Cette série de diapositives est fondée sur des présentations à un symposium satellite organisé dans le cadre du Congrès 2007 de la Société européenne de cardiologie, du 1 au 5 septembre 2007 à Vienne, Autriche. Présenté initialement par M. Boehm, M.D. ; K.M. Fox, M.D. ; G. Heusch, M.D. ; X. Jouven, M.D. ; J-C Tardif, M.D. ; et A. Hjalmarson, M.D, les présentations sont commentées par Michael R. Freeman, M.D. dans un numéro de Cardiologie – Actualités scientifiques. Bien que la fréquence cardiaque (FC) soit une variable clinique que l’on obtient facilement et de façon peu coûteuse, sa valeur dans l’évaluation du pronostic n’est pas connue ou acceptée largement. La FC au repos et les variations de la FC durant l’exercice et la récupération après l’exercice résultent de l’équilibre entre l’activité sympathique et l’activité vagale. L’importance de la FC dans la détermination de la demande en oxygène du myocarde est bien connue, mais le rôle pathophysiologique de la FC dans les maladies cardiovasculaires (MCV) demeure controversé. Il existe de nombreuses données épidémiologiques démontrant les implications pronostiques d’une FC élevée au repos dans la population générale et chez les patients atteints d’une MCV documentée. Les effets bénéfiques de la réduction de la FC chez les patients présentant un large éventail de maladies CV ont été démontrés. Cependant, le rôle spécifique de la réduction de la FC comme objectif thérapeutique est moins bien accepté ou compris. Dans ce numéro de Cardiologie – Actualités scientifiques, nous explorons ces aspects de la FC au repos et encourageons les médecins à prendre sérieusement cette variable en considération dans la prise en charge future des patients atteints de MCV.
Une FC élevée est associée à un risque plus élevé d’hypertension et d’athérosclérose et est un prédicteur puissant de la morbidité et de la mortalité CV. Ces relations ont été démontrées dans des populations générales. Le risque lié à une FC rapide est hautement significatif après ajustement pour les facteurs de risque majeurs d’athérosclérose, ce qui indique que la FC joue un rôle direct dans l’induction du risque. Les facteurs de risque de coronaropathie sont nombreux chez les sujets présentant une FC élevée, ce qui laisse penser que la suractivité du système nerveux sympathique pourrait être responsable de la morbidité CV accrue chez les sujets souffrant de tachycardie. Les troubles hémodynamiques liés à une FC rapide ont un impact direct sur la paroi artérielle et favorisent le développement de plaques d’athérome. La réduction médicamenteuse de la FC chez les patients présentant un IM ou une insuffisance cardiaque congestive peut être bénéfique dans plusieurs affections cliniques. Une étude chez 5713 hommes asymptomatiques actifs a démontré que le risque de mort subite par IM était accru chez les sujets présentant : • une FC au repos > 75 batt./min ; risque relatif (RR) = 3,92 (comme indiqué dans cette diapositive) • une augmentation de la FC durant l’exercice de < 89 batt./min ; RR = 6,18 • une diminution de la FC de < 25 batt./min à la fin de l’exercice ; RR = 2,20. Des prédicteurs additionnels du risque incluent un indice de masse corporelle (IMC) élevé, le tabagisme et l’absence d’activité physique. La FC demeure significative après ajustement pour les variables confondantes. Il est intéressant de noter que la FC a permis de prédire la mort subite, mais non la mort non subite. Ces données indiquent que les médecins devraient être attentifs aux patients ayant une FC au repos > 75 batt./min, une réponse atténuée de la FC à l’exercice et une récupération lente de la FC avec l’exercice, étant donné que ces facteurs permettent de prédire la mort subite. L’intervention la plus physiologique pour améliorer ces mesures est l’entraînement physique.
La relation entre la FC et les résultats cliniques a été démontrée, non seulement dans la population générale, mais également chez des sujets hyper-tendus. Cela a des implications importantes pour le traitement de l’hypertension, car les patients dont la FC est élevée au repos pourraient être des candidats idéaux au traitement antihypertenseur réduisant la FC. Chez 2293 hommes et femmes au total recevant un placebo, ayant initialement une tension artérielle systolique (TAS) de 160 à 219 mm Hg et une tension artérielle diastolique (TAD) de < 95 mm Hg, une FC clinique initiale accrue était associée positivement à un pronostic médiocre en termes de mortalité totale, de mortalité CV et de mortalité non CV. Chez les patients dont la FC était > 79 batt./min (quintile le plus élevé), le risque de mortalité était 1,89 fois plus élevé que chez les sujets dont la FC était ≤ 79 batt./min (intervalle de confiance [IC] à 95 %, 1,33-2,68). Les prédicteurs du décès était la fréquence cardiaque (p < 0,001), l’âge (p < 0,001), le taux sérique de créatinine (p = 0,001), la présence de diabète (p = 0,002), des antécédents de maladie CV (p = 0,01). La relation entre la FC et la mortalité était quantativement similaire chez les hommes et les femmes. Dans le registre des patients de la Coronary Artery Surgery Study, 24 913 patients au total atteints de coronaropathie soupçonnée ou prouvée ont été étudiés pendant un suivi médian de 14,7 ans. Une FC au repos accrue permettait de prédire la mortalité toutes causes et la mortalité CV et les réhospitalisations dues à une cause CV (p < 0,0001). Comparativement au groupe de référence, les patients dont la FC au repos était initialement de ≥83 batt./min, comme le démontre cette diaposi-tive, présentaient un risque significativement plus élevé en termes de mortalité totale (probabilité = 1,32 ; IC, 1,19-1,47, p < 0,0001) et de mortalité CV (probabilité = 1,31 ; IC, 1,15-1,48, p = 0,0001). La FC était un prédicteur de la réhospitalisation, d’événements CV et d’insuffisance cardiaque congestive et était indépendante des autres variables cliniques, incluant l’âge, le sexe, la fraction d’éjection, les diurétiques et d’autres facteurs de risque chez les patients atteints de coronaropathie.
Dans les années 1970, on a observé dans le traitement de l’IM aigu que la réduction de la FC entraînait une diminution de la douleur thoracique, du sus-décalage du segment ST, des arythmies, des lésions myocardiques et de la dysfonction ventriculaire gauche. L’efficacité du métoprolol, du timilol et du propranolol était maximale chez les patients dont la FC était supérieure à la valeur médiane. Une réduction de la FC d’au moins 15 batt./min durant l’évolution de l’infarctus était associée à une diminution de la taille de l’infarctus de 25 à 30 %. Une réduction de la FC de < 8 batt./min n’a aucun effet ou peut en fait augmenter la taille de l’infarctus. Cette diapositive montre la relation existant entre la réduction de la FC au repos et le pourcentage de réduction de la mortalité. L’effet bénéfique des bêta-bloquants est lié à une réduction quantitative de la FC. Une FC > 70 batt./min était associée à une mortalité 2,5 fois plus élevée qu’une FC < 70 batt./min. Le traitement avec des bêta-bloquants entraîne une réduction de la prévalence de la fibrillation ventriculaire, de la mort subite et de la mortalité chez les patients ayant une FC élevée.
Dans le traitement de l’insuffisance cardiaque congestive, une réduction médica-menteuse de la FC améliore le pronostic. La réduction de la FC était le prédicteur le plus puissant du pronostic dans l’étude CIBIS (Cardiac Insufficiency Bisoprolol Study). Il existe une excellente relation entre la variation de la FC et le pronostic dans l’insuffisance cardiaque congestive comme le montre cette diapositive. Ces études démontrent que la réduction de la FC dans l’angine, l’IM et l’insuffisance cardiaque congestive est un objectif thérapeutique important qui entraîne une réduction significative de la morbidité et de la mortalité. Cette discussion démontre l’importance de la réduction de la FC dans l’IM aigu et l’insuffisance cardiaque congestive. En 1632, Hyde suggéra qu’une réduction de la FC a un effet bénéfique chez les patients souffrant de douleur thoracique à l’exercice. Même si la FC est un facteur de pronostic, plutôt qu’un facteur de risque, l’approche thérapeutique pour réduire la FC est bien acceptée et documentée. Dans le traitement de l’angine de poitrine, Stone et coll. ont démontré que la réduction de la FC avec des bêta-bloquants est une stratégie efficace importante pour la prévention de l’ischémie et l’amélioration de la tolérance à l’exercice, étant donné qu’une augmentation de la FC précède le sous-décalage du segment ST, la dysfonction ventriculaire gauche et la douleur thoracique. La FC peut être réduite avec des bêta-bloquants, des antagonistes calciques non dihydropyridiniques et l’ivabradine. L’ivabradine inhibe l’activité stimulatrice du nœud sino-auriculaire et produit une amélioration dose-dépendante de la tolérance à l’exercice et du délai d’apparition de l’ischémie durant l’exercice. Si l’on observe une réduction des événe-ments cardiaques dans d’autres études avec l’ivabradine, il est possible que l’hypothèse selon laquelle la FC est un facteur de risque d’événements CV soit prouvée. Conclusion : La fréquence cardiaque est un déterminant important du pronostic chez les patients atteints d’une maladie CV connue ou soupçonnée. Le traitement des patients présentant un IM aigu, une insuffisance cardiaque congestive ou une ischémie manifeste à l’effort avec des médicaments visant à réduire la FC améliore les symptômes et réduit la mortalité et la morbidité.