Le marketing : entre évolutions et adaptation J’ai choisi de vous parler aujourd’hui du terrible passage à vide que le marketing a connu au cours des années 80. Cette période transitoire l’a obligé à se remettre en cause, à s’interroger sur ses pratiques, sur ses méthodes. Pourtant après plus de 40 années de succès, la preuve était faite de ses failles, ses faiblesses, de sa faillite. Toutes ses certitudes volaient littéralement en éclat. Le consommateur, que le marketing prétendait connaître, s’est rebellé en faisant mentir bon nombre d’études de marché. Des dizaines de produits ont du être retirés de leurs marchés. Samuel MAYOL
1985, Coca Cola ébranlé
Histoire du marketing : apparition du concept
Histoire du marketing : apparition du concept La prépondérance de l’offre XIXème siècle et début XXème : D > O Biens et services sont de 1ère nécessité Le problème de l’entreprise : produire La vente est automatique La réponse la plus souvent donnée à cette question réside dans le jeu de l’offre et de la demande. Au XIX ème siècle, période de pénurie, l’offre de produit est largement inférieur à ce qu’est la demande. Dans ce contexte tout produit fabriqué est automatiquement vendu. L’entrepreneur ne se soucie guère de la demande, car il sait qu’il vendra. Tout au plus il doit se faire connaître. On ne parle alors pas de marketing, ni même de publicité. On utilise juste les crieurs publics pour se faire connaître. Ce sont les prémices de la réclame (comme son nom l’indique, on ne fait que clamer la marque ou le produit). Ce qui préoccupe les économistes de l’époque, en revanche,, c’est de savoir comment produire plus et mieux. C’est le fordisme, le taylorisme et l’apparition de l’OST Le marketing n’existe pas. Ford dit lui même : « Vous pouvez choisir n'importe quelle couleur pour votre Ford T, pourvu qu’elle soit noire » O D
Histoire du marketing : apparition du concept La prépondérance de la Demande Peu à peu, généralisation de la production de masse Naissance de la société d’abondance Consommateur très sollicité Difficulté : la vente Industrialisation progressive de l’occident voit peu à peu un équilibre s’opérer entre l’offre et la demande. L’entreprise commence à comprendre que la vente automatique n’est plus et ne sera plus d’actualité dans les années à venir. C’est alors l’apparition des techniques de vente modernes et notamment les méthodes américaines. C’est également à ce moment là qu’apparaissent les premiers points de vente en libre service, prémices de la distribution moderne. L’objectif est de faciliter l’achat par tous les moyens. La réclame prend son envol par les moyens modernes que sont l’affichage et la radio. D O
Histoire du marketing : apparition du concept La prépondérance du besoin Depuis les années 70, acheteurs mieux informés Entreprise cherche les besoins du consommateur pour adapter ses produits Place prépondérante du marketing Le lendemain de la seconde guerre mondiale voit arriver l’explosion de ce que les américains avaient déjà commencé à faire quelques années auparavant, à savoir le marketing. L’offre de produit étant supérieur à la demande, il ne suffit plus de savoir produire ou de savoir vendre et distribuer, il faut maintenant savoir anticiper sur les attentes des consommateurs. C’est donc toute une démarche qui doit se mettre en place avant la création du produit. Toute l’entreprise doit intégrer cette façon de faire, c’est une véritable révolution dans le fonctionnement des entreprises D O
et des choix stratégiques Marketing stratégique Marketing opérationnel Démarche du Marketing Détecter les besoins Agir Définir une politique générale et des choix stratégiques Contrôler La nouveauté réside en réalité dans le fait que l’entreprise ne fasse rien sans savoir si en face elle trouvera des clients disponibles. Le client devient le centre de l’entreprise. L’apparition des études de marché donne naissance à la segmentation et au marketing que l’on appellera classique. Décomposé en marketing stratégique et opérationnel, on y retrouve des notions comme le positionnement et le marketing mix. Cette façon là de faire du marketing existe depuis les années 50. Souvent contesté et remis en cause, il demeure encore aujourd’hui la référence et le fondement même du marketing. Marketing stratégique Marketing opérationnel
Marketing : la crise de la quarantaine Théorisé dans les années 50 (Kotler) Années 80 : crise du marketing, nommée crise de la quarantaine (mid-life crisis) Remise en cause de Sa pertinence Son universalité Sa démarche Ses outils Comme je vous le disais en intro, les années 80 ont porté une charge plus lourde contre cette vision classique de marketing. Le marketing est entré dans une zone de turbulence que l’on peut nommer crise de la quarantaine. L’universalité et la pertinence même de sa démarche et de ses principaux outils comme la segmentation et le marketing mix ont été remis en cause par des courants alternatifs
NOUVEAUX COURANTS Courants alternatifs : mkt des services et mkt industriel Redéfinition de l’objet même du marketing: de la transaction comme objet central à la relation Marketing relationnel (CRM-Customer Relationship Management ou GRC-gestion de la Relation Client) : nouvel axe structurel de la démarche marketing Maximisation de la satisfaction client et du profit de l’entreprise Ces courants alternatifs sont de prime abord le mkt des services et le mkt industriel. Cette crise a amené une redéfinition de l’objet même du marketing. La transaction devient l’objet central de la relation. Au début des années 2000, un consensus semble ainsi voir le jour autour de la notion même de marketing relationnel et plus précisément de la gestion de la relation client ou CRM. Comme nouvel axe structurel de la démarche marketing. Le CRM utilise la relation entre le client et l’entreprise pur maximiser à la fois la satisfaction du client et le profit de l’entreprise.
NOUVEAUX COURANTS Défaillance des approches traditionnelles centrées sur le marketing de masse ou de segments Apparition des NTIC qui a permis l’envol du CRM Apparition simultanée d’autres innovations éloignées du CRM Son éclosion et sa montée sont d’abord à mettre sur le compte des défaillances des approches traditionnelles de marketing centrées sur le marketing de masse ou de segments de marché, mais ce sont surtout les NTIC, avec au premier chef Internet, apparues providentiellement en fin de décennie 90, qui ont permis l’envol du CRM
NOUVEAUX COURANTS Famille liée au Marketing Expérientiel : Marketing sensoriel Marketing tribal Rétromarketing Opposition entre une vue hédoniste à une vue fonctionnaliste de la consommation, utilisées dans les démarches relationnelles Pourtant, nous ne pouvons nous arrêter à cet apparent consensus autour des approches relationnelles tant sont nombreuses les innovations marketing apparues ces dernières années et qui sont loin d’être toutes en accord parfait avec le principe de CRM. On pense notamment à la grande famille liée au marketing expérientiel qui oppose une vue hédoniste de la consommation à la vue fonctionnaliste de la consommation comme utilisée dans la majorité des démarches relationnelles.
NOUVEAUX COURANTS Hédonisme : doctrine qui prend pour principe da la morale, la recherche du plaisir et l’évitement de la souffrance La morale du plaisir (ou hédonisme) fut fondée par Aristide de Cyrène, disciple de Socrate L’hédonisme prône l’appartenance à soi et ne la trouve que dans le plaisir « carpe diem » On entend par hédonisme la doctrine qui prend pour principe de la morale la recherche du plaisir et l’évitement de la souffrance. Cette morale du plaisir fut fondée par Aristide de Cyrène, disciple de Socrate. L’hédoniste cherche l’appartenance à soi, c’est à dire la capacité de vivre en société tout en gardant son autonomie par rapport aux autres et à ses propres désirs. Et ne la trouve que dans le plaisir. : non pas dans le souvenir ou dans l’attente du plaisir mais dans le plaisir immédiat. Il n’obéit qu’à un seul impératif que le poète Horace exprimera ainsi : carpe diem « cueille le jour », c’est à dire jouis du jour présent. Il s’agit donc d’écarter tout ce qui, dans le regret du passé ou dans l’appréhension du futur pourrait porter ombrage au plaisir immédiat. Aujourd’hui, la contradiction est bien présente : les théorisations et modélisations du marketing relationnel ne semblent pas vraiment en phase avec l’explosion de la subjectivité de la consommation et ses revendications hédonistes qui ont obligés les chercheurs en comportement du consommateur à contrebalancer la vue traditionnelle et fonctionnelle de la consommation par une vue expérientielle. Afin de mieux comprendre cette guerre interne aux théories marketing, il nous apparaît intéressant d’analyser l’évolution récente du marketing pour mieux comprendre comment le marketing est apparu si fragilisé et déboussolé à l’évolution de la société des années 80.
HISTOIRE RECENTE Années 80 : la résistible montée du marketing relationnel Premiers grands échecs du marketing traditionnel Innovations marketing basées sur une vision de la société Individu-consommateur libre et insaisissable Les années 80 ont été marquées par les premiers grands échec des démarches fondées sur le modèle traditionnel, avec batteries d’études et des tests quantitatifs. La faillite du New Coke lancé à grands frais puis retiré de la vente par la firme Coca Cola est emblématique à cet égard. Quelque chose s’est alors cassé dans l’esprit des managers : l’idée qu’en appliquant de façon rigoureuse les préceptes du marketing, on était certain d’arriver à un résultat positif. Cette certitude ébranlée, nombreux ont été ceux qui ont recherché une nouvelle certitude dans une des innovations marketing proposées alors par les gourous du marketing comme McKenna, consultant de la Silicon Valley La plupart des innovations marketing proposées s’appuyaient alors sur une vision de la société et des marchés : au début des années 90, nous serions passés, sous la poussée de l’individualisation des comportements d’un marché de masse à une masse de marchés de plus en plus fragmentés. Le concept de niche a alors été employé pour désigner des sous segments sur lesquels appliquer un mkt très ciblé, un micro mkt. Mais cela n’a pas été suffisant, malgré le développement ultérieur d’approches de type géomarketing, travaillant à l’échelle réduite d’un îlot ou pâté de maisons, car le mot clé était « l’individu » L’individu qui, ayant enfin gagné sa liberté totale d’agir et de choisir, n’en faisait alors plus qu’à sa tête , contredisant ainsi toutes les tentatives de classification sociale, même les plus fines. On a appelé cette conception du marketing, un temps le maxi mkt avant d’aboutir de façon consensuelle vers le one to one mkt. Impossible à mettre dans un segment, difficile à délimiter dans une niche, l’individu consommateur est alors devenu l’unité principale des innovations marketing. Il s’est agi de le cibler pour mieux le connaître et lui faire une offre vraiment personnalisée.
HISTOIRE RECENTE Années 90 : Apparition du marketing expérientiel Poids des attributs objectifs Produits utilitaires Consommation traditionnelle Explosion de subjectivité Si l’individu consommateur des années 90 a trouvé dans les innovations de type one to one marketing de quoi satisfaire ses besoins rationnels et utilitaires, il n’y a pas trouvé de réponse à sa quête existentielle et hédoniste. Le consommateur ne voulait pas qu’une offre, il voulait aussi être reconnu, considéré et respecté. Tout l’enjeu a alors été de renforcer la dimension humaine dans un monde, celui du marché où on a tenté de l’évacuer pour maximiser le profit des entreprises. Désormais les individus consommateurs, attendent de l’émotion, du contact humain, une atmosphère de convivialité, de relation majeure : il ne s’agit donc plus de gérer des portefeuilles de clients par le biais d’outils informatiques mais bien plutôt de bâtir, développer et maintenir une relation de fidélité entre l’entreprise et le client en s’inspirant de ce qui se fait dans les marchés industriels. Le mariage de l’esprit du marketing relationnel avec les outils du marketing individualisé a donné naissance au CRM. L’idée du « vécu quotidien » a alors fait son chemin pour désigner ces situations où l’interaction avec des produits, des services,, des vendeurs, des lieux de vente, des enseignes et d’autres clients venait conforter la quête identitaire du consommateur. Le marketing expérientiel revient à gérer l’expérience du consommateur, considérant qu’il est tout à la fois un être rationnel et émotionnel. Il s’agit de dépasser la fonctionnalité de l’offre pour affecter ses 5 sens et provoquer bonne humeur et émotions positives : le consommateur est amené à vivre des expériences polysensorielles mais aussi cognitives et communicatives, seul ou en groupes. Poids des réponses subjectives Produits hédoniques Consommation expérientielle
LE(S) MARKETING(S) Environnement marché Niches de marché Fidélisa-tion client Vécu client Compé-tences client Méga/ macro mkt Mkt sociétal Micro mkt Mkt direct Mkt situation-nel Mkt vert Géo mkt One to one mkt Mkt relationnel Empowerment mkt Mkt des réseaux Trade mkt CRM Chrono mkt Mkt expérien-tiel Mkt sensoriel Know-ledge mkt Mkt viral Buzz mkt Mkt éthique Mkt tribal Retro mkt Certains des termes évoqués dans cette diapo sont devenus très courants en marketing et figures en très bonne place dans la plupart des manuels de mkt. c’est notamment le cas du marketing direct, du mkt sociétal ou encore du géo mkt. Certains semblent plus nouveaux et c’est ceux-là que nous allons aborder maintenant: Le mkt des réseaux : cette innovation marketing cherche à bâtir, développer et maintenir une position relationnelle dans un réseau d’acteurs marchands et non marchands. Il postule qu’il n’y a pas de transaction faisable ou rentable avant que cette relation ne soit développée et consolidée. Ses deux variantes sont le trade marketing qui consiste à appliquer les méthodes du B to B au B to R (retail) et le marketing viral qui consiste à tenter de maîtriser le processus de diffusion des informations commerciales de la marque auprès d’un réseau de consommateurs potentiels et autres influenceurs ou leaders d’opinion. Le mkt éthique : cette vision du mkt se donne pour objectif prioritaire la recherche du bien être à lt de la collectivité au détriment ou dans l’idéal en complément de la satisfaction immédiate des consommateurs. Le consommateur fait donc un certain sacrifice pour que son mode de consommation soit en adéquation avec une certaine morale que la société dans son ensemble cherche à mettre en avant. Cela peut être une consommation écologique ou équitable. Cette vision doit même permettre au consommateur de se faire plaisir en respectant cette morale. Mon plaisir immédiat n’est plus assouvi mais je me fais plaisir en respectant l’environnement ou en consommant équitable. C’est mon sacrifice qui permettra à la terre ou aux petits producteurs de s’en sortir. Le mkt éthique invente une nouvelle forme d’hédonisme : l’hédonisme du sacrifice éthique. Le mkt expérientiel : le consommateur achète des produits ou des services moins pour leur attributs fonctionnels que pour les expériences émotionnelles qu’ils permettent quand ils sont mis en jeu. Chaque expérience est le moyen pour l’individu de construire son identité. L’essentiel est que le consommateur se rappelle d’une expérience positive avec une marque ou entreprise. Dans une société où les fondements sociaux ont évolué, de nouvelles configurations interpersonnelles se sont dessinées, pour donner lieu à des réseaux de connexion largement organisés par des affinités émotionnelles. Ces nouvelles tendances de fragmentation de la société en réseaux ou tribus ont tout naturellement amené le mkt traditionnel à reconsidérer l’approche du consommateur. De même ce mkt expérentiel exploite le passé comme une valeur d’authenticité, de qualité, de savoir faire et de sécurité. Le mkt de la nostalgie ou rétro mkt s’appuie sur cette quête de nostalgique d’authenticité du consommateur pour retraduire dans le monde actuel les produits et services d’autrefois. Gage de sécurité et de tradition, il permet au consommateur de se rassurer dans un environnement nouveau qu’il ne maîtrise pas totalement. C’est l’incertitude qui permet au rétro mkt de se développer. Le mkt sensoriel : il se définit comme le fait d’utiliser les facteurs sensoriels (musique, senteur, couleur, sensations tactiles et gustatives) dans le produit et/ou le lieu de vente pour suciter des réactions favorables du consommateur et/ou lui fair vivre des expériences snsorielles fortes. Le knowledge mkt : les clients deviennent des co-créateurs de la connaissance organisationnelle en construisant leur projet de consommation au sein de l’entreprise. Le client est proactif et met en jeu ses compétences individuelles ou dans la consommation d’un produit ou d’un service. C’est donc en connaissance de cause, que le consommateur agit.
CONCLUSION Société en mutation : hédonisme dominant Le marketing doit s’adapter CRM : solution idéale mais non suffisante Mkt one to one # segmentation # mkt tribal Course innovation # nostalgie Émotion # information Marketing 1.0 # Marketing 2.0 Depuis le début des années 70, la société a subi des mutations profondes devenues dès les années 90 des phénomènes incontournables : on voit apparaître une société à dominante hédoniste qui recherche désormais le plaisir, la sensation et qui affirme sa volonté de vivre pleinement l’instant. En conséquence la dimension affective et émotionnelle prend de plus en plus d’importance dans l’acte d’achat. Le mkt s’il souhaite tjrs être efficace doit donc adapter ses méthodes. Après voir étudié le consommateur des centaines de fois à travers des milliers d’études de marché, il est devenu de plus en plus mystérieux comme désireux de se défendre des stratégies mkt fondées sur le sacro saint positionnement, présenté durant des décennies comme la solution à toutes les interrogations. La solution était alors toute trouvée : le CRM. Issu du mkt one to one, nous avions enfin percé le mystère, découvert la clé du succès. Et bien entendu cela n’a pas suffit. À quoi sert la relation one to one si toute la tribu est concernée. A quoi sert la course à l’innovation quand la culture de la nostalgie domine. Quel marketing envisager devant un consommateur avide d’émotions mais en même temps très informé et désireux d’être acteur de sa consommation et à qui Internet offre un formidable terrain d’expression. Le mkt vie actuellement de vraie turbulences pour ne pas parler de séïsme. Le mkt traditionnelle tel qu’on l’a vécu entre les années 50 et 80 semble bien révolu pour laisser la place à des marketing, très nombreux, complexes et malgré tout incertains sur leur véritable efficacité. Le marketing initial voulait comprendre le marché pour mieux le maîtriser, c’est à dire comprendre la demande pour maîtriser et contrôler l’offre. Aujourd’hui, les rôles sont inversés. Seuls les consommateurs maîtrisent la situation. Au marketing maintenant de se réformer voire de se révolutionner pour s’adapter à un marché qu’il risque de ne plus comprendre, faute de ne savoir s’y adapter