INFECTIOLOGIE ‘Biologie du virus du SIDA’ MCB-19818 Michel J. Tremblay, Ph.D. Centre de Recherche en Infectiologie Centre de Recherche du CHUL (CHUQ) michel.j.tremblay@crchul.ulaval.ca ‘Biologie du virus du SIDA’
Généralités sur le VIH-1 •Le virus de l'immunodéficience humaine et ses sous-types sont de la famille des rétrovirus. Les rétrovirus humains étaient inconnus avant le début des années 1980 même si certains de ceux-ci étaient connus chez les animaux, par exemple, celui causant la leucémie féline. Le VIH-1 appartient à une famille importante de virus qui, de façon caractéristique, sont associés à des maladies immunosuppressives (qui affaiblissent le système immunitaire) ou à des maladies du système nerveux avec de longues périodes d'incubation (où il ne se passe rien) suivant l'infection première avant que des maladies secondaires deviennent apparentes. •Des rétrovirus très similaires au VIH-1 ont été retrouvés chez certains primates, et certains de ceux-ci sont associés à ce qu'il est convenu d'appeler le SIDA simien (des singes).
Historique du VIH-1 •Les premiers rapports du début des années '80 appelaient l'agent causal du syndrome le virus T-lymphocytotrophique humain de type III (HTLV-III) ou le virus associé à la lymphadénopathie (LAV) (les anciens noms du virus du SIDA). Ce nouveau virus, on le nomme maintenant le VIH de type 1 (ou VIH-1). Il existe aussi un VIH de type 2 (ou VIH-2).
Hétérogénéité génomique du VIH-1 •Les études ont identifié des sous-types du VIH-1 qui se sont créés avec la progression de l'épidémie à travers le monde. Les différents sous-types ont été identifiés avec certaines distributions géographiques. Un individu peut même être infecté avec différents sous-types de VIH-1. Les sous-types A à H appartiennent au groupe majeur M alors que le sous-groupe O est distinctement différent et génétiquement plus près du VIS (virus de l'immunodéficience des singes) et du VIH-2.
Hétérogénéité génomique du VIH-1 (suite) Sous-types Régions A Afrique centrale B Amérique du Sud (incluant Brésil) États-Unis, Canada, Europe, Thaîlande C Brésil, Inde, Afrique du Nord D Afrique Centrale E Thaîlande, République Africaine Centrale F Brésil, Roumanie, Zaîre G Zaîre, Gabon, Thaîlande H Zaîre, Gabon O Cameroun, Gabon
Données épidémiologiques sur le VIH-1
Les autre rétrovirus humains •Un second rétrovirus appelé VIH-2 a été isolé chez un certain nombre de patients, d'abord dans les pays d'Afrique de l'Ouest et subséquemment en Europe de l'Ouest, aux États-Unis et ailleurs. La plupart des cas sont apparus en Afrique de l'Ouest et seulement sporadiquement ailleurs dans le monde. •Le VIH-2 est caractérisé par un temps de latence plus long (où il ne se passe rien) avant l'apparition du syndrome, le cours de la maladie est moins agressif, les fonctions des cellules sont moins attaquées et il y a moins de virus dans le sang. La transmission du VIH-2 est similaire à celle du VIH-1 mais la transmission mère-enfant est beaucoup moins fréquente.
Les autre rétrovirus humains (suite) •Il existe aussi un autre groupe de rétrovirus humains différents du VIH que sont les virus lymphotrophiques-T de type I et II (HTLV-I et HTLV-II). L'infection au HTLV-I cause une leucémie (cancer du sang) et une maladie neurologique progressive. Le HTLV-I peut être transmis comme le VIH mais moins facilement. •Les virus HTLV-I se retrouvent surtout au Japon et à Okinawa, en Afrique Centrale et aux Caraîbes. Dans la plupart de ces régions, le taux d'infection est de 1-2% de la population, alors qu'à Okinawa, le taux est de 4%. Le temps de latence avant la véritable maladie est d'environ 20-30 ans. •Le HTLV-II, lui, a été identifié principalement dans des populations d'Amérique du Sud et dans certaines régions de l'Afrique. Une maladie neurologique progressive est causée par l'infection au HTLV-II.
Morphologie du VIH-1
Morphologie du VIH-1 (suite)
Architecture génomique du VIH-1
Cycle de vie du VIH-1 (suite)
Cycle de vie du VIH-1 (suite)
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1 •La transmission sexuelle du VIH-1 requiert la présence des cellules dendritiques (DC) pour traverser la barrière cutanéo-muqueuse. En effet, on a découvert récemment que les DC se lient à de fortes concentrations de VIH-1, et constituent donc un réservoir de VIH-1 qui sera transmis ultimement aux lymphocytes T CD4+. •Les DC qui résident dans les tissus périphériques capturent le VIH-1 et facilitent le transport du virus vers un nodule lymphatique situé à proximité. Ce dernier devient donc un centre de réplication viral. •L’enveloppe externe du VIH (i.e. gp120) s’associe avec la molécule de surface DC-SIGN (CD209) qui est un récepteur spécifique des DC. ICAM-3 demeure le ligand naturel de DC-SIGN.
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1 •Lors d’une infection primaire avec le VIH-1, le virus semble infecter majoritairement les lymphocytes T CD4+. Une virémie se développe durant les premières semaines suite à l’exposition. Deux à quatre semaines consécutives à l’exposition au virus, jusqu’à 70% des personnes infectées développent des symptômes qui s’apparentent à une grippe ou à une mononucléose infectieuse. •Des souches virales dotées d’un tropisme pour les macrophages (CCR5) sont responsables de l’infection primaire. •Lors des étapes initiales de l’infection, il semble que les populations virales doublent à toutes les 6 à 10 h. Chaque cellule infectée donne naissance à environ 20 nouvelles cellules infectées.
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1 •La concentration en particules virales dans le sang périphérique peut atteindre plus de 106/ml et même 108/ml. •Il a été estimé que la durée moyenne de survie des cellules infectées de manière productive avec le VIH-1 et des virus dans le plasma est de 2.2 et 0.3 jours, respectivement. •La production moyenne totale de virus a été estimé à 10.3 x 109 virus par jour.
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1 •Les fortes concentrations de virus qui sont détectées lors de l’infection primaire résultent en une dissémination de l’infection dans les nodules lymphatiques périphériques. •Des études menées à l’aide de modèles animaux (SIV et SHIV) indiquent que l’importante concentration de cellules T CD4+ localisée dans le tissu lymphoïde associé aux muqueuses du système digestif (GALT / gut-associated lymphoid tissue) constitue un site majeur de réplication virale lors de la primo-infection et aussi durant les phases subséquentes de la maladie.
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1 •Les cellules T CD4+ infectées de façon latente et les macrophages sont considérés comme les principaux réservoirs intracellulaires du VIH-1. •Le VIH-1 se retrouve sous 4 formes: intracellulaire, virus libre, virus lié à un complexe immun et virus associé à la surface cellulaire. •Des réservoirs extracellulaires de virus associé aux cellules incluent les DC, lymphocytes T CD8+, cellules B, cellules épithéliales, fibroblastes, plaquettes, neutrophiles et érythrocytes. •Virus associé aux cellules est toujours infectieux et plus stable que virus libre. Protégé jusqu’à un certain point de l’environnement extracellulaire hostile.
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1 •À l’intérieur de quelques semaines, le niveau de virus dans le sang va subir une diminution considérable et qui coincide avec le développement d’une réponse immunitaire dirigée contre le VIH-1. •Des lymphocytes T CD8+ cytotoxiques (CTL) avec une spécificité pour le VIH-1 naissent rapidement et constituent un facteur de l’hôte critique dans le contrôle de l’infection primaire avec le VIH-1. Cependant, une immunité stérilisante n’est jamais atteinte. •Les CTL voient le jour bien avant la naissance des anticorps neutralisants ce qui suggère qu’ils sont importants dans le contrôle de la virémie primaire.
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1 •Les CTL joue aussi un rôle primordial dans le contrôle de l’infection chronique. •Bien que les réponses CTL détectées chez les individus infectés de façon chronique par le VIH-1 sont puissantes et persistantes, elles échouent ultimement à contrôler la réplication virale chez la majorité des personnes infectées et qui ne recoivent pas une thérapie antirétrovirale hautement efficace (HAART). Plusieurs mécanismes pourraient être responsables d’un tel échec.
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1 •Le virus peut échapper à reconnaissance par les CTL grâce à des mutations au niveau de certains épitopes. •Le virus peut causer une diminution du niveau d’expression des molécules du CMH-I (protéine virale Nef). •Les CTL ne peuvent éliminer le réservoir constitué des lymphocytes T CD4+ infectés de façon latente. •Des CTL spécifiques au VIH-1 pourraient aussi présenter certaines anomalies fonctionnelles (ex: niveau réduit de perforine et maturation incomplète en cellule effectrice) •Un déterminant majeur semble une incapacité des lymphocytes T CD4+ auxilliaires à assister la fonction effectrice des CTL.
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1 •Plusieurs théories pour expliquer la baisse inexorable du nombre de cellules T CD4+: lyse cellulaire directe, apoptose des cellules à la fois infectées ou non, destruction des ‘bystander cells’, dommage aux cellules souches et diminution de la production de cellules T par le thymus. •La stade final de l’infection est caractérisée par l’apparition de l’immunodéficience clinique. •La progression de la maladie s’accompagne très souvent avec l’émergence de souches virales plus pathogènes qui utilisent le réceptor des chimiokines CXCR4 au lieu de CCR5.
Histoire naturelle de l’infection par le VIH-1 •Bien que la réponse des CTL joue un rôle prépondérant dans le contrôle de la réplication virale, la réponse immunitaire humorale semble aussi contribuer à diminuer la charge virale. •Des anticorps monoclonaux neutralisants confèrent une protection passive aux singes rhésus face à une infection subséquente (challenge) avec une souche pathogénique de SHIV qui exprime les glycoprotéines de l’enveloppe d’un isolat primaire du VIH-1. •Il est extrêmement difficile de générer la production d’anticorps qui neutralisent un grand nombre d’isolats viraux sauvages. Cette difficulté s’explique par la variabilité génétique and la complexité structurale des glycoprotéines de l’enveloppe du VIH-1.
Pourquoi le système immunitaire ne parvient-il pas à contrôler le VIH-1? •La transcriptase inverse du virus commet plusieurs erreurs lors de la production de l’ADN proviral à partir de l’ARN génomique. En conséquence, de nombreuses mutations sont introduites ce qui se traduit par l’apparition de variants qui peuvent échapper aux CTL ou aux anticorps neutralisants. •Actuellement il semble que le réservoir cellulaire qui agit comme une barrière empêchant l’élimination complète du VIH-1 soit un réservoir extrêmement stable constitué des lymphocytes T CD4+ infectés de façon latente avec un provirus intégré.
Pourquoi le système immunitaire ne parvient-il pas à contrôler le VIH-1? •La demi-vie des cellules T CD4+ qui expriment CD45RO sur les cellules de type mémoire est de 5 à 6 mois. •Les cellules de type mémoire et leur progéniture pourraient survivre pendant des périodes de temps beaucoup plus importantes (i.e. ›20 années) en considérant des périodes de division cellulaire occasionnelles générées par la présence d’un antigène qui persiste, un antigène causant une réaction croisée ou de cytokines.
Remarques finales •L’utilisation à grande échelle des thérapies HAART dans les pays développés pour le traitement des personnes infectées par le VIH-1 a résulté en une réduction notable des infections opportunistes et un accroissement significatif dans le prognostic de la maladie. Cependant, l’émergence de souches résistantes, l’apparation d’effets secondaires importants et la faible observance médicamenteuse ont pour effet de diminuer considérablement l’attrait des thérapies HAART. Le développement de nouvelles drogues plus efficaces et moins toxiques de même que la découverte d’immunomodulateurs pourraient paver la voie à de nouvelles alternatives thérapeutiques pour traiter les personnes porteuses du VIH-1. •La mise sur pied d’une stratégie vaccinale préventive et thérapeutique constitue une priorité pour contrer le fléau que représente ce rétrovirus qui affecte le genre humain.
Présentation PowerPoint http://www.cri.crchul.ulaval.ca/uhir/