Introduction au droit comparé

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Transcription de la présentation:

Introduction au droit comparé Professeur Sophie ROBIN-OLIVIER Ecole de droit de la Sorbonne Année universitaire 2015-2016

Premiere Partie : Introduction a l’analyse comparative Chapitre 1. La démarche comparative et le droit Section 1. Qu’est ce que comparer ? Section 2. Pourquoi comparer ? Section 3. Les relations entre le droit comparé et d’autres branches du droit (droit européen, droit international privé) Section 4. Le droit comparé et la mondialisation du droit Chapitre 2. Questions de méthode Section 1. La diversité des méthodes Section 2. L’adaptation de la méthode aux objectifs de la comparaison Chapitre 3. Diversité des droits et familles juridiques

Chapitre 3. Diversité des droits et familles juridiques Section 1. Origine et développement des familles juridiques Section 2. Critique du concept de famille juridique

Zweigert et Kötz : 8 « Rechtkreise » (régions de droit) 1- les droits romanistes, 2- les droits allemands, 3- les droits nordiques, 4- le Common Law, 5- les droits socialistes, 6- les droits d'Extrême-Orient, 7- le droit islamique, 8- le droit hindou

A noter : Classification fortement inspirée de la classification mise au point par Arminjon, Nolde et Wolff, 1950 Evolution de la classification (1998) 4 premiers groupes + 4 familles regroupées en deux catégories : les droits d’extrême orients (droit chinois + droit japonais) et les droits religieux (droits islamiques + droit hindou).

Critères (Zweigert & Kötz) Identification de styles juridiques, traits stylistiques distinctifs Recherche des qualités distinctives importantes ou essentielles Plusieurs critères (dont le poids relatif varie) : évolution historique (et les racines historiques, ex du common law) mode de pensée juridique (mentalité, legal thinking : par ex, recours aux normes abstraites, raisonnements déductifs/inductifs…) institutions distinctives (ex : le trust en common law, la cause/enrichissement sans cause en droit romano-germanique) sources du droit (serait un critère d’importance mineure mais importance relative de la jurisprudence et de la loi jugée significative) idéologie (influence de la religion ou d’une idéologie politique) Et aussi : étonnement suscité par tel ou tel aspect du droit d’un autre système.

Entreprise taxinomique florissante …mais parfois dérangeante 4 familles de droits: les droits aryens et indo-européens les droits sémitiques les droits mongols et les droits barbares ( africains et mélanésiens notamment ). Critère : la race « C’est à l’intérieur de chaque race que nous pouvons constater une évolution juridique particulière » G.SAUSER-HALL Fonction et méthodes du droit comparé (1913)

Section 2. Critique du concept de famille juridique Critique d’une classification qui s’établit selon des critères trop vagues, contestables (marque d’un certain désintérêt pour la question de la classification) Preuve du caractère contestable ? Il existe au moins 30 propositions différentes de regroupement des ordres juridiques dans des systèmes juridiques plus large, des « familles » Constantinesco

Relativité de la classification Classification dépend de la matière Les classifications sont souvent l’œuvre de privatistes, peuvent fort bien ne pas valoir pour le droit public Ex du droit allemand, qui appartient bien à la famille germanique pour le droit privé mais pour le droit public, on pourrait de placer avec les droits américain et italien (et non avec le droit français ou britannique) Classification dépend de l’époque considérée Changements dans les droits impliquent une difficulté dans la classification. Ex du droit russe… ZWEIGERT et KÖTZ

L’impossibilité de la classification ? Cas des droits mixtes Ex : Egypte (droit civil et droit musulman) Bangladesh (Common Law et droit musulman) Indonésie (droit civil, droit musulman, droit coutumier) Droit canadien (bijuridisme)

La fin des familles ? ‘certains comparatistes estiment que la classification en « familles juridiques » a vécu et que d’autres devraient y être substituées’ B. Fauvarque-Cosson Mélanges Blanc-Jouvan Qu’en penser aujourd’hui ? Qu’en faire ? Utilité dans le cadre de l’harmonisation des droits en Europe ?

Les familles comme simples repères Ex : dans l’Union européenne, distinction de la famille de Common Law et famille des droits romano-germanique

Un dépassement possible : La notion de “legal culture” ? “The concept of Legal Cultures”, D. Nelke, 2004 Legal culture : valeurs, pratiques, concepts qui composent une culture juridique donnée Identification des éléments culturels dont le droit est une expression, et qui déterminent une certaine attitude vis a vis du droit, des institutions juridique et des interprétations de la loi EX: Western legal culture v Non western legal culture (M.A. Glendon)

DEUXIEME PARTIE : LES SOURCES DU DROIT DANS LES DIFFERENTS SYSTEMES JURIDIQUES Chapitre 1. Les rapports entre la jurisprudence et la loi Section 1. La prééminence de la loi dans la famille romano-germanique Section 2. Le développement jurisprudentiel du droit dans la tradition de Common Law   Chapitre 2. La place de la Constitution Section 1. Les modèles de justice constitutionnelle Section 2. Le rôle de la Constitution et la question de la souveraineté parlementaire Section 3. Le rôle de la Constitution dans la protection des droits et libertés fondamentaux Chapitre 3. L’influence du droit européen et du droit international Section 1. La variété des effets du droit international en droit interne Section 2. Les méthodes d’incorporation du droit européen en droit interne

Le concept de source du droit Approche conceptuelle de la comparaison ? Objectifs de cette comparaison ? Tester la validité du classement en familles juridiques Répondre / approfondir des questions posées en droit interne (rôle de la constitution, influence du droit international dans le développement du droit…)

Sources et “legal formants” Rodolpho Sacco, “La comparaison juridique au service de la connaissance du droit” (1991) Formants = “facteurs modelant le droit” Ensemble des facteurs qui contribuent aux solutions qui sont et seront retenues Sources du droit au sens formel = sources des règles juridiques = sous-ensemble des “formants”

Les formants implicites ou“Cryptotypes” Non formulés/invisibles pour les juristes nationaux Nécessité de la comparaison pour les faire apparaître Importance : traits permanents du système juridique (loin de la contingences des “règles juridiques”)

Exemples Préférence des juristes français et italiens pour les règles générales et des juristes anglais et américains pour des règles plus étroites (proches des cas) Importance des traités (text books) pour les civiliste / préférence pour les case books pour les common lawyers

Idée : examiner les formants pour mieux comprendre le système juridique qui est le fruit de leur interaction Par ex : désaccords possibles entre loi, jurisprudence, doctrine, pratique… => relativité de la règle La comparaison impose de ne pas s’en tenir à l’un d’entres eux seulement

Ex.: l’offre unilatérale non acceptée lie-t-elle l’offrant en droit français ? Cciv, art. 1108 : validité d’une convention dépend du consentement “de la partie qui s’oblige” Mais art. 1101 : contrat = accord de volontés = cciv ne permet pas de connaître le droit tel qu’il est appliqué Doctrine : accord de volonté nécessaire sauf exceptions, par ex si destinataire de l’offre n’a aucune raison de refuser car offre faite dans son intérêt exclusif (Demolombe) Cour de cassation : même solution et précise (motifs) que silence peut parfois valoir consentement

Conclusion R. Sacco : il n’existe pas a priori une règle de droit que l’on peut identifier mais une variété de références juridiques, contenues dans différentes sources juridiques, qui peuvent se contredire Processus de sélection /interprétation pour pouvoir déceler la règle telle qu’elle est appliquée Importance de la connaissance des sources (legal formants) et de leurs interactions dans les différents systèmes juridiques car elles déterminent le développement du droit

Chapitre 1. Les rapports entre la jurisprudence et la loi Section 1 Chapitre 1. Les rapports entre la jurisprudence et la loi Section 1. La prééminence de la loi dans la famille romano-germanique Section 2. L’importance de la jurisprudence dans la tradition de Common Law

Section 1. La prééminence de la loi dans la famille romano-germanique ? “culte de la loi” en France Idée : la loi est la forme la plus achevée du droit (XVIIIème s.) “Dieu nous garde de l’équité des parlements” Article 5 de la Constitution de l’an III (1795) concernant les devoirs du citoyen : “nul n’est homme de bien s’il n’est franchement et religieusement observateur des lois” La loi, fruit de la volonté générale Statut élevé de la loi dans la hiérarchie de normes Plus récemment : lien entre développement de la loi et Etat providence

§1. Les facteurs historiques §2 §1. Les facteurs historiques §2. La question de l’interprétation de la loi

§1. Les facteurs historiques Importance de la codification dans la famille romano-germanique Influence du droit romain Codifications des XIX et XXèmes s.

L’influence du droit romain Code Justinien (VIème s.) Corpus Juris Civilis Entre 527 et 585 Monumentale compilation du droit romain / oeuvre des juristes byzantins pour préserver l’héritage romain après la chute de l’empire romain d’occident en 410

Corpus juris civilis Quatre parties Institutes : livre d’introduction pour les étudiants Le Digeste Le code : regroupement systématique de la législation romaine Les nouvelles : législation impériales adoptées après l’achèvement du Digeste et du code

Le Digeste Une commission rassemble les écrits des juristes pour en extraire des citations et les classer par matière => Recueil méthodique d'extraits des opinions et sentences des juristes romains Cinquante livres, divisés en titres, portant sur l'ensemble du droit privé = personnes, propriété, obligations, droit successoral, justice et droit pénal Chaque titre traite d'une question précise en juxtaposant des citations et en indiquant les solutions proposées par les juristes, mentionnées avec le nom de l'auteur et la référence de l'ouvrage.

Renaissance du droit romain XIème s Université de Bologne Enseignement du Corpus juris civilis

Glossateurs Exégètes – explication des textes, des mots, du Digeste Glose = annotation du Digeste Auteurs Irnerius (début du XIIème s.), père des glossateurs Accurse (XIIIème ss.), Grande Glose (rassemble 96 000 annotations) Méthodes Illustration par des cas (fictifs ou tirés de la pratique judiciaire) - Casus Aperçu général sur le contenu de la loi - Summa

Post-glossateurs XIIIème- XIVème s. Adaptation du droit romain au contexte de l’époque – au-delà de l’analyse littérale Bartolus Balde

Diffusion de l’enseignement du corpus juris civilis Juristes formés à Bologne : professeurs, juristes au conseil des princes, des cités, de l’église… Idée : traiter les cas en leur applicant un texte abstrait impératif Droits médiévaux romano-germanique Droit romain renouvelé

Jus commune Droit civil romain + travaux des glossateurs et post-glossateurs + droit canonique Revu, romanisé par la doctrine de l’Université de Bologne (Gratius, XIIème s.) = Base de construction des droits en Europe

Conclusion Importance des règles abstraites (corpus juris civilis) Importance de la doctrine universitaire

La réception du droit romain Au Moyen-âge, absence d’Etats centralisés et forts Le droit n’est pas une émanation de la souveraineté Diversité des droits qui s’appliquent cours ecclésiastiques : droit canonique tribunaux des corporations : usages du commerce juges : coutume locale puis, si lacune et avec l’aide de la doctrine universitaire, le jus commune

Importance croissante du jus commune Facteurs développement économique nouveaux problèmes posés par une économie plus complexe enthousiasme de la doctrine juridique Application facilitée par une certaine familiarité

Processus de réception Le droit privé romain renouvelé (par les travaux des juristes italiens et le droit canonique) quitte l’université pour les cours royales

Variations Italie : l’influence du droit romain était restée si forte que l’on peut à peine parler de « réception » Espagne : forte tension entre le jus commune et les coutumes locale France : différenciation entre les régions du sud et du nord de la Loire

Allemagne Forte influence du jus commune : considéré comme le droit commun de l’empire (XVIème, XVIIème s.) Cour impériale centralisée (1495) : juges tenus d’appliquer le jus commune, sauf preuve d’une coutume ou d’une loi locale (difficulté de cette preuve => application fréquente du droit romain). Faible résistance à l’influence du jus commune dans l’empire germanique : absence de résistance d’un corps de juristes influents, d’une juridiction centralisée ou d’un corps de droit « germanique » Besoin d’unifier le droit face aux difficultés posées par la multiplicité des coutumes locales dans les nombreux petits territoires de la confédération germanique

Conséquences de la réception du droit romain en Allemagne Une systématisation du droit beaucoup plus complète qu’ailleurs Des liens étroits entre les juges et l’université Jusqu’au XIXème s, les juges font appel à l’expertise des universitaires Constitution d’un corps de doctrine, systématisé en traités, reflétant les opinions doctrinales sur des cas soumis à l’université = sorte de droit jurisprudentiel « case law », regroupé dans des œuvres doctrinales

Les codifications européennes Facteurs Politiques (montée des nationalismes, consolidation du pouvoir royal) Philosophiques (rationaliser le droit par une compilation structurée, ordonnée, réfléchie, principes d'un droit universel moderne, par opposition aux règles locales inspirées par des considérations d'opportunité)

Codifications scandinaves XVII et XVIIIème s. Code de Christian V (Danemark - 1683 ; Norvège - 1687) Code du Royaume de Suède dit “code de 1734”

Codes inspirés de la philosophie des “lumières” Exemple du code prusse (1794) Frédéric II, ami de Voltaire Des systèmes juridiques rationnels, systématisés et complets seraient un progrès par rapport au droit traditionnel => Rejet du jus commune au profit d’un droit de l’Etat

Echec du code prusse Ambition de régler par le détail tous les aspects des conduites humaines Volonté excessive de précision Ignorance des limites de la loi Absence totale de liberté des juges pour interpréter le code

Le code civil des français Le code civil français Ancien régime 1804 En France, un voyageur change de droit aussi souvent que de monture Voltaire  Le code civil des français Napoléon

Méthode Rédaction très rapide (4 mois) Commission composée de 4 juristes éminents (Portalis, Maleville, Bigot de Préameneu, Tronchet) Forme : proche des Institutes de Justinien (personnes, propriété, des différentes manières d’acquérir la propriété)

Influences Jus commune Révolution française (contenu intellectuel, politique et social) Droit coutumier et en particulier la coutume de Paris (écrite au XVIès), Droit naturel Ordonnances royales Doctrine…

Trois piliers idéologiques : la propriété privée, la liberté contractuelle, la famille patriarcale Rôle de l’Etat : protection de la propriété privée, garantir l’exécution des contrats légalement formés, assurer l’autonomie de la famille sous l’autorité du père.

Style Style clair, articles concis Destiné à être compris des citoyens Conscience des limites de la loi La loi ne peut pas tout prévoir => des règles générales, non des dispositions détaillées

Portalis Discours préliminaire au premier projet de code civil « nous avons été frappés de l’opinion, si généralement répandue, que, dans la rédaction d’un code civil, quelques textes bien précis sur chaque matière peuvent suffire, et que le grand art est de tout simplifier en prévoyant tout. Tout simplifier est une opération sur laquelle on a besoin de s’entendre. Tout prévoir est un but qu’il est impossible d’atteindre. »

Nous nous sommes également préservés de la dangereuse ambition de vouloir tout régler et tout prévoir. Qui pourrait penser que ce sont ceux mêmes auxquels un code paraît toujours trop volumineux, qui osent prescrire impérieusement au législateur la terrible tâche de ne rien abandonner à la décision du juge ? … Les besoins de la société sont si variés, la communication des hommes est si active, leurs intérêts sont si multipliés et leurs rapports si étendus, qu’il est impossible au législateur de pourvoir à tout. Dans les matières mêmes qui fixent particulièrement son attention, il est une foule de détails qui lui échappent, ou qui sont trop contentieux et trop mobiles pour pouvoir devenir l’objet d’un texte de loi. Un code, quelque complet qu’il puisse paraître, n’est pas plutôt achevé, que mille questions inattendues viennent s’offrir au magistrat. Car les lois, une fois rédigées, demeurent telles quelles ont été écrites ; les hommes , au contraire, ne se reposent jamais ; ils agissent toujours ; et ce mouvement, qui ne s’arrête pas, et dont les effets sont diversement modifiés par les circonstances, produit à chaque instant quelque combinaison nouvelle, quelque nouveau fait, quelque résultat nouveau.

Contraste Ouverture de Portalis à une doctrine et une jurisprudence créatrices Méfiance de la doctrine du XIXème s. à l’égard des juges

Le code civil allemand Contexte politique Jusqu’en 1871 (unification réalisée par Bismarck), l’Allemagne demeure une confédération de royaumes, duchés, principautés, villes-Etats… Contexte juridique Au cours de XVIIè et XVIIIè s, la doctrine allemande introduit progressivement un contenu proprement germanique dans la structure romaniste, pour adapter le droit aux conditions de l’époque

Controverse autour de l’idée du code Thibaut (professeur de droit romain) Pour la défense de l’adoption d’un code sur les modèles français, prusse et autrichien, comme moyen de renforcer l’unification politique Savigny (figure dominante de l’école dite historique) Le droit comme le langage fait partie de la culture, du génie d’un peuple Ne dépend pas de la logique et de principes abstraits de droit naturel Suppose une analyse préliminaire approfondie de l’évolution des institutions allemandes

Le point de vue de Savigny prévaut Abandon au cours de l’approche jus naturaliste des codes préférence pour une science du droit systématisant les concepts et principes issus du droit germanique et du droit romain

Parallèlement : Tentatives pour découvrir dans le droit romain des principes sous-jacents qui pourraient être adaptés Etude approfondie et systématique du Digeste par les juristes allemand (Pandectistes) A partir de l’école historique, approche non historique du droit par les pandectes (croyance en la supériorité et permanente valeur des institutions romaines, considérations sociales, éthiques, économiques et pratiques moins centrales)

Influence pandectiste sur le code civil allemand Solution puisées dans le droit romain, pas toujours satisfaisantes Ex : sur exécution déféctueuse du contrat, rien sur la mauvaise exécution mais seulement retard et impossibilité Ex : responsabilité de l’employeur, pour ses propres fautes seulement, non celles de ses salariés

Méthode Vingt ans de travail 1874 : pré commission pour fixer le plan du futur code et réfléchir à sa méthode d’élaboration La même année : première commission pour rédiger le code. 11 membres : 8 juges et 3 professeurs d’universités G. PLANCK (homme politique libéral devenu haut magistrat) B. WINDSCHEID (professeur d’université, spécialisé en droit romain) + Travail d’harmonisation nécessaire pour rendre homogène l’ensemble des 5 parties. 873 séances communes pour aboutir à une première édition du code Code promulgué en 1896, avec entrée en vigueur 4 ans plus tard (1900)

Style Code pandectiste (ni romain, ni germanique) Précision Utilisation d’un langage particulier Références croisées destinées à mettre en relation les différentes parties du code (système logique clos) construction d’un système destiné à des experts très avertis (ce n’est pas un manuel pour le citoyen) Ni la prolixité du code prusse ni la concision du code français

5 livres Partie générale Obligations Propriété Famille Successions Structure 5 livres Partie générale Obligations Propriété Famille Successions

Partie générale Fruit de l’école pandectiste Abstraite – marque de la préoccupation “scientifique” du code Règles générales (s’appliquent à tout le droit privé sauf raisons propres à un domaine pt) Code = système complet et cohérent de règles

Clauses générales § 242 (livre II) Treu und Glauben § 138 I (livre I) Guten Sitten

Impact des clauses générales Pouvoir donné aux juges Pour adoucir les règles très strictes dans les cas particuliers (justice des cas) Adapter le code aux évolutions sociales, économiques… Voie d’entrée de certains objectifs politiques ou de certaines valeurs Cour constitutionnelle invite les juges à tenir compte des droits fondamentaux dans l’application des clauses générales

Comparaison avec le cciv français cciv français (avant réforme), art. 2279 : “ en fait de meubles, possession vaut titre” Critique allemande : qu’est ce que la possession ? La bonne foi est-elle requise ? A quoi se reconnaît-elle ? Bürgerliches Gesetzbuch, § 937 (Voraussetzungen, Ausschluss bei Kenntnis) “(1) Wer eine bewegliche Sache zehn Jahre im Eigenbesitz hat, erwirbt das Eigentum (Ersitzung). (2) Die Ersitzung ist ausgeschlossen, wenn der Erwerber bei dem Erwerb des Eigenbesitzes nicht in gutem Glauben ist oder wenn er später erfährt, dass ihm das Eigentum nicht zusteht.” Bien plus long et technique …mais répond à l’essentiel des questions que se posent les juristes français