L’architecture de la Renaissance en Italie: Brunelleschi, Alberti, Bramante Filippo Brunelleschi (1377-1446): les proportions, la perspective, le dôme de la Cathédrale de Florence, la Basilique San Lorenzo de Florence la chapelle Pazzi et l’église Sainte Marie des Anges Leone Battista Alberti (1404-1472): Les traités, les façades des basiliques préexistantes (Saint François à Rimini, 1450 et Sant André à Mantou, 1470), L’église au plan centré (Da Sangallo, Santa Maria delle Carceri à Prato, 1485) Donato Bramante: « Il Tempietto » (le petit temple), Saint Pierre de Montorio, Rome (1502), le projet pour Saint Pierre de Rome (1506)
L’Italie, l’architecture romaine, le style gothique et la Renaissance L’Italie n'adopta jamais entièrement le style gothique. La présence sur le sol italien des vestiges des édifices romains témoignant de la grandeur du style classique, a toujours influencé les artistes. La renaissance en architecture est ce retour à l’architecture romaine, déjà bâtie sur l’héritage grec, son renouveau... Gothique: Cathédrale de Léon, 1205-1301, Espagne Ce renouveau va s’effectuer à la fois à partir de l'observation des ruines romaines, et du déchiffrement du « De Architectura », un traité de Vitruve (architecte et ingénieur romain, 1er siècle av. J.C.).
Filippo Brunelleschi (1377-1446), architecte On attribue généralement à l’architecte Filippo Brunelleschi (1377–1446) le mérite d'avoir inauguré la Renaissance en architecture. En étudiant l’architecture antique romaine, il s’aperçoit que, contrairement aux constructions gothiques contemporaines, les monuments de la Rome antique respectaient des règles mathématiques simples, l'emploi systématique d’arcs en plein-cintre et de voûtes en berceau et le respect des proportions des ordres classiques. (celui qui formula les règles de la perspective linéaire) Basilique San Lorenzo, 1420, La chapelle Pazzi,
Brunelleschi rejette la verticalité du style gothique pour la simplicité et les proportions équilibrées du style classique, reprenant l’arc en plein cintre, les voûtes en berceau, les coupoles et les proportions des ordres classiques. Renaissance: Brunelleschi, La Basilique San Lorenzo, Florence, 1420 Gothique: Notre Dame de Chartres, XIIème-XIIIème s.
Le premier exemple d’architecture de la renaissance est la Basilique San Lorenzo, Florence, 1420, par Brunelleschi.
La basilique San Lorenzo de Florence ressemble aux églises paléochrétiennes et à l’ancien roman toscan car pour Brunelleschi, ces monuments illustraient l’architecture religieuse de l’Antiquité classique. Renaissance: Brunelleschi, La Basilique San Lorenzo, Florence, 1420 Basilique paléochrétienne: St Paul Hors les Murs, Rome, IVème siècle
La Basilique San Lorenzo, Florence, 1420, par Brunelleschi Si San Lorenzo ressemble aux églises paléochrétiennes et à l’ancien roman toscan, l’impression que donnent ces trois intérieurs diffèrent: C’est que les proportions (rapport entre les mesures) entre les éléments importants de l’édifice sont différentes chez Brunelleschi: Roman Toscan: Intérieur de la cathédrale de Pise, Toscane, Italie (XIème-XIIème, plafond XVIIème) Roman Toscan: la cathédrale de Pise, Toscane, Italie (XIème-XIIème) La Basilique San Lorenzo, Florence, 1420, par Brunelleschi
Assemblage d’unités standard Nous voyons que Brunelleschi a conçu San Lorenzo comme un assemblage d’unités abstraites, les plus grandes étant des multiples d’une unité standard. Brunelleschi affirme que les « rapports arithmétiques exprimés en nombres entiers entre toutes les dimensions importantes d’un édifice » (ses proportions) « sont le secret d’une bonne architecture. » Assemblage d’unités standard Si le plan de San Lorenzo, basilical, avec le transept formant avec la nef le forme de la croix latine… n’est pas nouveau, l’est l’importance donnée à la symétrie et aux proportions.
La Chapelle Pazzi, commencé vers 1430 Autres œuvres de Brunelleschi La Chapelle Pazzi, commencé vers 1430 La plus originale des créations de Brunelleschi, elle reste inachevée de son vivant.
La Chapelle Pazzi, commencé vers 1430 Un porche rappelant le narthex fait de la façade un écran. L’arc central reliant les deux colonnades classiques encadre le portail et attire le regard sur la coupole…
L’architrave supporte deux voûtes en berceau qui à leur tour supportent une coupole sur pendentifs au-dessus de l’ouverture centrale.
Nous y retrouvons l’assemblage d’unités standards
Chapelle Pazzi: intérieur Nous retrouvons le même motif de deux voûtes supportant une coupole centrale à l’intérieur de la chapelle. La lumière entre par les hautes lucarnes de la coupole (une au centre et 12 autour = le Christ avec ses 12 apôtres) par lesquelles on ne voit que le ciel. Chapelle Pazzi: intérieur
Brunelleschi, Le plan de l’église Sainte Marie des Anges: la première église de plan centré à coupole de la Renaissance: l’idéal La première église de plan centré à coupole de la Renaissance (s’inspirant des édifices ronds et polygonaux des églises paléochrétiennes), elle est un exemple de ce que va être l’idéal des édifices sacrés (tels que décrits plus tard par un autre architecte, Alberti), car le cercle (ou les formes dérivés du cercle: carré, hexagone, octogone) est la figure la plus parfaite, la plus naturelle, et, de ce fait, l’image même de la Raison divine.
Brunelleschi: L’église Sainte Marie des Anges, Florence (1434-1437, inachevée) Alberti: Le cercle (ou les formes dérivés du cercle: carré, hexagone, octogone) est la figure la plus parfaite, la plus naturelle, et, de ce fait, l’image même de la Raison divine.
Proportions et Harmonie d’origine Divine, car retrouvées dans tout l’univers… Brunelleschi: proportions, « rapports arithmétiques exprimés en nombres entiers entre toutes les dimensions importantes d’un édifice sont le secret d’une bonne architecture. » Cette conception va être clairement annoncée une dizaine d’années plus tard par un autre architecte, Alberti, dans son traité d’architecture, à savoir que les proportions arithmétiques déterminant l’harmonie musicale devraient aussi régir l’architecture, car elles se retrouvent dans tout l’univers, ce qui prouve leur origine divine (Pythagore, Platon, le néoplatonisme: le monde écrit en caractères mathématiques).
Leone Battista Alberti (1404-1472) Les traités Les façades des basiliques préexistantes (Saint François à Rimini, 1450 et Sant André à Mantou, 1470) L’église au plan centré (Da Sangallo, Santa Maria delle Carceri à Prato, 1485)
Leone Battista Alberti (1404-1472) Alberti a commencé sa carrière comme spécialiste de l’Antiquité et théoricien: il rédigea ses traités sur la peinture, la sculpture et l’architecture de la Renaissance. Il ne débute son affirmation comme architecte qu’à la mort de Brunelleschi. C’est Alberti qui, dans son traité d’architecture, va clairement énoncer l’idée de Brunelleschi que les rapports mathématiques entre les dimensions importantes d’un édifice sont le secret d’une bonne architecture, et notamment que les proportions arithmétiques déterminant l’harmonie musicale devraient aussi régir l’architecture, car elles se retrouvent dans tout l’univers, ce qui est preuve de leur origine divine. Alberti: Le cercle (ou les formes dérivés du cercle: carré, hexagone, octogone) est la figure la plus parfaite, la plus naturelle, et, de ce fait, l’image même de la Raison Divine.
Les façades d’églises préexistantes: Saint François à Rimini, par Alberti, 1450 Alberti commence sa carrière d’architecte en « rajoutant » des façades renaissance aux églises déjà existantes, comme ici à celle, gothique, de Saint François de Rimini. La solution d’Alberti: une coquille renaissance pour l’ancien édifice, et pour la façade un arc de triomphe romain. En 1450, Sigismond de Malatesta, seigneur de Rimini, demande à Alberti de dessiner une façade pour l’église gothique Saint François:
Alberti, Façade de Saint-François de Rimini, 1450 Le problème résolu ici par Alberti est le problème fondamental de l’architecture Renaissance: comment appliquer un système de construction classique à l’extérieur d’une structure non classique. La solution d’Alberti: les éléments classiques font relief sur la surface du mur, en sont la décoration.
Façade de Sant Andrea de Mantou, 1470
Alberti, Façade de Saint André, à Mantou, 1470 (comment appliquer une façade renaissance à une basilique qui préexistait) Alberti a ici à nouveau à ajouter une façade renaissance à une basilique. Sa solution est une combinaison d’un arc de triomphe avec les éléments d’un temple classique: le fronton , l’architrave et l’ordre colossal de pilastres.
La façade renaissance: Arc de triomphe romain + éléments du temple grec = « Art romain: arc de triomphe (arc de Titus, 81 après J.C.) Temple grec: Le Parthénon, temple dorique, Vème siècle avant J.C. Alberti, Façade de Sant Andrea, à Mantou, 1470 » +
Alberti, Sant Andrea à Mantou, 1470 Mais… Mais Alberti a tenu que la hauteur de la façade soit égale à sa largeur, même si la nef, plus haute, dépasse! Cela n’est heureusement pas visible de la rue… Alberti, Sant Andrea à Mantou, 1470
Plan et intérieur de Sant Andrea de Mantou: la façade est une parfaite introduction à l’intérieur où ces motifs et proportions sont repris: l’ordre colossal des pilastres, la voûte en berceau rapelle la voûte de l’arc, les arcs en plein cintre entre la nef et les chapelles.
Alberti: Les églises à plan centré L’idéal des édifices sacrés tels que décrits par Alberti est une église de plan centré à coupole (s’inspirant des édifices ronds et polygonaux des églises paléochrétiennes) car le cercle (ou les formes dérivés du cercle: carré, hexagone, octogone) est la figure la plus parfaite, la plus naturelle, et, de ce fait, l’image même de la Raison divine: Jusqu’ici nous avons vu comment Alberti s’y est pris en adaptant les églises préexistantes (Rimini) ou bâtissant sur l’emplacement d’une église préexistante (Mantou), voyons maintenant un édifice bâti conformément à ses idéaux:
Alberti mort en 1472 Guillaneo Da Sangallo, Santa Maria delle Carceri, 1485, Prato: plan centré (croix grecque)
Le respect des préceptes d’Alberti: plan central en croix grecque, la profondeur des bras de la croix est la moitié da la largeur, la hauteur de la façade est le double de sa largeur… Guillaneo Da Sangallo, Santa Maria delle Carceri, 1485, Prato
Santa Maria delle Carceri (1485, Prato, par Sangallo): l’intérieur s’inspire de la chapelle Pazzi de Brunelleschi. Sangallo, Santa Maria delle Carceri, 1485, Prato
L’architecture de la haute Renaissance en Italie: Bramante Donato Bramante: Le Tempietto et le plan original de Saint Pierre de Rome
Bramante: San Pietro in Montorio, Rome, « Il Tempietto », petit temple, 1502 Donato bramante Les idées d’Alberti vont trouver leur pleine application dans la génération suivante d’architectes. La chapelle de Saint Pierre à Rome (1502), marquant l’emplacement de la crucifixion de Saint Pierre, illustre le style Renaissance dans sa plénitude:
Bramante: San Pietro in Montorio, Rome, « Le Tempietto », 1502
Bramante: projet pour Saint Pierre de Rome, 1506
Bramante décrit ses projets pour le nouveau Saint Pierre de Rome:« Je placerai le Panthéon au sommet de la basilique de Constantin »
Les idées de l’Architecture de la Renaissance en Italie: Résumé Les architectes de la Renaissance reprennent la simplicité et les proportions équilibrés du style classique (Brunelleschi: « rapports arithmétiques exprimés en nombres entiers entre toutes les dimensions importantes d’un édifice sont le secret d’une bonne architecture.» Alberti: « les proportions arithmétiques déterminant l’harmonie musicale devraient aussi régir l’architecture, car elles se retrouvent dans tout l’univers, preuve de leur origine divine.») L’Église de plan centré à coupole (s’inspirant des édifices ronds et polygonaux des églises paléochrétiennes) est l’idéal de l’église renaissance, car « le cercle (ou les formes dérivés du cercle: carré, hexagone, octogone) est la figure la plus parfaite, la plus naturelle, et, de ce fait, l’image même de la Raison Divine. » (Alberti) Exemples d’églises au plan centré: la première, l’église Sainte Marie des Anges, par Brunelleschi (Florence 1434-1437) puis l’Église Santa Maria delle Carceri, par Sangallo. Les exemples de la haute renaissance sont le « Tempieto » (1502), petit temple rond, par Bramante, et son projet pour Saint Pierre de Rome (1506). Quand rajoutées aux basiliques préexistantes, les façades renaissance reprennent les éléments classiques grecs et romains mais en décoration des murs (éléments romains: forme de l’arc de triomphe, arcs en plein cintre, voûtes en berceau ; éléments du temple grec: colonnes et pilastres des ordres grecs, corniches, architraves, fronton). Sainte Marie des Anges, par Brunelleschi (Florence 1434-1437) puis l’Église Santa Maria delle Carceri, par Sangallo Tempieto 1502, Saint Pierre 1506
Mini test: Expliquez pourquoi le Tempieto de Bramante représente une église idéale pour les architectes de la renaissance?