TENSION ET COOPERATION REGIONALE : LE CAS DU BASSIN DU JOURDAIN Alexandre GHAFARI Octobre 2009
PLAN I Données géographiques et géopolitiques II Considérations juridiques III Perspectives et avenir
I Données géographiques et géopolitiques.
I Données géographiques. Situé dans une zone aride et semi aride appelée par les hydrologues « water stress zone » zone à fort déficit hydrique. Selon l’ONU la pénurie d’eau est reconnue dès que le volume d’eau renouvelable disponible par an et par habitant est inférieur à 1000 m3. En 2000 : 178m3 en Jordanie, 275m3 en Israël, 76m3 dans les territoires palestiniens occupés.
Caractéristiques du Jourdain. Réunion de 3 cours d’eau dans le bassin de Houleh : - le fleuve Hasbani au Liban - le fleuve Banias du Golan - le fleuve Dan d’Israël Traverse Israël et se jette dans le lac de Tibériade, Est rejoint à la sortie du lac par son principal affluent, le Yarmouk. Longueur : 360 kilomètres. Débit annuel moyen de 1,8 milliards de m3 (13 milliards dans les années 1940).
Données géopolitiques. Bassin du Jourdain = Le Jourdain + le Hasbani + le Banias + le Dan + le Yarmouk + le lac de Tibériade + l’aquifère montagneux de Judée – Samarie. 4 Etats concernés : Israël, la Jordanie, la Syrie, le Liban + l’Autorité Palestienne. Mais situation particulière de la Syrie et du Liban pour qui le Jourdain ne représente pas une source essentielle d’eau douce.
Une situation marquée par des tensions permanentes et par de nombreuses guerres. 2 septembre 1953 : creusement par Israël d’un canal pour détourner l’eau du fleuve National Water Carrier. Protestation de la Syrie mais achèvement de l’aqueduc national en 1964. Situation après la guerre des 6 jours (déclenchée par Israël le 5 juin 1967) montre que le contrôle des ressources en eau était bien un facteur de cette guerre.
II Considérations juridiques. Droit général des cours d’eau internationaux. Référence aux règles d’Helsinki de 1966 et à la Convention de New-York de 1997 sur le droit relatif aux utilisations des cours d’eau internationaux à des fins autres que la navigation. Utilisation raisonnable et équitable des eaux d’un cours d’eau international. Obligation de ne pas causer de dommages appréciables aux autres Etats du fait de l’utilisation du cours d’eau. Obligation générale de coopérer et d’échanger régulièrement des données et des informations disponibles sur le cours d’eau.
Et les accords régionaux? Ou bilatéraux? Les plus anciens traités datent des années 1920 entre la France et la Grande Bretagne. Mais en 1953 Israël renonce à ces traités. Plusieurs plans sont proposés. Quelques accords bilatéraux sont signés. Aucun traité régional n’a été négocié.
Le plan Johnston. Plan de partage des eaux du Jourdain entre les différents protagonistes par les USA, définitivement adopté en 1956. Chaque Etat se voit attribuer une quotte part : - Jordanie reçoit 774 millions de m3 - Israël reçoit 394 millions de m3 - Syrie reçoit 45 millions de m3 Tous les Etats s’opposèrent à ce plan.
TRAITE DE PAIX DU 26 OCTOBRE 1994 ENTRE JORDANIE ET ISRAEL La Jordanie est le pays le plus fragile et le plus menacé des Etats (déficit de 370 millions de m3 en 2000) obligation de tenter de trouver un accord avec Israël. Article 6 consacré à la question de l’eau. Cet article renvoie à une annexe II intitulée « Questions concernant l’eau ».
Article 6. Eau Paragraphe 1 : Reconnaissance mutuelle de la part des ressources en eau du Jourdain et du Yarmouk et des eaux souterraines de l’Araba. Paragraphe 2 : Reconnaissance implicite du principe de l’utilisation raisonnable et équitable. Reconnaissance que l’eau peut être un facteur de rapprochement et de coopération entre les deux Etats. Paragraphe 3 : Reconnaissance de leur pénurie en eau. Appel à une coopération régionale. Paragraphe 4 : Envisage la possibilité de transferts de ressources en eau à travers les frontières. Prévoit la coopération dans de nombreux domaines et l’échange d’information.
Annexe II. Questions concernant l’eau. Article I. Attribution des ressources en eau. Article II. Ouvrage de retenue. Article III. Qualité et protection de l’eau. Article IV. Nappe phréatique. Article V. Notification et accord. Article VI. Coopération. Article VII. Commission mixte de l’eau.
Situation entre Israël et la Palestine Accord d’Oslo du 4 mai 1994 élargi par l’accord intérimaire du 28 septembre 1995 (Oslo 2) redonnent aux Palestiniens un peu de pouvoir quant à la gestion de l’eau potable et des eaux usées mais seulement dans la bande de gaza et Jéricho. Urgence de régler au niveau international la question des eaux souterraines confinées 90% de l’eau qui est extraite de l’Aquifère de la Montagne est utilisée pour la consommation d’Israël. Or cet aquifère est situé en Cisjordanie.
Situations également bloquées entre Israël et la Syrie. Avec la Syrie : - Retrait du Golan reviendrait à Israël d’hypothéquer 30% de son eau. - Désaccords sur les frontières.
III Perspectives et avenir. Il faut une approche intégrée. Considérer le bassin dans son ensemble (fleuve Jourdain + affluents + lac + aquifère). Convention régionale avec tous les Etats concernés pour un partage équitable et une gestion concertée.
Coopération pour garantir la durabilité des ressources, le respect du droit à l’accès à l’eau pour chacun (un rapport de la banque mondiale d’avril 2009 : 1 palestinien dispose de 4 fois moins d’eau qu’un israélien). Tendance à un droit à l’eau potable et à l’assainissement. Création souhaitable d’une commission du bassin du Jourdain … Mais au préalable nécessité de régler les problèmes politiques.
Le cas du bassin du Jourdain n’est qu’un exemple parmi tant d’autre sur les tensions régionales qui existent quant à l’eau douce. Chaque cours d’eau présente des caractéristiques propres appelant souvent des solutions spécifiquement. Un accord régional serait la meilleure solution. MAIS l’existence d’une convention internationale de portée générale portant sur une approche intégrée de la gestion de l’eau douce serait un instrument approprié pour aider les Etats qui partagent un bassin ou fleuve international à trouver un cadre juridique adéquat.
Le modèle d’optimisation de Fisher ou le règlement du cas du bassin du Jourdain par une approche économique. Concept de Water Allocation System qui distribue l’eau de manière à en maximiser l’utilité nette pour tous les consommateurs. Fais apparaitre la valeur de l’eau permet d’exprimer les conflits en termes monétaires. Un traité ne doit pas seulement définir la propriété des ressources mais porter sur la négociation de permis d’abduction d’eau. Appréhender les ressources en eau et l’accès à celle-ci comme une question économique et non pas politique. Rôle crucial joué par la Banque Mondiale.
Il faut que la logique d’affrontement laisse place au rapprochement des Etats. Dépasser les égoismes nationaux fondés sur la dépassée théorie de la souveraineté absolue pour developper une réelle politique de solidarité et de coopération. Vision optimiste : eau ne sera pas la cause d’une guerre mais un catalyseur de la paix