ÉPARGNE ET INVESTISSEMENT © HEC Montréal Décembre 2002
Introduction Il semble y avoir un lien positif entre le taux d’investissement / épargne et le PIB réel par habitant. Par quels mécanismes l’épargne est-elle allouée aux investissements ?
L’épargne et l’investissement Quels sont les déterminants de l’investissement ? Comment va-t-on financer les projets d’investissement et à quel taux d’intérêt ? Si l’épargne nationale est insuffisante, un pays peut-il faire appel à l’épargne internationale ? À quel taux d’intérêt et comment ?
Les déterminants de l’investissement Décision d’investir = décision d’acquérir du nouveau capital physique (machines, équipement et structures). Critère de choix : comparer le rendement du nouveau capital à son coût. Le rendement est égal à productivité marginale du capital (PmK), c’est-à-dire le gain de production associé à une unité additionnelle de capital ou à chaque dollar additionnel investi. Le coût réel du capital est égal au taux d’intérêt réel (r) plus le taux de dépréciation du capital (d). On peut donc écrire : PmK = r + d ou PmK – d = r Les entreprises vont investir tant que le rendement réel net sur l’investissement est supérieur ou égal au taux d’intérêt réel.
L’investissement et le taux d’intérêt réel au Canada entre 1981 et 2001
La fonction d’investissement Taux d’intérêt réel (r) Seuls les projets d’investissement dont le rendement net est supérieur ou égal à r0 sont réalisés (I0) r0 Tous les autres projets dont le rendement est inférieur à r0 ne sont pas réalisés car ils ne sont pas rentables ! I Investissement (I) I0
Les autres déterminants… D’autres facteurs que le taux d’intérêt réel peuvent influencer I. L’investissement dépend aussi des bénéfices nets réels anticipées (BENRA) des entreprises. Les bénéfices dépendent de la croissance économique et du progrès technologique. Si la croissance économique est plus forte que prévu, les entreprises anticipent une hausse de leurs bénéfices. Quant au progrès technologique, il stimule la productivité et le rendement réel attendu sur l’investissement.
Les déterminants de l’épargne privée Épargne = revenu annuel non consommé. La décision d’épargner est un choix entre consommation présente et consommation future. Ce choix dépend du taux auquel les agents économiques substituent la consommation future à la consommation courante (taux de préférence inter-temporelle). Les agents comparent leur taux de préférence inter-temporelle au taux d’intérêt réel; plus ce dernier est élevé, plus l’épargne est importante.
La fonction d’épargne S r1 r0 Épargne (S) S0 S1 Taux d’intérêt réel
Les autres déterminants de l’épargne En plus du taux d’intérêt réel, l’épargne dépend : du revenu personnel disponible réel courant, de la richesse nette réelle et du revenu réel futur anticipé. Revenu personnel disponible : revenu des particuliers après impôts. Une hausse du revenu disponible stimule la consommation et l’épargne. Richesse nette = (l’actif des ménages - ses dettes); elle résulte de l’épargne accumulée au fil des ans et des gains de capital. Une augmentation de la richesse fait augmenter la consommation au détriment de l’épargne. Enfin, si on prévoit un revenu plus élevé dans le futur, la consommation courante est stimulée au détriment de l’épargne. Selon Statistique Canada, le revenu personnel disponible (RPD) est défini comme la somme du revenu de travail (RT: salaires, traitements et revenus tirés des entreprises individuelles), des paiements de transferts (Tr: comme par exemple l’aide sociale) et des revenus de placement (RP : intérêts et dividendes), desquels on déduit les impôts (T). RPD = (RT + TR + RP) - T
L’épargne et l’investissement en économie fermée Y = C + I + G SP = Y – T + Tr – C SG = T – Tr – G SP + SG = Y – T + Tr – C + T – Tr – G SP + SG = SN = Y – C – G = I SN = I
Le marché des fonds prêtables (capitaux) et le taux d’intérêt réel SN = Offre SN = I r0 I = Demande Fonds prêtables (S, I) S0 = I0
L’influence des bénéfices anticipées r O Une hausse des bénéfices stimule l’investissement et la demande de fonds prêtables; le taux d’intérêt a tendance à augmenter r1 r0 D1 D0 Fonds prêtables (S, I) I0 I1
L’influence du revenu disponible Une hausse du revenu disponible augmente l’épargne et l’offre de fonds prêtables; le taux d’intérêt réel a tendance à diminuer r0 r1 D Fonds prêtables (S, I) S0 S1
L’influence de la richesse et du revenu futur O1 O0 Une hausse de la richesse ou du revenu futur a pour effet de stimuler la consommation courante et donc de décourager l’épargne; l’offre de fonds prêtables est ainsi réduite et le taux d’intérêt réel a tendance à s’accroître r1 r0 D Fonds prêtables (S, I) S1 S0
L’épargne gouvernementale (SG) et le taux d’intérêt réel SP + SG SP SP + SG Lorsque les gouvernements font des surplus budgétaires, l’épargne publique est positive (SG > 0) et vient gonfler l’épargne nationale (SP + SG); dans le cas où les administrations publiques font des déficits, l’épargne publique est négative (SG < 0) et vient réduire l’épargne nationale. r DÉFICIT SURPLUS SG < 0 SG >0 r0 D S0 S, I
Note sur l’épargne publique et les budgets gouvernementaux Une baisse de G cause une hausse de l’épargne publique, tout en laissant l’épargne privée inchangée Une hausse de T augmente SG mais diminue SP.
Relation entre l’épargne gouvernementale et le taux d’intérêt
L’épargne et l’investissement dans une petite économie ouverte Jusqu’à maintenant, l’épargne nationale était la seule source de financement des investissements. En économie ouverte, ils peuvent aussi être financés par l’épargne étrangère. Il se peut que l’épargne nationale soit plus élevée que l’investissement; dans ce cas, l’excédent servira à financer des investissements à l’étranger.
L’épargne et l’investissement en économie ouverte Y = C + I + G + XN où XN : EX – IM Y – C – G = I + XN SN = I + XN Or, SN + SF = I donc : -SF = XN
Taux d’intérêt en économie ouverte Dans une petite économie ouverte, avec mobilité internationale des capitaux, le taux d’intérêt réel est déterminé sur le marché mondial des capitaux (fonds prêtables); c’est le taux de référence pour toutes les transactions financières nationales.
Le marché mondial des capitaux et le taux d’intérêt réel mondial SM = Offre mondiale rM IM = Demande mondiale S, I SM = IM
Le cas d’une petite économie ouverte en besoin de financement SN = Offre nationale r Au taux d’intérêt mondial (rM), l’investissement est supérieur à l’épargne nationale (IN > SN), il y a une demande excédentaire de capitaux. Celle-ci sera comblée par l’épargne étrangère (SF) qui est égale à (IM – EX), ce qui implique que EX < IM. Taux d’intérêt réel mondial rM SF >0 I = Demande nationale S, I SN IN
Une petite économie ouverte en excédent de financement SN = Offre nationale r Au taux d’intérêt mondial (rM), l’épargne nationale est supérieure à l’investissement (SN > IN), il y a une offre excédentaire de capitaux. Celle-ci sera destinée au financement de l’investissement étranger puisque l’épargne étrangère est négative (SF < 0) et EX > IM. SF <0 rM I = Demande nationale S, I IN SN
Une petite économie ouverte en résumé… SN SN SN Dans une petite économie ouverte, le taux d’intérêt mondial est le taux de référence à long terme. Tout déséquilibre entre l’épargne nationale (SN) et l’investissement se trouve compensée par l’épargne étrangère (SF). Celle-ci s’ajuste de manière à assurer l’égalité entre l’épargne totale (ST = SN + SF), et l’investissement. En contrepartie, ceci implique que les exportations nettes (EX – IM) prennent les valeurs qui assurent cet équilibre global. r Déficit Surplus EX<IM EX>IM SF <0 rM SF >0 IN S, I
Le mécanisme d’ajustement des exportations nettes Question : comment les exportations nettes s’ajustent-elles pour assurer l’égalité entre l’épargne totale et l’investissement ? Réponse : le mécanisme d’ajustement repose sur le taux de change réel. Ce mécanisme sera examiné en détail dans le chapitre sur la balance des paiements et les taux de change. Idée : le taux de change prend une valeur qui assure l’égalité entre –SF et (EX - IM).
Implications pour la politique économique Les gouvernements ont un rôle à jouer : Politique fiscale encourageant l’épargne des particuliers et des ménages (ex. programmes d’épargne études, logement, retraite); Pas de forts déficits budgétaires (SG < 0) Politiques fiscale favorisant l’investissement des entreprises dans des secteurs en croissance de l’économie et facilitant son financement (ex. régime d’épargne actions, crédits d’impôt de toutes sortes, accès à du capital de risque)
ÉPARGNE ET INVESTISSEMENT © HEC Montréal Décembre 2002