Consommation d’alcool : ouvrons le dialogue avec la personne âgée Christine De Saint Aubert Psychologue Centre Alcoologique de Jour – Valenciennes Intersecteur d’Alcoologie du Hainaut Centre Hospitalier de Saint-Amand-les-Eaux cdesaintaubert@ch-saint-amand-les-eaux.fr Soirée thématique Reper’âge - avril 2014
Les soignants sont des témoins « privilégiés » du mésusage d’alcool chez les aînés Ils pénètrent dans leur intimité, rencontrent leur famille, leur voisinage… Ils maintiennent un lien social avec les personnes Ils accompagnent quotidiennement des personnes institutionnalisées => relation de confiance => évaluation régulière de l’évolution de la personne, de son humeur, de son état général…
A quelle occasion aborder la consommation d’alcool avec la personne âgée ? Comme pour tout facteur potentiellement en lien avec son bien-être et sa qualité de vie… Lors d’échanges formels (consultations, entretiens avec la personne âgées) Lors d’échanges informels
Au cours de l’accompagnement du sujet âgé Soins quotidiens Aide à la toilette Aide à la mobilité…
A l’occasion d’un changement Première consultation en médecine générale Prescription d’un médicament incompatible avec l’alcool Entrée en EHPAD Demande d’aide à domicile, d’accompagnement familial ou d’APA
Évaluer la consommation d’alcool en explorant le mode de vie de la personne Les habitudes alimentaires La qualité de sommeil Les traitements médicamenteux La consommation tabagique… Explorer la consommation d’alcool « qu’avez-vous l’habitude de boire au cours de la journée ? » Nommer les boissons (vin, bière…) plutôt que d’utiliser le mot « alcool » (la bière ce n’est pas de l’alcool !) Poser des questions ouvertes (à éviter « vous buvez ? ») Se montrer disponible, attentif, à l’écoute
En présence de signes non spécifiques pouvant évoquer un mésusage d’alcool HTA Anxiété Troubles du sommeil Chutes… => Explorer les habitudes de consommation d’alcool parmi les facteurs d’explication possibles (et non exclusifs!)
En présence de signes spécifiques évocateurs d’un mésusage de l’alcool Ivresses répétées Haleine alcoolisée Demandes régulières pour faire acheter ou se procurer des boissons alcoolisées En présence de bouteilles stockées en quantité dans le placard du résident ou au domicile, ou de bouteilles vides jetées dans la poubelles Partir des faits constatés pour aborder la question Sans jugement, avec une écoute bienveillance En respectant la liberté personnelle
Lors d’une hospitalisation en lien direct ou indirect avec la consommation d’alcool Chute Tentative de suicide Dégradation de l’état général …
Changer prend du temps : le cercle du changement de Prochaska et DiClemente
Susciter un désir de changement La consommation d’alcool est un comportement appris Il a un sens et une fonction dans la vie de la personne (personne ne boit de l’eau de javel!) Pourquoi le modifier ou y renoncer ? Accompagner la réflexion : les principes de l’entretien de motivation (William R. MILLER (1983) et Stephen ROLLNICK (1991) )
Perception de la consommation d’alcool Somnolence, perte d’équilibre, sentiment de honte … - + plaisir, anxiolytique oubli, antalgique… décidé à changer indécis satisfait
Prise de conscience du problème (ambivalence et divergence) Posséder une information qui remet en question le caractère anodin de la consommation et y adhérer (accepter que ce soit vrai pour soi) => explorer ce que la personne sait des risques liés à l’alcool avec l’avancée en âge, les traitements, l’état général… => apporter une information minimale
Favoriser l’expression de l’ambivalence Explorer les raisons personnelles de continuer à consommer des boissons alcoolisées (définir le sens, la fonction de la consommation d’alcool) A quel moment de la journée buvez-vous du vin… Qu’est-ce que ça vous apporte ? A quoi ça vous sert ? Explorer les conséquences négatives de cette consommation (raisons de réduire ou d’arrêter) Quels sont les côtés moins agréables de votre consommation d’alcool ? Qu’est ce que vous avez remarqué ? Est-ce que votre entourage vous a déjà fait des réflexions sur votre consommation? Qu’en pensez-vous ? Susciter une réflexion sur les raisons personnelles de changer
Susciter un « discours-changement » Parler du changement, s’imaginer changer augmente les chances de succès Le niveau auto-évalué de disposition au changement prédit le degré de changement à venir (Projet Match, 1997a,1997b) : Les argumentations contre le changement diminuent la probabilité de changer « Ça n’est pas important pour moi / j’en suis incapable » Le discours sur les possibilités de changement augmente la probabilité de changer « C’est important pour moi / j’en suis capable »
Responsabiliser la personne âgée C’est à elle de faire des choix : responsabilité et liberté La rendre actrice de sa réflexion et de sa démarche de changement : l’aider à trouver des raisons personnelles de réduire ou d’arrêter sa consommation d’alcool Sinon, risque de contre attitude (réflexe d’opposition) ou d’attitude passive Éviter de se poser en expert, de donner trop d’information trop tôt Respecter le rythme propre à la personne
Pratiquer une écoute empathique Manifester de l’empathie : montrer par des reformulations que l’on parvient à se représenter ce que la personne âgée pense et ressent, sans jugement et en lui reconnaissant le droit d’avoir ce point de vue (différent d’approuver) « si je comprends bien ce que vous me dites, … » L’acceptation favorise le changement : la personne âgée ne s’opposera pas aux arguments qu’elle a elle-même avancés Encouragez-là à s’exprimer sur sa consommation d’alcool (posez des questions ouvertes) Renforcer les propos exprimant un désir de changement (réduction ou arrêt)
Accompagner le changement Intérêt du travail en réseau : prise en compte des déterminants multiples de la situation Travail avec la famille Faire le lien avec les lieux de soin Politique des « petits pas » Valoriser chaque petit changement Proposer des boissons non alcoolisées
Dédramatiser les « incidents de parcours » « J’étais seul et déprimé, j’ai appelé mon voisin et nous avons bu une bouteille de vin ». Les incidents de parcours ne constituent pas une rechute L’apprentissage se fait souvent par essai-erreur L’erreur a une valeur informative (comment gérer un nouvel épisode de déprime ?) à condition de l’analyser objectivement : ne pas dramatiser et ni se décourager (c’est foutu, je n’y arriverai jamais) ne pas banaliser (tout va bien, ce n’est pas important )
Un outil pour les professionnels : le groupe d’échange de pratiques Augmenter la connaissance du réseau de soin et des partenaires Dégager des pistes de réflexion et d’intervention à partir d’échanges sur une situation concrète apportée par un participant Renseignements et inscription au GREID : 42 rue de Mons à Valenciennes tel : 03 27 41 32 32