Logique et raisonnement scientifique cours transversal Collège Doctoral Pr. Alain Lecomte.

Slides:



Advertisements
Présentations similaires
Algorithmes et structures de données avancées Cours 7
Advertisements

Algorithmes et structures de données avancés
COURS DE MATHEMATIQUES DISCRETES SM
CHAP 1. Les critères de décision en univers non mesurable
Cours d'algorithmique 9 - Intranet 1 12 décembre 2006 Cours dAlgorithmique Logique de Hoare (début) : Principes et constructions élémentaires.
CHAPITRE 2 Nombres entiers, initiation à l’arithmétique- Nombres rationnels.
Termes préfixés et N-uplets
Quantificateurs généralisées A. LECOMTE. SNs quantifiés Tous les écrivains ont aimé les œuvres de Stendhal Un romancier russe est passé hier à la télévision.
La voie intuitionniste
Logique et Raisonnement Scientifique
Logique et raisonnement scientifique
Vers une interprétation « concrète »
Calcul propositionnel
3. Logique et mathématiques De Frege à Gödel. Frege (1848 – 1925) Après que la mathématique se fut pour un temps écartée de la rigueur euclidienne, elle.
Approches formelles en syntaxe et sémantique Alain Lecomte UMR 7023 Structures Formelles de la Langue.
Logique et Raisonnement Scientifique A. Lecomte Gödel et lincomplétude.
Système formel Nous avons introduit : signes de variables (x, y, z, …), de constantes (0, 1), d’opérations (+, ), de relations (=, ) Axiomes : ce sont.
Faut-il brûler la logique classique?
Logique et raisonnement scientifique
Logique et raisonnement scientifique
                                        République Algérienne Démocratique et Populaire Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique.
Logiques Mathématiques
Structures de données linéaires
Preuves interactives: IP, AM, MA et isomorphisme de graphe
Graphes Conceptuels J.F. Baget Inria.
Programmation logique Logique des prédicats du premier ordre
Sémantique axiomatique
INTÉGRALE INDÉFINIE cours 2.
1.2 COMPOSANTES DES VECTEURS
Calcul Relationnel Chapitre 4, Section 4.3.
Probabilités et Statistiques
Programmation logique Démonstrateur automatique
Équations différentielles.
Calcul Intégral Au XVIIIème siècle, les mathématiciens progressent dans deux domaines séparés : les problèmes des tangentes (et la longueur des arcs) et.
Etude dune bibliothèque: Permutations sur les listes.
Espaces vectoriels Montage préparé par : S André Ross
Rappels de logique des prédicats du 1er ordre
IFT Complexité et NP-complétude
CSI 4506: Introduction à l’intelligence artificielle
CSI 4506: Introduction à l’intelligence artificielle
Présentation dans le cadre du congrès mathématique
Partie II Sémantique.
Sémantique dénotationnelle
Database Management Systems 3ed, R. Ramakrishnan and J. Gehrke1 Calcul Relationnel Chapitre 4, Section 4.3.
Modélisation des opérations Spécifier les transformations détat que lon attend des services de la machine Létat dune machine entièrement déterminée par.
Programmation linéaire en nombres entiers : les méthodes de troncature
La Logique des propositions
Programmation fonctionnelle Lambda-calcul
La Logique du premier ordre LPO
Cours n°2UE102e(S. Sidhom) UE 102e. M1.IST-IE cours n°2 Systèmes à base de règles Par : Sahbi SIDHOM MCF. Université Nancy 2 Équipe de recherche SITE –
D.E ZEGOUR Ecole Supérieure d’Informatique
Sémantique logique 2- sémantique de Montague
Raisonnements mathématiques.
Programmation linéaire en nombres entiers
Probabilités et Statistiques Année 2009/2010
Micro-intro aux stats.
D.E ZEGOUR Ecole Supérieure d’Informatique. Problèmes de décision Concepts de base Expressions régulières Notation particulière pour exprimer certaines.
CHAPITRE III Calcul vectoriel
Leçon 4 NOTION DE FONCTION Fabienne BUSSAC.
CSI 4506: Introduction à l’Intelligence Artificielle
Raisonnement et logiques
CHAPITRE 3. Acquisition d’information et révision des croyances
8PRO107 Éléments de programmation Les adresses et les pointeurs.
Systèmes formels 1. Définition d'un SF Morphologie Théorie propre
LOGIQUE ET PROGRAMMATION LOGIQUE
Chap. 3 Récursion et induction. Les définitions par récurrence consistent à construire des objets finis, à partir d'autres, selon certaines règles. Les.
Relation de conséquence logique Nous avons vu une relation entre formules: l’équivalence tautologique (  ) Nous allons définir une nouvelle relation,
Loi de vitesse de réaction
Cycle, Cocycle, Arbre et Arborescence
Qu’est ce que les mathématiques ?  Un travail qui peut être long, fait de rebondissements, de déceptions, de retour en arrière.  Un exemple :  Le grand.
Transcription de la présentation:

Logique et raisonnement scientifique cours transversal Collège Doctoral Pr. Alain Lecomte

7- La logique intuitionniste de Heyting et Kripke à la correspondance de Curry-Howard

Système déductif (déduction naturelle) : de, A |-- B on peut déduire : |-- A B A, B |-- A B A |-- A B B |-- A B A, A B |-- B (modus ponens) A B |-- A A B |-- B de, A |-- C et, B |-- C on peut déduire :, A B |-- C

arbres Élimination de Introduction de A A B B [A] x B A B x

arbres Élimination de Introduction de A B

arbres Élimination de Introduction de A B [A] x [B] y CC A B C x,y

Système déductif (déduction naturelle) de, A |-- B et, A |-- B on peut déduire : |-- A (red. à labsurde) de |-- (x), où x est libre et napparaît pas dans, on peut déduire : |-- x (x) (t) |-- x (x) A, A |-- B x (x) |-- (t) de, (x) |-- C, où x est libre et napparaît pas dans, on peut déduire, x (x) |-- C

Modèle de Kripke On définit une structure comme un triplet (e 0, K, ) où K est un ensemble, e 0 un élément de K et une relation réflexive et transitive (un préordre) sur K Soit P un ensemble de variables propositionnelles, un modèle intuitionniste sur (e 0, K, ) est une fonction : : P K {V, F} telle que: – Si (p, h) = V et si h h, alors (p, h) = V

interprétation Linterprétation quon peut donner est celle dun mathématicien idéalisé dont on modélise lactivité mentale. Celle-ci se structure sous la forme de suites détats, pouvant se représenter a priori comme un arbre. K est donc lensemble des états de la connaissance et e 0 est létat initial. La relation est simplement un ordonnancement des états. On fait lhypothèse dune croissance monotone des connaissances, de sorte que si deux états h et h sont tels que h h et si S h et S h désignent les ensembles de propositions connues dans les états respectifs h et h, alors S h S h

Valeur de vérité dune formule Comme dans le cas de la logique propositionnelle classique, on peut étendre la définition de, initialement définie seulement sur les propositions atomiques, à toute formule propositionnelle, au moyen de la définition récursive suivante: – a) (A B,h) = V ssi (A,h) = (B,h) = V – b) (A B,h) = V ssi (A,h) = V ou (B,h) = V – c) (A B,h) = V ssi pour tout h tel que h h, (A,h) = F ou (B,h) = V – d) ( A,h) = V ssi pour tout h tel que h h, (A,h)= F

commentaires (a) et (b) ne sont pas étonnants : je connais A B dans un état h si et seulement si, dans cet état, je connais à la fois A et B, idem pour A B (c) signifie que A B est connu dans un certain état si et seulement si dans cet état et dans tout état futur, on ne pourra pas connaître A sans connaître B (d) signifie que la négation de A est vraie dans un état si dans cet état et tous les états futurs, A est faux On peut vérifier facilement que la propriété de monotonie vraie pour les atomes lest encore pour les formules quelconques: – Si (A, h) = V alors pour tout h tel que h h, (A, h) = V

remarque Les états peuvent aussi sinterpréter comme des mondes possibles et la relation comme relation daccessibilité sur ces mondes : on obtient alors un plongement dans une logique modale. Nous reviendrons plus loin sur ce point : il sagira de la logique modale S4.

Lensemble K (la formule est vraie à e 0 ) e0e0 e1e1 e3e3 e4e4 e2e2 e 10 e8e8 e9e9 e6e6 e5e5 e7e7 (Le fait quune variable propositionnelle figure à côté du nom dun état signifie que dans cet état, est vraie. Par défaut, est fausse).

Remarque La représentation précédente de la relation était un arbre, or une relation réflexive et transitive ne définit pas toujours un arbre! Un arbre est défini par une relation R antisymétrique stricte vérifiant: – Il nexiste pas de h tel que hRe 0 – Pour tout h e 0, il existe h unique tel que hRh – Pour tout h, e 0 R*h, où R* est la fermeture transitive et réflexive de R Une structure (e 0, K, ) sera appelée une structure arborescente si et seulement si il existe un arbre (e 0, K, R) et que = R* Nous nous limiterons aux structures arborescentes parce que nous pourrons démontrer plus tard que tout modèle peut être remplacé par un modèle arborescent équivalent.

commentaires Selon Kripke (1963), les états sont des instants auxquels on dispose de plus ou moins dinformation. Si à un instant h, on dispose dassez dinformation pour prouver A, alors on dit que (A, h) = V, si nous navons pas assez dinformation, on dit que (A, h) = F. Si (A, h) = V, on dit que A a été vérifié au temps h, si (A, h) = F, que A na pas été vérifié au temps h. Bien noter que (A, h) = F ne signifie pas que A a été prouvé faux au temps h, mais seulement que A na pas (encore) été prouvé au temps h.

Commentaires (suite) Dans ce modèle, le passage de e 0 à e 2 indique que nous avons gagné assez dinformation pour pouvoir affirmer R, en plus de P, Apparemment, le passage de e 1 à e 4 ne fait gagner aucune information (même ensemble de propositions vraies P et Q), il y a cependant un gain dinformation qui réside en ceci que de e 1 on peut passer à e 3, alors que de e 4, on ne le peut plus, donc linformation acquise est celle qui exclut R. e0e0 e1e1 e2e2 e3e3 e4e4 P P,Q P,Q,R P,R

Commentaires -3 Il est préférable de ne pas interpréter V et F comme « vrai » et « faux », par exemple asserter « intuitionnistiquement » A à h ne signifie pas que A « est faux à linstant h », mais que nous naurons jamais aucune preuve de A à partir de linstant h De même, asserter«intuitionnistiquement» que A B à h ne signifie pas que A est faux ou B est vrai à h, mais que dans toute situation future (après h), chaque fois que nous aurons une preuve de A, alors nous aurons aussi une preuve de B.

Formule valide Une formule A est dite valide si et seulement si (A, e 0 ) = V pour tout modèle sur une structure (e 0, K, ) Un modèle sur une structure (e 0, K, ) tel que (A, e 0 ) = F est appelé un contre-modèle de A

Exemples de contre-modèles Dans ce modèle, on a: – (P,e 1 ) = V et (P,e 0 ) = F, – Donc (P P,e 0 ) = F (P est faux en e 0 par hypothèse, mais P est également faux (non V) en e 0 car il sera faux en e 1 ) e0 e1 P Ceci est donc un contre-modèle de P P (le tiers-exclu)

Commentaire 1 Nous trouvons ainsi immédiatement un contre-modèle du tiers-exclu, ce qui signifie que celui-ci nest pas valide en logique intuitionniste Nous ne sommes pas surpris vu que nous savons que la perspective initiale de Brouwer (fondateur de lintuitionnisme) était justement de bannir une telle loi du raisonnement mathématique Intuitivement : à linstant e 0, nous navons pas encore prouvé P, nous ne pouvons pas non plus asserter P puisquil reste la possibilité que nous gagnions plus tard assez dinformation pour aller vers e 1 et ainsi pouvoir asserter P.

Commentaire 2 Cette même structure permet de réfuter: P P – En effet ( P P,e 0 ) = F pour les raisons suivantes: – ( P,e 0 ) = V puisque ( P,e 0 ) = ( P,e 1 ) = F – Mais (P,e 0 ) = F, – donc ( P P,e 0 ) = F

Exercices Prouver que la structure suivante réfute: (P Q) P Q (P Q) (Q P) P Q

Trouver une structure permettant de réfuter ( P Q) (Q P) Trouver une structure permettant de réfuter (P Q) ( P Q) Trouver une structure permettant de réfuter P P

Extension à la logique des prédicats Une structure quantificationnelle est une structure (e 0, K, ) munie dune fonction définie sur K telle que pour tout h K, (h) soit un ensemble non vide et que: – Si h h, alors (h) (h) Un modèle quantificationnel sur une structure quantificationnelle (e 0, K, ) est une fonction à deux arguments telle que: – Si P n est une lettre de prédicat darité n et si h K, si n=0, (P n,h) = V ou F, si n 1, (P n,h) est un sous-ensemble de [ (h)] n – Pour n=0, si h h et si (P n,h)=V, alors (P n,h)=V et si n 1 et h h, alors (P n,h) (P n,h)

Univers et quantificateurs On prend pour univers U défini par: – U = Si P est de la forme P n (x 1, …, x n ) avec n 1, si a 1, …, a n sont des éléments de U assignés respectivement à x 1, …, x n, on a: – (P n (x 1, …, x n ), h) = V ssi (a 1, …, a n ) (P n, h) – (( y)A(x 1, …, x n,y), h) = V pour lassignation de a 1, …, a n à x 1, …, x n ssi il existe b (h) tel que (A(x 1, …, x n,y), h) = V pour lassignation de a 1, …, a n à x 1, …, x n et de b à y, – (( y)A(x 1, …, x n,y), h) = V pour lassignation de a 1,…, a n à x 1,…,x n ssi pour tout h tel que h h, pour tout b (h), (A(x 1,…, x n,y), h) = V pour lassignation de a 1, …, a n à x 1, …, x n et de b à y

commentaire Asserter « intuitionnistiquement » que – Pour tout x, A(x) Cest dire que pour tout x quon pourra choisir dans un état futur, on pourra vérifier A(x) (on aura une preuve de A(x)).

Contre-modèles en logique prédicative Il est possible de montrer au moyen dun contre-modèle que la formule suivante nest pas valide en logique des prédicats intuitionniste:

Contre-modèle Nous avons: (P(x),e0) = (P(x),e1) = V pour lassignation de a à x, mais (P(x),e0) = (P(x),e1) = F pour lassignation de b à x. De plus, (Q,e0) = F et (Q,e1) = V, Doù (( x)(P(x) Q),e0) = V, alors que (( x)P(x) Q,e0) = F (dans e0, on ne peut choisir que a comme assignation à x, et dans ce cas, P(x) est vérifiée donc aussi P(x) Q. Dans e1, on peut choisir a ou b, pour a, P(x) est encore vérifiée, pour b, P(x) ne lest pas, mais Q lest, en revanche pour que ( x)P(x) soit vérifié en e0, il faudrait que P(x) soit vérifié et en a à e0 et en a et en b à e1, ce qui nest pas le cas, quant à Q, elle nest pas vérifiée en e0, donc (( x)P(x) Q,e0) = F.) e0 e1 {a,b}P(a), Q {a}P(a)

interprétation Kripke suggère linterprétation suivante: Supposons que a et b soient les entiers 0 et 1, que R soit le dernier théorème de Fermat (avant quil ne soit démontré!), que Q soit R R. Soit V contenant 0 et contenant 1 si Q est vraie, soit x une variable sur V. Soit P(x) lassertion: x=0. Dans létat e0, on peut asserter V {0, 1} et 1 V ssi Q est vraie, donc on peut asserter ( x)(P(x) Q), mais tant quon na pas atteint e1 (où soit le théorème de Fermat a été démontré soit sa négation la été), on ne peut pas asserter ( x)P(x) Q.

Remarque Cest bien sûr le fait que (h) puisse varier qui est responsable de ce fait, car dans tout modèle où (h) est constant, la formule est vraie! (h) est lensemble des individus connus pour être dans notre univers sur la base de notre information à linstant h (par exemple, dans le cas précédent, 1 nappartenait à lunivers que lorsquon avait pu décider quelle proposition était vraie, du théorème de Fermat ou de sa négation) Noter que pour prouver lexistence dun x dans D tel que P(x), on aura du dabord trouver un élément x dont on a une preuve quil est bien dans D (cf. la condition: « b (h) » dans la clause concernant lexistentielle)

Logique intuitionniste et logique modale déjà Gödel (1933)… possibilité dimmerger LI dans S4 : – On peut associer à toute formule du CP une formule * modalisée telle que: – démontrable dans LI ssi * démontrable dans S4 mais pas linverse!

Une autre sémantique… Une sémantique des preuves Une preuve de est une construction associant à toute preuve de une preuve de Une preuve de est un couple formé dune preuve de et dune preuve de Une preuve de est une fonction qui associe 1 à toute preuve de et associe 2 à toute preuve de

Retour sur limplication Une preuve de est une construction associant à toute preuve de une preuve de – élimination de : à partir dune preuve ( ) de et dune preuve ( ) de, on obtient une preuve de : ( ) : application – introduction de : étant donnée une preuve ( ) de, obtenue au moyen dune hypothèse associée à la variable x, on obtient une preuve de, notée x.

arbres Élimination de Introduction de A A B B [A] x B A B x

arbres Élimination de Introduction de A : A B : B : ( ) [A : x] x B : A B : x. x

-calcul variables = -termes si x et y -termes, x(y) -terme si y -terme et x variable, x.y -terme + typage [[ x. y.[u(x)](y)](a)](b)

-calcul variables = -termes si x et y -termes, x(y) -terme si y -terme et x variable, x.y -terme + typage [[ x. y.[u(x)](y)](a)](b)

-calcul variables = -termes si x et y -termes, x(y) -terme si y -terme et x variable, x.y -terme + typage [ y.[u(a)](y)](b)

-calcul variables = -termes si x et y -termes, x(y) -terme si y -terme et x variable, x.y -terme + typage [ y.[u(a)](y)](b)

-calcul variables = -termes si x et y -termes, x(y) -terme si y -terme et x variable, x.y -terme + typage [u(a)](b)

-calcul variables = -termes si x et y -termes, x(y) -terme si y -terme et x variable, x.y -terme + typage [u(a)](b)

Curry-Howard déduction - élimination - introduction hypothèse hypothèse déchargée normalisation -terme application abstraction variable Variable liée -réduction