Amandine Garde University of Exeter A.Garde@exeter.ac.uk « Protection des enfants-consommateurs: que fait l'Union européenne en matière de sécurité des jouets et d'obésité infantile? Amandine Garde University of Exeter A.Garde@exeter.ac.uk
Introduction Marché européen: près de 500 millions de consommateurs, dont 25% sont des enfants Enfants-consommateurs: Ils achètent eux-mêmes des biens et des services Ils influencent les choix de consommation de leurs parents Ils constituent un marché futur
Introduction Oui, mais les enfants sont des consommateurs vulnérables: ils sont souvent plus sensibles que les adultes à la présence de certaines substances ils sont également plus crédules et susceptibles d’être manipulés D'où le besoin d'une protection juridique accrue
Introduction Question: que fait l'Union européenne afin de protéger les enfants- consommateurs? Question abordée à l'aide de deux exemples: la sécurité des jouets la prévention de l'obésité infantile
Marché intérieur et sécurité des jouets « un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée selon les dispositions du présent traité » (Article 14 CE) Acceptable à condition que les produits en libre circulation soient sûrs D'où l'adoption de directives relatives à la sécurité des produits (Article 95 CE)
Sécurité des jouets Directive 88/378 relative à la sécurité des jouets Elle pose des exigences essentielles, complétées par des spécifications techniques plus détaillées Les jouets qui ne remplissent pas ces exigences ne peuvent être mis en libre circulation dans l’Union européenne Les jouets qui les remplissent doivent porter le marquage de conformité CE
Marquage de conformité
Marquage de conformité CE L'apposition du marquage CE incombe au fabricant d'un produit Le fabricant peut généralement se contenter de déclarer aux autorités nationales compétentes que son produit est conforme aux dispositions de la directive et normes techniques qui la complètent ! Risque de confusion du consommateur
Retrait des produits dangereux Exemple du retrait des jouets Mattel (été et automne 2007) 924 produits dangereux signalés à la Commission en 2006 24% de jouets près de la moitié en provenance de Chine La directive sur les jouets impose que chaque Etat membre fasse en sorte que les producteurs établis sur leur territoire respectent l’obligation de sécurité
Retrait des produits dangereux Système RAPEX mis en oeuvre au cas où un produit dangereux se retrouverait en libre circulation sur le marché communautaire Information par un Etat membre de la Commission des mesures qu'il compte prendre Transmission de l'information par la Commission aux autres Etats membres Communication par les Etats membres à la Commission des mesures envisagées
Sécurité des produits et intérêt supérieur de l'enfant Communication sur les droits de l'enfant publiée par la Commission en juillet 2006 + Article 24 Charte L'un des principes directeurs de cette Communication est la reconnaissance que l'intérêt supérieur de l'enfant doit constituer une considération primordiale dans toutes les politiques communautaires (« mainstreaming ») Intérêt de l'enfant c./ lobbies industriels
II. Prévention de l'obésité infantile en Europe
L'étendue de la crise en Europe On parle d'obésité lorsque l'IMC est supérieur à 30 IMC = kg/(m)2 L'OMS a qualifié l'obésité d'épidémie en 1998 Les taux européens actuels sont similaires aux taux qui prévalaient aux Etats-Unis dans les années 80 Augmentation de l'obésité ces 10 dernières années: jusqu'à 27% chez les hommes et 38% chez les femmes
L'étendue de la crise en Europe Les tendances sont encore plus marquées pour les enfants, notamment en Angleterre et en Pologne Près de 30% des enfants sont en surpoids, et le nombre croît de 400,000 par an
L'étendue de la crise en Europe De nombreuses maladies sont associées à l'obésité: les maladies cardio- vasculaires, l'ostéoporose, certains cancers, le diabète de type II… L'obésité coûte cher: jusqu'à 7% des budgets de santé publique Et ce chiffre ne prend pas en compte les coûts indirects (absentéisme, diminution de la productivité...): estimés à plus de £2 milliards par an au Royaume-Uni
Vers une stratégie communautaire de lutte contre l'obésité? L'obésité est une condition multifactorielle Nécessaire d'agir simultanément dans des domaines variés (relatifs aussi bien à l'alimentation qu'à l'activité physique) Action requise à tous les niveaux (local, national, européen, mondial) Partenariat avec une multitude d'acteurs (Commission européenne, Etats membres, OMS, société civile, industrie agro- alimentaire...)
Vers une stratégie communautaire de lutte contre l'obésité? Mars 2005: mise en place de la plate forme européenne Nutrition, Santé et Activité Physique par la Commission européenne Décembre 2005: lancement d'une consultation (livre vert) – 274 réponses 30 mai 2007: publication du livre blanc « Une stratégie européenne pour les problèmes de santé liés à la nutrition, la surcharge pondérale et l'obésité »
Vers une stratégie communautaire de lutte contre l'obésité? De nombreuses mesures ressortent de la compétence de chacun des Etats membres et non pas de la Communauté Toutefois, l'Union européenne peut apporter une valeur ajoutée à l'action des Etats membres - notamment: étiquetage et publicité des produits alimentaires promotion de la consommation de fruits et de légumes dans le cadre de la PAC
Obésité et publicité de produits alimentaires Matraque publicitaire des enfants = une cause (parmi d'autres) de l'obésité infantile Relation établie par des études indépendantes entre le nombre de publicités visionnées par les enfants et leur poids L'OMS a reconnu qu'il était nécessaire d'agir afin de réglementer la publicité aux enfants pour des produits alimentaires peu sains
La directive dite Télévision Sans Frontières (TSF) Objectif poursuivi: la libéralisation du marché des services audiovisuels En 1989, l'obésité ne causait pas d'inquiétudes particulières Par conséquent, très peu de dispositions relatives à la publicité aux enfants pour les produits alimentaires: articles 12 et 16? Article 12(d): la publicité ne doit pas « encourager des comportements préjudiciables à la santé ou à la sécurité »
La directive TSF – Article 12 Demandes de modification – ignorées par la Com. Rapport Hieronymi: “Aucune forme de publicité ou de télé-achat ne pourra être faite lors d'émissions pour enfants pour des produits alimentaires ou des boissons qui ne sont pas conformes aux principes énoncés dans le Règlement sur les allégations nutritionnelles et de santé » Justification: l'augmentation de l'obésité; « la promotion aux enfants de produits alimentaires au profil nutritionnel peu recommandable est décisive dans les choix alimentaires des enfants. Par conséquent, la publicité pour de tels produits ne devrait pas être permise, au moins avant, pendant et après les programmes pour enfants »
La directive TSF – Article 12 Proposition qui n'a pas été retenue par le Parliament Préférence du Parlement et de la Commission pour un recours à l'auto-réglementation Confirmé dans le texte final de la directive 2007/65 sur les services média audiovisuels adopté le 11 décembre NB: extension du champ d'application à d'autres supports audiovisuels, et notamment à l'internet
La directive TSF – Article 3 sexies (2) « Les États membres et la Commission encouragent les fournisseurs de services de médias à élaborer des codes déontologiques relatifs à la communication commerciale audiovisuelle inappropriée, accompagnant les programmes pour enfants ou incluse dans ces programmes, et concernant des denrées alimentaires ou des boissons contenant des nutriments ou des substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique, notamment ceux tels que les matières grasses, les acides gras trans, le sel/sodium et les sucres, dont la présence en quantités excessives dans le régime alimentaire global n’est pas recommandée »
La directive TSF – Article 16 1. La publicité télévisée ne doit pas porter un préjudice moral ou physique aux mineurs et doit, de ce fait, respecter les critères suivants pour leur protection : a) elle ne doit pas inciter directement les mineurs à l'achat d'un produit ou d'un service, en exploitant leur inexpérience ou leur crédulité ; b) elle ne doit pas inciter directement les mineurs à persuader leurs parents ou des tiers d'acheter les produits ou les services concernés [...] ;
Rôle de l'autorégulation Préférence marquée de la Commission pour l'auto-réglementation: voir aussi le livre blanc sur l'obésité du 30 mai 2007 La Commission prévoit de ré-évaluer sa position, si nécessaire, en 2010 Exemples de mesures prises par les industriels de l'agro-alimentaires: McDonald's France: pas de pub pour les menus Happy Meal dans les grilles de programmes TV spécifiquement destinés aux enfants
Rôle de l'autorégulation Ferrero France: pas de pub TV lorsque les enfants de moins de 10 ans représentent plus de 25% de l'audience totale Coca-Cola France: pas de pub TV dans les programmes spécifiquement destinés aux enfants Initiatives certes louables mais isolées et insuffisantes Efficacité nécessairement très limitée de ces mesures
Rôle des mesures nationales Directive d'harmonisation minimale: Suède: interdiction de faire de la publicité télévisée aux enfants de moins de 12 ans Royaume-Uni: interdiction récente d'insérer des publicités pour de la malbouffe pendant les programmes pour enfants (4-16) Limite à cette liberté accordée aux Etats membres: principe de la compétence de l'Etat de transmission Aff. 34 & 35/95 De Agostini, CJCE 9 juillet 1997
La situation en France Loi de Santé Publique du 9 août 2004 Article 29 (inséré à l'article L. 2133 du Code de la santé publique): insertion de messages sanitaires dans les publicités pour certains produits alimentaires, ou versement d'une taxe à l'INPES Préférence très nette des industriels pour la première option – efficacité? Campagne de l'UFC Que Choisir Intérêt de l'enfant c./ lobbies industriels