Quand le travail rime avec souffrance: le Burn-Out Professeur Philippe Corten Université Libre de Bruxelles, CHU-Brugmann Casablanca 2011
Historique A la fin des années 60, développement aux USA de la médecine communautaire. Un certain nombre de soignants quittent les hôpitaux pour s’investir dans cette pratique (c’est leur choix). Or, très rapidement, on constate que ceux-ci consomment plus de café, fument plus, prennent des tas de médicaments. En argot américain, quand on a ce genre de comportement, on dit qu’on BURN-OUT, comme en français on pourrait dire qu’on brûle la mèche par les deux bouts. www.cliniquedustress.be
Origine du concept Dictionnaire : To Burn-out: 1. Se consumer (pour une bougie) 2. Etre grillé (pour une lampe) 3. Métaphorique : la flamme est éteinte Bonne analogie : On se consume de l’intérieur Pas ou peu de signes apparents (on donne le change) Traduction française : Epuisement professionnel : Mais cette appellation met l’accent sur la fatigue alors qu’elle n’est pas systématiquement présente et n’est pas pathognomique du Burn-Out. Est-on certain qu’il ne soit que professionnel? (Tautologie de principe historique) www.cliniquedustress.be
Signes cardinaux Epuisement émotionnel Cynisme Démotivation www.cliniquedustress.be
Burn-Out : Effet de mode ou réel danger? Statistiques : 72% des employés disent ressentir du stress 86% des cadres se disent de plus en plus stressés 70% des belges au travail dorment mal la nuit de dimanche à lundi 50% des versements de l’INAMI pour incapacité primaire sont liés au stress et au Burn-Out. Burn-Out « terminal » Incapacité : 8,5 mois 15% ne retourneront jamais sur le marché du travail 75% changeront d’entreprise Or ceux qui vont faire un Burn-Out c’est la « crème » des collaborateurs Danger : Le Burn-out prend des années pour s’installer Pendant très longtemps les personnes en Burn-out donnent le change en apparence, mais elles se vident peu à peu de l’intérieur comme rongées par un cancer. www.cliniquedustress.be
Facteurs favorisants Tautologie de principe!! Métiers à risques : Le syndrome de Burn-Out apparaît particulièrement dans les professions qui demandent d’avoir une FLAMME, une vocation, Qui sont en Contact avec du PUBLIC (des inconnus) où la réussite de l’action dépend essentiellement de ses CAPACITES RELATIONNELLES, exposées au STRESS, aux contraintes et aux frustrations Tautologie de principe!! Métiers à risques : Soignants Educateurs, professeurs Travailleurs sociaux Commerciaux Cadres… www.cliniquedustress.be
Processus du Burn-Out Une situation Une réponse Un processus Une souffrance www.cliniquedustress.be
Une situation => une réponse Le choc de la réalité: Malgré sa flamme Malgré le fait qu’on se soit impliqué Les patients ne guérissent pas, voire meurent Les patients ne sont pas toujours compliants à leurs traitements Au départ ce sont des réponses adaptatives normales et saines. Se blinder Prendre de la distance (moins s’impliquer) Réduire ses ambitions (être plus réaliste) www.cliniquedustress.be
De la réponse au processus 1- Se blinder Se blinder = une réponse adaptative NORMALE Un soignant est régulièrement confronté à des situations dramatiques: polytraumatisés, suicides, enfants mourants… Il est important, tant pour lui que pour le patient, qu’il ne s’effondre pas devant ces situations. => il doit augmenter sa résistance. Processus Epuisement des émotions Malheureusement si ce type de réponse se répète il n’est pas possible de se blinder uniquement contre les affects négatifs. Petit à petit on va également se blinder contre les affects positifs (joies, plaisirs…) =>anhédonie www.cliniquedustress.be
De la réponse au processus 2- Moins s’impliquer Moins s’impliquer = une réponse adaptative NORMALE Malgré le fait que le patient ait une frousse bleue des piqûres, le soignant devra réaliser son acte => Être concerné sans s’impliquer (métaphore du Breakfast anglais: le poule est concernée, le cochon est impliqué) => laisser son tablier au vestiaire quand on a fini de travailler Lorsqu’on est submergé par une série de choses à réaliser, on a besoin que les autres n’envahissent pas tout le temps notre bulle. « De l’air! » => on met les autres à distance =>on pose des limites Processus Cynisme et déshumanisation des relations Malheureusement si ce type de réponse perdure, petit à petit Madame X devient la pancréatite de la chambre 15 => peu à peu les gens deviennent des pions qu’on manipule (y compris les amis, le mari) => cynisme progressif => quand on a besoin d’eux pour partager les émotions, on les a tellement mis à distance qu’ils ne répondent pas présents. www.cliniquedustress.be
De la réponse au processus 3- Etre plus réaliste Etre plus réaliste = une réponse adaptative NORMALE Comme les professions à risques sont celles qui demandent d’avoir une flamme, une vocation, il est normal qu’au début de sa carrière un soignant rêve d’être le Docteur Schweitzer. Bien vite, il faut se rendre à l’évidence. => réduire ses ambitions Processus Démotivation Malheureusement, à force de diminuer ses ambitions, petit à petit on attend de moins en moins de soi et des autres, on se croit de moins en moins capable d’atteindre un but. => on se démotive => voire on se sous-estime Ce processus s’étend aux amis , aux relations affectives. www.cliniquedustress.be
Donc: Une réponse: = Réponse adaptative normale Un processus: Se blinder Moins s’impliquer Etre plus réaliste = Réponse adaptative normale Un processus: Epuisement des émotions Déshumanisation des relations Démotivation Le processus envahit peu à peu tous les domaines de vie www.cliniquedustress.be
Du processus à la souffrance Le Burn-Out est un syndrome lentement évolutif. Il faut presque 10 ans pour arriver au stade terminal. Il est très destructeur. Il gangrène petit à petit tous les domaines de vie. Il est contagieux. Pendant longtemps ceux qui en sont atteints donnent le change (peu de signes) www.cliniquedustress.be
Comment enrayer le processus ? Tourner le dos au mythe d’Atlas : On n’est pas obligé de porter seul le poids du monde ! Ne pas rentrer dans le syndrome du pélican: On n’est pas obligé de se saigner pour aider les autres ! Partager ses émotions dès le début. => COMMUNIQUER www.cliniquedustress.be
Eviter que le Burn-Out ne nous épuise Travailler sur les causes : La flamme Les relations Le stress et les frustrations Travailler sur le processus : Intelligence émotionnelle La bonne distance Des objectifs réalistes Préserver sa qualité de vie Communiquer www.cliniquedustress.be
Prévention : travailler sur les causes La flamme Dans ce genre de métier on a besoin de sa flamme, il faut donc la préserver tout en lui donnant des limites. Comment faire? Vieillir : on est généralement plus idéaliste à 20 ans qu’à 40. Mieux se connaître, prendre soin de soi Ne pas tabler sur la vocation comme moteur de motivation mais sur l’esprit d’équipe ou d’entreprise. => savoir communiquer ses déceptions et ses joies www.cliniquedustress.be
Prévention : travailler sur les causes 2. Les relations interpersonnelles Dans ces métiers une grosse part de la réussite de l’action dépend de ses capacités relationnelles, mais pas uniquement. Comment faire? Développer ses compétences (techniques) Se soucier sans s’engager Préserver sa vie sociale et familiale www.cliniquedustress.be
Prévention : travailler sur les causes Le stress Si possible supprimer la cause ou tout au moins: Augmenter ses aptitudes (résilience) Augmenter le support de la hiérarchie et des collègues Eliminer les stress inutiles Développer des mécanismes d’adaptation Identifier et verbaliser ses émotions quand elles surgissent (et pas 3 heures après), y compris sa colère ou son irritabilité Se mettre des limites et savoir dire NON de façon assertive: Ni hérisson, ni paillasson Demander de l’aide Savoir se retirer, arrêter le disque dur. www.cliniquedustress.be
Prévention : travailler sur le processus 4. Eviter l’épuisement émotionnel On a l’habitude de parler d’intelligence uniquement pour ce qui est cognitif. Nos émotions sont aussi une manière d’appréhender la réalité et on peut le faire intelligemment (intelligence émotionnelle). Comment faire? Au travail : préférer le « comment » on s’est senti face à telle situation au relevé de ce qu’on a fait (ou pas fait) Avec son conjoint : lui demander le soir comment s’est passée sa journée et non ce qu’il a fait (et vice versa). Ne pas accepter de consacrer toute sa vie à sa vie professionnelle. Utiliser le sens de l’humour www.cliniquedustress.be
Prévention : travailler sur le processus 5. La bonne distance Etre en empathie (pouvoir se mettre à la place de l’autre) et non en sympathie (sun paθos = souffrir avec) Comment faire? Rester professionnel Rester à l’écoute de leur vie et leurs difficultés Penser à leur anniversaire, à leurs événements de vie Pouvoir être intégré dans une trajectoire de soins plutôt qu’un épisode de soin Trouver la meilleure solution pour eux tout en mettant des limites Les considérer comme des partenaires Transmettre à votre secrétariat quand vous êtes (réellement) disponible pour leur répondre au téléphone www.cliniquedustress.be
Prévention : travailler sur le processus 6. Avoir des objectifs réalistes Avoir des objectifs réalistes, signifie d’une part continuer à avoir des objectifs, se poser des défis et d’autre part savoir se mettre des buts atteignables. Comment faire? Mettre des limites Voire la partie pleine du verre et pas uniquement la partie vide Augmenter ses compétences Ne pas être seul à vouloir atteindre ces buts, mais les fixer ensemble, en équipe => partager les mêmes buts +> COMMUNIQUER www.cliniquedustress.be
Prévention : travailler sur le processus Préserver sa qualité de vie : La vie est de qualité quand la vie fait sens www.cliniquedustress.be
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