FLUIDITE ET ENCOMBREMENTS DES TRANSPORTS TERRESTRES PRESENTE PAR LE CONSEIL BURKINABE DES CHARGEURS
Introduction Le commerce extérieur des pays africains est fortement pénalisé par les coûts de transport des marchandises. En effet, tandis que les coûts de transport interviennent pour moins de 6% dans le prix de revient des marchandises dans les autres régions du monde, en Afrique ces coûts oscillent entre 15 à 25% (pour les pays à façade maritime), voire entre 45 à 60% pour les pays de l’hinterland).
Le transport terrestre est considéré comme le maillon le plus cher de la chaîne de transport. Si les coûts des facteurs d’exploitation (coûts d’acquisition des véhicules, des pièces détachées, du carburant etc…) peuvent en partie expliquer cette situation, il y a également ce qu’il est convenu d’appeler le fléau des transports en Afrique ; c'est-à-dire les tracasseries administratives et policières sur les axes routiers qui concourent à rallonger les délais d’acheminement et à grever les coûts du transport routier.
La question est si préoccupante que des programmes nationaux et sous-régionaux de facilitation des transports sont en chantier en vue d’enrayer ce phénomène des encombrements des transports terrestres et d’instaurer une fluidité du trafic au bénéfice du système des transports et des échanges de nos pays.
La présente communication est basée sur l’exemple du trafic burkinabè qui transite principalement par quatre (04) ports à savoir Lomé, Téma, Abidjan et Cotonou. Mais nous pouvons affirmer sans grand risque de nous tromper que cet exemple est illustratif des pratiques non seulement de la sous-région de l’Afrique de l’Ouest, mais également des autres régions de l’Afrique.
Elle s’articule autour de deux points : Les impacts des contrôles excessifs sur les transports terrestres Les mesures d’allègement des contrôles sur les axes routiers
Les impacts des contrôles excessifs sur les transports terrestres
L’organisation des contrôles routiers, de façon générale, a pour but d’assurer la sécurité de la circulation routière et la protection des économies nationales contre les fraudes et autres trafics illicites.
Cependant force est de constater que, dans la pratique, ces contrôles se caractérisent par des facteurs tels que la lourdeur des formalités administratives et surtout la multiplicité des contrôles. Par leur caractère souvent abusif et tracassier, ils ont fortement contribué à dégrader les conditions des transports inter Etats et constituent dans la quasi-totalité des Etats africains l’une des entraves majeures au développement du transport routier.
De tels dérapages dans les systèmes de contrôles ont pour conséquence le renchérissement des coûts de transport et le rallongement des délais de route entraînant une faible rotation des camions.
Quelques exemples illustratifs.
Tableau1. Les tarifs routiers et les frais annexes sur certains axes routiers de la sous-région
Nature des produits Abidjan - Ouaga Lomé - Ouaga Tema - Ouaga Cotonou- Ouaga Conteneur 20’ x 2 ou 1 x 40’ avec retour 1 500 000 F 1 350 000 F 1 200 000 F Conteneur 20’ x 2 ou 1 conteneur sans retour 1 200 000 F 1 050 000 F 1 050 000 F 1 150 000 F Céréales 39 000 F/tonne 32 250 F/tonne 35 250 F/tonne 33 000 F/tonne Sucre 39 000 F/tonne 35 250 F/tonne Fer, Carreaux 35 250Ftonne 34 000 F/tonne Frais annexes aux tarifs routiers 130 000 F (escorte Abidjan-Ouangolo) + le double environ en faux frais 56 000 F (faux frais Niangoloko-Ouaga) 20 000 F (solidarité sur la mer en territoire togolais) +≈ 15 0000 F 28 500 F (faux frais Cinkansé-Ouaga) 23 500 F (escorte Tema-Paga) 6000 F ( faux frais Tema-Paga) 26 000 F ( faux frais Dakola-Ouaga)
Il ressort de ce tableau que les frais annexes, c'est-à-dire ceux relevant des contrôles varient de 7 à 25% des tarifs routiers ; ce qui représente des sommes importantes.
Axes Lomé-Ouaga Tema-Ouaga Cotonou-Ouaga Abidjan-Ouaga Distance 992 kms 1 070 kms 1 200 kms 1 164 kms Formalités de transit Une (01) semaine + 02 jours à Zongho 05 jours 03 jours Traversée du territoire 01 à 02 jours 02 jours 03 jours Formalités à la frontière 03 à 04 jours 02 à 03 jours 01 jours Réacheminement à Ouagadougou 01 jour Temps de séjour à Ouagarinter avant déchargement 05 à 10 jours parfois plusieurs semaines Plusieurs jours au dépôt SONABHY
On constate qu’au delà des délais de traversée des territoires les opérations terminales constituent une entrave supplémentaire à la fluidité du trafic.
Les mesures d’allègement des contrôles sur les axes routiers
Les contrôles excessifs et intempestifs sur les axes routiers ont entraîné une exaspération des opérateurs de transports notamment des transports routiers. Les autorités compétentes des différents pays ne sont pas restées insensibles aux plaintes de ces opérateurs. Aussi à différents niveaux des mesures ont été prises en vue de l’allègement de ces contrôles. A ce titre on peut citer :
Les mesures prises au niveau de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Les dispositifs de fluidité routière mis en place sur certains corridors. Les actions en cours au niveau de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA).
Les mesures prises au niveau de la CEDEAO Il s’agit essentiellement de la convention de la CEDEAO de 1982 relative au Transit Routier Inter-Etats, communément appelée Convention TRIE. Elle a pour objectif la simplification de formalités douanières entre les Etats membres de la communauté.
Le principe est l’instauration d’un document douanier unique, le carnet TRIE, permettant à un véhicule transportant des marchandises d’aller d’un pays membre à un autre pays membre en traversant un ou plusieurs autres.
La convention TRIE préconise l’institution d’un fonds de garantie sous-régional avec une perception unique du fonds de garantie.
Mais, la mise en circulation d’un carnet TRIE unique et l’institution d’un fonds de garantie sous-régionale sont conditionnées par la mise en œuvre d’une procédure uniforme pour l’agrément douanier des véhicules par chaque Etat membre.
En effet, hors mis les conteneurs, les véhicules citernes et les camions frigorifiques, les parcs automobiles des différents Etats n’offrent pas de garantie suffisante de scellement permettant leur circulation en toute sécurité sous un document douanier unique, en l’occurrence le carnet TRIE unique.
En attendant que cette condition soit remplie, on assiste à l’émission de carnet TRIE nationaux et la perception de fonds de garantie par des cautions nationales.
Des rencontres récentes ont eu lieu sur la question entre les administrations douanières et les cautions nationales, qui ont permis des avancées et la mise en application d’un carnet TRIE unique est envisagée pour janvier 2006.
Les dispositifs de fluidité routière mis en place sur certains corridors.
Les ministres chargés des transports du Burkina, de la Côte d’Ivoire, du Mali et du Niger ont organisé plusieurs rencontres sur les problèmes des tracasseries administratives et policières, parmi lesquelles on peut citer les réunions suivantes : La réunion de Bamako en mars 1997 La réunion de Bobo-Dioulasso en octobre 1997 La réunion de Yamoussokro en mai 1999
Les recommandations issues de ces différentes concertations ont préconisé l’organisation d’escortes groupés et de contrôles conjoints aux frontières.
L’organisation de ce système de convois de véhicules a pour objectifs : D’améliorer la fluidité du trafic et la sécurité de la circulation sur les axes routiers des pays concernés ; De renforcer la lutte contre la fraude ; D’accroître le rendement des moyens de transport par une meilleure rotation de ceux-ci ;
Fluidifier les échanges entre les pays concernés. Suite à ces recommandations, la Côte d’Ivoire a initié une action dénommée « opération fluidité routière » en 2001 qui consiste en l’organisation d’escortes groupées des véhicules de transports de marchandises. Cette escorte est assurée par tous les services de contrôle (police, gendarmerie, douane…) et coordonnée par l’Office Ivoirien des Chargeurs (OIC).
L’opération promettait de faire ses preuves, malheureusement les évènements de septembre 2002 lui ont porté un coup de frein. Le gouvernement burkinabè a pris un Décret en 2001 pour réorganiser les contrôles routiers dans le sens de l’amélioration de la fluidité routière ; les textes et les autres modalités d’application de ce Décret sont en élaboration, leur mise ne œuvre est imminente.
Une autre expérience qui mérite d’être citée en la matière, c’est le système de convoyage des véhicules à partir du port de Lomé jusqu’à la frontière avec le Burkina ; système baptisé « Opération Solidarité sur la Mer ». Malgré quelques insuffisances, ce système permet tant bien que mal une certaine amélioration de la fluidité du trafic sur l’axe Togo-Burkina.
Le Mali a institué un « Droit de traversée » dont le paiement au point de départ du véhicule après un contrôle des différents services, devait donner droit à la traversée du territoire sans autre perception.
Mais dans la pratique, d’une manière générale, la mise en place de ces différents dispositifs n’empêchent pas les perceptions illicites qui persistent.
Les actions en cours au niveau de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) Après la CEDEAO, l’UEMOA s’est lancée dans la lutte contre les contrôles excessifs sur les axes routiers et pour l’instauration de la fluidité routière. L’UEMOA a commandé une étude qui a abouti à la mise en place en 2001 d’un programme de facilitation des transports au sein de l’Union. Ce programme comporte plusieurs composantes qui visent l’élimination des contrôles intempestifs et l’instauration d’une fluidité sur les axes routiers des pays membres de l’Union ; ce sont : La construction des postes de contrôle juxtaposés aux frontières qui a démarré avec la construction du poste pilote à la frontière entre le Togo et le Burkina. La création de comité nationaux de Facilitation des Transports dans les Etats membres avec à terme un comité régional. La mise en place d’un observatoire des pratiques anormales sur les axes routiers. Une étude en vue de la mise en place d’un système d’Information Anticipée sur la Marchandise(SIAM).
Dans le cadre de son programme de facilitation des transports, l’UEMOA travaille en collaboration avec la CEDEAO à travers des actions complémentaires :
Les deux organisations se sont réparties les axes pour la mise en place d’observatoire des pratiques anormales. La CEDEAO a pris la décision de créer des comités nationaux de Facilitations des Transports dans les pays non membres de l’UEMOA.
Conclusion
La question des tracasseries et leurs impacts sur les transports routiers en Afrique est certes très préoccupante, mais elle fait l’objet d’une attention toute particulière de la part des autorités compétentes de la sous région.
Toutes les actions en cours devraient permettre une amélioration significative de la situation. Les différents corridors de transit devraient faire de la lutte contre ce phénomène une de leurs actions prioritaires de promotion car, plus que les tarifs routiers proprement dit, les conditions de traversée des territoires de transit, sont souvent un élément déterminant du choix du corridor par le Chargeur de l’hinterland.
La fluidité du trafic est également un facteur important de promotion des échanges sous-régionaux et internationaux.
JE VOUS REMERCIE POUR VOTRE ATTENTION