérêt : Il s’agit d’un autoquestionnaire Il comporte des questions simples ayant pour objet l'évaluation de la dépendance au tabac A chaque réponse est attribuée un score La dépendance est d'autant plus élevée que le score total est élevé Intérêt : Appréciation de la dépendance à la nicotine Aide à la prescription des substituts nicotiniques
Évaluation de la dépendance par le Test de Fagerström Interprétation : 0 à 2 : pas de dépendance 3 à 4 : dépendance faible 5 à 6: dépendance moyenne 7 à 10 : dépendance forte à très forte
De quelle manière, la comorbidité anxio-dépressive influence-t-elle le tabagisme et le sevrage ?
Une dépression vraie peut nécessiter un traitement spécifique avant d'envisager le sevrage Les fumeurs déprimés fument plus que les non déprimés Il y a plus de fumeurs parmi les sujets déprimés que les non déprimés Les fumeurs ayant des antécédents de dépression peuvent présenter une rechute de celle-ci à l'arrêt du tabac L'arrêt du tabac est plus difficile chez les sujets déprimés
Après les étapes habituelles de la consultation d'aide au sevrage, la date d'arrêt proposée par le patient est retenue ; un timbre à la nicotine à 21 mg par jour et des gommes à la nicotine 2 mg à la demande sont prescrits Quels sont les autres mesures thérapeutique de la dépendance au tabac dont l’efficacité a été démontrée de façon scientifique ?
Les thérapies cognitivo-comportementales Le Bupropion (Zyban) Le conseil minimal Les thérapies cognitivo-comportementales Le Bupropion (Zyban) psychotrope de type antidépresseur atypique, inhibiteur de la recapture de la dopamine et de la noradrénaline La Varenicline (Champix) agoniste partiel des récepteurs nicotiniques
Chez Monsieur HER… le sevrage tabagique fait partie des mesures de prévention secondaire de la morbi-mortalité post-infarctus. Quelles sont les autres mesures de prévention secondaire recommandés ?
Réduction pondérale (l’objectif est un IMC < 25 kg/m2) La priorité est au sevrage tabagique qui, a lui seul, a une influence sur la mortalité à moyen terme post-infarctus supérieure à chacune des autres mesures considérées individuellement: Réduction pondérale (l’objectif est un IMC < 25 kg/m2) par une alimentation diversifiée une réduction des graisses animales et des acides gras saturés une alimentation riche en fruits, en légumes, en poissons, une alimentation pauvre en viandes grasses au profit des viandes maigres et des huiles végétales réduction des sucres purs au profit des glucides complexes Activité physique régulière 30 minutes de marche rapide ou d’un équivalent, au moins 5 fois par semaine et si possible tous les jours Maintien d’une PA 130/80 mmHg par les mesures hygiéno-diététiques et les antihypertenseurs (médicaments du système rénine angiotensine, diurétiques, bêtabloquants, inhibiteurs calciques). Maintien du LDL cholestérol < 1g/l et la prescription d’une statine
Prise en charge des facteurs de risque cardio-vasculaires La prévention secondaire efficace doit être Globale et fondée sur la correction rigoureuse des facteurs de risque d’athérosclérose avec des objectifs et un suivi plus exigeants qu’en prévention primaire Elle comporte des mesures hygiéno-diététiques et des prescriptions validées par les résultats d’essais contrôlés. Les patients ne suivant pas ou suivant mal les traitements recommandés ont une mortalité annuelle qui est le double de celle des patients ayant une bonne observance thérapeutique
La réduction pondérale L’objectif est un index de masse corporelle inférieur à 25Kg/m2 un tour de taille inférieur à 102 cm chez l’homme inférieur à 88 cm chez la femme Quels que soit le poids initial, une alimentation diversifiée et le maintien du poids idéal sont essentiels. des graisses animales et des acides gras saturés alimentation riche en fruits, en légumes, en poissons, pauvre en viandes grasses au profit des viandes maigres et des huiles végétales
Activité physique régulière Sevrage tabagique Priorité mais près de 40% des fumeurs reprennent leur intoxication après un infarctus. L’arrêt du tabac réduit le taux de récidives et de décès Activité physique régulière 30 minutes de marche rapide ou d’un équivalent, 4 à 5 fois par semaine et si possible tous les jours Maîtriser l’hypertension artérielle objectif : pression artérielle 130/80 mmHg par les mesures hygiéno-diététiques et par les classes thérapeutiques validées médicaments du système rénine angiotensine Diurétiques Bêtabloquants inhibiteurs calciques
Maîtriser l’hypercholestérolémie le bénéfice est en rapport direct et proportionnel à la diminution du LDL-cholestérol Objectif: LDL cholestérol < 1g, si possible à 0,80g/l par les mesures hygiéno-diététiques précitées et par la prescription d’une statine. Chez le diabétique surcharge pondérale équilibration de la glycémie Objectif: hémoglobine glycosylée < 6,5% glycémie à jeun inférieure à 1,10g/l pression artérielle < 130/80 mmHg