Cette série de diapositives est fondée sur un rapport d’un mini-cours et des contributions originales à la 53e réunion scientifique annuelle de l’American College of Cardiology, du 7 au 10 mars 2004, à Nouvelle-Orléans, Louisiane. Présenté initialement par E.J. Topol, M.D., S. Yusuf, M.D. ; H.C. Herrman, M.D., Y.J. Woo, M.D., R.C. Becker, M.D., et W.S. Weintrub, M.D., le rapport est présenté et commenté dans Cardiologie Actualités scientifiques par Gordon Moe, M.D. Le traitement du syndrome coronarien aigu (SCA) évolue constamment. Actuellement, quatre agents pharmacologiques établis, comprenant l’aspirine, l’héparine de bas poids moléculaire/non fractionnée (HBPM/HNF), les inhibiteurs des récepteurs glycoprotéiniques (GP) IIb/IIIa et le clopidogrel, plus plusieurs associations de ces traitements antithrombotiques, sont évalués afin de répondre aux questions qui demeurent sans réponse dans le traitement antithrombotique. Le numéro de Cardiologie Actualités scientifiques a présenté les toutes dernières données sur l’utilisation pratique des traitements antithrombotiques dans le syndrome coronarien aigu, en mettant l’accent sur les agents antiplaquettaires oraux.
Pour déterminer les effets du traitement antiplaquettaire chez les patients présentant un risque élevé d’événements vasculaires, une méta-analyse collaborative – l’Antithrombotic Trialists’ Collaboration – a récemment examiné des études randomisées sur un traitement antiplaquettaire par rapport à un placebo ou celles comparant un traitement antiplaquettaire à un autre chez des patients à haut risque. Comme le démontre cette diapositive, dans l’ensemble, le traitement antiplaquettaire a réduit le paramètre mixte : les événements vasculaires graves d’un quart, l’infarctus du myocarde (IM) non mortel d’un tiers et l’accident vasculaire cérébral non mortel d’un quart. L’aspirine était l’agent antiplaquettaire le plus étudié.
Une observation importante de cet aperçu systématique – l’Antithrombotic Trialists’ Collaboration – est l’impact de la dose d’aspirine. L’utilisation de l’aspirine à une dose de 75-150 mg par jour était associée à une réduction de 32 % des événe-ments vasculaires combinés, alors qu’une dose de 500-1500 mg était associée à une réduction de 19 % (reconnaissant que les populations à l’étude étaient différentes). Cela indique que la dose de 75-150 mg par jour est au moins aussi efficace que la dose plus élevée et le risque d’hémorragie majeure a augmenté significativement lorsque la dose d’aspirine était augmentée. Ainsi, sur la base ces observations, 81 mg par jour est apparemment la dose préférée pour son effet antithrombotique. L’aspirine est utilisée depuis plus de 100 ans et pourtant, on a encore beaucoup à apprendre sur ce médicament. Les mécanismes de l’effet anti-inflammatoire de l’aspirine sont assez distincts de ses effets antithrombotiques et on commence à peine à les comprendre. L’athérogenèse et la déstabilisation de la plaque impliquent des mécanismes d’origine immunitaire. L’interleukine (IL)-7 est un régulateur de l’homéostasie des lymphocytes T, mais est également impliquée dans l’inflammation. Chez les patients atteints d’angor stable et instable, les taux plasmatiques d’IL-7 étaient significativement accrus et chez ces patients, la libération accrue de l’IL-7 des plaquettes activées a contribué de façon significative au taux accru d’IL-7. On notera que l’aspirine réduit la libération spontanée et stimulée de l’IL-7 des plaquettes. Un autre mécanisme inflammatoire a lieu par l’initiation des résolvines, une nouvelle famille de produits bioactifs des circuits de transformation de l’acide gras oméga-3 qui contrecarrent les signaux pro-inflammatoires. L’aspirine possède donc des mécanismes anti-inflammatoires uniques. Malgré les effets bénéfiques bien documentés de l’aspirine dans la réduction des événements indésirables dans les cas de coronaropathie, le récent rapport RAND sur la qualité des soins administrés à des adultes aux États-Unis indique que seulement 61 % des participants atteints d’IM que l’on considérait comme des candidats à l’aspirine ont reçu le traitement, ce qui indique une lacune importante.
Le clopidogrel est un autre agent antiplaquettaire qui agit comme un antagoniste des récepteurs P2Y12. Un traitement préalable avec le clopidogrel a un effet bénéfique chez les patients subissants une intervention coronarienne percutanée, comme nous le voyons dans la diapositive ci-dessus. L’activation plaquettaire se produit en réponse aux lésions des vais-seaux et contribue de façon importante à stopper le saignement. Cependant, dans les états morbides, l’activation plaquettaire entraîne une occlusion vasculaire et des lésions ischémiques. Le récepteur P2Y12, activé par l’adéno-sine diphosphate (ADP), joue un rôle essentiel dans l’activation plaquettaire. Ces récepteurs sont les cibles des inhibiteurs du récepteur P2Y12 (p. ex. le clopidogrel) qui ont une valeur thérapeutique éprouvée. En résumé, les nouvelles données indiquent que les inhibiteurs du récepteur P2Y12 peuvent exercer un effet anti-inflammatoire. Des données sur l’utilisation d’un traitement d’association avec l’aspirine et le clopidogrel dans le contexte de la prévention primaire seront bientôt publiées.
Les résultats d’études de registres de patients atteints de SCA ont révélé que seulement une minorité (<25%) d’événements indésirables surviennent à l’hôpital, la majorité (>40%) survenant 2 ans après l’événement de référence. En outre, les patients atteints d’IM aigu peuvent présenter de multiples petites plaques complexes d’athérome, en plus de la lésion responsable de la thrombose. Du simple fait du fardeau de la maladie, ces multiples petites plaques sont plus vraisemblablement associées à un pronostic clinique défavorable. Ces observations soulignent donc l’importance d’une stratégie thérapeutique chez les patients atteints de SCA qui modifie non seulement le processus thrombotique aigu, mais également le processus athéroscléreux des plaques petites, mais vulnérables. Par conséquent, une telle stratégie thérapeutique peut avoir un effet positif sur le pronostic clinique à long terme. L’utilisation du clopidogrel conjointement à l’aspirine est compatible avec une telle stratégie. Comme le démontre cette diapositive, dans l’étude CURE (Clopidogrel in Unstable Angina to Prevent Recurrent Event), les effets bénéfiques du clopidogrel + l’aspirine par rapport au placebo + l’aspirine sur le paramètre primaire mixte (IM, accident vasculaire cérébral et mort CV) étaient apparents 24 heures après la randomisation. On notera que ces effets béné-fiques se sont maintenus après 12 mois, étant donné que les courbes des événements des deux groupes à l’étude ont continué à diverger. Même si les données sur les 30 premiers jours sont exclues de l’analyse, la différence entre les deux groupes est demeurée hautement significative. L’avantage du traitement d’association s’est maintenu, quel que soit les médicaments concomi-tants utilisés et ils étaient constants pour les différentes doses d’aspirine utilisées et les différents groupes de risque. Comme prévu, dans le groupe recevant le clopidogrel, les taux d’hémorragie majeure et mineure étaient légèrement plus élevés, mais on n’a pas noté d’augmentation du taux d’hémorragie menaçant la vie. Cependant, lorsqu’on l’a intégré au paramètre primaire pour obtenir un marqueur de l’avantage net, la tendance était encore fortement en faveur du clopidogrel + l’aspirine. Par ailleurs, les résultats préliminaires indiquent que le clopidogrel est à la fois efficace et rentable dans le contexte du SCA chez les patients subissant une ICP.
En résumé, chez les patients présentant un SCA sans sus-décalage du segment ST, l’association de l’aspirine et du clopidogrel réduira le risque d’événements cliniques indésirables pendant au moins 12 mois (et probablement ultérieurement). Étant donné la discussion précédente concernant l’efficacité par rapport à l’innocuité de l’aspirine à faible dose par rapport à une dose élevée et une stratégie de traitement précoce par rapport à un traitement invasif tardif, le rapport entre l’avantage et le risque d’un traitement antiplaquettaire d’association peut être optimisé en utilisant l’aspirine à faible dose et en choisissant judicieusement le moment de l’intervention de revascula-risation coronarienne. La question de savoir si l’on doit instituer un traitement anti-plaquettaire avec le clopidogrel et l’aspirine chez un patient atteint de SCA sans sus-décalage du segment ST immédiatement lorsqu’il se présente à l’hôpital dépend de la probabilité qu’il subisse un PAC précoce. Celle-ci serait déterminée par le risque perçu que le patient ait besoin d’un PAC en urgence (par opposition à un traitement médical, une ICP ou un PAC tardif). Dans le traitement de ces patients atteints de SCA, le rôle des stratégies allant au-delà de l’administration d’agents antithrombotiques est tout aussi important. L’avantage d’un traitement hypolipidémiant et de l’inhibition de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (ECA) est bien connu. Cependant, aucune ligne directrice sur le traitement du SCA ne fait mention de la modification du style de vie, qui est à la fois efficace et peu coûteuse. Par exemple, des données non publiées de l’étude EPI-CURE ont démontré que le risque d’IM et de mort est de 20 % plus élevé l’année suivante. Bien que l’exercice au moins trois fois par semaine soit associé à une réduction de 20 % des événements cliniques indésirables, seulement 10 % des patients atteints de SCA dans l’étude CURE faisaient de l’exercice au moins trois fois par semaine un mois après la manifestation du SCA. Enfin et surtout, l’administration d’un traitement hypolipidémiant, d’un inhibiteur de l’ECA et la modification du style de vie offriront probablement un avantage à long terme supplémentaire.