Lien entre sécurité et développement: Par Ousmane OROU-TOKO Master of Arts en Coopération internationale et développement.

Introduction Importance du thème central du séminaire Les questions de développement ont longtemps été l’apanage des autorités politiques notamment civiles Les questions de sécurité avaient toujours relevées du domaine de la défense militaire Évolution des pensées et des comportements: vers une armée de développement Sécurité et développement : thème introductif à la problématique du séminaire Placer la problématique dans son contexte Appréhender l’évolution des concepts et des pratiques

Plan de Présentation Évolution du contexte, évolutions des concepts Sécurité et développement: définitions Sécurité et développement: acteurs et consensus Conclusion

Évolution du contexte, évolutions des concepts

Evolution du contexte Un contexte mouvant et changeant Les questions de développement et celles de sécurité, sont traitées de manière séparée Fin de la guerre froide en 1990: prise en compte des questions de sécurité au niveau des acteurs du développement Publication de l’Agenda pour la paix en 1992 par le SG/ONU Génocide rwandais de 1994 a accentué le débat sur les liens entre sécurité et développement Traditionnellement, les questions de développement d’une part et celles de paix et de sécurité d’autre part, sont traitées de manière séparée. Les acteurs politiques se cantonnaient essentiellement aux questions liées à l’économique, au politique et au social des Etat en laissant la charge de la sécurité au domaine de la défense militaire. Ce n’est qu’avec la fin de la guerre froide au début des années 1990, que les questions de sécurité et de promotion de la paix ont pris de l’ampleur et de la considération notamment au niveau de la Coopération Internationale au Développement. Depuis cette époque, le nombre des activités de promotion de la paix est allé en s’accroissant parallèlement au débat sur le rôle des acteurs de la scène internationale et l’adaptation des instruments disponibles aux nouveaux problèmes posés par les conflits armés au sein même des Etats. Si le ‘coup de fouet’ à ce débat a été donné par la publication en 1992 de l’Agenda pour la paix par le Secrétaire général des Nations Unies d’alors Boutros Boutros-Ghali, c’est le génocide rwandais de 1994 qui a accentué la discussion sur le rôle de la coopération au développement dans les pays en conflit, surtout par rapport à ses incidences négatives (involontaire) sur la dynamique conflictuelle

Evolution du contexte Déconstruction des différentes recherches sur l’analyse des causes des conflits Mondialisation et transformations sociales et conflit Croissance économique et conflit Pauvreté et conflit Inégalité et conflit Ressources et conflit (économie de guerre) Etc. Dans le cadre de ces recherches, plusieurs problématiques ont été abordées notamment celle de la mondialisation et des transformations sociales comme sources de conflit, celle de la croissance économique et conflit, la problématique pauvreté et conflit, la problématique inégalités et conflit, la problématique ressources et conflit (économie de guerre), croissance démographique et conflit, éducation et conflit, démocratie, économie de marché et conflit, aide publique au développement et conflit

Evolution des concepts Sécurité Le concept de sécurité Traditionnellement concept de sécurité a fait l’objet de restriction : sécurité du territoire face aux agressions extérieures, à la protection d’intérêts nationaux face à l’étranger, ou à la sécurité de la planète face à la menace d’un holocauste nucléaire : Etat westphalien détenant le monopole de la violence légitime Fin de la guerre froide: l’avènement d’un monde interdépendant et multicentrique et où évoluent des acteurs transnationaux Il s’agit de la sécurité étatique pour lequel  les Etats poursuivaient les mêmes objectifs définis en termes de sécurité en réglant leur comportement les uns envers les autres par l’usage de  deux instruments communs : la diplomatie et la force. L’usage de ces instruments doit être envisagé à la fois dans  « le cadre unilatéral d’Etats souverains (…) et dans le cadre multilatéral d’une communauté d’Etats souverains établissant des normes et des règles destinées à renforcer la sécurité de chacun des membres ». Cette conception de la sécurité s’appliquait davantage aux Etats-nations « Théories de la sécurité », Charles-Philippe David et Jean-Jacques Roche, 2002, P. 17

Evolution des concepts Sécurité Caractéristiques La transformation des éléments spatiaux et temporels du conflit  Le changement de l’identité des belligérants  L’élargissement de la nature des cibles  La systématisation d’une guerre asymétrique et privatisée exprimée par la formulation « notre sécurité dépend de l’insécurité que nous faisons subir » Sécurité n’est plus une question d’armement, mais une question de vie humaine et de dignité: sécurité humaine Ces caractéristiques montrent bien que le monde évolue vers un réel changement de paradigme du conflit centré sur l’Etat. Pour beaucoup d’individus, la sécurité est synonyme de protection contre la maladie, la faim, le chômage, la criminalité, la répression politique, les catastrophes naturelles, etc. Le sentiment d’insécurité naît plus souvent des incertitudes du quotidien que de la crainte d’un cataclysme mondial Avec l’avènement de l’interdépendance et de la mondialisation, la sécurité est devenue l’affaire d’autres types d’acteurs aux agendas multiples et souvent non conciliables. Les concepts de « sécurité humaine » et de « sécurité globale » sont aujourd’hui abondamment utilisés pour décrire les enjeux des conflits contemporains. La sécurité humaine qui a pour objet d’analyse non la protection de l’Etat mais la protection de l’individu, rappelle que la sécurité doit aller au-delà de la défense armée des territoires. A côté de la sécurité humaine on note l’existence d’un concept voisin : le concept de sécurité globale qui témoigne quant à lui de l’élargissement du concept même de sécurité qui tient compte des risques autres que militaires pour la sécurité nationale et inclut d’autres acteurs que les seuls Etats. La sécurité globale prend en compte les dimensions politiques, économiques, sociales ou environnementales qui sont toutes inter-reliées.

Evolution des concepts: Articulation Sécurité et Développement Les phénomènes de sécurité et de développement étant composites, ils se croisent et se recroisent  Concept de sécurité englobe un large éventail de menaces non militaires, concept de développement devenu un fourre-tout Concept de sécurité humaine : la sécurité ne se limite pas à la protection contre la violence physique, mais aussi à la protection contre toute privation (accès à une alimentation suffisante, accès aux soins médicaux, à l’éducation, etc.)  Certains aspects des deux concepts peuvent avoir une liaison causale positive ou négative, d’autres aspects peuvent coexister indépendamment les uns avec les autres ou alors être reliés indirectement par une dynamique causale complexe. L’analyse de l’articulation entre la sécurité et le développement, quel que soit l’angle de compréhension choisi, débouche sur un même constat, celui de la complexité : « les phénomènes de sécurité et de développement étant composites, ils se croisent et se recroisent » La notion de sécurité qui au départ était perçue d’un point de vue purement militaire a évolué ces dernières années pour englober un large éventail de menaces non militaires. L’émergence de la sécurité humaine montre de façon assez significative l’évolution de ce concept. Le concept de développement également a subi de façon considérable une évolution et est devenu un  fourre-tout. Deux types d’interprétation de ce concept sont promues,  soit une interprétation restreinte : il faut protéger la sécurité des individus et non des Etats, soit une conception élargie : la sécurité ne se limite pas à la protection contre la violence physique, mais aussi à la protection contre toute privation (accès à une alimentation suffisante, accès aux soins médicaux, à l’éducation, etc.) 

Evolution des concepts: Articulation Sécurité et Développement Lien avec le sous-développement et la pauvreté: les Etats faibles posaient une menace pour le système international en raison de la perméabilité de leurs frontières aux terroristes, aux réseaux de criminels et autres facteurs de déstabilisation L’articulation sécurité et développement s’est transformée en stratégie intégrée de réduction de l’insécurité mondiale par le biais du développement des Etats faibles ou fragiles

Sécurité et développement: Définitions

Définitions notion de sécurité Dominique David, dans le dictionnaire de stratégie, conçoit la sécurité « au sens le plus large du terme (…) comme l’état d’un sujet qui s’estime non menacé par tel ou tel danger, ou pense avoir les moyens d’y répondre si ce danger vient à devenir actuel » Sécurité humaine: regroupe les problèmes les plus urgents des peuples sous trois rubriques principales, dont chacune se rapporte à un des trois droits fondamentaux de l'être humain: le droit de vivre à l'abri du besoin, le droit de vivre libéré de la peur et le droit, pour les générations futures, d'hériter d'une planète où elles pourront survivre Ce concept qui voit le jour au début des années 1990 est le produit simultané de la fin de la guerre froide, du processus de mondialisation et de démocratisation, et de l'universalisation de la question des Droits de l'homme. La disparition brutale et inattendue du système bipolaire a marqué une mutation spectaculaire de l'environnement stratégique. On assiste à l'apparition de nouveaux problèmes de sécurité qui dépassent les frontières: migrations massives, conflits ethniques, criminalité organisée, maladies pandémiques, surpopulations, très grande pauvreté, exclusion et marginalisation de millions de personnes

Définitions notion de développement La notion de développement a évolué: passant progressivement d’une conception axée essentiellement sur l’économique à une vision plus globalisée et centrée sur l’homme Développement économique – développement social – développement humain – développement durable – développement humain durable En 1980, Willy Brant constatait dans le rapport final de la Commission Nord-Sud que la notion de développement ne sera et ne pourra jamais être définie à la satisfaction générale. le développement économique se confond d’une certaine manière avec la croissance économique en termes d’augmentation du Produit national brut (PNB) ou du Produit intérieur brut (PIB) global ou par tête d’habitant Développement social : Sous l’instigation de l’Assemblée générale des Nations unies, on a fini par admettre que sans un développement social véritable, le développement économique n’est qu’un mirage pour la grande majorité des pauvres de ce monde. Ce développement ne profite qu’à quelques pays ou bien dans un pays donné, à une minorité de personnes. Développement humain: le but du développement est d’élargir la gamme des opportunités qui s’offrent aux individus qui ne sauraient être réduits à leur seule dimension d’homo economicus Développement durable : affirmé le lien entre environnement et développement en vue d’assurer le développement durable pour le bien des générations présentes et des générations futures. Le développement durable qui traite de la protection de l’environnement n’a donc son sens que parce qu’il a pour finalité le bien être de l’homme: développement humain durable

Définitions Sécurité-développement Développement humain: processus d’élargissement des possibilités de choix offertes aux individus Sécurité humaine implique que les individus peuvent exercer ces choix librement et sans risque et en espérant que les perspectives d’aujourd’hui ne s’évanouissent pas demain Depuis les années 1970 et plus encore au cours des décennies 1980 et 1990, de nouvelles notions sont apparues dans les relations internationales. Au cours de cette période on assisté à l’évolution des concepts de sécurité et de développement. Bien qu’ayant chacune un contenu spécifique, ces deux notions s’interfèrent et s’articulent l’une avec l’autre dans la mesure où finalement elles ont trait à la même réalité

Définitions Sécurité-développement Lien entre sécurité et développement: une avancée sur un front renforce les possibilités de progresser sur l’autre, de même qu’un échec dans un sens accroît le risque d’échec de l’autre Le concept de sécurité humaine implique que les individus aient les moyens de se prendre en charge afin de satisfaire à leurs besoins essentiels. La sécurité humaine, à cet égard apparaît comme un élément essentiel du développement participatif. Un échec en matière de développement humain engendre des privations avec leurs cortèges de pauvreté, de faim, de maladie, d’inégalités entre communautés, entre régions ; autant de facteurs susceptibles de dégénérer en violence.

Sécurité et développement: acteurs et consensus

Sécurité et développement Les acteurs Ces acteurs correspondent à deux champs celui de la sécurité (forces armées, forces de polices, agences de renseignements…) celui du développement ( gouvernements, agences nationales de développement, organisations intergouvernementales telles que le Programme des Nations Unies pour le Développement, le PNUD et la Banque mondiale) Le lien entre sécurité et développement s’appréhende plus aisément en procédant à une réflexion sur les acteurs

Sécurité et développement Le consensus Pendant longtemps les acteurs du développement ont adopté des positions réservées face à leur implication dans les conflits armées impossibilité de mettre en œuvre des actions de développement dans un espace de guerre car le développement s’inscrit dans la durée la légitimité de leurs actions Aujourd’hui implications des acteurs du développement dans les conflits armées: le développement seul ne suffisait pas à garantir la stabilité. Prise en compte de la sécurité et son existence comme condition essentielle à toute action de développement. Or un conflit armée détruit les infrastructures à peines reconstruites, il déplace les populations, il appauvrit les gouvernements désormais insolvables Mais avec le bouleversement de l’ordre politique international au cours des années 1990, les agences de développement se sont de plus en plus impliquées dans la gestion des conflits armées

Sécurité et développement Le consensus réaction contrastée des acteurs du secteur de la sécurité implication des acteurs du développement comme un apport de ressources en termes d’influence et en termes de budget irritation vis-à-vis d’un acteur qui prétend investir dans un champ auquel il ne comprend rien, celui de la sécurité En effet pour stabiliser un conflit armé, les agences de développement et surtout les agences onusiennes, fournissent sur le terrain, un cadre de coordination politique de référence sur lequel les militaires peuvent appuyer leurs actions de terrain. Ces agences peuvent également jouer le rôle d’intermédiaire favorisant la coordination entre militaires et ONG dans la mesure où « elles comprennent à la fois les logiques politico-stratégiques guidant l’action des militaires et les logiques humanitaires et éthiques guidant les ONG » Cette prédisposition favorable des acteurs du champ de la sécurité à utiliser les ressources que peuvent leur fournir les agences de développement se heurte à des résistances contre toute ingérence dans leur domaine réservé 

CONCLUSIONS Sans sécurité il n’est pas de développement et sans développement il n’est pas de sécurité. La sécurité et le développement peuvent se soutenir, se nuire ou rester sans influence mutuelle Aujourd’hui, la sécurité ne se limite plus à l'impératif traditionnel de défense contre toute attaque militaire mais englobe la protection de la personne et de la propriété Les outils de prévention, de règlement des conflits et de maintien de la paix s’élaborent pour créer une synergie entre les actions de sécurité et les actions de développement