La réponse immunitaire antitumorale

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Transcription de la présentation:

La réponse immunitaire antitumorale Cédric Ménard et Julien Edeline

Objectifs du cours Comprendre le concept d’immunosurveillance Connaître les principaux effecteurs cellulaires et moléculaires impliqués dans la réponse immunitaire antitumorale Comprendre les applications thérapeutiques potentielles de la manipulation de cette réponse immunitaire antiumorale

Le concept de niche tumorale Cellule normale Cellule transformée Niche de soutien TAM Immunité Anti-tumorale Co-évolution NK TCD8 CD Tgd Treg Tumeur MDSC stroma angiogenèse

A_L’immunosurveillance Toutes les tumeurs sont potentiellement immunogènes (immunosurveillance) Concept ancien (XIXème siècle): Coley observe des régressions tumorales chez des patients atteints d’érysipèle La réaction inflammatoire est responsable de la réduction tumorale 1900s : Paul Ehrlich propose que le taux de cancers chez les humains serait bien supérieur sans système immunitaire Le système immunitaire (SI) est le support de la réaction inflammatoire Le SI peut donc reconnaître spécifiquement les cellules tumorales et les détruire Chir ortho onco : infection par strepto fait régresser des sarcomes (os, tissus mous) mais pas mélanomes ou carcinomes Ehrlich : les êtres vivants à forte longévité ne font pas plus de cancers que les autres

Preuves depuis années 90 La cellule tumorale Ac anti-tumeur (SEREX) TCD8 anti-tumeur (tétramères HLA) Présence de TIL, infiltration par TCD8EM, gènes Th1 = bon pronostic (cultures, PCRQ, TMA,Pagès et al New Engl J Med 2005; 353:2654) La cellule tumorale Est donc reconnue par le SI (apparition d’Ag tumoraux) Déclenche une réponse immunitaire classique Est capable d’être lysée (mécanismes d’échappements à contourner pour immunothérapie efficace en jouant sur le contexte cellulaire et moléculaire)

molécules HLA biotinylées) Tétramère (Assemblage de 4 molécules HLA biotinylées) Pentamère (Assemblage de 5 molécules HLA multimérisées par un domaine coiled-coil donc toutes sur le même plan)

Cancer colorectal (75 patients) Early metastasis Relapse Early metastasis Relapse Cancer colorectal (75 patients) Pagès et al New Engl J Med 2005; 353:2654

Notion d’immunoscore Good prognostic Bad prognostic CXCL13 très corrélée à la survie Mécanisme de délétion de CXCL13 avec perte TFH et B Bindea et al Immunity 2013; 39:782 Cancer colorectal (153 patients)

Paradigme des 3E visible cliniquement métastase Echappement Dunn, Annu Rev Immunol 2004 métastase Phase d’élimination SI élimine la plupart des cellules tumorales La phase d’équilibre Les cellules tumorales sont présentes, mais « contenues » par le SI La phase d’échappement La tumeur grossit, devient invasive et métastase Conséquence de : « épuisement » du SI ou inhibition du SI ou émergence de variants tumoraux

Preuve clinique Régressions spontanées observées dans 1-2% des mélanomes (enfants/ado++) Infiltrat lymphocytaire associé + carcinome à cellules claires rénal

TCD4 TCD8 gdT CTL PNN Complément DCm Migration Maturation Migration B GANGLION DRAINANT Présentation de peptides dans le CMH de classe II DCm TCD4 Présentation de peptides dans le CMH de classe I Activation réciproque IL-4 IL-6 TGF IL-21 IL-12 TCD8 Migration Maturation Th2 Th17 TFH IL-21 IL-4 Th1 IL-2 Migration IL-17 TNF IFN-g TNF gdT IL-5 IL-4 IL-13 LYMPHE B NK CTL PNN Macrophages Importance de l’immunité innée Corps apoptotiques Ag soluble PNE Mastocytes Non-soi (tumeur) DCi Capture de l’Ag Contexte de danger Complément

Réponse NK/Tγδ Dommages à l’ADN = stress génotoxique Expression membranaire de MICA (ligand de NKG2D) Activation des NK pour lyser la cible + sécrétion d’IFN Cassures de l’ADN et mutations activent ATM Tγδ

Réponse NK/Tγδ Les cellules tumorales expriment aussi des ligands d’autres récepteurs activateurs NK NKp30 (ligd = B7-H6) NKp44 et NKp46 Rappel : perte d’expression de molécules de CMH I dans 40 à 80% des tumeurs (variable d’un type histologique à l’autre) Balance de signaux NK penche vers l’activation Ligds : cf cours de l’année dernière. Pour NKp46 et 44, le ligd présenté par des cellules ltumorales n’est pas clairement identifié Perte du CMH I ds des tumeurs solides ou hémato Cf cours NK de L2

Réponse adaptative T Dérégulations génétiques entraînant l’expression anormale d’une protéine normale, ou l’apparition d’une nouvelle protéine Présentées à la membrane des cellules tumorales par les molécules de CMH I (peptides) Ag tumoraux Patients spécifiques Ces Ag peuvent peuvent être reconnus par les T4 ou les T8 suivant la forme sous laquelle ils sont présentés. D’où cible potentielle d’immunothérapie Partagés Tumeurs spécifiques Tissus spécifiques Ubiquitaires

Lien entre instabilité génétique et immunogénicité L’instabilité génétique favorise la production de néoantigènes et l’immunogénicité tumorale

Lien entre instabilité génétique et réponse à l’immunothérapie Rizvi Science 2015; 384:124 L’instabilité génétique favorise la réponse aux anti-PD1

Les mécanismes d’échappement Hanahan and Weinberg, Cell 2011

Sous la pression de sélection du système immunitaire L’échappement au système immunitaire Elimination Sous la pression de sélection du système immunitaire Equilibre Echappement Résistance à la lyse Immunoedition Immunosuppression

Résistance à la lyse ALTERATION DE LA SENSIBILITE A LA LYSE (inhérent au processus tumoral, peut entrainer une chimiorésistance simultanée) Surexpression de prot anti-apoptotiques (bcl-2, FLIP...) Sousexpression de prot pro-apoptotiques (Bax, casp 8...) Dérégulation de p53 (mutée dans 50% des K) Perte d’expression ou mutation de Fas

Immunoédition Sous la pression de sélection du SI CMH Classe I KIR NK CMH Classe I TCD8 KIR Ligands des rec activateurs NK Défaut de présentation de l’antigène Perte des antigènes immunodominants Perte de l’expression des ligands de recepteurs activateurs NK Expression de CMH classe I non classiques (HLA-G)

Cellules suppressives Immunosuppression PD-L1 PD-L2 iDC iTreg TAM nTreg Cellules suppressives Peu de CPA immunogènes CCL2 CCL22 MDSC PD-L1 PD-L2 PD-L1 PD-L2 Effets : *) Baisse de prolifération **) Incapacité fonctionnelle IL-10, TGF-b IDO, ARG1 CTLA4 Cellules tumorales TCD8 NK PD-1 Cellules effectrices TAM : tumor associated macrophage MDSC : myeloid-derived suppressor cell Treg : regulatory T lymphocyte PD-1

Stratégies classiques Manipulation de la réponse anti-tumorale - Chirurgie - Radiothérapie - Chimiothérapie Stratégies classiques Immunothérapie Nouvelles stratégies Anticorps anti-tumeur Allogreffe Agonistes de TLR - Administration de cytokines - Vaccination peptidique - Vaccination dendritique Transfert de lymphocytes activés (CAR T cells) - Elimination des T régulateurs (cyclophosphamide, anti-CD25...) - Blocage molécules suppressives (anti-CTLA4, anti-PD1/PDL1, anti-KIR…) Thérapeutique combinatoire

Immunothérapie conventionnelle Anticorps thérapeutiques (voir cours Anticorps) Cytotoxiques par ADCC, CDC ou induction directe d’apoptose Blocage des facteurs de croissance nécessaires à la tumeur Stimulation du système immunitaire Stimulation par ligands de Toll-Like Receptors TLR4 : BCG intravésical (Immucyst®) Cancer de la vessie : 60% de réponse Activation des macrophages puis PNN et NK puis DC et T TLR7 : imiquimod (Aldara®) Verrues génitales et condylomes acuminés Carcinomes épidermoïdes ou basocellulaires superficiels Activation des DC cutanées et de réponse Th1

Immunothérapie conventionnelle Administration de cytokines (voir cours Autres biothérapies) De moins en moins utilisées en cancéro (effets 2aires ++) Moins efficaces que de nouvelles thérapies mais rémissions prolongées chez une petite partie des patients IFN (2a, Roferon® ou 2b, Introna®) Activation des NK (cytotox/prolifération), maturation des DC Augmentation de l’expression des molécules de CMH Leucémie à tricholeucocytes, Kaposi, mélanome, (CML, lymphome folliculaire, myélome, lymphome T cutané) IL-2 (aldesleukine, Proleukin®) Activation des NK (cytotox/prolifération), prolifération des lymphocytes T, augmentation de la cytotoxicité des T CD8 Cancer du rein, mélanome (association éventuelle IFN)

Thérapie cellulaire Allogreffe et effet du greffon contre la leucémie (GvL) Les T et NK du donneur contenus ds le greffon peuvent s’activer contre les cellules leucémiques résiduelles (post-chimio) et les détruire (non soi !) Immunothérapie active (vaccination) Immunothérapie passive Cf UE9 Thérapie cellulaire

Injection de T exprimant un CAR Développement dans les néoplasies B Lymphocytes T T anti-CD19 CD19 B tumoral (LLC, FL, autres lymphomes B) Stimulation (anti-CD3/anti-CD28) + CAR CD19 dans vecteur LTV/RTV CAR LYSE TCR endogène Construction génétique scFv anti-CD19 + chaine signalisation TCR Ramos et al Ann Rev Med. 2015

Injection de T exprimant un CAR Développement dans les néoplasies B AVANTAGES 1) Très forte affinité (>>TCR) 2) Pas besoin d’expression CMH classe I par la tumeur 3) Pas de restriction au CMH et pas de compétition pour CD3/TCR endogène 4) Pas besoin de co-recepteurs 5) Mémoire in vivo OPTIMISATION 1) Nécessité d’une lymphodéplétion 2) Optimisation de la production et de la dose des CAR 3) Importance de la masse tumorale (dans l’efficacité et les effets secondaires type syndrome de lyse) 4) Role du microenvironnement suppresseur local 5) Utilisation du TCR endogène (anti-viral) 6) Autres cibles (CD30 dans HL) scFv anti-CD19 Molécules de costimulation (CD28/CD137) CD3z Implication de Novartis depuis 2012

Lever l’immunosuppression Elimination ou blocage des Treg Cyclophosphamide faible dose, anti-CTLA-4 Bloquer les « points de contrôle » inhibiteurs de la réponse immunitaire : Anti-CTLA-4 : ipilimumab (Yervoy®) : mélanome, prostate Anti-PD1/anti-PD-L1 : taux de réponse prometteurs dans de nombreux cancers Activation T polyclonale du SI : effets 2aires auto-immuns fréquents corrélés à l’efficacité antitumorale

Ipilimumab = anticorps anti-CTLA4 Efficace dans le mélanome Semble intéressant pour environ 10%-20% des patients… Dans ces cas-là, efficacité qui semble prolongée

Anti-PD1 et anti-PDL1 Preuve de l’efficacité dans plusieurs tumeurs : Mélanome Cancers bronchiques Cancers du rein Cancers ORL… Et prometteurs dans de nombreuses autres Nombre significatif de patients non répondeurs Mais quand la réponse est présente, elle est prolongée

Inhibiteurs de checkpoints en adjuvant Prévention de la récidive = guérison Weber, NEJM 2017

Intérêt des associations ? Dans le mélanome, association anti-CTLA4 et anti-PD1 > monothérapie Mais toxicité de ces traitements : Réactions auto-immunes Sélectionner les patients qui en bénéficient?

Associations autres traitements et immunothérapie Zamarin, Pharmacol Ther 2015

Associations autres traitements et immunothérapie Sharma, Cell 2015

Exemple immunothérapie après radiothérapie Antonia, NEJM 2017

Conclusions Immunothérapie : Une révolution en devenir Inhibiteurs de checkpoint immunitaires sont rentrés dans la pratique clinique Nombreuses autres voies en cours de développement Place des associations