Service de médecine interne Hôpital de Bicêtre, AP-HP Les attentes : prévention et prise en compte des lipodystrophies et autres comorbidités Cécile Goujard Service de médecine interne Hôpital de Bicêtre, AP-HP Novembre 2011
Définitions SYNDROME LIPODYSTROPHIQUE Les lipohypertrophies Au moins un item : augmentation du périmètre abdominal, bosse de bison, augmentation du tour de poitrine, augmentation du tour de taille, présence de lipome Les lipoatrophies (faciale et autre) Au moins un item : amaigrissement des bras, amaigrissement des fesses, amaigrissement des jambes, amaigrissement au niveau des pieds, veines plus apparentes, lipoatrophie faciale Lipodystrophie mixte Au moins un critère de lipoatrophie ET un critère de lipohypertrophie
La situation aujourd’hui Que disent les experts (Rapport Yeni 2010) ? Prévalence faible chez les patients non traités 2 % Formes atrophiques plus rares du fait de l’arrêt d’utilisation des analogues thymidiniques de la TI en 1ère ligne Gain de tissu adipeux sous traitement difficile à évaluer, en particulier au niveau de la partie supérieure du corps 50 % des patients infectés par le VIH traités sont considérés comme étant lipodystrophiques
Etude PREFACE Méthodologie Objectif principal Objectifs secondaires Etude non interventionnelle, descriptive, transversale, le jour d’une consultation auprès d’un médecin référent VIH Un questionnaire renseigné par le médecin Un auto-questionnaire patient Objectif principal Décrire la prévalence de la lipoatrophie faciale chez les patients VIH+ et traités par ARV depuis plus d’un an Décrire la prise en charge des lipoatrophies faciales Objectifs secondaires Décrire la prévalence des autres localisation de lipoatrophie, de la lipohypertrophie, des syndromes lipodystrophiques mixtes
Etude PREFACE Auto-questionnaire ABCD Etude de 3 dimensions Signes de lipodystrophie, score variant de 0 (aucune atteinte) à 6 (6 régions atteintes) Satisfaction globale de l’aspect du corps, score variant de 1 (très mécontent) à 5 (très satisfait) Qualité de vie (4 dimensions) Dimension A : contrôle et vécu de la maladie et satisfaction de l’apparence du corps Dimension B : impact psychologique, social et relationnel Dimension C : crainte pour l’avenir Dimension D : relation avec le traitement Pour faciliter l’interprétation des scores de qualité de vie, chaque score a été transformé pour que les valeurs minimales et maximales soient comprises entre 0 (mauvaise qualité de vie) et 100 (très bonne qualité de vie) Guaraldi G, Muuri R, Orlandoa G, et al. Lipodystrophy and quality of life of HIV-Infected persons. AIDS. 2008, Vol. 10 (3): 152-161
Etude PREFACE Participation Données présentées à l’IAC 2010 à Vienne Inclusion des patients d’avril 2009 à juillet 2009 sur toute la France 2 410 patients inclus par 122 médecins (dont 2131 fiches d’observation analysables) 2 305 auto-questionnaires ABCD reçus, soit 96 % (dont 2026 auto-questionnaires analysables)
Etude PREFACE Caractéristiques des patients 1 479 hommes (69,7 %) Age moyen : 47,1 ± 9,7 ans IMC moyen : 23,4 ± 4,0 kg/m2 Origine ethnique : 1 608 patients (75,8 %) d’origine caucasienne 308 patients (14,5 %) originaires d’Afrique sub-saharienne Infectés par le VIH en moyenne depuis 12,7 ± 6,1 ans 12,9 ± 6,1 ans pour les hommes vs 12,2 ± 6,2 ans pour les femmes (p = 0,033) Traités par ARV depuis en moyenne 9,3 ± 4,6 ans Hommes traités depuis plus longtemps (9,6 ± 4,5 ans) que les femmes (8,8 ± 4,7 ans, p < 0,001) Co-infection VHC : 352 patients (16,5 %) Femmes infectées depuis plus longtemps (14,5 ± 5,7 ans) que les hommes (12,3 ± 6,2 ans, p<0,001) Co-infection VHB : 168 patients (8,1 %)
Etude PREFACE Prévalence de la lipoatrophie Prévalence de lipoatrophie faciale = 54,0 % (n = 1 150) (IC à 95 % =[51,9 %-56,2 %]) Lipoatrophie et ancienneté du traitement ARV Plus longue était l’exposition aux ARV, plus la prévalence de la lipoatrophie faciale était élevée (p < 0,001) Environ 25 % de la population présentait une lipoatrophie de type 3 ou 4 Rappel : Grade 1: modérée et localisée; 2 : plus profonde; 3 : très profonde et étendue; 4 : très sévère
Etude PREFACE Prévalence de la lipoatrophie faciale SELON L’ORIGINE ETHNIQUE SELON LE SEXE Les hommes étaient plus touchés par la lipoatrophie faciale que les femmes (p<0,001) : Prévalence de la lipoatrophie faciale chez les hommes : 61,0 % (IC à 95% = [58,5 %-63,5 %]) Prévalence de la lipoatrophie faciale chez les femmes : 37,8 % (IC à 95% = [34,0 %-41,6 %])
Etude PREFACE Lipoatrophie non faciale Les données pour les patients traités plus de 10 ans ont été ajoutées pour comparaison
Etude PREFACE Caractéristiques des patients atteints de lipoatrophie faciale
Etude PREFACE Lipohypertrophies/Lipoatrophies 83,3 % des patients présentaient au moins un signe de lipoatrophie (faciale ou autre) OU de lipohypertrophie 42,0 % présentaient au moins un signe de lipoatrophie (faciale ou autre) ET un signe de lipohypertrophie Davantage de lipoatrophies OU lipohypertrophies chez les hommes Hommes : 85,4 %, Femmes : 78,6 % (p < 0,001) Davantage de lipoatrophies ET lipohypertrophies chez les femmes Femmes : 43,2 %, Hommes : 41,5 % (p < 0,001) Davantage de lipoatrophies OU lipohypertrophies avec la durée d’exposition + de 10 ans : 92,0 %, - de 5 ans 65,6 % (p < 0,001) Davantage de lipoatrophies ET lipohypertrophies avec la durée d’exposition + de 10 ans : 53,6 %, - de 5 ans 21,5 % (p < 0,001) Lipohypertrophies Prévalence : 57 % Apparition précoce
Etude PREFACE Concordance entre patient et médecin % concordant % discordant Valeur du Kappa Item 1 : tour de taille 76,5% 23,5% 0,531 Item 2 : tour de poitrine 80,5% 19,5% 0,473 Item 3 : lipoatrophie faciale 80,2% 19,8% 0,607 Item 4 : amaigrissement des fesses 82,2% 17,8% 0,644 Item 5 : amaigrissement des jambes et/ou bras 79,9% 20,1% 0,596 Item 6 : bosse de bison 90,8% 9,1% 0,537 Le coefficient de concordance Kappa s’interprète selon les indications de Landis et Koch : entre 0,00 et 0,20 : une concordance mauvaise entre 0,21 et 0,40 : une concordance faible entre 0,41 et 0,60 : une concordance modérée entre 0,61 et 0,80 : une concordance bonne entre 0,81 et 1,00 : une concordance excellente Bonne concordance entre patient/médecin surtout pour - lipoatrophie faciale - amaigrissement des fesses
Etude PREFACE Qualité de vie Relation avec le traitement Impact psychologique, social et relationnel Crainte pour l’avenir Contrôle et vécu de la maladie et satisfaction de l’apparence du corps Score total : 68,8 ± 21,3 (score variant de 0=mauvaise qualité de vie, à 100=bonne qualité de vie)
Quelles conséquences ? Selon le type : Lipoatrophie : Stigmatisation Gêne fonctionnelle (ex fesses, talons…) Lipohypertrophie Risque cardiovasculaire Syndrome métabolique Troubles glucidolipidiques Quelles sont les possibilités d’intervention ? Une prévention est elle possible? Y a-t-il une implication différente de certains ARV/classes d’ARV ? Quelle thérapeutique si le trouble est apparu? (injections, chirurgie…)
Peut-on se passer des INTI ? Patients concernés Patient naïf en 1ère ligne Patient traité en relais d’un traitement efficace Patient en échec avec virus résistant aux INTI Schémas expérimentaux
Lipoatrophie : une implication différente de certains ARV/classes d’ARV ? ACTG 5142 Lipoatrophie à S48 et S96 EFV 600 mg QD + 2 NRTIs 753 patients naïfs d’ARV LPV/r 400/100 mg BD + 2 NRTIs LPV/r 533/133 mg BD + EFV 600 mg OD EFV LPV/RTV LPV/RTV + EFV d4T ZDV TDF P à S96 EFV vs LPV/RTV .003 EFV vs LPV/RTV + EFV < .001 LPV/RTV vs LPV/RTV + EFV .023 P à S96 d4T vs ZDV .038 d4T vs TDF < .001 ZDV vs TDF < .001 100 50 42 32 40 30 21 30 26 27 20 % de Patients avec une Lipoatrophie 17 % de Patients avec une Lipoatrophie 20 16 10 9 10 7 9 10 8 188 191 197 171 166 173 93 153 133 84 136 117 48 96 48 96 Semaines Semaines Haubrich R, et al. AIDS. 2009;23:1109-1118.
Lipoatrophie : une implication différente de certains ARV/classes d’ARV ? Essai Cameron/M03-613 LPV/r 400/100 x2/j LPV/r 400/100 x2/j + AZT/3TC n=104 S96 155 patients naïfs d’ARV CVpl>1000/ml LPV/r 400/100 x2/j + AZT/3TC 2:1 EFV 600mg x1/j + AZT/3TC n=51 Différence significative de modification de la graisse des membres Evolution similaire de la graisse du tronc EFV + ZDV/3TC EFV + ZDV/3TC LPV/r + ZDV/3TC LPV/r LPV/r + ZDV/3TC LPV/r 25 30 20 20 15 10 p < 0001 Environ 2,3 kg 10 Environ 1,1 kg Median % change in limb fat 5 Median % change in trunk fat p < 0001 -5 -10 -10 -15 -20 Weeks -20 Weeks 24 48 72 96 24 48 72 96 LPV/r : n = EFV : n = 97 45 90 41 89 36 79 32 74 32 LPV/r : n = EFV : n = 97 45 90 41 89 36 79 32 74 32 Cameron DW et al., 14e CROI, Los Angeles, février 2007, communication orale #44LB
Évolution des paramètres lipidiques Lipoatrophie : une implication différente de certains ARV/classes d’ARV ? Monothérapie IP : essai ANRS MONOI Tolérance lipidique à S96 Évolution des paramètres lipidiques de l’inclusion à S96 Médianes (mg/dL) Valantin MA, CROI 2011, Abs. 534
Etude prospective comparative Lipohypertrophie : une implication différente de certains ARV/classes d’ARV ? Switch LPV/r vers ATV/r Impact sur la redistribution des graisses Etude prospective comparative 37 patients « switchés » de LPV/r vers ATV/r 46 patients poursuivant LPV/r Résultats à M12 ATV/r LPV/r Données DXA J0-M12 médiane (range) p Graisse tronculaire, kg 0.87 (6.90, 8.19) 0.021 0.26 (5.68, 5.04) 0.435 Graisse périphérique, kg 0.21 (2.49, 5.20) 0.386 0.15 (3.85, 4.18) 0.736 Ratio masse grasse, % 3.76 (19.29, 52.68) 0.028 2.97 (28.50, 34.02) 0.223 Graisse totale, kg 0.95 (8.89, 12.47) 0.056 0.49 (9.33, 7.28) 0.245 Modification de la graisse périphérique et tronculaire en fonction du traitement 0,007* 0,223* * Test de Wilcoxon entre J0 et M12 intra-groupe Ferrer E. et al. AIDS Research and Human Retroviruses 2011, 27 : 1-5
Messages Risque de modification de la répartition des graisses sous traitement Durée de traitement, mais existe dès les premières années, quels que soient les schémas Classes avec peu de différence à moyen-long terme entre les molécules et dans les essais de switch (hormis INTI)
Quelle prise en charge ?
Prise en charge des troubles lipodystrophiques Chez les patients ayant une lipoatrophie faciale 20,5 % traitements de comblement 5,9 % traitements médicamenteux (levocarnil, glitazones, metformine)
Conclusion Lipoatrophie difficilement réversible pas de traitement systémique effet transitoire des traitements de comblement Lipohypertrophie plus facilement accessible à des mesures hygiéno-diététiques Problème persistant même avec associations d’ARV récentes Effet à très long terme? Affiner les stratégies thérapeutiques à moindre impact sur les graisses
Recommandations EACS 2011
Remerciements Patients qui ont participé à l’Etude Préface Médecins A.Berrebi, A.Blanc, A.Cheret, A.Creuwelsbonneau, A.Madrid, A.Py, A.Trylesinski, B.Castan, B.Christian, B.Dupont, B.Giffo, B.Lebouche, C.Aquilina, C.Augustinnormand, C.Barbuat, C.Beck, C.Billy, C.Biron, C.Chartier, C.Fontier, C.Gaud, C.Genet, C.Penalba, C.Ricaud, C.Rouger, C.Tomei, D.Binet, D.Houlbert, D.Line, D.Salmonceron, E.Badsi, E.Brottiermancini, E.Carbonneldelalande, E.Klementgrandjean, E.Legrand, E.Rosenthal, F.Banisadr, F.Borsalebas, F.Boulard, F.Granier, F.Jeanblanc, F.Lescure, F.Lucas, F.Lucht, F.Prevoteauduclary, F.Raffi, G.Cessot, G.Force, G.Hittinger, G.Lemoal, G.Lepeu, H.Touitou, I.Auperin, I.Rouanet, J.Berger, J.Cervoni, J.Chennebault, J.Esnault, J.Faller, J.Jacquet, J.Laurichesse, J.Livrozet, J.Marionneau, J.Mattei, J.Pouaha, J.Riou, J.Schmit, K.Ghomari, K.Koffi, L.Belarbi, L.Desaintmartin, L.Elhajj, L.Faba, L.Gerard, L.Hocqueloux, L.Lerousseau, L.Prudhomme, L.Roudiere, M.Blancderradji, M.Bonmarchand, M.Khuongjosses, M.Kirstetter, M.Obadia, M.Philippon, M.Priester, M.Souala, M.Treilhou, N.Canu, O.Taulera, O.Zakditzbar, P.Allegre, P.Cheval, P.Chiarello, P.Detruchis, P.Fialaire, P.Heudier, P.Lataste, P.Lebret, P.Leclercq, P.Mercie, P.Muller, P.Perre, P.Philibert, P.Poubeau, P.Rodon, P.Suel, R.Djebbar, S.Bregigeon, S.Chadapaud, S.Radenne, S.Sire, S.Tempesta, T.Akpan, V.Baillat, V.Gueripel, V.Jeantils, V.Martineztadayoni, V.Reliquet, X.Delatribonniere, Y.Quertainmont Conseil scientifique de Préface F. Allaert, M. Duracinsky, C. Goujard, M. Hellet, P. Leclercq, M. L’Henaff, JP. Meunier, P. Ngo Van, G. Pialoux, J. Thevenon Promotion Laboratoire Abbott France