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Catherine BRAUN-BRETON
Quelques aspects de la biologie des amibes Catherine BRAUN-BRETON
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Phylogénie des Amoebozoa
Eucaryotes unicellulaires de forme variée déformable et se déplaçant par mouvement “rampant” on distingue deux grandes catégories selon leur habitat: pour la plupart des amibes libres (existence autonome dans un milieu aquatique ou sol humide) et amibes parasitaires (se développant essentiellement dans le tube digestif de diverses espèces animales dont l’Homme)
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Les amibes : des organismes de morphologie variée
La plupart des espèces sont des amibes isolées à pseudopodes lobés Certaines amibes du sol sont couvertes d'une coquille, le test, qui permet de résister à la dessiccation (Thecamibiens) Certaines espèces ont des flagelles Proteus Thecamoeba verrucosa Entamoeba Arcella dentata
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Organisation du trophozoïte
rôle avant tout osmo-régulateur
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2. Locomotion : mouvement amiboïde avec émission de pseudopodes
le cytoplasme sous deux états distincts : - l'ectoplasme qui a la texture d'un gel et se situe à la périphérie - l'endoplasme granulaire plus fluide. Au niveau du pseudopode naissant passage de l’endoplasme vers l’extrémité et transformation en gel. Au niveau du pôle postérieur de l’amibe, transformation de l’ectoplasme en endoplasme fluide Mouvement impliquant myosine et micro-filaments d'actine.
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Les pseudopodes participent également à la nutrition
Phagocytose de petites proies (bactéries, levures) ou d’autres protistes, des globules rouges, d’autres amibes 5 µm 50 µm
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3. Amibes pathogènes de l’Homme
3.1. Epidémiologie * 9 espèces d'amibes intestinales parmi lesquelles seule l'espèce Entamoeba histolytica est pathogène. * Egalement des cas cliniques d’infection par Acanthamoeba : amibiase cutanée (nodules et ulcération de la peau ; rare et limité chez les immunocompétents), kératite amibienne (inflammation de la cornée; multiplication avec l’usage de lentilles de contact) et encéphalite granulomateuse amibienne (rare ; issue généralement fatale ; touche essentiellement des personnes immunodéprimées ou abusant de stéroïdes ; infection par voie nasale ou respiratoire; également due à Naegleria fowleri) * 12 % de la population mondiale est infectée par Entamoeba histolytica; 50 M de cas de colites et abcès hépatiques et morts par an * 80 à 90% des infections par Entamoeba histolytica sont asymptomatiques * dysenterie amibienne : ulcération de l'épithélium intestinal (dysenterie, colites chroniques, megacolon toxique) * amibiase hépatique
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Distribution géographique des amibiases humaines à Entamoeba histolytica
toutes les zones tropicales ou tempérées Bangladesh : 40% des enfants sont infectés / an et 80% sont infectés au moins une fois pendant leur enfance
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3.2. Cycle de développement
2 formes : kystes et trophozoïtes contamination par ingestion de kystes (eau ou aliments contaminés) excystation du kyste dans l’intestin, donne 8 trophozoïtes Trophozoïte Mobile Ingestion de bactéries, particules alimentaires Facteurs de virulence Kyste Forme de résistance et de transmission
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métabolisme anaérobie
dépourvues de mitochondries mais des mitosomes qui semblent correspondre à des mitochondries dégénérées capables d'engloutir des érythrocytes et des débris intestinaux pour se nourrir génome complètement séquencé, environ 20 Mb réparties sur 14 chromosomes capacité codante élevée : peu d'introns, distances intergéniques courtes, peu de séquences répétées
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forme trophozoïte : forme cellulaire végétative et de reproduction
Entamoeba histolytica
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le kyste : forme de dissémination passive et de résistance
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3.3. la pathologie Différentes issues d’une infection par Entamoeba histolytica - 90% asymptomatiques - 10% d’invasion de la muqueuse du colon (diarrhées) - <1% abcès hépatiques d’après Ralston KS (2015)
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Virulence d’Entamoeba histolytica
1. Adhésion aux cellules cibles 2. Induction de la mort des cellules ; phagocytose 3. Échappement au système immunitaire
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Franchissement de la barrière intestinale
Gal_GalNAC lectine: principal récepteur à la surface des cellules cibles Effecteurs de la cytotoxicité : Amoebapores cystéine protéases
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Les cystéine-protéases : des acteurs majeurs de la pathogénicité
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Trogocytose : le mécanisme de virulence re-visité
mise en évidence d’un nouveau mécanisme, la trogocytose (live imaging) de la capacité de tuer directement des cellules de l’hôte dépend la capacité des trophozoïtes à envahir et détruire les tissus la mort cellulaire est induite par le trophozoïte avant phagocytose de la cellule (phagocytose préférentiellement de cellules mortes) Le rôle des amoebapores et des cystéines protéases dans la cytotoxicité n’est pas clair : pas d’activité cytotoxique de lysats ou de surnageants cellulaires l’activité des amoebapores nécessite un pH 5,2 Ralston et al. (2014) Trogocytose = ingestion de « bouchées » de cellules Phagocytose = ingestion de cellule entière
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Trogocytose : le mécanisme de virulence re-visité
d’après Ralston KS (2015) Ralston et al. (2014) Chronologie : - trogocytose - signal calcique - mort cellulaire La trogocytose est restreinte aux cellules vivantes et dépend de leur déformabilité et de leur taille
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Interactions entre le système immunitaire de l’Homme et Entamoeba histolytica
1. Le système immunitaire inné Neutrophiles - souvent les premières cellules à intervenir lors d’une infection amibienne - possiblement recrutées par un signal chimiotactique des amibes et/ou des cellules épithéliales - les neutrophiles répondent aux trophozoïtes par la libération de dérivés réactifs de l’oxygène (ROS) - les amibes produisent des enzymes de détoxification des ROS (SOD, peroxiredoxin, NaDPH-flavin oxydoréductase) Macrophages - activité amibicide après stimulation par IFNg, TNFa - reconnaissance des trophozoïtes via TLR -2 : inhibition par le LPPG - production de NO réduite par l’amibe - MLIF : pentapeptide anti-inflammatoire sécrété par l’amibe, inhibition IL1 et favorise production d’IL10 Natural Killers (NK & NK T cells) - production d’IFN et de peptides cytolytiques après activation - corrélation entre taux d’IFN et de NK et résistance à l’infection
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2. Les cellules épithéliales intestinales
- elles participent à la réponse immunitaire des muqueuses par la sécrétion de médiateurs pro-inflammatoires et servent de cellules présentatrices d’Ag - En présence de trophozoïtes, elles produisent plus de cytokines pro-inflammatoires 3. La réponse adaptative - Humorale (mais transfert passif d’anticorps non efficace) et cellulaire (T CD4+) - Réponse de type Th1 protectrice, Th2 pathologique modulées par l’amibe : favorise production de cytokines de type Th2 et inhibe celle de cytokines de type Th1 La flore intestinale joue elle aussi sur le devenir de l’infection amibienne : certaines bactéries favorisent la virulence de l’amibe et d’autres réduisent cette virulence Des questions encore ouvertes : - Quels sont les déterminants de l’infection invasive ou non invasive? - Quel est le rôle de l’inflammation dans les toutes premières étapes de l’infection ? - Quels sont les signaux qui initialisent le processus invasif ?
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4. Diversité de cycles de vie
4.1. Exemple d’Entamoeba phase de multiplication (trophozoïte) et enkystement produisant la forme infectante (kystes) pas de reproduction sexuée
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4.2. Les amibes sociales Les Dictyostelides (une vingtaine d'espèces ) - se nourrissent de bactéries par phagocytose. - conditions optimales : les amibes peuvent se diviser toutes les 3 heures. Peuvent être cultivées au laboratoire sur un milieu complexe mais défini (temps de génération 9 heures) - émission d’un signal (encore inconnu) de dispersion qui leur permet de ne pas épuiser localement la nourriture d’après O’Day DH & Keszei A (2012) Biological Rev. 87: plusieurs états différenciés : deux formes unicellulaires et deux formes pluricellulaires.
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Le développement multicellulaire asexué
- en carence alimentaire, les amibes cessent de se repousser et commencent à émettre un attracteur (généralement de l'AMPc comme chez Dictyostelium discoïdeum). Ce produit attire les autres amibes du voisinage qui se concentrent et se mettent à leur tour à émettre de l'attracteur. Cycle: déplacement vers le centre pendant 100 secondes, parcourant ainsi 20 mm, émission d’un pulse d'attracteur. - formation d’un agrégat
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- formation d’un plasmode (agrégat de quelques centaines à quelques centaines de milliers de cellules maintenu par des protéines d'adhésion, les discoïdines, propres à chaque espèce - le plasmode se différencie en une sorte de "limace", dont la taille peut atteindre jusqu'à 1 mm et qui se déplace sur le support - la limace possède plusieurs types cellulaires : les cellules prestalk qui vont former la tige par apoptose les cellules pré-spores, 1% de cellules sentinelles (cellules S) impliquées dans un mécanisme de défense vis à vis de pathogènes (élimination par phagocytose des bactéries dangereuses telles que les Legionella)
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de la limace au corps fructifère
- La limace peut se déplacer pendant plusieurs jours sur le substrat; dans la nature : attirée par la chaleur et la lumière, elle atteint la surface de la litière de feuilles - différenciation en corps fructifère (sporophore ou sporocarpe) composé de 3 parties, un disque basal, un pied et une masse de spores. Cette différenciation suit un vrai processus morphogénétique comme dans un organisme pluricellulaire - Les spores sont ensuite libérées dans l’environnement - Au cours de ce processus, les cellules sont sous forme haploïde dans le cas de plasmodes mixtes, certaines souches « gagneuses » produisent plus de spores et moins de cellules de tige plus de 100 gènes sont impliqués dans le contrôle de ce phénomène complexe
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Le développement unicellulaire asexué en microcystes
Induit lorsque les amibes (trophozoïtes) sont soumises à une pression osmotique élevée Enkystement en une forme dormante = microcyste Très peu caractérisé bien qu’observé chez la plupart des espèces (pas Dictyostelium discoideum)
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Le développement multicellulaire sexué en forme dormante macrocyste
Induit par les conditions environnementales (à l’obscurité, en conditions humides, à basse concentration d’ions phosphate) Développement hétérothallique (ex D. discoideum) (24h environ) - initié par la rencontre de deux gamètes mobiles de type sexuel compatible : formation d’une cellule binucléée qui grossit (cellule géante). - La cellule binucléée émet de l’AMPc qui attire d'autres cellules d’amibes - Fusion des noyaux produisant un zygote géant qui ingère les amibes qui l’entourent (cannibalisme) ; la phagocytose continue jusqu’à ce que toutes les amibes soient dans des endocytes - Digestion des amibes dans les endosomes et maturation du macrocyste (formation de la paroi) en forme dormante - Dans des conditions ad hoc, le macrocyste germe: la méiose se produit et des amibes sont relâchées. d’après O’Day DH & Keszei A (2012) Biological Rev. 87:
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Cannibalisme par phagocytose lors de la multiplication sexuée
- La phosphodiestérase extracellulaire limite le champ d’action de l’AMPc - Ceci ralentit le processus de phagocytose et permet une accumulation d’amibes autour du macrocyste (pre-cyst aggregate) , qui vont synthétiser la paroi d’après O’Day DH & Keszei A (2012) Biological Rev. 87:
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Le développement multicellulaire sexué en forme dormante macrocyste
Des alternatives au modèle d’hétérothallisme - Selon l’espèce ou la souche d’amibe, développement homo- ou hétéro-thallique - Deux types de développement hétérothallique - On retrouve ces différents types chez Dictyostelium discoideum Gamétogenèse: Il n’y a pas nécessairement formation de gamètes (mating types I & II) mais toujours de cellules fusion-compétentes (mating type III; bisexual) La formation de gamètes est induite par des phéromones (éthylène) d’après O’Day DH & Keszei A (2012) Biological Rev. 87:
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5. Les amibes sages femmes
un phénomène mis en évidence pour la première fois chez Entamoeba invadens, parasite de serpent utilisé comme modèle du pathogène humain Entamoeba histolytica. Croissance en culture axénique à 25°C mais également observé chez d’autres amibes dont Dictyostelium discoïdeum Le phénomène (« midwifery ») : lors de la mitose d’une amibe, la séparation des deux cellules filles est réalisée par une amibe voisine, attirée par la cellule en division et appelée amibe sage-femme
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- dans environ 30% des cas de division cellulaire chez Entamoeba invadens, coopération entre deux amibes - une amibe voisine (amibe « sage femme) se déplace (jusqu’à 200 µm; généralement trajectoire droite et vitesse d’environ 0,5 – 0,6 µm/s) vers l’amibe en cours de division a – c : l’amibe sage femme s’aligne contre l’amibe en division au niveau du sillon de cytodiérèse d – f : émission d’un pseudopode perpendiculairement au sillon g – i : l’amibe sage femme force son passage dans cette direction et provoque la séparation des deux cellules
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une réponse chimiotactique
- prélèvement de milieu à proximité du sillon d’une cellule en division dans une micropipette - dépôt à proximité d’une amibe n’ayant pas de cellule en division dans son entourage : dans 70% des cas mouvement (0,7 µm/s) en direction du dépôt (jusqu’à plus de 100 µm dans 40% des cas) - comparaison avec milieu frais ou prélevé dans l’environnement d’une amibe qui ne se divise pas : met en évidence que la molécule attractive est thermorésistante (20 min 95°C) , d’une masse moléculaire 50 à 100 kDa, sensible à l’oxydation; candidat de choix: lipo-phospho-glycane de la membrane plasmique
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6. un prédateur comme modèle de pathogenèse bactérienne
Interactions entre bactéries pathogènes opportunistes et protozoaires de l'environnement Bactéries développant des interactions endosymbiotes ou parasitaires avec des Protistes libres (Legionella, Mycobacterium, Pseudomonas, Vibrio) L. pneumophila dans un macrophage (A) et dans une amibe A. polyphaga (B)
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Legionella pneumophilia
bactérie ubiquitaire de l’environnement résiste à des variations importantes de température, d’osmolarité … résiste à la phagocytose par des protistes qui se nourrissent de bactéries (Ciliés, Amibes) dans l’environnement, Legionella pneumophilia semble se multiplier préférentiellement, voire exclusivement dans des protistes Mycobactéries de l’environnement M. marinum (pathogène de poissons et d’amphibiens) M. fortuitum (pathogène d’insectes) M. avium (infections systémiques chez des patients immunodéprimés) tous capables de se multiplier dans des amibes (Acanthamoeba castellani) M. marinum survit dans des kystes d’Acanthamoeba polyphaga
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multiplication de L. pneumophila ou M. avium dans A
multiplication de L. pneumophila ou M. avium dans A. castellanii / culture axénique * augmentation de l'efficacité d'invasion de cellules épithéliales ou macrophages * multiplication plus efficace dans des monocytes ou des macrophages * virulence plus importante chez la souris * plus grande résistance aux antibiotiques et aux biocides (eau de javel, chloramine)
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