Duplication du cube, trisection de l’angle, quadrature du cercle : rien d’impossible ! Stage « Grands problèmes » 11 avril 2006.

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Transcription de la présentation:

Duplication du cube, trisection de l’angle, quadrature du cercle : rien d’impossible ! Stage « Grands problèmes » 11 avril 2006

Felix Klein 1895

Eutocius d’Ascalon (Palestine) 480-540 Commentaires sur le traité d’Archimède « De la sphère et du cylindre » (manuscrit latin de 1270)

«  Ce problème résolu, nous pourrons, d’une façon générale, changer en cube toute figure solide donnée limitée par des parallélogrammes, ou la faire passer d’une forme à une autre et la rendre semblable à une figure donnée, et l’amplifier en respectant la similitude, et cela, même quand il s’agit d’autels et de temples ; nous pourrons aussi convertir en cube les volumes des corps liquides et secs, tels le métrète et la médimne, et exprimer par l’arête de ce cube la capacité des récipients de ces corps. Mais mon invention sera utile aussi à ceux qui voudront augmenter les dimensions des catapultes et d’autres machines balistiques, où tout doit être augmenté en proportion, épaisseurs, longueurs, forages, trous des moyeux et cordes engagées dans ceux-ci, si nous voulons que la portée du tir soit augmentée en proportion ; or cela n’est pas réalisable sans que les moyennes soient trouvées. »

a x y b Insertion d’une moyenne proportionnelle Insertion de deux moyennes proportionnelles

Treize solutions rapportées par Eutocius pour le problème des deux moyennes : Archytas de Tarente (428 - 350) Platon (427 - 347) Eudoxe de Cnide (408 - 355) Ménechme (deux solutions) (380 - 320) Nicomède (280 - 210) Philon de Byzance (280 - 220) Érastosthène de Cyrène (276 - 194) Apollonius de Pergé (262 - 190) Dioclès (240 - 180) Héron d’Alexandrie (10 - 75) Sporus de Nicée (240 - 300) Pappus d’Alexandrie (290 - 350)

L’appareil de Platon

Albrecht Dürer 1525 http://www.museo.unimo.it/

Le mésolabe d’Ératosthène

Les coniques de Ménechme

Le compas parfait ?  <  : ellipse  =  : parabole Ibrāhīm ibn Sinān (908 - 946) Wayjan al-Qūhī (940 - 1000) Abū al-Sijzī (945 - 1020)  <  : ellipse  =  : parabole  >  : hyperbole

Le trisecteur d’Archimède

La conchoïde de Nicomède

La quadratrice d’Hippias-Dinostrate

L’appareil de Giambatista Suardi 1752

Les constructions dans les mathématiques arabes Abū Nasr al-Fārābi (875 - 950) : Le livre des procédés ingénieux et des mystères de la nature sur la subtilité des figures géométriques Abū al-Wafā’ (940 - 998) : Le livre des constructions géométriques nécessaires à l’artisan Approfondissement des procédés grecs pour l’insertion de deux moyennes et la trisection de l’angle Construction de l’énnéagone régulier Douze constructions (au moins) de l’heptagone régulier Nombreuses constructions des sections coniques (par points, avec des fils, avec le compas parfait...) Umar al-Khayyām (1048 - 1122) : théorie complète de la construction des équations cubiques Utilisation systématique des constructions utilisant droites, cercles et coniques

François Viète 1593 Cas d’une seule racine réelle : insertion de deux moyennes Cas de trois racines réelles : trisection de l’angle

Mais je m’étonne de ce qu’ils n’ont point outre cela distingué divers degrés entre ces lignes plus composées, et je ne saurais comprendre pourquoi ils les ont nommées mécaniques, plutôt que géométriques. Car de dire que ç’ait été à cause qu’il est besoin de se servir de quelque machine pour les décrire, il faudrait rejeter par même raison les cercles et les lignes droites, vu qu’on ne les décrit sur le papier qu’avec un compas et une règle, qu’on peut aussi nommer des machines. Descartes 1637

Classification de Descartes 1637 • courbes géométriques : courbes ayant une équation algébrique ou courbes engendrées par un « mouvement continu unique » • courbes mécaniques : autres courbes (quadratrice, spirale, cycloïde, courbe logarithmique…)

René Descartes 1637

Frans van Schooten 1646

Guillaume de L’Hospital 1720

Carl Friedrich Gauss 1801 Le polygone régulier à n côtés est constructible avec des droites et des cercles si et seulement si n = 2np1p2 ... pk , où les pi sont des nombres premiers distincts de la forme 2a + 1 Carlos Videla 1997 Le polygone régulier à n côtés est constructible avec des droites, des cercles et des coniques si et seulement si n = 2n3mp1p2 ... pk , où les pi sont des nombres premiers distincts de la forme 2a3b + 1 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20

Construction des polygones réguliers à 7 et 9 côtés avec Cabri Éric Bainville et Bernard Genevès 1998

Construction des polygones réguliers à 13 et 19 côtés avec Cabri Éric Bainville et Bernard Genevès 1998

Alfred Bray Kempe 1849 - 1922

Watt 1784 Roberts Chebyshev Kempe Peaucellier 1864

Le trisecteur de Kempe

Alfred Bray Kempe 1876 Gabriel Koenigs 1895 Les courbes planes algébriques sont exactement celles qui peuvent être tracées à l’aide d’un système articulé Toute équation algébrique peut être résolue de manière exacte au moyen d’un système articulé Gabriel Koenigs 1895 Toute relation algébrique entre points d’un plan peut être réalisée par un système articulé plan Toute relation algébrique entre points de l’espace peut être réalisée par un système articulé dans l’espace

Gottfried Wilhelm Leibniz 1693 Certains problèmes ne sont ni plans, ni solides, ni sur-solides, ni d’aucun degré déterminé, mais surpassent toute équation algébrique. Il n’empêche que de tels problèmes peuvent réellement se poser en Géométrie : il est donc indispensable d’admettre les seules courbes permettant de les construire ; or ces courbes peuvent être tracées d’un mouvement continu, il ne faut donc pas les juger mécaniques, mais géométriques. C’est pourquoi l’erreur qu’a commise Descartes en les excluant de la Géométrie fut aussi grave que celle des Anciens qui rejetaient comme non géométriques certains lieux solides ou linéaires. Il existe néanmoins d’autres façons de construire les courbes, comportant l’adjonction d’un élément physique.

Construction exacte de la courbe logarithmique et du nombre e Giovanni Poleni 1729 Giambatista Suardi 1752

L’intégraphe d’Abdank-Abakanowicz

Musée des arts et métiers, Paris L’appareil de Platon Musée des arts et métiers, Paris

Quadrature du cercle avec l’intégraphe

Felix Klein 1895 Voilà donc une construction géométrique qui permet la quadrature du cercle. On voit de plus qu’elle la réalise dans l’ordre d’idées où s’étaient engagés les géomètres anciens ; notre courbe intégrale n’est qu’une modification des quadratrices considérées par eux. 1882 : Lindemann démontre que la quadrature du cercle est impossible à la règle et au compas 1886 : L’intégraphe d’Abdank-Abakanowicz permet de résoudre de manière exacte la quadrature du cercle

Artobolevski 1975-1978 : Mécanismes algébriques Finalement, l’idée de Descartes connaît une postérité étonnante puisque, au vingtième siècle, on va étudier et construire systématiquement les mécanismes articulés permettant de construire les courbes algébriques. Les traités (un des plus aboutis est celui de l’ingénieur mécanicien russe Artobolevskii, dans lequel j’ai puisé les illustrations) décrivent une collection de mécanismes de base, que l’ingénieur peut ensuite combiner pour réaliser des calculs plus complexes. On reconnaît sur les figures de gauche des appareils permettant de réaliser des opérations : un additionneur, un multiplicateur, un extracteur de racines cubiques (qui n’est pas sans rappeler l’appareil de Platon), le compas trisecteur de Descartes, et, à droite, des systèmes articulés pour tracer des courbes algébriques classiques : hyperbole, ellipse, conchoïde, cissoïde.

Artobolevski 1975-1978 : Mécanismes transcendants Au début du vingtième siècle, ces instruments sont repris et approfondis grâce aux progrès technologiques. On voit ici un planimètre pour calculer l’aire enclose dans un contour fermé, un intégraphe pour construire la courbe intégrale d’une courbe donnée, et deux appareils tractionnels pour tracer des courbes transcendantes : on retrouve le traceur de logarithmes de Suardi, et l’autre instrument sert à tracer une spirale logarihtmique. Ces mécanismes transcendants s’ajoutent aux mécanismes algébriques vus tout-à-l’heure. Au total, l’ingénieur dispose d’une collection complète de mécanismes permettant d’effectuer tous les calculs mathématiques courants. Grâce à cela, on a vu fleurir, à partir des années 1920-1930, un calcul analogique graphomécanique de grande envergure.

Un analyseur différentiel Science Museum, Londres