Le choix du conjoint en contexte migratoire : mixité et endogamie Christelle Hamel, Sociologue, INED Unité de recherche « Migrations internationales et minorités » ------------ Journée scientifique « Familles, migrations internationales et politiques publiques » 21 juin 2011
Plan de la présentation Questions de recherche Mixité, intégration, migration L ’enquête Trajectoires et Origines Objectifs Population Résultats: Facteurs qui influencent le taux de couple mixtes
Question de recherche La mixité est-elle un indicateur d’intégration ? Comment migration et mise en couple s’articulent-elles dans l’histoire de vie des personnes ? A quel âge arrivent-elles ? Quelle est leur situation matrimoniale à leur arrivée en France ? Comment s’opère le choix du conjoint ? Quels sont les facteurs qui influencent la mixité de ceux et celles arrivés célibataires et adultes ? Diplôme Religion - La mixité est souvent conçue dans les études sur les immigrés comme un indicateurs d’intégration, tant économique que culturelle. Cependant l’interprétation à donner au constat d’un taux élevé de couple mixte n’est pas aisée. Certains travaux anglophones ont fait le constat du fait qu’un taux de couple mixte élevé peut s’accompagner d’une faible insertion professionnelle des migrants (assimilation segmentée), tandis que d’autres ont aussi fait le constat d’un fort taux d’endogamie peut être associée à une forte intégration économique. Par ailleurs, les glissements interprétatifs du constat au niveau d’un groupe d’un faible taux de mixité à la suspicion d’un refus des individus de se groupe de « vouloir ne pas se mélanger » sont toujours un risque de surinterprétation. Il reste néanmoins qu’il existe une sorte de fascination pour le couple mixte (demande de journalistes récurrentes…) qui obligent à tenter de comprendre les processus qui influent sur le taux de couple mixte dans un groupe donné. La démarche suivie dans cette présentation ne s’interroge donc pas sur l’intégration des migrants, mais plutôt sur ces processus en suivant deux axes d’investigations. Le premier s’interroge sur l’articulation des calendriers de mise en couple et de migration. Il va sans dire que si les personnes sont déjà en couple à leur arrivée en France, la possibilité de se mettre en couple est plus réduite que si les personnes arrivent célibataires. Le second explore les facteurs qui favorisent le choix d’un conjoint de la population majoritaire (diplôme, religion notamment) et les modalité de rencontre du conjoint, qui tente de replacer la question de la mixité du couple dans une problématique du choix du conjoint.
L’enquête Trajectoires et Origines INED et l’INSEE, en 2008 Etudie : Les trajectoires sociales Les conditions de vie L’expérience des discriminations et du racisme selon l’origine Population : Immigrés (9 000) Enfants d’immigrés (9 000) Originaires d’un DOM et leurs enfants (800 pers) Population majoritaire (3 500) Comprend un module décrivant l’histoire conjugale
Origine du conjoint Champs: 18-60 ans; union actuelle Mixité entendue comme union avec une personne de la population majoritaire Dans leur ensemble, 51% des immigrés vivent avec un conjoint originaire du même pays qu’eux. On observe des variations fortes selon les origines, allant de plus de 80% pour les originaires de Turquie à moins de 20% pour les originaires d’Espagne ou Italie qui sont parallèlement les plus nombreux à vivre en couple avec une personne de la population majoritaire. On constate encore des variations prononcées entre pays d’une même zone géographique: entre le Maroc et l’Algérie notamment (60% et 45%). Entre l’Afrik sahélienne et l’Afrik guinéenne et centrale (60% et 45%) Les conjoints immigrés d’un autre pays sont peu fréquents et concernent souvent un immigré de la même grande zone géographique: Maghreb, Asie-du Sud-Est. Les conjoints nés en France de parents immigrés représentent des cas peu fréquents, hormis pur les originaires du Maghreb (17% pour les algérien et 8% pour les Marocains) Ces taux décrivent-ils le statut matrimonial ou bien des histoires migratoires différenciées?
Migration et mise en couple : Indicateurs utilisés L’année d’arrivée en France : construite en considérant le premier séjour de plus d’un an La première union : une cohabitation dans un même logement pendant au moins six mois La situation matrimoniale à l’arrivée: non pas en considérant le statut matrimonial légal, mais la date de rencontre du conjoint avec qui l’individu a vécu au moins six mois Analyse par sexe
Mise en couple et migration au masculin 18-60 ans En vert à droite, les personnes arrivées avant l’âge de 15 ans, qui mécaniquement ont rencontré leur conjointes après la migration et qui ressemblent davantage aux enfants d’immigrés nés en France à l’ensemble des immigrés. En bleu les personnes déjà en couple à leur arrivée en France, dont le poids plus ou moins important influe évidemment bcp sur la part de couples mixtes. En rouge, les personnes arrivées après 15 ans, qui ont rencontré leur conjoint après la migration, exposés à la possibilité réelle de choisir un conjoint dans la population majoritaire, les seuls que l’ont puissent vraiment comparer entre eux. Le nombre de personnes en situation de choisir un conjoint dans la pop maj est très élevée chez les immigrés d’afriq sahélienne ou guinéenne et centrale; assez faible chez les immigrés Turcs ou de l’UE 27 autre que l’Europe du sud. Le faible taux de couples mixtes chez les turcs est largement du au fait que peu d’entre eux étaient en célibataires à leur arrivée en France. Champs: Hommes, 18-60 ans, union actuelle
Mise en couple et migration au féminin Champs: Femmes, 18-60 ans, union actuelle
Variation du taux de couple mixte (Hommes) En bleu foncé, le tx de couple mixte calculé sur l’ens. des hommes immigrés En saumon, le taux de couple mixte calculé sur les hommes arrivés après 15 ans, avec rencontre après. Variation traduisent une augmentation ou une diminution des tx de mixité. Diminution pour l’Espagne, l’Italie et l’ASE, et le Portugal dues au poids des personnes arrivées avant 15 ans, ds ces courants migratoires qui sont les plus anciens. Une augmentation des tx de mixité pour l’Algérie et Afr centrale ou guinéenne et l’Algérie et surtout aut UE 27.
Variation du taux de couples mixtes (Femmes) Effectifs faibles pr femmes turques et Esp. Italie Changement qui ne change pas l’ordre de comparaison des groupes entre eux. A part pour l’Espagne et l’Italie Variation toujours dans le sens d’une augmentation de la mixité des couples. de 3 à 15 points. L’augmentation est due au fait que les femmes qui ont migré seules sont nettement plus qualifiées que celles qui ont migré en couple, notamment pour l’Algérie et l’Afr sub. Quels sont les autres facteurs pouvant faire varier le taux de couple mixte?
Facteurs favorisant la mixité du couple (hommes) Avoir un bac. ou un diplôme du supérieur Etre arrivé adolescent plutôt qu’adulte Avoir reçu une religion chrétienne dans l’enfance Avoir reçu une religion non-chrétienne dans l’enfance, même si elle a eu peu d’importance entrave la formation d’un couple mixte Toutes choses égales par ailleurs Effet significatif de l’origine Etre originaire d’Esp-Italie, Algérie ou d’un Aut. Pays de l’UE27 Favorise la mixité Etre originaire d’ASE ou de Turquie freine la formation d’un couple mixte.
Facteurs favorisant la mixité du couple (femmes) Avoir un bac. ou plus est le déterminant le plus fort Avoir déjà un CAP ou un BEP influe déjà Arriver adulte plutôt qu’adolescente L’inverse des hommes Avoir reçu une éducation où la religion avait … Pas ou peu d’importance, quelle que soit cette religion (chrétienne ou autre) Toutes choses égales par ailleurs: Effet très peu significatif de l’origine Qui ne reste que pour les originaires de Turquie On peut dire qu’il y a une frontière sociale forte Les femmes entrées seules sont nettement plus qualifiées que celles entrées en couple et sont en proportion aussi diplômées que les hommes de même origine, notamment celles venant de pays où l’offre d’emploi est faible.. Le diplôme explique le fort tx de couple mixte pr l’afr sub et le Portugal - La frontière religieuse ne se fait sentir pour les femmes que dans le cas d’une éducation où une religion non-chrétienne était importante. -
Conclusion Très forte hétérogénéité de l’articulation des calendriers de mise en couple et migration avec des effets contrastés Pour les personnes arrivées adultes et célibataires, l’effet du diplôme prime sur l’origine pour les femmes. L’origine a un effet plus prononcé pour les hommes. Les facteurs qui influent sur le taux de couple mixte difficile à explorer : la population majoritaire
Merci de votre attention ! Des questions ? Des remarques ? Christelle Hamel : christelle.hamel@ined.fr « Trajectoires et Origines : Enquête sur la diversité des populations en France, Premiers résultats », INED, Documents de travail, n°168, octobre 2010. http://www.ined.fr