CELLULITE ET GANGRENE
PLAN Introduction Définitions Conférence de consensus Clinique Examens complémentaires Bactériologie Thérapeutique Conclusion
INTRODUCTION Ce cours ne portera pas sur les érysipèles et autres infections superficielles non nécrosantes
Définitions
La CELLULITE: terme difficile à employer correspond à des affections variées Aussi appelée dermo-hypodermite bactérienne DEUX TYPES: Dermo-hypodermite bactérienne non nécrosante: érisypèle cellulite aigue correspond à l’atteinte des tissus du derme avec extension plus ou moins importante à l’hypoderme
Dermo-hypodermite bactérienne non nécrosante:
Dermo-hypodermite bactérienne nécrosante: cellulite nécrosante fasciite nécrosante Atteinte des tissus cutanés avec lésion de l’hypoderme ASSOCIEES à des thromboses vasculaires et de la nécrose Fasciites nécrosantes si nécrose de l’aponévrose superficielle
Dermo-hypodermite bactérienne nécrosante:
La conférence de consensus de la SPILF sur la prise en charge de l’érisypèle et de la fasciite nécrosante de Janvier 2000 recommande d’abandonner le terme de cellulite car correspondant à des entités différentes et prêtant trop à confusion On devra parler de: - Dermo-hypodermite bactérienne non nécrosante ( correspondant globalement à l’érisypèle)
Dermo-hypodermite bactérienne nécrosante Si nécrose de l’aponévrose superficielle: Fasciite nécrosante Myosite et myonécrose
GANGRENE: Atteinte des tissus sous-jacents (le muscle) en plus de la dermo-hypodermite On parle plutôt de myonécrose La gangrène correspond à la myonécrose par clostridium perfringens
Classification bactériologique: Giuliano A et coll. Am J Surg 1977; 142:377-83 Dermo-hypodermites nécrosantes de type 1 et 2: TYPE 1: polymicrobienne avec au moins une espèce anaérobie TYPE 2: monomicrobienne (streptocoque du groupe A)
Clinique Ces infections ont fréquemment lieu sur des terrains débilités -diabétique -artéritique -sujet âgé -cancer -immunodépression -cirrhose -alcoolisme chronique -insuffisance rénale, cardiaque, pulmonaire
AINS contestés conférence de consensus de la SPILF sur la prise en charge de l’érisypèle et de la fasciite nécrosante de Janvier 2000
D.C. Elliott, Ann. Surg. 1996(224): 5, 672-683.
D.C. Elliott, Ann. Surg. 1996(224): 5, 672-683.
SUIVANT LA FORME: Dermo-hypodermite bactérienne nécrosante Fasciite nécrosante myonécrose
Dermo-hypodermite bactérienne nécrosante Fasciite nécrosante SIGNES LOCAUX: Tuméfaction douloureuse apparaît en premier Bulles avec liquide clair puis marron ou violacé purpura Douleur locale disproportionnée Annane D et coll. Pathologies infectieuses en réanimation. ELSEVIER Œdème induré diffus dépassant les limites de l’érythème
Les lésions de nécrose sont très spécifiques Profonde: taches cyaniques, bleus grisés, mal limitées, avec une hypoesthésie La crépitation reste possible, en générale secondaire à clostridium perfringens Effraction cutanée retrouvée dans 60 à 80% des cas (plaie, brûlure, ulcère, varicelle)
SIGNES GENERAUX: Fièvre habituelle mais non constante Tachycardie, polypnée Hypothermie, agitation, confusion, hypotension possibles Évolution vers choc septique possible…
Formes sub-aigues possibles avec le diagnostique différentiel de dermo-hypodermites bactériennes non nécrosantes difficile: Recherche de signes généraux de gravité Surveillance pluri-quotidienne des lésions cutanées Examens complémentaires rapides et recours à la chirurgie rapide Avis spécilisés disponibles rapidement si doute
Mortalité proche de 30%
Diagnostique différentiel: Gangrènes ischémiques Pyoderma gangrenosum
Pyoderma gangrenosum Nécrose autour d’une cicatrice opératoire récente, superficielle Avec bordure extensive purulente
TOPOGRAPHIE: Les topographies préférentielles sont la paroi abdominale, le périnée, les extrémités La localisation influe sur le type de lésions retrouvées, les bactéries responsables, le mécanisme déclenchant et les complications Il faut aussi noter la localisation cervicale de part sa gravité potentielle
LOCALISATION ABDOMINALE: Étiologie: -post-opératoire -péritonite -fistule Germes: -polymicrobiennes -entérobactéries, streptocoques -bactérioides, clostridium
LOCALISATION ABDOMINALE: Constamment plurimicrobiennes Le plus souvent des fasciites nécrosantes La localisation thoracique post-chirurgicale s’en rapproche Tomodensitométries d’indication large pour localiser les lésions primitives souvent internes et lésions locales
LOCALISATION AUX MEMBRES
LOCALISATION AUX MEMBRES Étiologie: -morsures, traumatismes, injections -ulcères, maux perforants -post-chirurgicale Germes: -Streptocoques A -Clostridium
LOCALISATION AUX MEMBRES: Très fréquemment à streptocoque A Fréquentes myonécroses
LOCALISATION PERINEALE
LOCALISATION PERINEALE: Étiologie:-post-chirurgie -tumeurs, fistules, hémorroïdes, plaies, abcès, fissures -infections urinaires, lésions urétrales -gangrène idiopathique de Fournier Germes:-polymicrobiennes -entérobactéries, streptocoques -bactérioides, clostridium
Problème diagnostique: Sub-aigue sur 4 à 5 jours avant le diagnostique Souvent simple pesanteur au stade initial Puis aggravation des signes locaux et généraux et extension au cuisse et à l’abdomen Rareté atteinte testiculaire, anale et vésicale car vascularisation distincte Tomodensitométrie peut être utile au stade précoce, voir l’échographie pour rechercher des collections ou des gaz
LOCALISATION PERINEALE: Constamment plurimicrobiennes Extension aux zones du voisinage très fréquentes Mortalité de 19 à 25%
Gangrène de Fournier: Nécrose idiopathique de verge et scrotum idiopathique chez des sujets jeunes d’évolution fulminante Pour d’autres auteurs elle correspond à toutes les DHB-FN périnéales
LOCALISATION CERVICO-FACIALE:
LOCALISATION CERVICO-FACIALE: Étiologie: -post-chir ou soins dentaires, trauma -angine, infection dentaire -orostome post-radique Germes: -polymicrobiennes -entérobactéries, streptocoques -fusobacterium, Porphyromonas
LOCALISATION CERVICO-FACIALE: Rares Deux sous types: -scalp et péri-orbitale post-traumatique monomicrobiennes -secondaires à infections locales,dentaires, auriculaires plurimicrobiennes et extensives
LOCALISATION CERVICALE: GRAVE: 38 à 50% de mortalité Diagnostique précoce difficile Première phase avec avec signes modérés( douleur, gêne, œdème) Seconde phase explosive: extension locale jusqu’au thorax avec médiastinite possible dont le pronostic est redoutable Dans 40% des cas le médiastin postérieur est atteint Examen tomodensitométrique+++
LOCALISATION CERVICO-FACIALE Complications: Obstruction voies aériennes supérieures Pneumopathies de déglutition Thrombose jugulaire ou thrombophlébite cérébrale
Myonécrose et gangrène 0,2 cas pour 100.000 habitants Porte d’entrée traumatique dans la moitié des cas Cause chirurgicale fréquemment retrouvée Lésions locales diverses aussi possibles Elles peuvent aussi être spontanées rechercher une cause digestive
Incubation courte de 6 heures à 6 jours Début marqué par douleur vive permanente, croissante Signes locaux limités initialement: -plaie atone,froide,tendue,pale, légérement érythémateuse -retentissement général limité
Puis évolution rapide avec: -œdème et aspect de peau bronzée -ecchymoses et phlyctènes -liquide purulent s’échappant pas la peau -crépitation neigeuse fréquente Signes généraux s’y associent Muscles insensibles, atones à l’incision
Goulon M. Les anaérobies. MASSON 1981; 185-99 Mortalité supérieure à 20% des cas Extension au tronc (67% de décès!!!), age élevé, caractère spontané de la myonécrose et retard de prise en charge sont des facteurs de mauvais pronostique Goulon M. Les anaérobies. MASSON 1981; 185-99
Examens complémentaires Possibles mais ne doivent pas retarder le traitement Aucun d’entres eux n’est validé comme élément décisionnel formel
Examens complémentaires Dermo-hypodermite bactérienne nécrosante Fasciite nécrosante Biologie Imagerie biopsie
Examens complémentaires BIOLOGIE: Peu spécifique Syndrome inflammatoire Augmentation urée CIVD Doser les CPK: si élévation…MYONECROSE
Examens complémentaires IMAGERIE: Radiologie conventionnelle toujours utile car elle peut mettre en évidence de l’air IRM semble intéressante: -hypersignal hypodermique renforcé par le gadolinium -de plus permet de connaître la profondeur de la nécrose -bonne sensibilité mais mauvaise spécificité
Examens complémentaires Biopsie: Problème technique important car doit être profonde jusqu’au fascia Peut permettre une analyse bactériologique des tissus Interet potentiel dans les cas douteux Difficile à recommander
Examens complémentaires Hémocultures positives jusqu’à 40% des cas
Examens complémentaires Myonécrose et gangrène Le diagnostique est avant tout clinique Le traitement ne doit prendre aucun retard Les radiographies peuvent montrer de l’air dans les tissus La chirurgie fait le diagnostique visuellement
Bactériologie Dermo-hypodermite bactérienne nécrosante Fasciite nécrosante La cause la plus fréquente en est le streptocoque du groupe A, seuls ou associés à d’autres germes Incidence de 1 à 3 pour 100.000 habitants KAUL R. et coll. Am J Med 1997. 103:18-24
Bactériologie D’autres germes possibles comme les entérobactéries, les staphylocoques Les anaérobies rencontrés sont bacterioides, clostridium, peptostreptococcus, fusobacterium Les DHB-FN polymicrobiennes sont fréquemment rencontrées sur un terrain prédisposé
Bactériologie Ponctions sous cutanées possibles si doute diagnostique: Si charge bactérienne forte et polymorphisme de celle-ci c’est un argument pour une forme nécrosante de dermo-hypodermite Prélèvements per-opératoires et examen direct obligatoires
Bactériologie Myonécrose et gangrène Dans 80 à 90% des cas le germe impliqué est un clostridium Mais bacterioides fragilis, peptostreptococcus et fusobacterium sont possibles
Thérapeutique Antibiothérapie Chirurgie Oxygénothérapie hyperbare Mesures générales de réanimation Immunoglobulines intraveineuses
Thérapeutique Urgence!!! D’après Giuly E. et coll. AFAR 2006; 25: 978-81
Thérapeutique Antibiothérapie DHB-FN: Elle doit être rapidement instaurée et ne pas retarder la chirurgie Elle doit être adaptée aux germes retrouvés et à la localistion de l’infection Toujours intra-veineuse
Thérapeutique Localisation aux membres: -fréquence élevée des streptocoques mais aussi des anaérobies -Pénicilline G associée clindamycine ou rifampicine conférence de consensus de la SPILF sur la prise en charge de l’érisypèle et de la fasciite nécrosante de Janvier 2000
Thérapeutique Cervico-faciale: -pénicilline G et clindamycine ou rifampicine Abdomen et périnée: -pénicilline à large spectre (uréidopénicilline) et imidazolé +/- aminoside conférence de consensus de la SPILF sur la prise en charge de l’érisypèle et de la fasciite nécrosante de Janvier 2000
Thérapeutique Post-opératoire: -associer un aminoside CAS PARTICULIERS: -toxicomane: -penser au staphylocoque si atteinte membre supérieur -association anti-staphylocoque avec aminoside
Thérapeutique Patient immunodéprimé: -risque important de pseudomonas aeruginosa -C3G (ceftazidime) ou pipéracilline-tazobactam associés à un aminoside
Thérapeutique Durée antibiothérapie: 10 à 15 jours suivant l’évolution clinique
Thérapeutique Antibiothérapie Myonécrose et gangrène Clostridium sensible à la pénicilline mais pas les bacterioides Association clindamycine avec soit nitro-imidazolé ou pénicilline et inhibiteur des bêta lactamases est recommandé Durée: 10 jours en moyenne conférence de consensus de la SPILF sur la prise en charge de l’érisypèle et de la fasciite nécrosante de Janvier 2000
Thérapeutique Chirurgie EN URGENCE Chirurgiens spécialisés et expérimentés Chirurgies multiples et pansements répétés
Thérapeutique PRINCIPES: -incision: qui confirme l’aspect nécrotique -exploration: elle seule permet de déterminer la limite des tissus atteints -excision: large jusqu’au tissus sains marqués par l’apparition de tissus sain sur la tranche -reprises: dès le lendemain car l’excision est rarement complète initialement -traitement porte d’entrée
Thérapeutique Forme périnéale: -dérivations urinaires et digestives fréquentes -organes génitaux externes réimplantés temporairement dans le tissus graisseux sous cutané
Thérapeutique
Thérapeutique Le retard de prise en charge chirurgicale est un facteur de risque de mortalité majeur retrouvé dans diverses études 6,8% de mortalité versus 24,8% si chirurgie à lieu 24 heures après l’admission dans l’étude de Wong CH et coll. (J Bone Joint Surg 2003; 85A: 1454-60)
Thérapeutique Oxygénothérapie hyperbare PRINCIPE: Anaérobies et clostridium perfringens en particulier sont très sensibles à l’O2 -Effet bactériostatique -Inhibition de la production de toxine
Thérapeutique Amélioration de la survie de chiens si associé à antibiothérapie et chirurgie comparé à chirurgie et antibiothérapie seules 95 versus 70% dans le cadre de myonécrose DEMELLO FJ. Surgery 1973; 73:936-41 Pas de preuve formelle chez l’homme Principe: 2 à 3 séances de 1 à 2 heures par jour pendant 4 à 7 jours
Thérapeutique Mesures générales de réanimation Réanimation symptomatique Penser à l’hypercatabolisme Protection des voies aériennes si atteinte cervico-faciale
Thérapeutique Immunoglobulines intraveineuses Il semblerait il y avoir un intérêt si un streptocoque du groupe A est mis en évidence dans ce genre d’infections Darenberg J et coll. Clin infec Dis 2003; 37: 333-40 Moins de défaillances multiviscérales à J1 et J2. Mais effectif insuffisant pour démontrer une différence de mortalité (21 patients inclus)
Conclusion Multiples problèmes: 1- diagnostique parfois difficile et qui doit être rapide 2- formes anatomiques diverses avec prises en charge spécifique 3- Traitement urgent et hautement qualifié