Imaginez… Imaginez un village africain écrasé de soleil. Des cases blanches au toit de paille. Volailles et cochons. Chacun vaque à ses occupations.
Tout à coup, dans un bruit assourdissant, une de ces drôles de machines comme il passe dans leur ciel de plus en plus souvent. Mais celle-ci passe si près d’un jeune aigle… L’a-t-il frôlée ?
L’oiseau tombe lourdement et s’abat entre les cases. Il ne semble pas blessé, plutôt choqué, et refuse de bouger, encore plus de s’envoler !
Notre aigle fait l’amusement de tout le village. Et les enfants sont ravis ! Mais les ménagères protestent : il mange de plus en plus, comment arriver à le rassasier ? Et les Anciens du village ont pitié de ce roi des cieux qui ne sait pas voler…
Les enfants font diverses tentatives. L’aigle bat des ailes, vigoureusement… Mais se laisse pesamment retomber au sol. Il est évident que cet oiseau a pris des habitudes de paresse, ou peut-être que la peur lui a ôté toute envie de parcourir les cieux, au risque d’y faire encore de périlleuses rencontres.
Quelqu’un a une idée : sûrement, ça va marcher ! Il suffit de lâcher le volatile récalcitrant du haut d’un toit… Hélas, le volontaire pour cette tentative manque se rompre le cou, et l’aigle tombe lourdement à terre, déployant à peine ses ailes.
Tous décident d’aller consulter le Gand Sage du village : “J’ai vu vos efforts, dit celui-ci, mais ils sont vains. Cet oiseau a oublié qu’il est Fils du Soleil. Il est capable de voler, mais ne partira vers son domaine, les cieux, que lorsque il retrouvera dans ses prunelles l’éclat aveuglant du soleil, que lui seul est capable de regarder en face.”
Le Grand Sage leur donne la marche à suivre : amener l’oiseau sur le haut de la montagne, sans lui montrer la lumière du jour qui se lève, et tout à coup le mettre face à la clarté du soleil levant. Et il ne pourra résister à l’appel.
Lourd est le grand oiseau, lointaine est la montagne… Deux hommes décident de partir. A la lune naissante, ils capturent l’oiseau endormi et, le cachant à tour de rôle sous leur burnous, ils se mettent courageusement en route, désireux de rendre sa dignité au roi du ciel, fils du soleil…
La route est longue, certains passages dangereux ; l’un après l’autre, ils franchissent les sentiers abrupts, conscients d’accomplir une noble tache.
Ils atteignent leur but juste à temps, quand le soleil incandescent commence à embraser l’horizon.
Le cœur battant, l’aigle toujours caché sous leur burnous, ils attendent que la clarté soit aveuglante, et triomphe totalement des ténèbres.
Alors, ils dégagent l’aigle, le posent sur un surplomb, face à cette triomphante lumière, et l’exhortent : “Vole, bel aigle ! Vole !” L’aigle fixe sans ciller cette éblouissante clarté, et, après un ou deux battements d’ailes, prend triomphalement son envol.
Le cœur battant, les deux hommes le regardent se diriger droit vers le soleil, et se fondre dans sa clarté. Le Maître du Ciel, grâce eux, a retrouvé sa dignité…
- Texte lu par Yvonne Ollier -Musique : jingles originaux improvises pour vous par Arnaud Lepresle Enregistrement réalisé aux Studios Noctambule, 12 rue des Fougères 58 SAINT ELOI Tél : Diaporama de Jacky Questel, ambassadrice de la Paix