Après la Haute Renaissance: Renaissance tardive ou plutôt… Contexte, années 1520-1580 Maniérisme Protobaroque Réalisme de l’Italie du Nord
Que se passe t-il après la Haute Renaissance? La période allant de 1520 (mort de Raphaël) à 1580 est appelée la Renaissance tardive, considérée jadis temps des pâles imitateurs de grands maîtres. La perfection était atteinte avec De Vinci, Michelange, Rahaël et Titien, alors quoi faire après? C’est aussi un temps de crise (le sac de Rome de 1527 et l’avènement du protestantisme) qui ébranle l'idéal humaniste de la Renaissance, un temps de contradictions où apparaissent des tendances concurrentes et non plus un idéal commun… En art, parmi les divers courants concurrents apparaissent le maniérisme , le proto-baroque et le réalisme… Au cours dernier, nous avons parlé du maniérisme… Le sac de Rome par la famille Colona sur l’instigation de Charles Quint, contre le pape, en alliance avec François Ier et les Médicis
Le Maniérisme Nous appelons maniérisme le style maniéré (reprenant, insistant sur la manière de peindre), artificiel, s’inspirant de certains aspects de la peinture de Raphaël et de Michel-Ange, et mettant la « vision intérieure » du peintre au-dessus de l’observation de la nature ou l’autorité des grands maîtres du passé… C’est un art de codes, de symboles, de citations d'artistes classiques s’adressant au goût éduqué et sophistiqué des castes sociales élevées… Apprécié des protecteurs aristocratiques, ce style devient vite international.
Les caractéristiques du maniérisme Le maniérisme rompt avec l’équilibre de la composition classique de la Renaissance et favorise une composition anticlassique, l’espace désuni, irréel. Les corps sont déformés, en torsion (la figura serpentina, dessinant un S), les tons acides et crus (hérités de Michel-Ange de la chapelle Sixtine), la lumière contribue à l’aspect irréel de la scène. Rosso Fiorentino La déposition de la croix en 1521. Pontormo, Descente de la croix, (1525-28) Parmigiannino, Autoportrait et la vierge au long cou
Le maniérisme à Venise: Tintoret (1518-1594), La Cène (1592-94) La composition est anticlassique, les figures de serviteurs au premier plan, alors qu’on distingue à peine les apôtres au fond, l’intérieur est enfumé et en désordre. Le contraste entre le familier et le surnaturel… La Cene Tintoretto San Giorgio Maggiore Venice La composition est anticlassique avec la table de biais, le Christ ne se remarquant que par son auréole, les figures de serviteurs au premier plan, le tout dans un intérieur enfumé et en désordre, sert à intensifier le contraste entre le familier et le surnaturel… Le maniérisme à Venise: Tintoret (1518-1594), La Cène (1592-94)
Le plus grand des peintres maniéristes est El Greco (1541-1614) Le plus grand des peintres maniéristes est El Greco (1541-1614). Dans son Enterrement du comte d’Orgaz, réalisé en 1586 pour la chapelle de San Tomé à Tolède, en Espagne, El Greco peint trois niveaux de réalité, dont le troisième, céleste, présente le caractère irréel d’une vision extatique et personnelle, toute maniériste (figure étirées, lumière irréelle…) qui réalise ses plus grandes œuvres en Espagne, dont il partage la ferveur de la Contre-Réforme
Autres tendances: protobaroque et réalisme du nord de l’Italie… Aujourd’hui le maniérisme nous fascine tout particulièrement, car nous verrons cette approche resurgir dans l’art du XIXème et XXème siècle: notre époque est aussi une époque de contradictions aux tendances concurrentes et non plus un idéal commun, ressemblant à celle là… Mais de son temps d’autres tendances allaient être plus appréciées: il s’agit du protobaroque et du réalisme du Nord de l’Italie…
Le proto-baroque Un autre courant, apparu vers 1520, était particulièrement apprécié par ses successeurs: nous l’appelons le proto-baroque, car il préfigure le baroque en de si nombreux points que nous pouvons le considérer comme étant la première période du Baroque.
Le représentant le plus important du proto-baroque est un peintre de l’Italie du Nord, Le Corrège (1489/94-1534). Le Corrège a assimilé les techniques du sfumato, du clair obscur et de la perspective des maîtres de la Haute Renaissance, mais l’équilibre classique de la Renaissance ne l’attire pas. Son relatif isolement à Parme lui permet de développer un style personnel…
Le Corrège, le représentant le plus important du proto-baroque, développe un style personnel… Dans son Assomption de la Vierge, réalisé en 1525 pour la coupole de la cathédrale de Parme, il utilise les techniques du sfumato , du clair obscur, et sa maitrise parfaite de la perspective, pour créer un puissant trompe-l’œil, l’illusion de la perspective tournoyante, ouvrant la coupole vers un ciel ouvert. Ce procédé préfigure le style baroque.
Le Corrège est aussi connu pour ses séries mythologiques érotiques: Jupiter et Io (1532), Ganymède… Nous allons aussi retrouver cet érotisme dans le baroque. Correge Venus and Cupid with a Satyr 1524-1525
Le réalisme de l’Italie du Nord Un troisième courant de ce XVIème siècle est le réalisme de certains peintres, particulièrement du nord de l’Italie, dont Girolamo Savoldo et Paul Véronèse. Girolamo Savoldo, Saint Matthieu, vers 1535 Véronèse, Les Noces de Cana, 1562/63
Dans le Saint Matthieu que Girolamo Savoldo peint vers 1535, nous voyons l’ange apparaissant au Saint écrivant son évangile dans ce qui parait être un intérieur humble et simple. La lumière de la lampe donne à la scène un caractère à la fois mystique et intime. Cette idée que le mystère de la foi est à la porté de tous correspond aussi bien à l’idée protestante, et Le réalisme de l’Italie du Nord: Girolamo Savoldo, Saint Matthieu, vers 1535
Le sacré apparait au milieu du simple et du profane, le mystère de la foi est à la porté de tous. Cette idée correspond à l’idée protestante, dont ici nous voyons l’influence dans la peinture du Nord de l’Italie. Girolamo Savoldo, Saint Matthieu, vers 1535
Paul Véronèse (1528-1588), Repas chez Lévi, 1573 Nous retrouvons ce réalisme chez Véronèse, né et formé à Vérone, mais travaillant à Venise, contemporain de Tintoret mais de style très différent. Voyons en guise d’exemple son Repas chez Lévi, peint en 1573, qui aurait pu être sa Cène… Paul Véronèse, Repas chez Lévi, 1573
Paul Véronèse (1528-1588), Repas chez Lévi, 1573 Si la composition du tableau fait penser à une œuvre de la Renaissance, il y manque un élément essentiel: la conception idéale, élevée de l’homme, le «dessein de l’âme humaine», toujours présent chez les maîtres de la Renaissance. Accusé par l’Inquisition d’avoir rempli sa toile « de bouffons, nains, Allemands, ivrognes et autres vulgarités » , il change le titre, plutôt que de changer le tableau…
Véronèse, Noces de Cana, 1562/63 Dans ses toiles Véronèse combine le maniérisme de l’Italie centrale avec le réalisme de l’Italie du Nord. Les musiciens Véronèse, Tintoret, Titien Véronèse, Noces de Cana, 1562/63
Résumons: Après la Haute Renaissance… Renaissance tardive ou plutôt: Maniérisme Proto-baroque Réalisme du Nord de l’Italie
Le Maniérisme (1520-1580)… Nous appelons maniérisme le style artificiel, maniéré (reprenant, insistant sur la manière de peindre), s’inspirant de certains aspects de la peinture de Raphaël et de Michel-Ange: Michel-Ange, Mise en tombeau, 1510 Rosso Fiorentino (1494-1540), La déposition de la croix, 1521. Michel-Ange, Mise en tombeau, 1510 Jacopo Pontormo, Descente de la croix, 1525/28
Les caractéristiques du maniérisme Le maniérisme rompt avec l’équilibre de la composition classique de la Renaissance. Les corps sont déformés, en torsion (la figura serpentina, dessinant un S), les tons acides et crus (Michel-Ange de la chapelle Sixtine), l’espace est désuni, la lumière contribue à l’aspect irréel de la scène. C’est un art de codes, de symboles, de citations d'artistes classiques s’adressant au goût éduqué et sophistiqué des castes sociales élevées… Rosso Fiorentino La déposition de la croix en 1521. Pontormo, Descente de la croix, (1525-28) Parmigiannino, Autoportrait et la vierge au long cou
Le proto-baroque Nous considérons un autre style, apparaissant vers 1520, préfigurer le baroque. Nous l’appelons le proto-baroque. Le proto-baroque utilise les techniques de la peinture acquises par la Haute Renaissance (la perspective linéaire et atmosphérique, le sfumato, le clair-obscur) pour créer de puissants trompe-l’œil. Le Corrège (1489/94-1534): Assomption de la Vierge, 1525, Cathédrale de Parme
Un troisième courant apparait au nord de l’Italie, nous parlons de réalisme, car ces peintres (Girolamo Savoldo, Paul Véronèse) traitent les thèmes religieux en des termes du humble quotidien. Girolamo Savoldo, Saint Matthieu, vers 1535: l’ange apparait dans un intérieur humble, le sacré apparait au milieu du profane…
Paul Véronèse (1528-1588), Repas chez Lévi, 1573 Véronèse combine le maniérisme de l’Italie centrale avec le réalisme de l’Italie du Nord: sa composition est classique, mais pas les « bouffons, nains, Allemands, ivrognes et autres vulgarités ».
Véronèse, Noces de Cana, 1562/63 Anecdote: Véronèse donne ses traits, et les traits de ses collègues Tintoret et Titien aux musiciens au premier plan… Les musiciens Véronèse, Tintoret, Titien Véronèse, Noces de Cana, 1562/63