DELIMITATION ET CONSERVATION FORESTIERE EN AFRIQUE CENTRALE BRIEFING « Accès à la terre, acquisitions de terres et développement rural : nouveaux enjeux, nouvelles opportunités », Yaoundé, Cameroun, les 27 et 28 septembre 2010 DELIMITATION ET CONSERVATION FORESTIERE EN AFRIQUE CENTRALE CAS DU PROGRAMME D’APPUI A LA CONSERVATION DES ECOSYSTEMES DU BASSIN DU CONGO (PACEBCo) Présenté par : Patrice MEZUI, Expert financier, BAD en détachement à la CEEAC
INTRODUCTION Les forêts du bassin du Congo qui s’étendent sur 10 pays d’Afrique Centrale (Burundi, Cameroun, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, RCA, RD Congo, Rwanda, Tchad et Sao Tome & Principe), couvrent une superficie de plus de 4 000 000 Km2. Elles font face ces dernières années à de nombreux défis qui menacent leur survie. Le taux de déforestation est aujourd’hui estimé à 2 %, soit une perte de plus 2.000.000 ha/an. L’exploitation informelle ou non durable du bois ne cessent de dégrader les espaces naturels. Les conflits armés, la mauvaise gouvernance, la faible capacité institutionnelle des administrations nationales et régionales chargées de la gestion des forêts réduisent les efforts de conservation et accentuent cette dégradation. Le braconnage pour l’approvisionnement de la filière de viande de brousse est en train de provoquer la disparition de certaines espèces animales. Enfin, l’apparition plus fréquente d’événements climatiques est en train d’affecter les écosystèmes forestiers du bassin qui constituent d’importants puits de carbone à préserver. Pour contribuer à l’atténuation de ces effets, la Banque africaine de développement (BAD) a accordé, en avril 2009, un don d’un montant de 24,3 millions de F CFA (37 millions d’euros) à la Communauté des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC) en vue de la mise en œuvre d’un programme d’appui à la conservation des écosystèmes du Bassin du Congo, en abrégé « PACEBCo » d’un coût total de 28,4 millions de F CFA (43,3 millions d’euros). Ce programme vise à assurer la régénération des écosystèmes, le renforcement des institutions en charge de leur gestion et améliorer les conditions de vie des populations. Le programme prend en charge 4 des 10 axes du plan de convergence de la Commission des Forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC) adopté en 2005 en vue d’une gestion concertée des forêts du Bassin du Congo à savoir : (i) l’aménagement des écosystèmes ; (ii) la conservation de la biodiversité ; (iii) le développement d’activités génératrices de revenus et promotion de bonnes pratiques d’exploitation des ressources naturelles ; et (iv) le renforcement des capacités, la participation et l’information des parties prenantes. Ce Programme d’une durée de 5 ans devrait apporter un appui à une meilleure gestion durable des forêts à travers les actions de délimitation et de conservation forestière ainsi que l’appui institutionnel des parties prenantes, objet de cette présentation.
Six (6) paysages sont retenus : Monte Alen – Monts de Cristal, Tri National de la Sangha (TNS), Lac Télé–Lac Tumba, Maringa-Lopori-Wamba, Maiko-Tayna-Kahuzi-Biega et Virunga, répartis sur 8 pays : RDC, Congo, République Centrafricaine, Cameroun, Rwanda, l’Ouganda, Gabon et Guinée Equatoriale. La présentation s’articulera sur trois points : Les actions de délimitation et de conservation forestière ; Les contraintes dans la mise en œuvre du programme ; Les enjeux du programme.
Cartographie de la zone du programme (12 paysages pilotes)
CARTE DU PROGRAMME
I. Présentation des activités de délimitation, de conservation et de renforcement des capacités des parties prenantes du programme 1.1 Délimitation forestière La délimitation physique des aires protégées se fera à travers les actions de bornage et de signalisation sur une superficie de 4 000 000 ha au sein des six (6) paysages. Elles se répartissent comme suit : Paysage Monte Alen – Monts de Cristal (1) La superficie de ce paysage à délimiter s’effectuera au cours de l’exécution du programme. Tri-National de la Sangha – TNS (Cameroun, RCA et Congo) (2) Le Paysage Tri-National de la Sangha, d’une superficie estimée à 36 236 km2, comprend le Parc national de Nouabalé-Ndoki en République du Congo avec 419 000 ha, le Parc national de Lobéké au Cameroun avec 43 000 ha, le Parc national de Dzanga-Ndoki avec 125 100 ha et la Réserve spéciale de Dzanga-Sangha avec 310 100 ha en République Centrafricaine. Paysage Lac Télé–Lac Tumba (RDC et le Congo) (3) Situé au centre de la Cuvette congolaise et centré sur les lacs Télé en République du Congo, Tumba et Mai-Ndombe en RDC, ce paysage couvre une superficie de 126 440 km² dont 54 001 km² pour la section occidentale située en République du Congo et 72 439 km² pour la section orientale située en RDC. Il comprend la réserve communautaire du lac Télé avec 440.000 ha en République du Congo et la Réserve scientifique de Mabali avec 1 900 ha, en République Démocratique du Congo.
1.2 Conservation forestière Paysage Maringa-Lopori-Wamba (RDC) (4) D’une superficie de 74 544 km², ce paysage se limite aujourd’hui au bassin des rivières Maringa et Lopori et aux entités administratives et territoriales de Bongandanga, Basankusu, Befale et Djolu dans les districts de l’Équateur, de Mongala et de Tshuapa de la province de l’Équateur en RDC. La délimitation concerne la reserve Forestière de Lomako Yokolala avec 3 625 km2. Paysage Maiko-Tayna-Kahuzi-Biega (RDC) (5) Ce Paysage comprend le Parc national de la Maiko avec 1 000 000 ha, le Parc national de Kahuzi-Biega avec 660 000 ha et la Réserve naturelle de Tayna avec 88 600 ha. Paysage Virunga (RDC, Rwanda et Ouganda) (6) Transfrontalier entre la RDC, le Rwanda et l’Ouganda, ce paysage couvre 15 155 km² et comprend deux parcs nationaux contigus, le parc national des Virunga avec 772 700 ha en RDC et le parc national des Volcans 16 000 ha au Rwanda, le domaine de chasse de Rutshuru avec 64 200 ha en Ouganda et une bande de 10 km de large en Bordure des parcs nationaux. 1.2 Conservation forestière Le programme permettra de réaliser principalement : 10 000 hectares de plantations forestières communautaires dans les paysages de Virunga et Kahuzi-Biega ; Une dizaine de projets REDD ; Une dizaine de projets en changements climatiques avec un appui des parties prenantes en négociation et calcul des stocks de carbone.
La mise en œuvre de ces actions dans les paysages écologiques retenus sera coordonnée par le Réseau des Aires Protégées d’Afrique centrale (RAPAC) et CIFOR avec l’appui des ONG, associations et autres partenaires. Ces ONG travailleront étroitement avec les services des parcs nationaux des pays concernés. 1.3 Appui aux Administrations en charge de la gestion des aires protégées Les activités d’accompagnement prévues concernent : La construction ou réhabilitation de 120 postes de garde et équipés plaques solaires et de systèmes radio de communication ; La construction de six (6) centres écologiques avec réseau d’adduction d’eau ; Réhabilitation des Jardins Zoologiques ; L’acquisition de vedettes de surveillance ; La formation de 200 gardes/an en suivi-écologique, lutte anti-braconnage et équipement en kits forestiers soit 1 000 gardes formés dans tout le bassin ; Sensibilisation et formation de 300 000 personnes en protection et utilisation de la biodiversité dont au moins 40% de femmes et de 50% de populations autochtones ; Création de comites de gestions dans les périphéries des aires protégées.
1.4 Promotion Durable du Bien-être des Populations Le programme vise à promouvoir, dans les 6 paysages, des activités d’amélioration des conditions de vie et de lutte contre la pauvreté des populations locales. Les réalisations prévues sont : Elaboration des schémas d’aménagement et de gestion des aires protégées des paysages ciblés : Une dizaine de plans d’aménagement et de gestion forestière (PAGF) ; 50 à 60 Plans de Développement Local (PDL) dans les paysages concernés. Renforcement des capacités parties prenantes Il s’agit de renforcer leurs capacités de négociation, d’organisation, de planification et gestion des organisations communautaires de base, les communautés locales et les administrations concernées et d’appuyer la décentralisation des activités dans les zones du programme (Plus de 1.500.000 personnes dont au moins 40% de femmes, 50% d’autochtones concernées). Promotion d’activités génératrices des revenus Cette activité permettra de créer : des microprojets générateurs de revenus ; un Fonds de développement local (FDL) qui assurera le financement sous forme de microcrédits d’infrastructures socioéconomiques communautaires à la demande.
II. Contraintes dans la mise en œuvre des actions du programme Les microprojets concernent : 60 écoles primaires, 30 centres de santé, un pavillon d’un hôpital, 100 puits et forages, 105 projets d’adductions d’eau potables, 500 km de pistes à réhabiliter ou aménager, 7 plates formes multifonctionnelles pour les femmes, 8 quais et ouvrages divers, 300 microprojets dans les domaines de la pêche, agroforesterie, artisanat et autres et la distribution de 100 000 moustiquaires et des campagnes de lutte contre le VIH/SIDA et les maladies hydriques. II. Contraintes dans la mise en œuvre des actions du programme Les principales contraintes sont : les activités incontrôlées de déforestation et destruction de la faune, défrichement pour le charbon de bois et les cultures agricoles ; les activités incontrôlées d’exploitation minière artisanale et d’exploitation du bois dans les parcs ou à proximité ; l’insuffisance de connaissances, la pauvreté et l’insuffisance de moyens alternatifs de subsistance, l’absence de surveillance et les perturbations climatiques et hydrologiques) ; les risques récurrents d’invasion de parcs par les bandes armées, les guerres, l’insécurité et l’instabilité politique ; les faibles capacités institutionnelles des administrations nationales en charge des questions forestières ; l’absence de délimitation de certaines aires protégées, source de conflits entre les administrations chargées de leur gestion et surveillance avec les populations riveraines, voire entre pays dans le cas des paysages transfrontaliers. III. Enjeux du Programme
1-12 Thèmes transversaux Principaux enjeux Pauvreté Amélioration des moyens d’existence des populations Promotion d’une vision de conservation qui intègre le développement humain Environnement Gestion des impacts du Programme sur l’environnement biophysique et humain Population Caractérisation et maîtrise des dynamiques des populations. Gestion des impacts des composantes du Programme sur l’environnement humain (socio culturel et socio économique) Qualité de vie Effets sur la santé humaine Limitation des effets de contamination Faune-Homme Hygiène, santé et sécurité autour des réalisations du Programme VIH/SIDA Genre Activités génératrices de revenus. Accès équitable aux équipements et aux services. Implication des femmes et des jeunes dans les processus de décision. Gouvernance environnementale Equité et répartition des recettes fiscales entre les pouvoirs centraux, les provinces et les communautés locales Transparence dans la gestion financière et budgétaire et gestion foncière Participation Implication de toutes les parties prenantes Capitalisation de l’expérience des Programmes antérieurs et en cours Renforcement des capacités des acteurs des parties prenantes Enjeux cumulatifs au niveau des paysages Maîtrise du contexte d’intervention des actions du Programme Mise en synergie des interventions du Programme avec celles des autres acteurs Conciliation des impératifs de conservation et d’amélioration des conditions de vie des populations Enjeux transfrontaliers Mise en cohérence entre limites des Paysages et limites territoriales des Etats Harmonisation des politiques et approches de gestion des ressources forestières Cohérence entre intérêts sous-régionaux et intérêts nationaux Intégration des populations locales Renforcement des capacités des parties prenantes pour la prise en compte des spécificités liées aux populations autochtones pygmées (et autres) Mise en œuvre des activités spécifiques pour tenir compte de cette catégorie de la population Instabilité sociopolitiques et déplacements des populations Renforcement des capacités des parties prenantes pour la prise en compte des spécificités liées à la période post conflits, notamment en ce qui concerne les stratégies et approches de gestion de conflits ; Evaluation d’impacts post conflits ; Prise en compte du contexte post conflits dans l’étude d’impacts des projets spécifiques 1-12
Conclusion Au stade actuel, les activités du programme ont démarré avec la signature des conventions avec les principaux partenaires et le recrutement des personnels des paysages. La prochaine étape est l’organisation des concertations avec les ONG et Associations opérant dans les zones du programme pour le démarrage des activités sur le terrain. Il est à noter que la réussite du programme dépend de l’implication étroite de toutes les parties prenantes et aussi de la concertation et coopération régionales. Cette gestion participative devra permettre de garantir une meilleure appropriation par les populations des méthodes d’aménagement, de gestion intégrée, de protection de l’environnement et de lutte contre les fléaux.
JE VOUS REMERCIE