La mise à disposition de personnel entre associations Conférence-débat CROS 25 février 2009
Les différentes formes d’externalisation de la main d’œuvre en France Le législateur est intervenu en réglementant le prêt de main d’œuvre et en renforçant les garanties offertes aux salariés. Le prêt de main d’œuvre à but lucratif : -le travail temporaire -l’entreprise de travail à temps partagé -les organismes participant à un même pôle de compétitivité Le prêt de main d’œuvre à but non lucratif : -les Groupements d’Employeurs -les associations intermédiaires -la mise à disposition par le biais d’une convention, sous certaines conditions Le phénomène d’extériorisation de la main d’œuvre prend en France des formes très variées. C’est pourquoi le législateur est intervenu en restreignant les possibilités de recours à ce type d’opérations, en réglementant le prêt de main d’œuvre et en renforçant les garanties offertes aux salariés. Il existe plusieurs outils encadrés d’un point de vue légal pour le prêt de main d’œuvre à but lucratif et à but non lucratif. Nous allons nous intéresser aujourd’hui aux dispositifs de prêt de main d’œuvre à but non lucratif.
Une pratique très règlementée Pour partager des emplois, plusieurs solutions existent : Groupement d’Employeurs, convention de mise à disposition. Compte tenu des évolutions juridiques récentes, il convient d’être très prudent en matière de mise à disposition de personnel. Le délit de marchandage, un risque réel -Délit passible de sanctions pénales lourdes -Sont coupables aussi bien celui qui met à disposition du personnel que celui qui bénéficie de la mise à disposition -Le risque existe même si la mise à disposition concerne un seul salarié et s’effectue sur une durée déterminée Pour partager des emplois, plusieurs solutions existent, dont le groupement d’employeurs ou la mise à disposition de personnel. Compte tenu des évolutions juridiques récentes, il convient d’être très prudent en matière de mise à disposition de personnel : ce qui fonctionnait encore il y a encore quelques années, tombe aujourd’hui sur le coup de la loi. Ainsi, la mise à disposition est réglementée. Il importe de respecter les règles définies notamment par le Code du Travail sous peine de risquer une condamnation pour délit de marchandage. Ce délit est passible de sanctions pénales lourdes : deux ans de prison, 30 000 euros d’amende pour les personnes physiques, 50 000 euros pour les personnes morales. Sont alors coupables aussi bien celui qui met à disposition du personnel que celui qui bénéficie de la mise à disposition. Le risque de délit existe même si un seul salarié est concerné et même si la mise à disposition s’effectue sur une durée déterminée.
Une pratique très règlementée Les situations susceptibles de faire émerger le risque de délit de marchandage Contrôle de l’Inspection du Travail Litige avec un salarié Accident de travail La remise en cause éventuelle de la mise à disposition peut intervenir au moins à trois occasions : la première, c’est lors d’un contrôle de l’Inspection du Travail. Le deuxième cas, c’est celui du litige avec un salarié : un salarié se fait licencier par l’employeur d’origine alors qu’il est mis à disposition depuis longtemps au sein d’une autre structure. Il peut tout à fait dire : « cela fait cinq ans que je suis mis à disposition de l’autre structure. C’est donc lui mon employeur. De la même façon, si une mise à disposition dure depuis très longtemps et que le lien de subordination avec l’employeur d’origine s’est distendu, le salarié peut affirmer : « Mon véritable employeur, c’est celui chez qui je suis mis à disposition. C’est lui qui me donne des ordres, c’est lui qui m’indique quand je pars en vacances, etc.». Le troisième cas, c’est celui de l’accident de travail.
Le cas de la convention de mise à disposition Les associations peuvent envisager de mutualiser divers moyens, dont leur personnel. Les mises à disposition de personnel peuvent ainsi être consenties entre associations sans que soit créée une structure juridique nouvelle. Ces actions, licites dans leur principe, sont encadrées juridiquement. Elles appellent donc plusieurs précisions.
Le cadre légal de la mise à disposition par le biais d’une convention Respecter le Code du Travail et la Convention Collective Absence de fraude aux droits des salariés ou aux organismes sociaux Respecter le principe de la spécialité de l’objet de l’association La mise à disposition doit être conforme à l’objet statutaire de l’association Etablir une convention de mise à disposition spécifique au prêt de personnel Différencier mise à disposition de personnel et mise à disposition de locaux Une opération de mise à disposition de personnel entre associations : -doit avant toute chose se conformer au Code du Travail et la Convention Collective -doit respecter l’objet statutaire de l’association . Le cas échéant, il faut modifier les statuts. Par exemple, une école de football dont l’objet social concerne strictement l’enseignement du football peut difficilement facturer des prestations de services administratifs à d’autres clubs de football -doit donner lieu à une convention de mise à disposition concernant exclusivement du prêt de personnel.
Le cadre légal de la mise à disposition « à titre onéreux » Refacturer à l’euro/l’euro Il est essentiel que l’opération de prêt de main d’œuvre ne se traduise par aucun profit pour celui qui met du personnel à disposition. Cela signifie que la facturation de l’opération devra couvrir exclusivement : -les salaires ; -les charges sociales y afférentes ; -les frais professionnels éventuellement remboursés à l’intéressé ; -les frais supplémentaires liés à la gestion administrative et comptable du dossier qui doivent correspondre à un coût réel et justifiable afférant à l’emploi du salarié prêté. La répartition du temps de travail entre les associations doit être précise et démontrable : utiliser la fiche temps -Pour être légale, la mise à disposition à titre onéreux doit correspondre à une refacturation à l’euro/l’euro du salaire toutes charges comprises, c’est-à-dire le salaire + les charges (dont la taxe sur salaire si l’association est exonérée de TVA et les remboursements de frais). Outre les charges sociales, il existe d’autres charges afférentes au salaire, notamment le coût d’établissement de la fiche de paie. Supposons qu’elle soit externalisée auprès d’un cabinet conseil et que son émission coûte 15 euros par mois, l’association qui met à disposition son salarié pour un mi-temps dans une autre structure va lui refacturer 7,50 euros, ce qui est logique car conforme à la réalité. Par contre, si les fiches de paie sont gérées en interne par un comptable, la situation est différente. Il sera délicat de déterminer précisément son coût, de même qu’il ne sera pas aisé de définir avec exactitude le montant des autres charges de fonctionnement à imputer sur le salarié lorsqu’il est mis à disposition. La tentation sera alors d’affecter des frais de gestion forfaitaires. Or, le cadre légal impose des refacturations à l’euro près. Dès qu’on retient la base forfaitaire, il existe un risque de délit de marchandage. -La répartition du temps travaillé entre les deux structures doit être précise et doit pouvoir être démontrée. En ce sens, la fiche de temps est un outil fiable et indiscutable.
Le cadre légal de la mise à disposition « à titre onéreux » Ne pas installer la mise à disposition dans la durée La mise à disposition doit permettre de gérer un problème ponctuel : ce n’est pas en soi un mode de gestion du personnel La mise à disposition doit intervenir pour des compétences dont la structure bénéficiaire ne dispose pas en interne Risque de transfert de la qualité d’employeur vis-à-vis du salarié mis à disposition Dans la pratique, dans le monde associatif, les mises à disposition de personnel à durée indéterminée ou de longue durée, sont très courantes et jusqu’à ce jour, nous n’avons pas d’expériences qui nous permettent de dire qu’il existe un risque majeur. Pour autant, en principe, une mise à disposition ne peut intervenir que ponctuellement, pour des compétences dont la structure bénéficiaire ne dispose pas à l’interne ; ce n’est pas en soi un mode de gestion du personnel. Si le besoin est permanent, on crée une structure ad hoc, a priori un Groupement d’Employeurs. En effet, dans le cas d’une mise à disposition de personnel qui durerait depuis longtemps, on peut être – dans les faits – dans une situation de multiemployeurs ou de transfert de la qualité d’employeur vis-à-vis des salariés. Cette situation représente un risque réel en cas de rupture du contrat.
Conclusion En conséquence, une association peut détacher un salarié auprès d’une autre association par le biais d’une simple convention. Mais, à la différence du régime des Groupements d’Employeurs, aucun texte d’origine légale ne précise les rapports entre l’association qui a la qualité d’employeur et celle qui reçoit les salariés. Cela concerne à la fois les relations employeur-association utilisatrice et les relations employeur-salarié. C’est en cela que le régime juridique des Groupements d’Employeurs présente des garanties supplémentaires aux opérations de mise à disposition de personnel dans le cadre d’une association de droit commun.
Le cas du Groupement d’Employeurs
Qu’est ce qu’un Groupement d’Employeurs ? Un Groupement d’Employeurs (GE) est une association loi 1901 dont l’objet social est la mise à disposition de personnel auprès de ses membres adhérents. Les associations adhérentes se partagent ainsi le temps de travail des salariés du GE.
Le travail à temps partagé Qui est l’employeur ? Le GE est l’unique employeur. Il n’y a qu’un seul contrat de travail, quel que soit le nombre d’associations au sein desquelles le salarié est amené à travailler. Ce contrat de travail unique respecte toutes les obligations légales et sociales en vigueur (durée du travail, cotisations sociales, ..) L’objectif du GE est d’employer ses salariés en CDI à temps complet. Le temps partiel et le CDD restent possibles.
Une Relation Tripartite L’association Adhère Sont mis à disposition Le Groupement d’Employeurs Les salariés Embauche
De nouvelles relations de travail Qui est le responsable ? De nouvelles relations de travail apparaissent dans le cadre d’un GE. Dans les faits, le GE reste l’employeur, le garant du salaire et le seul apte à sanctionner en cas de faute professionnelle ou de manquement. Mais, au quotidien, le salarié est soumis au règlement intérieur des associations au sein desquelles il est mis à disposition. L’association qui accueille le salarié est responsable des conditions d’exécution du travail.
De nouvelles relations de travail Comment s’organise le temps de travail ? L’organisation du temps de travail s’établit entre le GE, le salarié et les associations même si in fine, seul le GE peut valider l’emploi du temps. Le salarié peut travailler deux jours dans l’association A et trois jours dans l’association B. Ou bien le matin, chez A et l’après-midi chez B. Ou encore l’hiver chez A et l’été chez B.
Un fonctionnement simple Pour les associations : Les associations adhèrent au Groupement Le Groupement recrute les salariés compétents en fonction des besoins des adhérents Chaque adhérent paie sa part de salaire et de charges en fonction des heures qu’il a utilisées
Un fonctionnement simple Pour les salariés : Le Groupement établit le contrat de travail et émet les bulletins de salaire Le salarié est couvert par une convention collective La consolidation de l’emploi favorise la polyvalence et la motivation des salariés
Une formule triplement gagnante Les associations mutualisent leurs besoins en main d’œuvre, fidélisent les salariés et bénéficient de compétences qu’elles ne pourraient pas financer seules Les salariés disposent d’un emploi pérenne, de formations régulières Les territoires stabilisent des salariés qualifiés et polyvalents permettant ainsi le maintien de services d’intérêt général et d’utilité sociale
L’organisation du Groupement d’Employeurs Le Conseil d’Administration Le GE, comme toute association, est piloté par un Conseil d’Administration composé d’adhérents du Groupement. Le GE est donc un outil au service de ses adhérents et dirigé par ses adhérents. Ceux-ci sont à la fois acteurs et utilisateurs du Groupement. Le Conseil d’Administration veille au bon fonctionnement du GE et s'assure de l'application des décisions prises en Assemblée Générale. Il est doté des plus larges pouvoirs concernant la gestion courante de l'association.
L’organisation du Groupement d’Employeurs La structure de gestion Si le nombre de salariés et d’adhérents le justifient, le GE peut mettre en place une structure de gestion plus ou moins importante selon l’activité à gérer. Si le GE veut rester autonome mais ne souhaite pas assurer la gestion administrative du personnel, il peut sous-traiter la comptabilité et la paye à un autre Groupement déjà existant sur son territoire. Si plusieurs associations veulent se partager le temps de travail de salariés, mais qu’elles ne souhaitent pas créer leur propre GE, elles peuvent adhérer à un GE déjà existant.
L’organisation du Groupement d’Employeurs La structure de gestion Le collectif d’associations peut également décider d’assurer bénévolement la gestion de l’emploi : -une des associations prend en charge la gestion pour le collectif -les associations assurent de manière alternée la gestion
Article L.1253-17 du Code du Travail Le Groupement d’Employeurs : une association soumise à des règles spécifiques Convention collective applicable Lorsque les membres du GE entrent dans le champ d'application d'une même convention collective, cette convention est obligatoirement celle du GE Dans le cas contraire, le choix de la convention collective applicable est à l'entière appréciation des membres du GE : classifications professionnelles niveaux d'emploi des salariés activité des différents membres du GE Article L.1253-17 du Code du Travail
Le Groupement d’Employeurs : une association soumise à des règles spécifiques Régime fiscal Le GE est soumis à TVA à partir du moment où l’un de ses adhérents est assujetti à la TVA Le GE non soumis à la TVA est soumis à la taxe sur les salaires Selon la nature de son activité et les conditions dans lesquelles elle est exercée, le GE peut être assujetti : -à l’impôt sur les sociétés -à la taxe professionnelle
Article L.1253-8 du Code du Travail Le Groupement d’Employeurs : une association soumise à des règles spécifiques Responsabilité solidaire « Les membres du Groupement sont solidairement responsables de ses dettes à l’égard des salariés et des organismes créanciers de cotisations obligatoires » Article L.1253-8 du Code du Travail Possibilité de limiter le risque de défaillance du Groupement : -S’assurer de la pérennité et de la régularité des adhérents -Modalités de paiement des factures -Dépôt de garantie : paiement d’avance de quelques MAD -Réserves alimentées par le résultat de chaque exercice -Point régulier sur le budget et la trésorerie
Conclusion Le GROUPEMENT D’EMPLOYEURS permet de : -Mutualiser les besoins de personnels -Pérenniser les emplois associatifs -Susciter la création de nouveaux emplois -Apporter un appui à la fonction employeur -Développer la qualité de l’encadrement -Professionnaliser le secteur sportif
Le cas de la prestation de services
Les critères de différenciation entre mise à disposition et prestation de service Les cas où la question de la différenciation se pose Contrôle de l’Inspection du Travail Litige avec un salarié Accident de travail Le critère du personnel qualifié On considère que lorsque le besoin porte sur un métier très spécifique qui nécessite un personnel qualifié (par exemple pour la mise en place d’un outil informatique), on est plutôt dans une logique de prestation de service que dans une logique de mise à disposition. Cependant, ce critère du personnel qualifié ne saurait constituer un critère d’appréciation unique. La question de la différenciation entre mise à disposition et prestation peut se poser au moins à trois occasions : -Contrôle de l’Inspection du Travail -Litige avec un salarié -Accident de travail. Le critère du personnel qualifié On considère que lorsque le besoin porte sur un métier très spécifique qui nécessite un personnel qualifié (par exemple pour la mise en place d’un outil informatique), on est plutôt dans une logique de prestation de service que dans une logique de mise à disposition. Cependant, ce critère du personnel qualifié ne saurait constituer un critère d’appréciation unique.
Les critères de différenciation entre mise à disposition et prestation de service Le critère de la subordination Si une personne d’une société tiers établit pour vous des fiches de paie et vous les facture, on est bien dans le cas de la prestation de service : la rémunération va être forfaitaire, à la tâche (en l’occurrence, à la fiche de paie). Le salarié reste subordonné à l’employeur d’origine qu’est le prestataire (et non au client). Dans le cas de la mise à disposition, la situation est différente puisque le critère de tarification est le tarif horaire, donc le temps de travail. Lorsque l’employeur met à disposition un salarié, ce dernier va devoir suivre les instructions de l’association au profit de laquelle il est mis à disposition.
Les critères de différenciation entre mise à disposition et prestation de service Le critère des modalités de facturation Dans le cas de la prestation de service, la société prestataire répercute sur son prix de vente un certain nombre de coûts directs et indirects, à moins – cas rarissime – de trouver une structure qui facture à prix coûtant. En revanche, mettre à disposition du personnel et facturer forfaitairement, c’est-à-dire imputer des frais de gestion forfaitaires est illégal.
Conclusion La prestation de service est autorisée à la condition que la prestation facturée ne se réduise pas à du prêt de main d’œuvre, que les salariés restent subordonnées à la société prestataire et que le développement des services soit compatible avec l’objet social de l’association. Par exemple, une compagnie dont l’objet social concerne strictement la création peut difficilement facturer des prestations de services administratifs à d’autres compagnies.
Les accompagnements et les aides pouvant être sollicités Le CRGE accompagne les associations qui ont un projet de mutualisation d’emploi (information, modalités de constitution, démarches administratives, documents juridiques, …) Le DLA (Dispositif Local d’Accompagnement) propose une aide aux associations pour la consolidation des activités et la pérennisation des emplois dans le milieu associatif. A travers le dispositif « Emplois Tremplins Associatifs », la Région Poitou-Charentes accompagne les associations, y compris les Groupements d’Employeurs, qui développent un projet d’activité nécessitant un soutien à l’emploi.
Sources Rapport et note du cabinet Delsol sur « Les mises à disposition de personnel entre associations » Note du cabinet Prémisses sur « Mutualiser des moyens et des compétences » Analyse juridique, sociale et fiscale des formes atypiques d’organisation de l’emploi dans le secteur sport du cabinet Amnyos Note « Associations et mise à disposition de personnel » de Pierre Fadeuilhe
Centre de Ressources pour les Groupements d’Employeurs Centre de Ressources pour les Groupements d’Employeurs de Poitou-Charentes CRGE Poitou-Charentes 60-68 rue Carnot 86000 POITIERS Tél : 05 49 88 25 57 Fax : 05 49 88 97 70 E-mail : crge@wanadoo.fr Site Internet : www.crge.com