Forum des Hauts Fonctionnaires du Budget des Etats Membres de l’AFRITAC Centre (FoHBAC) Démarche de performance dans la gestion budgétaire : cas de la France Frank Mordacq N’Djamena, 8 janvier 2013
La LOLF, réforme budgétaire et réforme de la gestion publique Les principaux enjeux de la gestion «en mode LOLF» Rendre les politiques publiques compréhensibles et lisibles par tous Définir des priorités et leur affecter des moyens Rendre compte au contribuable de l’emploi de sa contribution Orienter la gestion publique vers une logique de résultats Par la responsabilisation accrue des gestionnaires sur des engagements et des objectifs Par la mesure des résultats et de la performance afin de parvenir à une meilleure utilisation des crédits Renforcer la transparence des informations budgétaires et le contrôle parlementaire Par la modernisation de la comptabilité de l’Etat Par une plus grande clarté des choix stratégiques en matière de finances publiques La démarche de performance est au service de l’amélioration de l’efficacité de l’action publique et de l’optimisation des moyens
La LOLF, réforme budgétaire et réforme de la gestion publique La nouvelle présentation du budget et la démarche de performance
I. Le cadre de la performance : le programme 125 programmes pour le budget général Le programme regroupe les crédits (quelle qu’en soit la nature) destinés à mettre en œuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions (600 pour le budget général) Il relève d'un seul ministère Unité de spécialité des crédits Travaux de définition de la performance : fixation des objectifs et indicateurs de résultats Il nécessite un pilotage avec des fonctions managériales 1
Les documents de performance S’engager sur les résultats : le projet annuel de performance (LFI) Rendre compte des résultats : le rapport annuel de performance (LR) Même présentation, même structure que le projet annuel de performance afin de faciliter la comparaison prévisions/réalisation Vote en première lecture sur la loi de règlement n-1 avant l’examen du PLF n+1
La responsabilisation accrue des gestionnaires publics, contrepartie de l’autonomie de gestion
La responsabilisation accrue des gestionnaires publics, contrepartie de l’autonomie de gestion
Les documents budgétaires LOLF : les projets annuels de performance (PAP) Des fascicules par mission Annexes au PLF prévues par l’art.51-5 LOLF, ils récapitulent les crédits (y compris les fonds de concours attendus) et les emplois demandés en les détaillant par programme, action, titre, catégorie Comprenant les projets annuels de performance de chaque programme Présentation des crédits du programme (par nature et destination) et évaluation des dépenses fiscales associées Présentation du programme et de ses actions Présentation des objectifs et des indicateurs de résultats Justification au premier euro des crédits demandés Présentation des principaux opérateurs et de leurs emplois Présentation des coûts du programme et des actions
Les documents budgétaires LOLF : les rapports annuels de performance (RAP) Des fascicules par mission Annexes au PLF prévues par l’art.54-4 LOLF Comprenant les rapports annuels de performance de chaque programme Un bilan stratégique signé du responsable de programme Un rappel de la présentation du programme Pour chaque objectif, les résultats attendus et obtenus des indicateurs, et une analyse des résultats La justification au premier euro, pour chaque titre, des mouvements de crédits et des dépenses constatées Une présentation des réalisations effectives des principaux opérateurs et des emplois effectivement rémunérés La présentation des coûts complets du programme et de ses actions
La notion de performance (1) Un budget orienté vers les résultats Des objectifs déterminés dans le cadre des moyens alloués (≠ budgétisation par objectif) Des objectifs d’amélioration de l’efficacité de la dépense Performance n’est pas rentabilité Article 15 de la déclaration des droits de l’homme
La notion de performance (2) La démarche de performance consiste en un dispositif de pilotage par objectifs mis en place pour améliorer l’efficience, l’efficacité et la qualité de l’action publique au regard de résultats prédéfinis. L’efficacité mesure les résultats relativement aux objectifs prédéfinis Rapport entre le niveau de réalisation des activités planifiées et des résultats escomptés L’efficience mesure les résultats relativement aux moyens engagés Rapport entre le résultat obtenu et les ressources utilisées Alors que l’efficacité est une mesure de résultat, l’efficience mesure les moyens engagés pour arriver au résultat.
III. Les éléments de la performance Un guide méthodologique partagé entre le Gouvernement, le Parlement, la Cour des Comptes et le CIAP Une sélection d’objectifs et d’indicateurs de résultats représentative des priorités du programme Une stratégie pour expliquer la cohérence Des objectifs pour répondre aux attentes du citoyen, de l’usager et du contribuable : un choix politique Des indicateurs pour mesurer la réalisation des objectifs retenus Des objectifs et indicateurs : Qui éclairent les politiques et sont présentés au Parlement dans les PAP et dont il est rendu compte dans les RAP Et sont utilisés et déclinés dans la gestion interne et donnent un sens à l’activité de chaque agent
Les trois axes des objectifs et indicateurs Trois axes définissant chacun une des dimensions de la performance : efficacité socio-économique (point de vue du citoyen) : les effets attendus des politiques publiques qualité du service rendu (point de vue de l’usager) : la qualité exigée efficacité de la gestion (point de vue du contribuable) : l’optimisation des moyens Fournir des indicateurs de mesure des résultats pour chaque objectif en fixant les cibles (niveaux de performance obtenus et attendus) Les objectifs à atteindre sont définis au niveau stratégique puis déclinés à chaque échelon opérationnel : Chaque échelon est libre du choix des moyens à employer pour réaliser les objectifs La démarche de performance permet de piloter puis d’évaluer les choix de gestion effectués
IV. Les critères de la performance Définir les objectifs Principes Explications 1 Objectifs sélectifs couvrant l’essentiel 3 à 4 objectifs par programme 2 Objectifs attestant l’amélioration de la dépense Pas d’objectifs d’activité ou de moyens 3 Objectifs équilibrés entre les 3 points de vue Efficacité socio-économique Qualité de service Efficience de la gestion 4 Objectifs coordonnés Dans le cadre d’une stratégie commune 5 Objectifs compréhensibles : clairs et précis et explicités Notamment indiquer les leviers d’action envisagés 6 Objectifs imputables Pas d’objectifs lointains par rapport au programme 7 Objectifs mesurables Assortis d’indicateur(s) chiffré(s)
Les indicateurs de performance : les qualités attendues Pertinent Lien logique avec les objectifs Permettant de formuler un jugement Représentatif Doit être partagé, reconnu et accepté par tous les acteurs contribuant à l’action visée Compréhensible Clair Immédiatement interprétable Sélectif Justifié Doit permettre de se poser les bonnes questions quant aux objectifs finaux Fiable Robuste Documenté Plan de construction/amélioration Dont la précision de mesure est estimée Doit contribuer à maîtriser l’efficacité de la dépense publique (c’est un élément du contrôle de gestion, et d’aide au pilotage)
Les critères de la performance Des indicateurs chiffrés avec des cibles Valeurs pour l’année du budget à venir Valeurs cibles sur 2 ou 3 ans Si la valeur est atteinte, on change d’indicateur Des indicateurs fiables et documentés 45 % objectifs socio-économiques (en baisse) 19 % qualité de service 36 % efficience (plus qu’en 2006)
Exemple : objectif et indicateur (PAP n+1)
La fiabilité des indicateurs La fiabilité des indicateurs est auditable par les acteurs suivants : Le Parlement La Cour des Comptes Le Comité interministériel d’audit des programmes (CIAP), dans le cadre de ses audits
Quelques exemples de performance 3,4 objectifs par programme 2,1 indicateurs de performance par objectif (en moyenne) Depuis 2010, des indicateurs emblématiques par mission (96) Point de vue Axe d’analyse Exemples d’objectif d’indicateur Citoyen Usager Contribuable efficacité socio-économique qualité du service rendu de la gestion Accroître l’insertion professionnelle des jeunes diplômés % de diplômés ayant un emploi 6 mois après l’obtention de leur diplôme Accélérer les décisions judiciaires Réduire le coût de gestion de l’impôt Durée moyenne des décisions rendues ; Ancienneté moyenne des jugements en cours Coût par redevable d’un impôt
La performance
L’audit des programmes Un comité interministériel d’audit des programmes (CIAP) (créé en 2003) avec les corps d’inspections et une présidence IGF 8 cycles d’audits entre 2003 et 2011 : premiers cycles : audits généraux sur l’ensemble des aspects d’un programme (structure – actions – performance – JPE – opérateurs …) – Tous les programmes audités dernier cycle : des audits centrés sur la performance (pertinence du dispositif / fiabilité des informations produites / restitutions opérationnelles pour les actions du programme) Un contrôle qualité de la cohérence et de la pertinence des informations des programmes Le contrôle de qualité de la mesure des résultats n’est pas une évaluation de la performance En 2012, intégration du CIAP dans le comité d’harmonisation d’audit interne
V. Le pilotage de la performance Pour chaque unité budgétaire (programme, BOP, UO) : Un responsable Un périmètre d’action publique Une stratégie d’activité Un dispositif objectivité de suivi (objectifs, indicateurs avec valeurs cibles) Une enveloppe budgétaire (limitative, ventilée de manière indicative par nature et destination, fongible) La liberté d’action donnée aux gestionnaires publics a pour contrepartie leur responsabilisation sur les résultats attendus de leur activité.
Un système de responsabilité managériale sous l’autorité du ministre Pilotage : le responsable de programme après arbitrage mené par le directeur des affaires financières, dispose des crédits et les répartit pour les besoins de la gestion interne, s’engage sur la performance devant le Parlement : le Projet annuel de performance, rend compte devant le Parlement : le Rapport annuel de performance. La diversité des situations de responsable de programme En gestion : le responsable de budget opérationnel de programme dispose d’un budget opérationnel de programme. s’engage et rend compte dans le cadre du dialogue de gestion au responsable de programme.
VI. L’évaluation de la performance
La performance vue du Parlement français Le rapport de la MILOLF de juillet 2008 pas assez de liens entre les indicateurs nationaux des PAP et les indicateurs locaux la performance est trop déconnectée de l’allocation des moyens (mais la MILOLF reconnaît que ce n’est pas la tendance OCDE) adosser les indicateurs aux lettres de mission des ministres et à la RGPP demande d’une stabilisation de la maquette et de la justification des suppressions / modifications Le rapport de la MILOLF de juillet 2011 justifier systématiquement la hiérarchisation des indicateurs et notamment la présentation des «indicateurs de missions» dans les projets annuels de performances. Poursuivre l’harmonisation des indicateurs de gestion concernant les fonctions supports fusionner les conférences de performance et les conférences de répartition au moment de la préparation du budget ou, à tout le moins, réunir les mêmes interlocuteurs aux deux types de conférences «L’un des succès les plus importants de la LOLF, après cinq ans de mise en œuvre opérationnelle, réside dans aucun doute dans la diffusion de la culture de la performance et du «management» au sein de l’administration grâce à la nouvelle chaîne de responsabilité qu’elle impose».
En conclusion : les retours d’expérience Les points positifs Un vrai changement culturel et une appropriation par les cadres L’intérêt reconnu de la notion de performance comme compte rendu démocratique de la bonne utilisation des crédits Une mise en place d’une rémunération au mérite pour les cadres et d’un intéressement collectif pour les non cadres Un débat de principe clairement tranché Le choix d’un système mixte : indicateurs d’efficacité mais aussi efficience et qualité de service, visant la performance des administrations et déclinables dans les unités de base) la performance d’abord comme outil managérial et non de communication (ministères et Parlement favorables)
Les points à améliorer Sur les éléments de la performance Poursuivre la réduction du nombre d’indicateurs en distinguant mieux les indicateurs ayant leur place dans les PAP et ceux qui relèvent du pilotage interne aux ministères 2006 : 650 objectifs – 1.300 indicateurs 2013 : 420 objectifs – 880 indicateurs Fiabiliser les systèmes de mesures : régulièrement auditer les systèmes de mesure en s’appuyant sur le dispositif d’audit interministériel Standardisation des indicateurs d’efficience : bureautique, immobilière, GRH Harmoniser les définitions d’indicateurs communs à plusieurs programmes (insertion – formation – contrôle) Sur l’usage de la performance Pas assez d’appropriation politique La question de l’évaluation de la performance : les corps d’inspection, la Cour des Comptes, le Parlement Une discussion budgétaire insuffisante axée sur la performance Le lien entre la performance passée et la budgétisation nouvelle
Le lien entre performance et budget (Benchmark OCDE) Trois cas de figure : Absence de lien entre performance et budgétisation : la performance sert à responsabiliser les managers et à donner des informations aux acteurs externes (Grande-Bretagne) Existence d’un lien indirect : les résultats éclairent les choix notamment vis-à-vis des Parlements (les Etats-Unis avec le programme «programme assesment rating tool» (PART) Existence d’un lien direct : une situation rare sauf sur des cas ponctuels dans le domaine de l’enseignement supérieur (Danemark / Royaume-Uni et France) Les limites de la performance dans les retours d’expérience Chronophage complexe et parfois manipulable, ne pas se focaliser sur la vertu d’un indicateur D’où recours le plus souvent à une évaluation plus globale des politiques publiques