Spécificités du patient neutropénique

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Transcription de la présentation:

Spécificités du patient neutropénique Michael Darmon Service de réanimation médicale Hôpital Henri Mondor

PLAN ➊ Généralités ➋ Écologie microbiologique ➌ Antibiothérapie en urgence ➍ ...et aprés ? ➎ Place des antifungiques ➏ Isolement et DDS

PLAN ➊ Généralités ➋ Écologie microbiologique ➌ Antibiothérapie en urgence ➍ Choix d’un anti-infectieux ➎ Place des antifungiques ➏ Isolement et DDS

Définition FIEVRE DU PATIENT NEUTROPENIQUE 38°C pendant plus d ’une heure ou > 38.3°C (<36°C) Chez un patient ayant: Polynucléaires neutrophiles < 500 /mm3 ou neutropénie attendue dans les 48h Attention à la neutropénie fonctionnelle (LA hyperleucocytaire)

Fièvre de la neutropénie Fièvre non documentée (60 %) Fièvre documentée cliniquement (10 %) présence d’un foyer clinique pronostic péjoratif si foyer « majeur » Fièvre documentée microbiologiquement (30%) hémocultures surout pronostic variable selon le germe

Facteurs de risque Profondeur de la neutropénie Durée de la neutropénie Chimiothérapie préalable Corticothérapie Type d’immunodépression sous-jacente (humorale vs. Cellulaire)

Impact du retard thérapeutique 410 épisodes de bactériémies 382 patients neutropéniques Mortalité = 48% Influence pronostique de l’antibiothérapie guérison si appropriée: 67% guérison si inappropriée: 14% Bodey GP, Arch Intern Med. 1985

Impact du retard thérapeutique Délai entre HC+ et ATB appropriée % guérison ATB instaurée dès la fièvre 73 ATB instaurée le jour même 74 ATB instaurée plus tard 1 à 2 jours 3 à 4 jours 46 22 Bodey GP, Arch Intern Med. 1985

En pratique Complication fréquente: Urgence thérapeutique 50% si neutropénie de plus de 4 jours 100% si neutropénie de plus de 14 jours Urgence thérapeutique ATB débutés dans l’heure ! Ensemble hétérogène de situations Attention aux situations « limites »: Entrée en aplasie Neutropénie fonctionnelle

PLAN ➊ Généralités ➋ Écologie microbiologique ➌ Antibiothérapie en urgence ➍ ...et aprés ? ➎ Place des antifungiques ➏ Isolement et DDS

108 épisodes infectieux Facteurs associés a une infection a CG+ (OR; IC95%): Cytarabine haute dose 1.7 (1-2.8) IPP 1.7 (1.1-3.8) Colimycine orale 3 (1.8-5) Frissons 1.7 (1-2.7) Bactrim 0.3 (0.1-1)

EN

Certitude (Infection des tissus profonds prouvée) Probabilité (Terrain, microbiologique, Clinique) Possibilité (Terrain, Clinique) CID 2003

Aspergillose Atteintes pulmonaires, SNC et sinus Détresse respiratoires et SDMV (neutropénie) Hémoptysies (Sortie d’aplasie) Mortalité 65-90% Situations a risques: LA et allogreffe (10-20%) Corticothérapie Travaux

Le signe du halo 92% des patients avec aspergillose invasive (phase précoce)

50% apparition 5j avant bactériémie Bactériémie 40% Mortalité 50-80% Traitement optimal non connu !

Ne pas oublier les FdR spécifiques Facteurs de risque de pneumocystose: Terrain (VIH; déficit immunitaire) Hémopathie (lymphoïde surtout) Greffe de Moelle osseuse (auto / Allo) Traitements: Corticoïdes au long cours MabCampath® Fludarabine

Écologie Elle a changé au cours des 20 dernières années Ne pas oublier les facteurs de risques spécifiques Les bactéries restent prédominantes les CG+ représentent plus de 50% des germes Population à haut risque d’infection fongique Aspergillus et Candida « Champignons émergents » en réponse aux nouveaux antifungiques

PLAN ➊ Généralités ➋ Écologie microbiologique ➌ Antibiothérapie en urgence ➍ ...et aprés ? ➎ Place des antifungiques ➏ Isolement et DDS

Cahier des charges Couvrir les BGN ainsi que les CG+ Bactéricidie Savoir couvrir le SDMR ou les champignons Tenir compte du terrain Traitement ambulatoire ? Traitement P.O. ? Ne pas hypothéquer l’avenir du patient

Classification des risques Selon: Le terrain L’évolutivité de la pathologie La durée de la neutropénie La profondeur de la neutropénie L’existence d’un foyer infectieux L’existence de défaillances viscérales

Faible risque d ’infection sévère Maladie sous jacente en rémission ou contrôlée Pas de défaillance viscérale Pas d ’infection clinique évolutive : Pas d ’infection de KTc Pas de douleur abdominale Pas de confusion Radiographie de thorax Fonction rénale normale / BH normal Degrés et durée de neutropénie: PNN ou monocytes > 100 Aplasie attendue < 10j et depuis moins de 7j

Faible risque d ’infection sévère Si : Autonome Compliant Entouré Proche de l’hôpital

Haut risque d ’infection sévère: Place de la vancomycine Colonisation SDMR connue. Infection de KT suspectée Hémoculture à CG+ Collapsus Mucite grade III ou IV Fièvre > 40°

Risque d ’infection sévère: Place des aminosides L ’intérêt de la bithérapie reste controversé y compris chez le neutropénique: Métanalyse de Furno, Lancet Infect Dis 2002 29 études randomisées 4795 épisodes de neutropénies fébriles 1029 bactériémiques échec clinique = modification ATB ou DC pas de bénéfice retrouvé à l’adjonction d’aminoside… … mais bactéricidie et élargissement du spectre !

Haut risque d ’infection sévère IDSA 2002

En pratique Évaluation et traitement en urgence Examen clinique complet pluriquotidien: Ne pas oublier le pharynx, le pelvis, le cathéter... Prélèvement bactériologiques: Toujours prélever cathéter et urines… Rx de thorax systématique Évaluation du risque infectieux, traitement en fonction Garder en tête les spécificités de chaque type d’infection

PLAN ➊ Généralités ➋ Écologie microbiologique ➌ Antibiothérapie en urgence ➍ ...et aprés ? ➎ Place des antifungiques ➏ Isolement et DDS

IDSA 2002

Réévaluation à 48 heures Apyrexie: Fièvre persistante: Même traitement sauf si documentation ! Fièvre persistante: Selon l’état clinique du patient: Adjonction de Vancomycine Élargir l’antibiothérapie (?) Ou.. Pas de modification Neutropénie prolongée et J5: antifungiques

Au moment de la sortie d’aplasie Si infection identifiée poursuite du traitement selon la durée appropriée ! Fièvre persistante: Fenêtre d’antibiothérapie 4 à 5 jours après SA Si apyrexie et pas de site infectieux: Stop à 48 heures

En pratique L’escalade systématique n’est plus la règle Adapter l’antibiothérapie si documentation Antifungique à J5 si neutropénie prolongée Arrêt 48h après la SA si tout va bien Et si la durée d’aplasie est > à 15 jours ?

PLAN ➊ Généralités ➋ Écologie microbiologique ➌ Antibiothérapie en urgence ➍ ...et aprés ? ➎ Place des antifungiques ➏ Isolement et DDS

Trois utilisations ! Traitement empirique Traitement curatif Traitement prophylactique

Traitement empirique La fungizone reste le traitement de choix en l’absence d’insuffisance rénale ! Si insuffisance rénale: AmphotéricineB liposomale Caspofungine (Cancidas®) Pas de place pour le voriconazole !

In this [study], Voriconazol did not fulfill the protocol-defined criteria for non inferiority...

A titre indicatif en 2004… forme prix AP (€) posologie CTJ (70 kg) AmB IV 50 mg 4.60 1 mg/kg/j 6.90 Ambisome IV 50 mg 152 3 mg/kg/j 608 Abelcet IV 100 mg 125 5 mg/kg/j 438 Fluconazole IV 400 mg 42 800-400 mg/j 84-42 PO gél 200 mg 13 52-26 Voriconazole IV 200 mg 160 6 - 4 mg/kg/j 640 (V-Fend) PO cp 200 mg 43 800 mg 172 Caspofungine IV 50 mg 486 70-50 mg/j 486-619 (Cancidas) IV 70 mg 619 ou 70-70 mg/j

Traitement Curatif Peu de recul avec le Voriconazole (mais…) Littérature très pauvre avec la caspofungine Une maladie dont la mortalité est quasi constante avant 2000 !

Garder en tête que: La toxicité de l ’AmphoB est dose/temps dépendante La toxicité hépatique et les interactions médicamenteuses avec les azolés La posologie optimale des dérivés lipidiques de l ’amphoB n ’est pas connue Le spectre de la CASPOFUNGINE expose au risque d ’émergence de certaines infections fungiques. Le coût...

PLAN ➊ Généralités ➋ Écologie microbiologique ➌ Antibiothérapie en urgence ➍ ...et aprés ? ➎ Place des antifungiques ➏ Isolement et DDS

EFFICACITE DE L’ISOLEMENT Infections sévères pendant la neutropénie (%) Buckner, Annals of Intern. Med. 1978 Schimpf, Annals of Intern. Med. 1978 Bodey, Am J Med 1979

EFFICACITE DE L’ISOLEMENT Mortalité (%) Buckner, Annals of Intern. Med. 1978; Schimpf, Annals of Intern. Med. 1978; Levine NEJM 1979; Rodriguez Medicine 1978.

Mais… Les études sont anciennes Certains groupes de patients sont étudiés: LAM Allogreffe de moelle Parfois LNH Des études contradictoires Les études avec isolement « partiel » sont négatives

PAS D ’ISOLEMENT 50 allogreffes de moelle réalisées sans isolement Traitement prophylactique: Bactrim fort, Zovirax, IVIG Infections: 32% d’infections documentés (0 décès par infection) 24% de bactériémies à CG+ Pas d’infections fungiques Mortalité à 100j: 6% Mortalité à 22 mois: 18% Jours avec retour à domicile avant prise de greffe : 8j/25 Russell Lancet 1992

QUE FAIRE EN PRATIQUE ? DDS ? Consensus SRLF en réanimation 2002: « Isolement complet » Isolement géographique Pression positive et SAS Filtre HEPA ou flux laminaire Isolement technique: Blouse Masque Rien d ’autre DDS ? Réanimation 2002;11:250-6

QUE FAIRE EN PRATIQUE ? L’isolement protecteur est probablement efficace. Pas d’évaluation récente de son efficacité, ni des mesures techniques idéales. Risque de nuire au patient par défaut de surveillance. Plusieurs questions en suspens

Fièvre chez le neutropénique ➊ Une définition élargie ➋ Un traitement large en urgence ➌ Une surveillance clinique pluriquotidienne ➍ Une réévaluation à 48 h et 5 jours ➎ Un isolement ne nuisant pas à la surveillance ➏ Ne pas oublier: - l’AmphoB - le risque de résistances - les spécificités des infections