La persistance des activités informelles dans les pays en développement + Application au Cameroun + Jean-Claude Vérez, Université de Toulon, LEAD, EA 3163, La Garde, France
+ L’objectif de notre communication + Montrer ce en quoi les activités informelles, au- delà de leur dénomination et en excluant les activités illégales et mafieuses (économie de la drogue, trafic d’armement, trafic d’organes, enfants soldats), ont une utilité économique. On s’appuiera particulièrement sur le secteur agricole camerounais.
(1) Nous commençons par préciser les outils méthodologiques et les résultats majeurs de l’enquête de l’INS. (2) Nous poursuivons en rappelant les difficultés inhérentes à l’analyse du secteur informel et en resituant son rôle dans le temps, rôle qui ne semble pas avoir faibli, du moins depuis nos propres enquêtes menées dans les années (3) Nous terminons sur le bien-fondé des recommandations, déjà anciennes, cherchant à limiter l’impact du secteur informel ainsi que sur les débats théoriques qui ont jalonné ces trente dernières années.
+ Enquêtes de l’INS + - Base de sondage : ménages sélectionnés de manière aléatoire sur 10 régions - 2 questionnaires (ménage et individuel) - Enquête pilote du 30 /07 au 12/08/ Evaluations externe et interne
Répartition des actifs occupés
Emploi par secteur et par zone
1/ L’essentiel des effectifs est constitué de travailleurs indépendants (47,2 %) et des aides familiaux (29,7 %). 2/ Le travail des enfants reste préoccupant : 1,41 million d’enfants de ans sont engagés dans un emploi, soit 39,6 % d’enfants de ce groupe d’âges. 3/ Le taux de polyactivité, qui est le rapport du nombre de personnes exerçant un ou plusieurs emplois secondaires à la population active occupée, se situe à 26,5 %. 4/ Le taux de chômage au sens du BIT est estimé à 3,8 % chez les personnes âgées de 10 ans ou plus.
+ En 1976, le Cameroun compte 7,1 millions d’habitants (près de 20 millions aujourd’hui). + Le taux d’urbanisation est estimé à 28 % (59,2 % en 2011) et la population active représente 50,8 % de la population totale contre 69 % en Les actifs sont comptabilisés parmi les adultes âgés de 15 à 59 ans tandis qu’en 2011, ils concernent les ans. Il faut donc relativiser la progression du taux d’activité. + Enfin, on relève en 1976 comme en 2011 un taux de chômage peu élevé et une prédominance de l’informalité. + Sur les 2,76 millions d’actifs que compte le Cameroun en 1976, un peu plus de 2 millions exercent dans l’agriculture, chasse, pêche et sylviculture.
1/ Les emplois du secteur informel restent prédominants. 2/ Ils le sont dans le secteur agricole mais aussi non agricole. 3/ Du fait de l’urbanisation, on pouvait imaginer une montée des emplois plus formels ou, du moins, via l’exode rural et/ou la moindre croissance de la population rurale, une baisse de l’informel agricole. C’est au contraire celui-ci qui occupe la majorité des actifs occupés. 4/ Les recommandations des institutions internationales, des pouvoirs publics nationaux ou des experts (du moins une partie), consistaient à promouvoir l’économie formelle et à limiter le secteur informel. Si on lui trouvait des points positifs, il présentait suffisamment de limites pour tenter de le réduire afin d’asseoir une économie de marché officielle, déclarée, transparente. L’exemple du Cameroun montre qu’il n’en est rien.
1/ 48,0 % des revenus des ménages issus de l’emploi principal proviennent de l’informel agricole et 18,5 % de l’informel non agricole. 2/ La part de revenu des ménages provenant des secteurs public et privé formels est passée respectivement de 20,9 % et 17,1 % en 2005, à 21,4 % et 12,1 % en 2010 » (INS 2011).
Au cœur de rapports complexes qui mêlent autant l’espace marchand que non marchand, le secteur informel exige une approche pluridisciplinaire, des outils méthodologiques adaptés, notamment en matière d’enquêtes de terrain, de la prudence quant à ses perspectives. On voit mal comment les pouvoirs publics et/ou les institutions internationales pourraient réécrire les mêmes conclusions qu’il y a 30 ans. Il est à craindre que les propos affirmatifs ou simplement les intentions de transformer le secteur informel restent vaines si on ne mesure pas les logiques qui guident les acteurs. Une grille de lecture trop économiste, trop experte, semble vouée à l’échec. La confiance des acteurs de l’informel vis à vis des pouvoirs publics, de ses règles, de ses conventions ou de ses contrats, est plutôt faible. On peut se demander in fine si il n’ y a pas comme une sorte de croyance vertueuse au secteur informel (à défaut d’une croissance vertueuse) et une méfiance ou fatalité vis à vis du secteur formel !