3e PARTIE : Le marché monétaire La monnaie Economie réelle et économie monétaire
Chapitre 12 : La monnaie 1.Introduction : fonctions de la monnaie ; différentes formes de monnaie ; création monétaire. 2. Les théories monétaires : les monétaristes ; les keynésiens. 3.Les banques centrales : fonctions des banques centrales ; le système européen des banques centrales.
1.1. Les fonctions de la monnaie : fonction principale et première de transaction ou d’échange fonction de précaution réserve de valeur = épargne liquidités et quasi-liquidités fonction de spéculation fonction de pouvoir économique fonction d’étalon de mesure de la valeur
1.2. Évolution des formes de monnaie Troc Monnaie : Monnaie « primitive » : coquillages, sucre, tabac, etc. Monnaie métallique (pièces d’or, d’argent, etc.) Monnaie fiduciaire (billets) Monnaie scripturale (comptes à vue)
1.2.1. Monnaie métallique
1.2.1. La monnaie métallique Monnaie “privée” Monopole de l’émission de monnaie par l’Etat ( fonction régalienne de l’Etat) : Exemple de suspension de ce “droit” : Russie en 1989 où le $ sera utilsé et autorisé comme monnaie pour payer une partie des récoltes Monnaie européenne : Euro : émis et géré par la Banque Centrale Européenne Cours légal de la monnaie : elle doit être acceptée comme moyen de paiement.
1.2.2 De la monnaie métallique à la monnaie fiduciaire Monnaie métallique insuffisante ( fin du XVIIe) Augmentation des échanges donc augmentation de la demande de monnaie pour assurer les transactions Insuffisance de l’offre : métaux précieux (or et argent) Création d’un substitut à la monnaie métallique : le billet de banque, émis par les orfèvres
Dépôt et émission de billets Création monétaire Système basé sur la confiance Dans la valeur du billet de banque émis : il peut être échangé à tout moment contre sa valeur en or Mais si tous les détenteurs de billets viennent en demader la contrepartie en or : faillite Banques privées se substituent aux orfèvres Création des banques centrales : Banque de Suède 1668, Banque d’Angleterre 1694, Banque Nationale de Belgique 1852 : assurer la sécurité des échanges monétaires
1.2.3. Transformation de la monnaie fiduciaire en monnaie scripturale Au départ : la masse monétaire s’élève à 1000 EUR en monnaie fiduciaire On les dépose ensuite à la banque A la masse monétaire s’élève à 1000 EUR en monnaie scripturale Bilan de la banque A Actif Passif Trésorerie : 1000 Dépôt : 1000
Création monétaire (1) Bilan de la banque A Actif Passif La banque A applique un coefficient de trésorerie (t) de 10% Elle conserve 100 EUR en trésorerie et prête le reste. Bilan de la banque A Actif Passif Trésorerie : 100 Crédits: 900 Dépôt : 1000
Les 900 EUR prêtés sont déposés à la banque B : Création monétaire (2) Les 900 EUR prêtés sont déposés à la banque B : Actif Passif Trésorerie : 900 Dépôt : 900 La banque B conserve 10% de ce dépôt en trésorerie et prête le reste : Actif Passif Trésorerie : 90 Crédits: 810 Dépôt : 900
Les 810 EUR prêtés sont déposés à la banque C : Création monétaire (3) Les 810 EUR prêtés sont déposés à la banque C : Actif Passif Trésorerie : 810 Dépôt : 810 La banque C conserve 10% de ce dépôt en trésorerie et prête le reste : Actif Passif Trésorerie : 81 Crédits: 729 Dépôt : 810
Création monétaire (4) Banque A : Banque B : Banque C : Actif Passif Trésorerie : 100 Crédits: 900 Dépôt : 1000 Banque A : Actif Passif Trésorerie : 90 Crédits: 810 Dépôt : 900 Banque B : Actif Passif Trésorerie : 81 Crédits: 729 Dépôt : 810 Banque C :
Création monétaire (5) Sdépôts = 1000 + 900 + 810 + 729 + ... = A+A(1-t)+A(1-t)(1-t)+A(1-t)(1-t)(1-t)+… = A[(1-t)0+(1-t)1 +(1-t)2 +(1-t)3 +……… +(1-t)∞] = A[somme des termes d’une progression géométrique de raison <1 lorsque n→∞] Cette somme tend vers une limite pour n tendant vers l'infini si et seulement si (1-t) est strictement plus petit que 1, et cette limite est alors Sdépôts = A / (1 - q) où q=1-t
→ somme des dépôts à la fin du processus de création monétaire : Si on considère qu’une partie des prêts n’est pas réinjectée dans le système bancaire : fuite en billets → somme des dépôts à la fin du processus de création monétaire : A = dépôt primaire t = coefficient de trésorerie b = coefficient de fuite en billet Et la création monétaire est :
Exemples de création monétaire : A = 1000 ; t = 0,1 ; b = 0 Somme dépôts : 1000 / [1 – (1 – 0,1)] = 10.000 Création monétaire : 10.000 – 1000 = 9000 A = 1000 ; t = 0,1 ; b = 0,2 1000 / [1 – (1 – 0,1) (1 – 0,2)] = 3571 Création monétaire : 3571 – 1000 = 2571
1.3. Les différents agrégats monétaires (1) La monnaie est un actif LIQUIDE : immédiatement disponible et utilisable : monnaie fiduciaire, dépôts à vue La définition de la masse monétaire a évolué : on distingue M1, M2 et M3, selon le degré de liquidité de ses composantes M1 == monnaie fiduciaire + monnaie scripturale 1945 : monnaie fiduciaire = 60% de la masse monétaireM1 2010 : monnaie fiduciaire = 16% de la masse monétaire M1
1.3.1. M1 : stock monétaire Monnaie fiduciaire et scripturale : Fiduciaire : billets en circulation parmi les agents économiques ( Etat, ménages, entreprises non financières) Scripturale : comptes à vue détenus par les agents “non-bancaires” Pour que la “monnaie” soit monnaie, elle doit sortir du système bancaire : billets doivent quitter la Banque centrale Les dépôts à vue doivent être détenus par les ménages, les entreprises, l’Etat Vitesse de circulation de la monnaie (Zone Euro) :
1.3.2. La quasi-monnaie : Certains actifs financiers sont quasi-liquides : présentent un degré de liquidité élevé qui permet de les associer à la monnaie c’est la quasi-monnaie : dépôts à court terme, autres actifs négociables ( c’est à dire facilement et rapidement convertibles en monnaie) M2 =M1 + dépôts à court terme M3 = M2 + autres actifs négociables Nécessité de contrôler la masse monétaire : contrôlke de l’inflation, impact sur l’activité économique
Les différents agrégats monétaires : monnaie et quasi monnaie(2) Agrégats monétaires dans la zone euro et leurs composantes en 2010 En % de M3 et en taux de croissance Source : Bulletin Mensuel de la BCE, février 2011
2. Les théories monétaires : Classiques (XVIIIe-XIXe siècle) : la monnaie n’a qu’une fonction de transaction Md = MT J.M. Keynes (1883-1946) : la monnaie est aussi conservée pour motif de liquidité Md = MT + ML Monétaristes (Friedman : 1912 - ) reprennent thèses des classiques : Md = MT
2.1. Les monétaristes (1) : La monnaie n’a qu’une fonction de transaction : Md = MT Équation quantitative de la monnaie : MV = PT où M = masse monétaire V = vitesse de circulation de la monnaie (constante) P = prix T = transactions (constantes) La monnaie est neutre : La monnaie n’influence que les variables nominales, pas les variables réelles.
Les monétaristes (2) Impact de ΔM sur ΔP : MV = PT Plein emploi : T constant V constant M = k*P où k=T/V constant Si M augmente agents économiques veulent dépenser davantage demande augmente mais pas offre (plein emploi) P augmente
Les monétaristes (3) : Exemples historiques de l’impact de ΔM sur ΔP : importations des métaux d’Amérique au 17ème siècle découverte des mines d’or en Californie au 19ème siècle inflation allemande des années ’20.
2.2. Les Keynésiens (1) : Préférence pour la liquidité : Md = MT + ML La demande de monnaie est une fonction décroissante du taux d’intérêt La monnaie n’est pas neutre : une augmentation de la masse monétaire peut entraîner une augmentation du revenu national (à prix constant)
Les keynésiens (2) Obligation = prêt à une entreprise valeur nominale (ex : 1000 EUR) taux d’intérêt nominal (ex : 10% de 1000 = 100 EUR) s’échange sur un marché prix = « cours » Exemple : Au départ : cours = valeur nominale = 1000 EUR return de l’obligation : 100 / 1000 = 10% Demande augmente cours = 1250 EUR return de l’obligation : 100 / 1250 = 8% Lorsque le cours augmente (diminue), le return diminue (augmente).
Les keynésiens (3) Épargne : sous forme de monnaie (liquide mais rapporte rien) ou sous forme d’obligation (rapporte intérêt mais pas liquide) La demande de monnaie pour motif de liquidité (ML) est fonction décroissante du taux d’intérêt (i) : i ML Δi(1) Δi(2) ΔML(1) ΔML(2) Δi(1) = Δi(2) ΔML(1) < ΔML(2)
Les keynésiens (4) Md i i(1) Md(2) Md(1) Effet d’une augmentation du revenu national (Y) : Y augmente volume des transactions (T) augmente demande de monnaie pour motif de transactions (MT) augmente demande totale de monnaie (Md=MT + ML) augmente Md i i(1) Md(2) Md(1)= ML(1) + MT(1) Md(2)= ML(1) + MT(2) Md(1)
Offre de monnaie (masse monétaire) = Demande de monnaie Les keynésiens (5) Équilibre sur le marché monétaire : Offre de monnaie (masse monétaire) = Demande de monnaie M = Md i M i Md M
Les keynésiens (6) Impact d’une hausse de la masse monétaire : i Md M
Les keynésiens (7) Impact d’une baisse de i : Si i baisse : I (la demande d’investissements) augmente
Impact d’une hausse de I : Les keynésiens (8) Impact d’une hausse de I : Si I augmente, Y (le revenu national) augmente Remarque : ceci n’est vrai que si on n’est pas au plein emploi.
Les Keynésiens (9) Synthèse de la politique monétaire keynésienne : Augmentation de M par la Banque centrale diminution de i augmentation de I augmentation de Y Remarque : la Banque centrale peut directement diminuer i
Comparaison des deux modèles (1): Monétaristes : L’augmentation de M génère de l’inflation Il faut contrôler M pour contrôler l’inflation. Keynésiens : L’augmentation de M permet de stimuler l’activité économique On peut pratiquer des politiques monétaires expansionnistes pour réduire le chômage.
Comparaison des deux modèles (2) : Hypothèses monétaristes : V et T constants ? Mc Candless & Weber (1995) : Étude portant sur 110 pays de 1960 à 1990 Relation positive entre M et P Pas de corrélation entre M et Y (sauf pour les 21 pays de l’OCDE. Pour ceux-là : relation positive entre M et Y)
Comparaison des deux modèles (3) : Évolution de M2 et de l’indice des prix à la consommation en Belgique (%age de variation par rapport à l’année précédente)
Comparaison des deux modèles (4) : Évolution de M2 et du PIB en Belgique (%age de variation par rapport à l’année précédente)
3. Les Banques centrales Origines Bilan simplifié d’une Banque centrale Fonctions principales : émission de billets politique monétaire gestion des réserves de change et régulation du marché des changes banquier du Trésor La Banque centrale européenne et l’eurosystème : aspects institutionnels la question de l’indépendance des Banques centrales la politique monétaire de la BCE
Origines : Orfèvre : transforme monnaie métallique en monnaie fiduciaire Au cours du temps, les banques prennent la place de l’orfèvre pour l’émission des billets Si une banque fait faillite : les billets qu’elle a émis n’ont plus de valeur. Création des Banques centrales (BNB : 1850) qui ont le monopole de l’émission des billets.
Bilan simplifié d’une Banque centrale : Actif Passif Or et monnaies étrangères Fonds publics Billets en circulation Dépôts des banques commerciales
Fonctions des Banques centrales (1): Émission des billets : Banque centrale européenne (BCE) décide de la quantité de billets en circulation (en fonction de la politique monétaire) Impression effectuée par les Banques centrales nationales (BCN)
Fonctions des banques centrales (2) : Politique monétaire : Fixation du coefficient de trésorerie obligatoire La Banque centrale, prêteuse en dernier ressort Opérations d’open market
Fonctions des banques centrales (3) : Exemple d’opération d’open market (t=0,2) :
Fonctions des banques centrales (4) : Gestion des réserves de change : Exemple : un importateur échange 1000.000 EUR contre l’équivalent en devises étrangères Bilan de la Banque Centrale : Actif Passif Devises étrangères : -1000.000 EUR Billets en circulation : -1000.000 EUR
Régulation du marché des changes : Fonctions des banques centrales (5) : Régulation du marché des changes : Exemple : hausse du tourisme européen au Japon on a besoin de plus de Yen demande de Yen augmente Taux de change flottant : Taux de change fixe (exemple fictif): O O O’ e’ e e D’ D’ D D La banque centrale vend (donc offre) du Yen afin que le taux de change ne varie pas Le taux de change (e) augmente
Fonction des banques centrales (6) : Banquier du Trésor : Si l’État emprunte à la Banque centrale, la Banque centrale « injecte » de la monnaie dans l’économie. Elle a recours à la « planche à billets » Génère de l’inflation (ex : hyperinflation allemande des années ’20) Interdit par la BCE.
Système européen des banques centrales, Eurosystème et Banque centrale européenne
L'organisation du Système européen de banques centrales (SEBC) Le Système européen de banques centrales (SEBC) se compose de la Banque centrale européenne (BCE) et des banques centrales nationales (BCN) [EN] des vingt-sept États membres de l'Union européenne. Le terme « Eurosystème » est utilisé pour désigner la BCE et les BCN des 17 États membres ayant adopté l'euro. l'objectif principal de l'Eurosystème est de maintenir la stabilité des prix.
La BCE et l’Eurosystème (1): Aspects institutionnels : Eurosystème = BCE + 17 BCN des pays de la zone EURO. Centralisation de décision / Décentralisation opérationnelle. BCE dirigée par le Conseil des gouverneurs : 16 gouverneurs des BCN + 6 membres du directoire chaque membre a 1 voix
Les missions fondamentales relevant de l'Eurosystème consistent à : définir et mettre en œuvre la politique monétaire de la zone euro ; conduire les opérations de change ; détenir et gérer les réserves officielles de change des États membres ; et promouvoir le bon fonctionnement des systèmes de paiement.
EUROZONE Dix-Sept États membres de l'Union européenne utilisent l'euro comme monnaie : Belgique , Allemagne, Estonie, Irlande, Grèce, Espagne, France, Italie, Chypre, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Autriche, Portugal, Slovénie, Slovaquie, Finlande Pays ne participant pas à la zone euro : Bulgarie, République tchèque, Danemark, Lettonie, Lituanie, Hongrie, Pologne, Roumanie, Suède et Royaume-Uni.
La BCE et l’Eurosystème (2): Une banque centrale doit-elle être indépendante ? Pour : Le gouvernement annonce un objectif en terme d’inflation mais il triche : il génère une inflation plus forte. Les agents économiques savent que le gouvernement va tricher ils revendiquent des augmentations de salaire supérieures Les augmentations de salaire génèrent une forte inflation Même si le gouvernement ne triche pas, les agents économiques pensent qu’il va tricher. Solution : la politique monétaire doit être confiée à une Banque centrale indépendante ; elle doit se fixer un objectif prioritaire en terme d’inflation ; elle doit haïr l’inflation
La BCE et l’Eurosystème (3): Une banque centrale doit-elle être indépendante ? Contre : le postulat de l’électoralisme et de l’horizon à court terme du gouvernement n’est pas nécessairement vrai ; les agences indépendantes ne sont pas contrôlées par les instances élues démocratiquement ; les agences indépendantes mettent en oeuvre la politique des milieux dirigeants ; la politique monétaire n’est pas coordonnée avec d’autres politiques économiques.
La BCE et l’Eurosystème (4): la BCE, modèle d’agence indépendante : membres du Conseil des gouverneurs n’ont pas de compte à rendre à leur pays d’origine objectif prioritaire en terme d’inflation la Federal Reserve (BC américaine) : doit rendre des comptes au Congrès deux fois par an le Congrès peut changer le statut de la FED objectif en terme d’inflation non prioritaire : sur le même pied que plein emploi et les taux d’intérêt modérés.
Instruments de la politique monétaire Contrôle de la croissance de la masse monétaire : M3 4.5% par an : M=f(vitesse, croissance PNB, inflation) Politique monétariste OPEN MARKET Cession temporaire : refinancement du système bancaire, prix d’achat et de rachat Opérations fermes Certificats de dette de la BCE : émis par la BCE Opérations sur devises destinées à faire varier M3 Dépôts des IFM auprès de la BCE
Réserves officielles et interventions sur le marché des changes Facilités permanentes : prêteur en dernier ressort, marché au jour le jour Prêt marginal (+) Facilités de dépôt (-) Réserves obligatoires : 2 % : coefficient de réserves obligatoires auprès de la BCE = réserves obl/assiette des réserves Réserves officielles et interventions sur le marché des changes
Organisation : Le Conseil des gouverneurs membres du directoire et des gouverneurs des BCN des États membres ayant adopté l'euro. arrêter les orientations et prendre les décisions nécessaires à l'accomplissement des missions confiées à l'Eurosystème ; définir la politique monétaire de la zone euro, arrêter les orientations nécessaires à leur exécution
Organisation : Le directoire se compose du président, du vice-président et de quatre autres membres. mettre en œuvre la politique monétaire exercer les pouvoirs qui lui sont délégués par décision du Conseil des gouverneurs de la BCE. Organisation : Conseil général président et du vice-président de la BCE ainsi que des gouverneurs des BCN des seize États membres.