Dans cette communication, le principe de fonctionnement des moteurs Diesel ou moteurs à allumage par compression a tout d’abord été rappelé : fort excès d’air, forte compression (température élevée, qui favorise la formation d’oxydes d’azote [NOx]) et combustion du carburant dès l’injection (d’où un mélange avec l’air peu homogène qui favorise la formation de particules). Ainsi, les moteurs Diesel, en comparaison des moteurs à essence, produisent beaucoup plus de particules (et d’oxydes d’azote). En 20 ans, la réglementation européenne a beaucoup limité les émissions des moteurs des véhicules. Les polluants pris en compte sont le monoxyde de carbone (CO), les hydrocarbures imbrûlés, le NOx et les particules. La composition de ces dernières a aussi beaucoup évolué, qu’il s’agisse du sulfate (origine : soufre des carburants ou lubrifiants), du carbone organique (hydrocarbures des carburants et lubrifiants, pyrosynthèse) ou des métaux (usure du moteur et additifs des lubrifiants). La réglementation varie selon les différentes classes de véhicules : particuliers et utilitaires légers, poids utilitaires lourds (poids lourds, véhicules de transport en commun) et les véhicules non routiers (engins de chantier et agricoles, chariots automoteurs, etc.). Cependant, en situation de circulation réelle, si la masse et le nombre des particules Diesel émises par les moteurs se sont considérablement réduites (limitation du nombre de particules à 6 x 1011/km depuis Euro 5b pour les véhicules légers) [figure], les émissions de NOx émises par les moteurs Diesel de véhicules légers sont nettement plus importantes que celles mesurées lors de l’homologation des moteurs.
La mesure réglementaire des particules comprend non seulement leur masse (prélèvement sur filtre après dilution à volume constant, ce qui permet la condensation des composés semi-volatiles), mais aussi leur nombre (mesure par compteur de noyaux de condensation — diamètre > 23 nm — après thermodilution, permettant d’éviter la condensation des composés semi-volatiles afin d’assurer une bonne reproductibilité des mesures). L’utilisation de filtres à particules (FAP) permet certes de réduire le nombre de particules émises, mais les particules semi-volatiles ne sont pas mesurées. Enfin, concernant le contrôle de la pollution lors des contrôles techniques, de nouveaux opacimètres plus performants (permettant de détecter l’absence de FAP) seront utilisés à partir de mai 2018. À partir de 2022, un contrôle des gaz (NOx, etc.) et du nombre de particules sera également réalisé.
La surveillance de l’air en France est assurée par 18 associations à but non lucratif (loi 1901 ou 1908) agréées par le ministère de la Transition écologique et solidaire. La fédération ATMO France est chargée de coordonner, d’assister, d’harmoniser et de représenter les associations sur les plans national, européen et international, auprès des pouvoirs publics et des différents organismes ayant à traiter de la qualité de l’air. Au niveau d’une région, le dispositif de surveillance comprend à la fois un réseau de mesures permanent avec des stations fixes (24 h/24 ; 7 j/7), une modélisation/cartographie (prévisions à court terme, analyse cartographique annuelle, scenarii prospectifs, aide à la décision), un cadastre des émissions (simulation/prévision…) et un plan de communication (informer, accompagner l’action, inciter aux changements). Concernant l’exposition chronique aux polluants, les grandes tendances montrent une nette inflexion à la baisse (figure) pour la plupart des polluants, une diminution insuffisante pour les particules, le dioxyde d’azote et l’ozone, de même que de fortes variations annuelles potentielles et liées à la météorologie.
La taille des particules est un facteur important : plus elles sont fines, plus elles pénètrent profondément dans l’organisme et irritent les voies respiratoires. Les particules PM2,5 ont ainsi un impact sanitaire plus important que les PM10. La principale source d’émission pour les particules PM10 et PM2,5 est le chauffage individuel au bois (respectivement 48 % et 63 %). Sur la période 2007-2016 en région Rhône-Alpes-Auvergne, la baisse est de 34 % (PM10) et de 50 % (PM2,5), se situant désormais à des valeurs proches des valeurs limites annuelles, mais non conformes aux recommandations de l’OMS (25 % de la population exposée pour les PM10 ; 63 % pour les PM2,5 en 2016). Les oxydes d’azote (NOx) sont quant à eux des gaz irritants pour les bronches, qui augmentent la fréquence et la gravité des crises d’asthme et peuvent entraîner des infections pulmonaires chez l’enfant. Ils participent aux pluies acides et à l’effet de serre. Les sources d’émission pour le NO2, le seul à être réglementé en air ambiant avec une valeur limite annuelle à 40 µg/m3 sont le transport, à 60 %, dont 90 % imputables au Diesel, et des zones plus particulièrement touchées qui sont les centres-villes et la proximité des grandes voiries. En région Rhône-Alpes-Auvergne, les concentrations moyennes en NO2 ont diminué de 21 % en 10 ans. Enfin, l’ozone (O3) n’est pas directement rejeté par une source de pollution : il se forme par une réaction chimique initiée par les rayons UV à partir de polluants dits “précurseurs”, dont les principaux sont les NOx et les composés organiques volatils (COV). L’ozone troposphérique (rencontré à basse altitude, de 0 à 10 km) est un gaz irritant à l’origine de la toux, d’altérations pulmonaires et de démangeaisons oculaires. La valeur cible ? Un seuil de protection de 120 µg/m3 pour le maximum journalier de la moyenne sur 8 heures à ne pas dépasser plus de 25 jours par année civile, en moyenne calculée sur 3 ans. Toujours dans la même région, une augmentation de 4 % des concentrations a été relevée de 2007 à 2016.
La combustion du carburant dans le moteur Diesel produit une pollution chimiquement complexe de gaz et de vapeurs auxquels s’ajoute une phase particulaire. Quels sont les principaux composants des particules Diesel ? Le carbone élémentaire (fraction insoluble) représente 50 à 75 % de la masse des particules. Le carbone organique (fraction soluble) en contient 19 à 43 % : il s’agit de divers composés organiques légers ou lourds, notamment des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et des nitro-HAP, dont certains sont cancérogènes (benzo(a)pyrène, 1-nitro-pyrène). Enfin, les sulfates (1-4 %) et les métaux (1-5 %) sont présents en moindres quantités. Le Diesel pollue-t-il moins que l’essence ? Non ! Certes, le gazole contient 10 % d’énergie en plus par rapport à l’essence et émet donc 10 % de CO2 de moins par litre consommé, mais les moteurs Diesel produisent beaucoup plus de particules (et d’oxydes d’azote) que les moteurs à essence (figure). De plus, dans le cycle de vie complet d’un véhicule Diesel et de sa consommation de carburant, celui-ci est responsable d’une émission plus importante de CO2 que toute autre motorisation.
Le problème est surtout lié à la taille des particules (plus de 90 % des particules liées au Diesel sont inférieures à 1 μm de diamètre), d’où une pénétration non pas seulement au niveau pulmonaire (fraction alvéolaire), mais également au niveau du système sanguin. Le Diesel est-il responsable d’asthme ? de survenue de cancers du poumon ? Oui aux 2 questions. Le Diesel est un adjuvant de la réponse allergique et induit un stress oxydatif (les radicaux libres de l’oxygène interagissent avec les lipides, les protéines et l’ADN, aboutissant à des lésions cellulaires ; il existe également un effet toxique direct sur l’épithélium respiratoire). Il augmente aussi la synthèse des IgE et modifie le profil des cytokines (IL-4, IL-5, IL-10, IL-13).
Concernant l’association avec la survenue du cancer du poumon, l’étude ESCAPE (European Study of Cohorts for Air Pollution Effects), méta-analyse de 17 études de cohorte dans 9 pays européens (313 000 sujets, 2 095 cancers du poumon, moyenne de suivi de 13 ans) a montré que, pour chaque augmentation de 5 μg/m3 de pollution aux PM2,5, le risque de cancer augmentait de 18 % (22 % pour une augmentation de 10 μg/m3 de pollution aux PM10, avec un risque plus marqué pour les adénocarcinomes).
La qualité de l’air reste une préoccupation majeure des patients et des médecins. Il n’est cependant pas toujours évident d’aborder cette question et de répondre aux interrogations des patients et de leur entourage. L’impact des pesticides sur la santé respiratoire est-il méconnu ? En termes de tonnage de pesticides vendus, la France se situe, sur des données déjà anciennes puisque datant de 2010, au 1er rang européen et au 4e rang mondial.