Capacité de discernement

Slides:



Advertisements
Présentations similaires
PERSONNES AGEES ET FIN DE VIE
Advertisements

XXXIXèmes Journées de la SGOC CHOLET 1er et 2 juin 2007
Psychiatrie du sujet âgé: l’expérience nantaise
La Dépression par le Médecin Généraliste
Quelles sécificités de la prise en charge palliative pour l’enfant ?
Toulouse – CIMG – 8 novembre 2005 Personne de confiance Pradines B. Service de Soins de Longue Durée Albi Cassaigne P. Unité Mobile de Gériatrie. Centre.
Personne de confiance Pradines B. Service de Soins de Longue Durée, Albi. Pradines V. Service du Pr Vellas, Toulouse. Cassaigne P. Unité Mobile de Gériatrie.
Fin de vie : Faut-il une loi ?
Bruno VELLAS Gériatre CMRR Midi-Pyrénées
Aptitude/inaptitude du concept à l’évaluation
“ La consultation mémoire”
Vous êtes un médecin de famille de 65 ans qui envisage de prendre sa retraite. Vous travaillez en cabinet, maintenant désigné GMF, avec six autres collègues.
Points de repère pour l’éducation des enfants
Matières dangereuses.
La loi du 11 février 2005 Droits et devoirs des établissements, des jeunes handicapés et de leurs familles.
La démarche clinique infirmière
Insertion et maintien dans lemploi des T.H La loi n° du 11 février 2005 Cette loi vise à garantir à toutes les personnes handicapées 1 / Légalité
RÉGLEMENTATION EN RADIOPROTECTION RELATIVE À LA PROTECTION DES PATIENTS DCS/SHSP / réunion CIEHS du 26/09/02.
Justice et Injustice DIEU EST-IL INJUSTE ?
Décisions médicales en fin de vie en France
Rencontre pour les parents de la deuxième année
EDUCATION THERAPEUTIQUE ET LE CARE : Quels liens peut-on faire ?
DMG Poitiers B Reynoard X Rucquois J Bernat 01/2010
La RBPP sur les Attentes de la personne et le projet personnalisé Du point de vue de l’Anesm 1.
Le RAI : quels enjeux liés à son déploiement dans le canton de Vaud?
Le cas Pierrette ou quand la personne âgée sort du cadre…
Soirée d’information du réseau REPER’ AGE
Le Programme Personnalisé de Réussite Éducative
Réseau gérontologique le point de vue du médecin généraliste et des libéraux Capacité de gérontologie - Année – Docteur Jean-Paul SCHLITTER -
Quest-ce que cest que la charte? La Charte est là pour protéger vos droits et libertés des actions du gouvernement. Si le gouvernement adopte une loi,
CONSEIL GENERAL DU BAS-RHIN
Aide médico psychologique
La recherche pédiatrique en génétique et lassentiment des enfants : quelles directives ? Denise Avard, PH.D., Directrice de recherche, CRDP, Université
Loi relative aux droits des malades et à la fin de vie
LE DON DU SANG 2011.
L’HOPITAL Groupe 4b Animatrices : Mélanie ZINCK et Elise
Don du sang: Sujet: karoline élève de 2nde veut donner son sang que
Brefs rappels sur la protection de l’enfance
L’évaluation gériatrique standardisée Intérêt et objectifs
Le développement de l’autonomie
Le rôle du médecin dans la prise de décision
REFUS DE SOIN ET MEDECINE D’URGENCE
De lautonomie et de son apprentissage P. VINCENT
Un grand voyage, une grande aventure nécessite toujours une longue et sérieuse préparation. Notre mort exige cette minutieuse préparation F.J.
Notre mort exige cette minutieuse préparation
Missions du conseiller en prévention
La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance
INTRODUCTION Présentez-vous, puis présentez le scénario ainsi que tous les outils éventuels utilisés. DÉFINITION DES RÈGLES DE DISCUSSION Exposez les règles.
Le respect de l’autonomie et le consentement au traitement
Information en cas de dommages liés aux soins
Distinction entre candidat certifiable et hautement certifiable : exploration du vécu des symptômes Habiletés d'écoute Utilise les habiletés d'une écoute.
Présence de la famille durant la réanimation pré-hospitalière
Atelier Handicap et Insertion RAPPORTEURS Marie-Claire HMAE et Robineda NIUAITI Animé par Séverine BRETESCHE.
TEMOIN DE MALTRAITANCE A L’ENFANT, QUOI FAIRE ?
« Service de Counseling » en planification familiale
Législation professionnelle
Loi relative aux droits des malades et à la fin de vie
LA PREVENTION DES CHUTES CHEZ LA PERSONNE AGEE
La perception de la pénibilité au travail dans les métiers du social
Diaporama sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG)
Valérie Havet (Docteur en Psychologie) Cours 1ère année IFSI
Limitation de traitement en réanimation. Point de vue d’un philosophe.
L’annonce de la maladie
Dr José GOMES LA BONNE DISTANCE D'après "La Bonne Distance" Atelier sur la reconnaissance des limites de l'intimité lors de la consultation Collège des.
DROIT DES CONTRATS ©.
De quoi parle-t-on ?  Définition.
DR C DEPUYDT JOURNÉE 11 DÉCEMBRE 2015 INTERVENTION SOUS CONTRAINTE EN PSYCHIATRIE On n’a que les mots : clarifier les définitions pour mieux comprendre.
Raisonnement clinique Infirmier
Muriel Nanchen Intervenante en protection de l’enfant Janvier 2016
Transcription de la présentation:

Capacité de discernement Samia Hurst Consultante – Conseil d’éthique clinique HUG Institut d’éthique biomédicale Faculté de médecine, UNIGE

Capacité de discernement Proposition clinique Capacité de discernement Présente Absente Consentement Refus Accord Refus On y va … L’acte proposé est illicite Urgence: Décision selon volonté présumée et intérêt ‘objectif’ du patient. Hors urgence: Représentant légal Idem…mais attention: Tenir compte de la contrainte en évaluant l’intérêt du patient.

Une question d’autonomie… Respecter les choix des patients, ce n’est pas une nécessité anodine. Les reconnaître comme personnes à part entière Viser leur bien avec intelligence Les respecter comme individu, même lorsque l’identité physique, psychologique et sociale est atteinte par une maladie.

…et de loi La capacité de discernement est présumée; donc pour l’invalider, il faut une cause légale d’incapacité. en raison de son jeune âge, de déficience mentale, de troubles psychiques, d’ivresse ou d’autres causes semblables

L’éthique à l’échelle humaine La capacité de discernement c’est la capacité de: Comprendre les informations pertinentes Apprécier leur importance dans sa situations concrète Raisonner avec ces éléments de façon cohérente Exprimer un choix Risque Tolérance Grisso T, Appelbaum PS. Assessing Competence to Consent to Treatment. A Guide for Physicians and Other Health Care Professionals. 1998.

L’éthique à l’échelle humaine La capacité de discernement, ce n’est pas: Une mesure du résultat On évalue la capacité, la façon dont un choix est fait, et non le résultat. Un choix stupide peut être autonome. Une mesure d’accord avec le médecin Un choix autonome peut être contraire à l’avis médical. Mesurable sur le « Mini Mental State » Ni la démence ni une autre pathologie psychiatrique ne signifient, par leur seule présence, qu’un patient n’est pas capable de discernement Une mesure de la perfection d’une décision Elle est suffisante ou insuffisante. La perfection n’est pas requise.

Évaluer la capacité de discernement Quel est le choix? Quels sont les éléments essentiels, que le patient doit avoir compris? Le patient a-t-il compris les éléments essentiels? Est-il capable de raisonner avec ces éléments? Les applique-t-il à sa propre situation? Exprime-t-il un choix? Une pathologie psychiatrique est-elle présente et susceptible d’affecter sa capacité de discernement? Si oui, envisager une évaluation psychiatrique Si non, puis-je y remédier? L’évaluation de la capacité de discernement est une conversation structurée avec votre patient. Mais il y a aussi des outils…

Questionnaire de Silberfeld Questions Réponses   1. Pouvez-vous donner un résumé de la situation? Problème chronique (1) ou Problème aigu (1) 2. Quel traitement souhaiteriez-vous si vous vous trouviez dans cette situation? Réponse claire (1) 3. Pouvez-vous nommer un autre choix possible pour vous? Un autre choix de traitement (1) 4. Quelles sont les raisons de votre choix? Une raison valable (1) 5. Quels sont les problèmes associés à votre choix de traitement ? Un problème (1) 6. Que signifiera votre décision pour vous et votre famille ? Pour le patient (1) Pour la famille (1) 7. Quel effet à court terme aura le traitement ? Effet à court terme (1) 8. Pouvez-vous penser à un effet à long terme ? Effet à long terme (1) 9. Pouvez-vous répéter quel traitement vous souhaitez ? Répétition de la réponse à la question 2 (1) Total : Min 6/10 Silberfeld M, Nash C, Singer PA. Capacity to complete an advance directive. J Am Geriatr Soc 1993;41:1141-3. Traduction française: J.-B. Wasserfallen, F. Stiefel, S. Clarke, A. Crespo. Appréciation de la capacité de discernement des patients: procédure d’aide à l’usage des médecins. BMS 2004 ;85 :1701-4

Cas 1 Monsieur G. est âgé de 80 ans et vit seul à domicile depuis sa retraite de la poste. Habituellement en excellente santé, il consulte pour une toux apparue il y a une semaine, fébrile ‘depuis la veille’. Il est également plus essoufflé que d’habitude. Vous diagnostiquez une pneumonie sans complications, mais nécessitant un traitement antibiotique. Vous discutez du lieu du traitement. Hôpital? Domicile?

Cas 1 Proposition: traitement hospitalier Monsieur G ne veut pas aller à l’hôpital. Il a compris qu’il souffre d’une maladie infectieuse pouvant mettre sa vie en danger, et que son état pourrait s’aggraver subitement. Il est d’accord de prendre un traitement, mais souhaite rester chez lui. Il craint de décéder à l’hôpital, comme d’autres autour de lui, ou de perdre sa capacité à se déplacer. Rester chez lui le rassure. Il vous assure que tout va bien se passer, qu’il ne risque rien en restant à la maison. Son fils unique, dit-il, aura le temps de s’occuper de lui s’il en a besoin. Il est capable de répéter son choix.

Cas 1 Proposition: traitement à domicile Monsieur G est d’accord de rester à la maison. Il a compris qu’il souffre d’une maladie infectieuse pouvant mettre sa vie en danger, et que son état pourrait s’aggraver subitement. Il est d’accord de prendre un traitement, mais ne veut pas aller à l’hôpital. Il craint d’y décéder, comme d’autres autour de lui, ou de perdre sa capacité à se déplacer. Rester chez lui le rassure. Il vous assure que tout va bien se passer, qu’il ne risque rien en restant à la maison. Son fils unique, dit-il, aura le temps de s’occuper de lui s’il en a besoin. Il est capable de répéter son choix.

Atelier Quadrimed 2012 Somme des scores ÷ Nombre d’items   Somme des scores ÷ Nombre d’items Score intermédiaire Compréhension Problème = Traitement Risques/bénéf. Score compréhension (0-6) Appréciation Score appréciation (0-4) Raisonnement Conséquences Comparaison Générer conséquences Cohérence logique Score raisonnement (0-8) Score expression d’un choix (0-2) Atelier Quadrimed 2012

Alternative 1: Alternative 2: Somme des scores ÷ Nombre d’items   Somme des scores ÷ Nombre d’items Score intermédiaire Compréhension Traitement = Risques/bénéf. Score compréhension (0-4) Alternative 2:   Somme des scores ÷ Nombre d’items Score intermédiaire Compréhension Traitement = Risques/bénéf. Score compréhension (0-4)

Si l’on reprend notre cas… Le questionnaire MacCAT a plusieurs effets: Il contraint à sérier davantage les points à aborder. Il approfondi davantage la compréhension et le raisonnement du patient. Il cadre davantage chaque élément (ex: ‘cohérence logique’ plutôt que ‘raison valable’) Il laisse l’évaluateur juger point par point si un manquement signale l’absence de capacité de discernement: ce n’est pas leur nombre mais leur nature qui prime. Il prend nettement plus de temps.

Cas 2 Monsieur S, un travailleur de chantier âgé de 25 ans, a été victime d’un accident. Un ascenseur d’échafaudage s’est effondré alors qu’il s’y trouvait, le précipitant dans une chute de trois étages. Il s’est rompu les deux astragales, et présente des fractures multiples et instables du bassin. A son admission sa tension artérielle est de 90/70. Lorsqu’on lui explique la nécessité d’une intervention chirurgicale, il accepte immédiatement mais déclare ne vouloir en aucun cas de transfusion sanguine : il est membre de l’Association des Témoins de Jéhovah et recevoir du sang serait, à ses yeux, pire que la mort.

Cas 3 Madame V est caissière dans un grand magasin, et vient vous consulter pour une arthrite de l’épaule. Conscient que la répétitivité des gestes qu’elle doit réaliser peut être à l’origine de ce problème, vous recommandez un arrêt de travail. Votre patiente refuse tout net : il n’en est pas question, son travail est important pour elle et elle ne peut pas s’arrêter.

Un consentement libre Cet aspect est nécessaire, mais controversé Geppert & Abbot «Voluntarism in Consultation Psychiatry: The Forgotten Capacity” Am J Psychiatry 2007;164:409-13

Cas 4 J., âgée de 14 ans, consulte pour une grossesse non désirée. Enceinte de 8 semaines, elle vous demande de l’envoyer ‘quelque part où elle peut avoir un avortement’. Elle vous demande également de ne rien dire à ses parents qui, dit-elle, ne la laisseraient pas faire son propre choix.

Le cas des mineurs Les parents sont les représentants légaux de leurs enfants mineurs. Le « jeune âge » est une cause légale d’incapacité de discernement. Mais la limite d’âge n’est pas définie par la loi et dépend du contexte. Un enfant n’est pas nécessairement non autonome. Si un mineur est capable de discernement, il a les mêmes droits en matière de consentement et de confidentialité qu’un adulte capable de discernement.

Points à retenir La capacité de discernement est fondamentale à l’exercice de l’autonomie. Sa reconnaissance est fondamentale à notre reconnaissance mutuelle comme des égaux moraux.

Points à retenir C’est une aptitude et non une mesure du résultat. On peut être stupide et autonome, d’accord avec son médecin et non autonome. Son évaluation repose essentiellement sur une conversation structurée portant sur la compréhension, l’appréciation, le raisonnement, et l’expression d’un choix. Il existe des outils permettant de mieux systématiser et documenter l’évaluation de la capacité de discernement.

Points à retenir Tous ces outils doivent reposer sur une part de jugement subjectif. La compréhension suffisante, une raison valable, la cohérence logique du choix: il y a des seuils dans l’évaluation. Plus les enjeux sont lourds, plus on peut être exigeant. Mais la perfection n’est pas requise: nous échouerions tous…