Le Romantisme: l’idée, le style Le néoclassicisme et le romantisme couvrent la période de 1750 à 1850, le temps de la Révolution industrielle et des révolutions politiques qui l’accompagnent, et sont tous les deux réactions contre les artifices du baroque et du rococo. Si le néo-classicisme rejette le baroque et le rococo pour retourner à l’art classique (gréco-romain, renaissance, classicisme) le romantisme le fait pour un retour à la nature, qui est sauvage, démesurée, changeante, sublime et terrifiante. Le romantisme est une réaction générale contre l’ordre social et les valeurs établies, un intense besoin de ressentir des émotions nouvelles, la recherche de l’émotion en soi.

LE STYLE des œuvres des artistes romantiques est hétéroclite, selon « affinité élective » de l’artiste, autre concept romantique… Les artistes romantiques redécouvrent ainsi les styles oubliés ou négligés, nous parlons DES renaissances plutôt que de LA Renaissance de la seule antiquité gréco-romaine du classicisme: Le Style hétéroclite:

Cette redécouverte des styles inclue le retour au vocabulaire baroque apte à transmettre le tumulte, la terreur, la sensualité…: nous parlons de ROMANTISME NÉOBAROQUE, dont on a vu en France deux grands représentants, qui sont Théodore GÉRICAULT et Eugène DELACROIX. Nous retrouvons dans leur toiles la composition en diagonale et l’éclairage contrasté rappelant le style baroque. France: Géricault, Le radeau de la Méduse, 1819 Théodore GÉRICAULT, Le radeau de la Méduse, 1819 Eugène DELACROIX, Liberté guidant le peuple

France: Géricault, Le radeau de la Méduse, 1819 Dans sa toile la plus célèbre, Le radeau de la Méduse, Géricault représente une tragédie de l’époque, mettant l’homme face aux éléments déchainés, thème romantique par excellence, mais aussi face à la folie… France: Géricault, Le radeau de la Méduse, 1819 France: Géricault, Le radeau de la Méduse, 1819

DELACROIX, Le Massacre de Scio, 1822-24 Alors qu’Eugène DELACROIX trouve ses drames contemporains dans les luttes nationales de son temps, comme ici dans la guerre d’indépendance grecque contre les Turcs… fait contemporain: la guerre d’indépendance grecque contre les Turcs DELACROIX, Le Massacre de Scio, 1822-24

Delacroix, Liberté guidant le peuple, 1830 Ou encore dans les révolutions de son temps… « Les trois glorieuses », 28 juillet 1830, contre Charles X, instaurant Louis Philippe et la Monarchie de juillet… Delacroix, Liberté guidant le peuple, 1830

Delacroix, La Mort de Sardanapale, 1827 Mais le romantisme, toujours à la recherche de l’émotion plus forte, puise de plus en plus dans l’exotisme, s’éloignant progressivement des preoccupations de son temps. Nous parlons d’escapisme… le tombeau royal d’Our (datant de 2600 av. J.C., découvert en 1822) Delacroix, La Mort de Sardanapale, 1827

Delacroix, Odalisque sur un divan, 1827-28 C’est en comparant ces deux Odalisques, celle du romantique Delacroix avec celle, néoclassique, d’Ingres, que nous avons constaté que si les manières de peindre sont différentes, le sujet, exotique, est le même. Il reflètent cet enchantement romantique, critique de sa société et de son époque, pour les pays lointains, les cultures différentes… Delacroix, Odalisque sur un divan, 1827-28 Ingres, La grande Odalisque, 1814

Néo-classicisme et le Romantisme… Suivant cette idée du choix du style selon affinité personnelle, le néo-classicisme est aujourd’hui considéré comme un aspect du romantisme et non plus comme un mouvement opposé: nous l’avons étudié à part car il représente le style dominant jusqu’au début du XIXème siècle ; Ingres, La grande Odalisque 1814

Ainsi ces deux grand styles (qui ne sont, on vient de le voir, en fait qu’un…), compagnons des grandes révolutions de leur époque, s’éloignent des préoccupations de leur temps, se perdant dans le besoin d’exotisme, escapisme d’une classe bourgeoise dorénavant dominante. INGRES, Portrait de Louis Bertin, 1832 David, La Mort de Marat, 1793

Delacroix, Chevaux arabes, 1860, Chasse au lion, 1861 Delacroix: Le Massacre de Scio, 1822-24, Liberté guidant le peuple, 1830 de la guerre d’indépendance turque aux chevaux arabes… Delacroix, Chevaux arabes, 1860, Chasse au lion, 1861

Réalisme: Gustave Courbet, Un enterrement à Ornans, 1849-50 C’est cette fuite des préoccupations de son temps et de sa société qui discrédite le romantisme et emmène sa fin, faisant place à un autre grand mouvement de la fin du XIXème siècle, dont nous allons parler aujourd’hui. Il s’agit du Réalisme. 6,68 mètres sur 3,15 mètres Réalisme: Gustave Courbet, Un enterrement à Ornans, 1849-50

Le Réalisme Gustave COURBET (1819-1877)

Le Réalisme: réaction à l’escapisme romantique Si le romantisme et le classicisme apparaissent en réaction contre le caractère artificiel du baroque et du rococo, le réalisme apparait au moment où le romantisme, compagnon des révolutions bourgeoises du XVIIIème et XIXème siècle, toujours à la recherche de l’émotion plus forte, s’égare dans l’exotisme et s’éloigne des préoccupations de son temps. Nous parlons d’escapisme.

Le néoclassicisme avec ses commanditaires et consommateurs, jadis révolutionnaires, maintenant bien établis, représentant la nouvelle classe privilégiée de l’industrialisation, la bourgeoisie. INGRES, Portrait de Louis Bertin, 1832

Madame Antonia Devaucay de Nittis, 1807 Mme Ingres, Madame antonia devaucay de nittis, 1807 Madame Antonia Devaucay de Nittis, 1807 Mme Ingres

Ingres, La grande odalisque, 1814 …subit le même sort. Ingres, La grande odalisque, 1814

Courbet, Pierre-Joseph Prudhon et ses enfants en 1853, 1865-67 Le réalisme sera souvent associé au socialisme et aux luttes des exploités du capitalisme en général. Le nom fut donné au mouvement par Gustave COURBET (1819-1877), peintre français, qui forgea le terme et en fit son programme. Prudhon:  « La propriété, c’est le vol » Socialiste, anarchiste Courbet, Pierre-Joseph Prudhon et ses enfants en 1853, 1865-67

Gustave COURBET (1819-1877) Né à Ornans dans une famille de paysans aisés, Courbet commence comme peintre romantique néobaroque vers 1840. Autoportrait (homme désespéré), 1843-45 Autoportrait (homme blessé), 1844-45

Le programme réaliste En 1846, le poète Charles Baudelaire réclame « un peintre qui exprimât l’héroïsme de la vie moderne », et Courbet, son ami, en fait son crédo artistique, seul à l’époque. L’exagération romantique de la sensibilité et de l’imagination ne sont qu’un échappatoire devant les réalités de l’époque, l’artiste moderne devrait se baser sur son expérience personnelle, affirme Courbet. Les bouleversements qui agitent, et en particulier la France vers 1848, marquent un tournant dans son œuvre:

Courbet, Les Casseurs de pierre, 1849 Les Casseurs de pierre (1849) est la première peinture traduisant le programme réaliste . Cette peinture nous présente pour la première fois dans un grand format des gens anonymes au travail. De ces deux travailleurs, l’un est visiblement trop jeune pour le dur travail qu’il fait, et l’autre trop vieux: c’est une critique… La toile reçut la forte approbation de Prudhon, socialiste et anarchiste. La technique reste celle des Le Nain et Rembrandt, dont il admirait l’œuvre, et le naturalisme de Caravage. Courbet, Les Casseurs de pierre, 1849

Courbet, Un Enterrement à Ornans, 1849, 315x668 cm Un enterrement à Ornans choque: son très grand format était alors réservé aux scènes historiques, mythologiques ou religieuses. Cette remise en question de la hiérarchie des genres fait assimiler l’art de Courbet à l’art « socialiste ». Les réactions sont violentes: « Est-il possible de peindre des gens si affreux ?» «Le Laid en grandeur nature!». Courbet, Un Enterrement à Ornans, 1849, 315x668 cm

Son autre tableau refusé à l’Exposition universelle de 1855, Courbet monte une exposition personnelle qu’il nomme le « Pavillon du Réalisme ». La critique de l’époque qualifie l’œuvre de «vulgaire». (où son autre tableau, La rencontre, est accepté). Courbet, Intérieur de mon atelier: une allégorie réelle résumant sept ans de la vie d’un artiste, 1854-1855, 352x587 cm

La réponse de Courbet: «Je ne peux pas peindre un ange, car je n’en ai jamais vu ». À ces critiques, Courbet répond: « Je tiens que la peinture est un art essentiellement concret et ne peut consister que dans la représentation des choses réelles et existantes (...); un objet abstrait, non visible, non existant n'est pas du domaine de la peinture». «Je ne peux pas peindre un ange, car je n’en ai jamais vu ». Les bouleversements qui agitent, et en particulier la France vers 1848, marquent un tournant dans son œuvre:

La Rencontre (Bonjour, Monsieur Courbet), 1854 Son autre tableau, La rencontre, pourtant critique des rapports de classes de l’époque (et vantant la liberté de l’artiste…) est par contre accepté à cette même exposition… l’Exposition universelle de 1855. La Rencontre (Bonjour, Monsieur Courbet), 1854

Gustave Courbet, Les cribleuses de blé, 1854 Notez toutefois que si le sujet des toiles de Courbet est nouveau (la vie actuelle, le monde du travail, l’exploitation de la classe ouvrière), la technique de Courbet reste traditionnelle. Gustave Courbet Les cribleuses de blé Gustave Courbet, Les cribleuses de blé, 1854

Courbet peint aussi les paysages...

Gustave Courbet, Les demoiselles au bord de la Seine, 1856 Et aussi, bien entendu, les femmes… Gustave Courbet, Les demoiselles au bord de la Seine, 1856

Mais quand il fantasme… Gustave Courbet, Femme aux bas blancs, vers 1861

Gustave Courbet, L'Origine du monde, 1866 …il le fait de manière réaliste. Gustave Courbet, L'Origine du monde, 1866

Néoclassicisme, romantisme, réalisme… Ingres, La grande odalisque, 1814 Delacroix, 1827-28, Odalisque Reclining on a Divan Gustave Courbet, L'Origine du monde, 1866 Delacroix, Odalisque, 1827-28

Dégager l’essentiel: Le Réalisme C’est l’exotisme, l’escapisme, la fuite du temps et des problèmes de leur société aussi bien du romantisme que du néo-classicisme, jadis révolutionnaires, qui fait place à un autre grand mouvement de la fin du XIXème siècle: le Réalisme. Son plus grand représentant est Gustave COURBET (1819-1877), peintre français, qui forge le terme et en fait son programme. Le réalisme, critiqué comme laid, vulgaire, choque car Courbet utilise le grand format des toiles, à l’époque réservé aux scènes historiques, mythologiques ou religieuses, pour représenter des scènes de la vie actuelle, ordinaire, du monde du travail, remettant en question la hiérarchie des genres (scènes historiques, religieuses, mythologiques ayant le plus de valeur, les natures mortes et les scènes de genre en ayant le moins). Le réalisme sera souvent associé au socialisme et aux luttes des exploités du capitalisme en général. Mais si Courbet introduit le nouveau traitement des sujets (la grande taille des toiles montrant la vie de tous les jours et le monde du travail), sa technique reste traditionnelle.

Ces messieurs, leurs affaires, leurs fantasmes…